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Dernier Carré "Léon Degrelle"

  • Hélène Urraca-Cornette ? Une mère soucieuse de l'avenir de son fils...

     

    ...plutôt que la maîtresse de Léon Degrelle

    cachée « Sous le manteau du Caudillo » [8]

     

     

    Bajo el manto.pngAprès l'installation de Jean-Louis Urraca chez Léon Degrelle à l'été 1956, il ne fut plus question d'Hélène à La Carlina, d'autant plus que son fils était parti faire son service militaire ; que Léon-Marie Degrelle retrouvait son père en septembre 1957 ; que le mois suivant, tous deux, fuyant le danger d'une arrestation, étaient partis à Séville chez José María Cernuda ; qu'à peine revenu à Constantina, Léon Degrelle devait vivre, le 22 février 1958, la mort violente de son fils unique; et qu'en avril 1958, Anne Lemay(-Degrelle) débarquait à Madrid pour rejoindre son père...

     

    Rodríguez fait semblant de croire que Léon Degrelle a voulu cacher sa relation avec Hélène Cornette puisque « accompagné d'Anne, il alla dîner à la maison de Serrano Suñer et de son épouse et à celle des comtes de Mayalde. De plus, il l'emmena faire la connaissance de la duchesse de Valence et d'autres amis et connaissances, en particulier Clara Stauffer qui restait la plus importante de ses relations à Madrid. Par contre, il ne lui présenta pas Hélène Cornette et celle-ci ne se rendait pas à La Carlina quand la famille de Degrelle s'y trouvait. » (p. 263).

     

     

     

    Apt Clarita Madrid Galileo14,3.png

    C'est au troisième étage de ce somptueux immeuble de la Calle Galileo qu'habitait Clarita Stauffer (capture d'écran Google Maps). Après sa délicate opération de l'estomac (septembre 1948 ; voir ci-après), Léon Degrelle dut quitter prématurément l'hôpital car son identité avait été révélée : c'est chez Clarita qu'il put trouver un refuge provisoire. Mais il n'eut pas à partager nécessairement le lit de son hôtesse qui mit à sa disposition une chambre disposant d'un cabinet de toilette (ce blog au 3 janvier 2023) ! Par la suite, ce pied-à-terre restera toujours à sa disposition pour ses déplacements à Madrid. Il s'y cacha en janvier 1951 lorsque, reconnu par des touristes belges à Cordoue, il compliqua la reprise des relations diplomatiques hispano-belges ainsi qu'en novembre 1957 (ce blog au 12 mai 2025) et avril 1958 lorsque les campagnes de presse belges le contraignirent à la discrétion. Léon Degrelle s'y réfugiera également un temps lors de la tentative d'enlèvement israélienne de 1961.

     

     

    Comme si Hélène s'était rendue après 1958 chez Léon quand Anne n'y était pas ! Et comme si faire sa connaissance eût dérangé Anne, qui rencontra la duchesse de Valence et Clara Stauffer qui, rappelons-le, nous ont été présentées comme autant de maîtresses de Léon Degrelle (ce blog au 1er septembre 2024) ! Souvenons-nous aussi que Clarita Stauffer n'eut pas à être présentée à Anne puisque c'est elle qui l'accueillit à la Gare du Nord de Madrid quand elle vint revoir son père pour la première fois depuis la guerre. À son grand plaisir d'ailleurs, puisqu'elle nous raconta d'emblée, en même temps que ses soupçons : « Elle m’inspira immédiatement confiance et affection. Allemande, blonde, yeux bleus rieurs, d’apparence vive, énergique, rayonnante de force et de caractère, étreinte sincère, longue, chaleureuse… “Ma” Clarita, que j’ai aimée dès la première seconde, eut je ne sais quelle relation intime avec mon père et je m’en fiche. » (ce blog au 3 janvier 2023). Anne ne sait rien avec certitude, mais, à l'instar d'un Rodríguez (ce blog au 15 mars 2025), elle se permet des suppositions... Clara cacha en effet son père à plusieurs reprises chez elle : « il avait sa propre chambre, ses affaires personnelles » (ce blog au 3 janvier 2023). Mais d'une supposée relation extra-conjugale, Anne n'en a pourtant absolument cure : « je m'en fiche », dit-elle. Pourquoi aurait-il pu alors en être autrement avec Hélène Cornette, puisque, selon José Luis Rodríguez, ce serait justement par l'intermédiaire de Clara Stauffer qu'elle aurait connu Léon Degrelle (au cœur alors d'un réseau de maîtresses entremetteuses !) ? (ce blog au 15 mars 2025).

     

    La seule relation de son père qu'Anne sut parfaitement établie car ouvertement assumée et revendiquée, fut le lien indissoluble qu'après 1959, il développa avec celle qui fut le plus grand amour de sa vie et pour laquelle il se battit bec et ongles, y compris devant les tribunaux, Jeanne Brevet que Rodriguez appelle avec malveillance « fille d'un antiquaire » (ce blog au 12 mai 2025).

     

    Celle qui deviendra Jeanne Degrelle, oui, Anne ne l'aima jamais, sans doute parce que dans sa jalousie, elle estimait qu'elle usurpait la place de sa mère, Marie-Paule Lemay...

     

     

    LD+Jeanne mariage Anne.jpg

    Cette photographie prise le 21 juillet 1962, jour du mariage d'Anne Lemay(-Degrelle), est emblématique de la situation de celle-ci vis-à-vis de son père, Léon Degrelle, et de Jeanne, sa future belle-mère (le cliché est abîmé car il a été plié en quatre). Les deux amants (au sens d'aimants) au visage peu amène ont plutôt l'air contrariés, comme s'ils venaient d'avoir des mots avec Anne qui semble fuir à l'arrière-plan (en robe de mariée).

    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

    Voici la manière acrimonieuse dont Anne parle de Jeanne Degrelle, à l'occasion de son mariage, dans son livre de mémoires effilochés (ce blog à partir du 23 octobre 2022) :

    « À la place [de ma mère et de ma grand-mère, les personnes les plus importantes de ma vie], je dus supporter la présence d'une dame qui, depuis un an déjà, partageait la vie de mon père. Elle s'appelait Jeanne Brevet et était divorcée d'un grand ami à moi et à mon mari, le journaliste et brillant écrivain Henry Charbonneau. » (p. 102).

    « La nouvelle femme de mon père et ses filles n'ont pas facilité la relation père/fille dont j'avais rêvé lors de notre première rencontre en 1958. Je savais que mes sœurs et moi, nous étions assez déçues de cette situation. God[elieve] se montra toujours plus indulgente. Cri-Cri [Marie-Christine] et moi, au contraire, plus fermées à toute approche. Le contact était tellement nul avec eux que nous ne fûmes pas mises au courant du décès d'une des filles de Jeanne (ainsi s'appelait Madame Brevet, compagne de mon père), emportée par une méningite fulminante à l'âge de douze ans. Ce dut être une souffrance atroce pour tous deux, mais ils ne la partagèrent pas avec nous. » (p. 108-109).

     

    Mariage Jeanne+LD 15.06.1984.jpgCatholique fidèle aux principes que lui enseignèrent ses parents et directeurs de conscience, Léon Degrelle ne divorça jamais et ne se maria avec sa compagne qu'après le décès de sa première épouse Marie-Paule Lemay à Nice, le 29 janvier 1984. Le mariage se tint le 15 juin de la même année, jour de son septante-huitième anniversaire, dans la plus stricte intimité. (Documentation © Jacques de Schutter)

     

    Commentaire d'Anne :

    « Mon père poursuivait sa relation avec madame Brevet. Tous deux, en tant que catholiques pratiquants, décidèrent de mettre de l'ordre dans leur vie et se marièrent devant l’Église. Nous autres, les filles, nous avons été mises au courant par un appel téléphonique de mon père. Cette précipitation pour légaliser sa situation chrétienne nous a blessées, ainsi que la froideur avec laquelle il nous l'a communiquée. C'était sa vie. Il était heureux. Sans problèmes économiques d'aucun ordre : sa femme avait une fortune importante qui lui permettait de s'abstraire de l'aspect prosaïque de la vie. Ils vivaient dans un somptueux penthouse, meublé luxueusement avec la collaboration de sa femme française, fille d'antiquaire. » (p. 119)

     

    Anne + Jeanne.jpg   Jeanne+God+LD+Anne Botin 19.01.1987.jpeg

    Comme dut être pénible pour Anne « fermée à toute approche » de devoir supporter la proximité affectueuse de sa marâtre ! À droite, un déjeuner au restaurant Botín, à Madrid, en janvier 1987 : Anne dont la main est enlacée par celle de son père, partage la place d'honneur avec la sculptrice du dernier buste de Léon Degrelle. Jeanne, la bien-aimée, est assise face à son mari.

     

     

    Finalement, il faut bien nous rendre à l'évidence que rien, à part des ragots, ne nous confirme les relations intimes entre Léon Degrelle et Hélène Cornette, que José Luis Rodríguez Jiménez nous présente comme obvies !

     

    Mais le témoignage du fils d'Hélène, Jean-Louis ?

     

    Nous l'avons vu : tant qu'il vécut à La Carlina, chez Léon Degrelle, jamais il ne soupçonna quoi que ce soit d'intime entre sa mère et son hôte. Et pourtant, nous rapporte Rodríguez, « À la journaliste Gemma Aguilera, il raconta que Degrelle me traita comme un fils, avec beaucoup plus de sensibilité que mes parents. Je suppose que c'est parce que c'était un grand ami –disons-le comme ça– de ma mère ; et c'est la même impression qu'il m'a communiquée. » (p. 248). C'est en fait à la journaliste catalane que Jean-Louis Urraca s'est confié, Rodríguez se contentant de reproduire le texte publié dans la traduction espagnole de son livre (p. 144).

     

    C'est aussi dans ce livre que nous apprenons comment Jean-Louis en est arrivé – peut-être même sur suggestion de la journaliste ?– à soupçonner sa mère d'avoir entretenu des relations avec Léon Degrelle : « En regardant différentes photographies conservées dans une boîte et qu'il a retrouvées, sur lesquelles sa mère et Degrelle apparaissent dans une attitude de connivence, [Jean-Louis] suppose bien qu'ils entretenaient une relation sentimentale et que c'est ce qui aurait été la véritable raison de sa présence à Séville. » (p. 145). Dans son interview de 2013, il insiste encore sur la postériorité de sa « découverte » : « J’étais là [à La Carlina], mais ce n'est qu’avec les photos et les lettres qu'ils s'écrivaient, que j'ai su clairement ce qui se passait entre eux. » (El Temps, 12 mars 2013).

     

    À partir de là, Gemma Aguilera va échafauder tout un roman bien horrifique : puisque Jean-Louis est maintenant installé à La Carlina, «  Hélène Cornette va effectuer des séjours toujours plus longs dans la maison de Degrelle, où sa mère Jeanne est d'ailleurs installée. Peut-être se sent-elle plus attirée que jamais par cet homme qui se sait plus puissant depuis que, pour dissimuler son identité, Franco lui a accordé la nationalité espagnole et qu'aujourd'hui il s'appelle José León Ramírez Reina. Avec l'aide de la Phalange espagnole, il va diriger une entreprise de construction qui recevra de nombreuses commandes de travaux de la part du Gouvernement franquiste, tandis qu'avec celle de José Finat Escrivá de Romaní, comte de Mayalde, et de Hans Joseph Hoffman, membre éminent de la Gestapo et artisan de l'établissement de nazis en Espagne, il obtiendra argent et faux documents. » (p. 145).

     

     

    Grandes+Hoffmann+AH 13.12.1942.png

    Pendant la guerre, Hans Hoffman (1916-1998) servit son pays en tant qu'interprète pour la Division Azul sur le Front de l'Est. Le Commandeur de la Division espagnole, Agustín Muños Grandes (ce blog au 1er septembre 2024), qui appréciait la qualité de ses traductions, le choisit malgré son jeune âge (Hoffman n'avait que vingt-six ans) pour être son interprète au Grand Quartier général de Rastenburg où il devait recevoir des mains d'Adolf Hitler, le 13 décembre 1942, la Croix de Chevalier de la Croix de Fer avec Feuilles de Chêne. On voit ici le Sonderführer (il ne s'agit pas d'un grade de la SS, mais du nom donné dans la Wehrmacht aux experts dont les compétences sont utilisées dans l'armée, en l'occurrence, ici, la traduction simultanée) Hoffman écouter les paroles de remerciements et d'adieu du général Muños Grandes avant de les traduire au Führer (photo publiée en quatrième page de couverture du bimensuel ASPAActualidades Sociales y Políticas de Alemania– du 15 janvier 1943). Après le rappel des Volontaires espagnols par Franco en octobre 1943, Hoffman revint à Madrid en tant qu'attaché de l'ambassade allemande.

     

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    Connu en Espagne sous le nom de Juan Hoffman, ce germano-espagnol ami du ministre-président de Bavière Franz Josef Strauss, consul général d'Allemagne à Málaga dans les années 1970, était estimé sur la Costa del Sol pour ses généreuses activités sociales.

     

    C'est un bouquin dénonçant l'Espagne, refuge nazi qui, en 2013, l'a décrit comme un dangereux agent de la Gestapo et de la SS (Rodríguez se contente d'en faire un ami de Clara Stauffer, p. 141). Malgré qu'aucun document ne fut jamais trouvé à son sujet dans les archives de ces organismes du Troisième Reich, cela suffit pour que se déclenche une invincible et foudroyante Damnatio memoriae. C'est ainsi qu'à Málaga, la Plaza Juan Hoffman a été débaptisée, de même qu'à Marbella, la Calle Juan Hoffman et à Ojén, le Colegio Alemán Juan Hoffman qu'il avait créé et que sa famille finance toujours.

     

    Une stèle rendant hommage à Juan Hoffman se trouvait sur la petite place portant son nom à Ojén (Málaga) : elle a dû disparaître (à gauche, en 2016 ; à droite en 2019, captures d'écran Google Maps).

      

    Juan Hoffmann Plaza 2016 a.png   Juan Hoffmann Plaza 2019.png

     

     

    Devons-nous épiloguer sur ces calembredaines ? Léon Degrelle se sentirait « plus puissant » alors que –nous venons de le voir– il doit fuir sa belle propriété de crainte d'être arrêté par les autorités espagnoles et extradé en Belgique ? Franco lui aurait accordé la nationalité espagnole ? (sur l'obtention de papiers officiels, ce blog au 25 mai 2019 et 3 janvier 2023). Il croulerait sous les commandes d'Etat ? (sur les entreprises de Léon Degrelle, ce blog au 3 décembre 2024). « Hans Joseph Hoffman, membre éminent de la Gestapo, » lui aurait procuré argent et faux documents ?

     

    Deux mots sur ce Hoffman qui n'eut d'autre lien avec Léon Degrelle que de lui sauver la vie. En le rencontrant en septembre 1948 tellement affaibli et amaigri par les souffrances provoquées par le réveil de sa grave blessure à l'estomac reçue pendant les combats du Caucase en 1942 (ce blog au 15 mars 2025), Hans Hoffman alerta sans délai son ami (et voisin sur la Costa del Sol), le ministre du Travail José Antonio Girón de Velasco qui prit immédiatement les choses en main, informant de la gravité de la situation le Docteur Alfonso de la Fuente Chaos (1908-1988), grand chirurgien de Madrid.

     

     

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    C'est une autre sommité de la médecine espagnole qui tenta d'alerter Léon Degrelle sur la gravité de son état : pionnier de la médecine psychosomatique en Espagne et autorité reconnue mondialement en matière de neurosciences, le Professeur Juan Rof Carballo (1905-1994) était un grand ami du spécialiste de l'endocrinologie, le Docteur Gregorio Marañon (1887-1960) dans la clinique duquel il travailla jusqu'au décès de ce traducteur de Léon Degrelle (ce blog au 31 mars 2021). Le 3 juin 1948, il réalisa les radiographies de son estomac, diagnostiquant à son patient « Juan Sanchez  » un « estomac en cascado-projection sagittale ».

     

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    Professeur de Pathologie et de Clinique chirurgicale à l'Université Complutense de Madrid, le Docteur Alfonso de la Fuente Chaos choisit une petite clinique discrète de Madrid, Calle Eloy Gonzalo, où il devait se charger personnellement de l'opération indispensable. José Antonio Girón y conduisit  « Juan Sanchez » le jour même dans sa propre voiture.

     

    « [Le chirurgien] pratiqua une opération difficile et extrêmement délicate sur l’estomac, organe qui avait quitté sa place normale [« Rotation de l'estomac 90° », note le Prof. Rof Carballo sur la radiographie] à cause du choc reçu dans la fureur de la bataille du Caucase par la déflagration d’un obus dont le souffle frappa son corps et provoqua un enfoncement près du cœur. » (José Luis Jerez Riesco, Degrelle en el exilio, p. 130).

     

     

     

    LD 1948, après opération.jpg

    Léon Degrelle après son opération à l'estomac subie dans une clinique privée de Madrid fin septembre 1948. La photo est postdatée à l'intention du journaliste d'Europe-Amérique à qui il va remettre une interview entièrement rédigée de sa main En recherchant Martin Bormann, je découvre Degrelle dans une clinique sud-américaine. La Une de l'hebdomadaire du 8 février 1951 est consacrée à l'article sensationnel abondamment illustré (la photo est publiée au bas de la page 7).

     

    Cette opération très délicate contraignit Léon Degrelle à prévoir le pire et tranquilliser sa conscience. En effet, le 22 août 1943, suite au refus de communion qui lui avait été signifié lors d'une messe à Bouillon et qu'il n'accepta pas, l'évêque de Namur l'avait excommunié (ce blog au 25 décembre 2016). L'excommunication avait été levée le 7 novembre de la même année par l'abbé Louis Fierens sur le Front de l'Est « en vertu des pouvoirs accordés aux aumôniers militaires pour la durée de la guerre ». Et même si Mgr André-Marie Charrue avait fait lire en chaire des églises de l'évêché son décret confirmant la levée de l'excommunication, Léon Degrelle craignait qu'elle ne soit valable que pour la durée de la guerre. Aussi écrivit-il, le 15 septembre 1948, à son évêque pour réitérer sa contrition : « Voilà quatre ans, avec une très grande bonté, vous avez bien voulu me relever de la sentence d'excommunication qui m'avait si péniblement frappé. La guerre n'est pas, en droit, encore terminée, mais je ne voudrais pas néanmoins prolonger à l'abri de cette confusion les délais qui me couvrent. [...] Mais je ne veux plus discuter à propos de cette triste affaire. Je préfère avoir tort tout seul si vous estimez qu'il vaut mieux qu'il en soit ainsi. Chaque matin, je reçois Dieu dans mon cœur, comme aux jours lumineux de mon enfance. Et je veux que dans l'abri humain où je le reçois, il n'y ait place ni pour l'orgueil, ni pour la rancœur. [...] »

    Lettre LD Charrue 1948 cc1.jpeg

     

     

    On voit que la liaison amoureuse entre Léon Degrelle et Hélène Cornette tient davantage du postulat que de la vérité historique vérifiée. Ce postulat est d'ailleurs indispensable à notre pseudo-historien des relations coupables pour élucubrer les intentions secrètes qui se cacheraient derrière une lettre de mai 1960 où, reprenant contact avec son amie, Léon Degrelle donne tout simplement de ses nouvelles (ne disposant pas de l'original en français, nous traduisons la traduction espagnole de Rodríguez) :

     

    « Bien chère Hélène,

    Combien d'années déjà sans nous voir ! J'ai passé quelques jours très agréables avec ta mère, toujours aussi gentille, droite comme un sapin des Ardennes qui jamais ne pourra plier.

    J'ai demandé à Michel de vous transmettre un petit cadeau pour toi ainsi que pour ton mari, car cela le concerne plus particulièrement. J'espère qu'il ne me tient pas rigueur pour la vile offense de cette folle allemande dont les calomnies d'hystérique refoulée prétendaient faire tant de mal. Je reprends mes mantras : je t'envoie un vieux bouquin que j'ai trouvé dans mes fouilles et dans lequel il y a un chapitre très curieux, avec une gravure intéressante, consacré à la Reine Urraca. J'ai pensé que cela vous plairait peut-être et je vous l'envoie ; ce n'est rien qu'un petit cadeau sans prétention, mais qui te rappellera l'affection que j'ai pour toi.

    Ton fils aîné va bien, il a fait beaucoup de progrès, il me semble plus équilibré, plus stable. [...] Et moi ? Je deviens vieux, ridé, grognon. Un spectacle lamentable ! Quand je me regarde dans la glace, je ne me sens pas orgueilleux. Et quand ma mauvaise humeur se déchaîne, je m'en veux d'être devenu si difficile et si grincheux. Ma vie n'est pas amusante. Tout devient gris et noir, comme dans les peintures du dernier Goya. Quand tout cela va-t-il finir ? J'aurais dû en avoir fini le 8 mai 1945. Depuis lors, ce qui survit, c'est un fantôme qui, parfois, me fait peur.

    J'espère que toi, toute noblesse et bonté, tu es heureuse.

    Affectueusement, Degrelle »

     

    Pour Rodríguez, cette lettre est écrite « sans doute pour inviter [Hélène] à revenir, mais prudemment, au cas où la lettre serait interceptée » (p. 263) !

     

    Mais cette lettre constitue de toute évidence une reprise de contact après tant « d'années déjà sans nous voir ». Ce qui veut bien dire que depuis que Jean-Louis est parti pour son service militaire (1957-1958), Hélène Cornette n'est plus revenue à La Carlina. Ce n'est, par contre, pas le cas de sa mère, Jeanne Compveut, dont Léon nous apprend qu'elle vient de passer quelques jours chez lui, ni, bien sûr, de Jean-Louis qui, travaillant désormais à Madrid pour les compagnies Air France et Iberia (Aguilera, p. 148), lui rend encore régulièrement visite. Pour le reste, Léon Degrelle se présentant comme un vieux grognon, n'offre certes pas l'image d'un amant passionnément énamouré. Au contraire, il ne considère son amie qu'en tant qu'épouse Urraca et à qui il souhaite tout le bonheur. La raison première de son courrier était d'ailleurs le cadeau d'un livre dont un chapitre est consacré à une reine portant le nom de son mari, Urraca (reine de Castille et Léon au XIIe siècle), livre par lequel il espère leur faire plaisir à tous deux. L'occasion aussi pour Léon Degrelle de revenir sur le seul contact qu'il eut avec le mari d'Hélène, Pedro Urraca : la lettre qu'il lui écrivit pour clarifier sa relation avec son épouse.

     

     

     

    Maison Compveult Carlina.jpg

    À La Carlina, Léon Degrelle mettait cette belle maison à la disposition de Jeanne Compveult, la mère d'Hélène Cornette et grand-mère de Jean-Louis Urraca.

     

     

    Bien entendu aussi bien José Luis Rodríguez Jiménez que Gemma Aguilera vont prétendre que cette lettre, qui essayerait vainement de la nier, ne faisait que confirmer leur culpabilité ! Écrite le 4 avril 1956, soit deux ans après que leur relation se fut transformée en amitié (ce blog au 15 avril 2025), ce courrier réagit à l'accusation gravissime d'adultère portée par une personne bien identifiée, contre l'épouse de Pedro Urraca.

     

    En 2011, Aguilera écrira « Entretemps, une rumeur se répand dans le village. Tout le monde considère qu'ils sont amants. Probablement que Jeanne [Compveult] le sait aussi. Très inquiet, craignant que la nouvelle soit arrivée aux oreilles d'Urraca par son fils, sa belle-mère ou quelque militaire ou fonctionnaire franquiste participant aux banquets qu'il organisait régulièrement, Degrelle se décide à écrire au policier pour lui donner sa version des faits » (p. 137).

     

    En 2024, c'est un nouveau roman que nous propose Rodríguez : « Les séjours d'Hélène en Espagne sont toujours plus longs et Pedro Urraca finit par soupçonner que son épouse a une aventure, bien qu'il n'ait pas utilisé ses relations dans la police pour effectuer des vérifications. Urraca se servit de l'excuse de rumeurs qui lui seraient parvenues par une certaine Katya Weierter –qui aurait été blessée parce qu'elle pensait que Degrelle avait des aventures amoureuses avec au moins deux duchesses– et il finit par aborder le sujet avec sa femme. Pour apaiser ses soupçons, Hélène demanda à Degrelle d'écrire à son mari pour tout nier. » (p. 246).

     

    Dans la première version, c'est Léon Degrelle lui-même qui, craignant que son affaire n'ait été révélée au policier par Jean-Louis, sa grand-mère ou l'un de ses familiers, aurait essayé d'apaiser la mari cocu ; dans l'autre, c'est Hélène qui supplie Léon d'essayer de détromper son mari qui aurait découvert le pot aux roses !

     

    Et si le courrier de Léon Degrelle à Pedro Urraca était tout simplement à prendre au pied de la lettre ? S'il n'était effectivement qu'une franche explication destinée à désamorcer le désastre que pourrait causer les accusations d'une espèce de nymphomane déçue ?... Qu'on en juge plutôt (traduction de la traduction espagnole de Rodríguez ; entre crochets, des précisions extraites de la traduction espagnole différente d'Aguilera).

     

    « Cher Monsieur,

    C'est avec une grande consternation et un profond regret que j'ai appris que vous avez, vous et votre charmante épouse, été victimes –par courrier– d'une certaine Allemande signant ses lettres du nom de Katya. Je suis presque gêné de vous déranger avec cette brève explication sur les manigances de cette femme qui, depuis quelques mois, s'est acharnée à calomnier à tort et à travers un certain nombre de personnes dont elle ignorait tout ou pratiquement tout. Malheureusement, dans son histoire, elle s'est efforcée d'outrager une femme aussi irréprochable et aussi appréciée que la vôtre et, par conséquent, de vous nuire également.

    Il n'entre pas dans mes intentions de m'expliquer par des circonlocutions. Voici les faits : pendant des années, cette Allemande m'a persécuté d'un amour démentiel alors que je ne lui ai jamais accordé la moindre attention. Ainsi, pour pouvoir expliquer son échec, elle m'a attribué une série de conquêtes parmi un large éventail que vous pouvez imaginer par la copie de la longue lettre que vous avez reçue : depuis la duchesse de V. et la duchesse de A. jusqu'à des veuves sexagénaires que son imagination transformait en jeunes demoiselles écervelées.

    Comme j'ai eu l'honneur de faire la connaissance de votre femme chez des amis communs [à Séville] et de manifester la grande estime que je lui portais, Katya, l'Allemande, l'a attaquée avec son artillerie la plus bruyante. L'année dernière déjà, au mois de mai, elle se permit de m'envoyer, à propos de votre femme, des délires du même genre que ceux que vous avez reçus. Je lui fis une réponse absolument claire, lui faisant part en même temps de mon indignation et de ma décision de l'exclure du cercle de mes relations. [Je garde la lettre que je lui ai envoyée pour vous la communiquer et je la tiens à votre disposition, en toute confiance, pour que vous puissiez vous rendre compte du genre de folle à laquelle je fais référence].

    Évidemment, il suffit de lire ces balivernes pour que vous sachiez à quoi vous en tenir. Mais je voudrais néanmoins vous exprimer le grand regret que j'éprouve pour cet incident que, par ailleurs, j'ignorais complètement jusqu'à la récente visite chez nous de votre femme qui vous est unie avec tant de ferveur et de noblesse et qui éprouve un grand dégoût pour le tumulte que cette folle a provoqué dans sa vie de famille !

    Vous avez eu toutefois l'élégance de n'accorder aucune importance aux bavardages de cette hystérique. Et vous avez raison : votre épouse et vous-même êtes bien au-dessus de si misérables calomnies ! Cependant, je ne voulais pas que vous ignoriez d'où elles viennent. Cette femme s'appelle Weierter et vit actuellement à Madrid s'il faut en croire la mention d'expéditeur sur ses anciennes lettres, à la rue Général Oráa 23.

    Mon cher Monsieur, j'espère avoir quelque jour le plaisir de vous connaître personnellement, comme j'ai eu le plaisir de connaître votre cercle intime. C'est de tout cœur que je serais ravi de vous recevoir dans [mes] montagnes lointaines si vous aviez l'occasion de passer par ici.

    En attendant [une réponse de votre part], je vous envoie, en même temps que ma profonde estime, mes sentiments les plus sincères.

    Degrelle »

     

     

     

    Katya Madrid Gén. Oráa 23.png

    L'immeuble madrilène où habitait l'Allemande Katya Weierter, rue du Général Oráa (capture d'écran Google Maps). Cette érotomane désappointée, pour se venger de sa déroute amoureuse, passa son temps à faire de Léon Degrelle l'amant de toutes ses amies, de la Duchesse de Valence à Clara Stauffer, en passant par Hélène Cornette et à le dénoncer si possible auprès des maris. Aujourd'hui, les pseudo-historiens à la Rodríguez présentent comme vérité biblique Les cinq femmes (dont une duchesse) du nazi que Franco protégeait (ce blog au 1er septembre 2024) !

     

     

    À propos de cette lettre, Rodríguez ironise : « Degrelle, consterné, fait preuve de son sens de l'humour. » (p. 246). Mais les détails très précis identifiant la malfaisante calomniatrice relèvent-ils vraiment de la galéjade ? S'il avait été convaincu de l'infidélité de sa femme, Pedro Urraca, le spadassin de Franco aux exploits policiers meurtriers, se fût-il laissé si complaisamment rouler dans la farine ?

     

    Surtout que c'est après ces graves accusations ayant convaincu, selon Rodríguez, Pedro Urraca que « son épouse avait une aventure » avec Léon Degrelle que le même Urraca laissa Hélène effectuer « en Espagne des séjours toujours plus longs » au domicile du même Degrelle !!! Plus fort encore,« Malgré les soupçons de son mari, Hélène n'eut aucun mal à convaincre Pedro, écrit-il avec ce qui doit être de l'humour très pince-sans-rire, d'accepter l'idée que son fils passe quelques années à Séville et que son épouse et sa belle-mère aille lui rendre visite à La Carlina » (p. 248) !

     

    On nage en plein vaudeville ! Mais Rodríguez est encore supplanté par plus courtelinesque : son inspiratrice (quasi-occultée, ce blog au 15 mars 2025) Gemma Aguilera a découvert une autre possible conquête de l'insatiable séducteur nazi ! Une certaine « Esperanza Ortega, la sœur d'un subalterne militaire, ami de Léon Degrelle, entretint une relation amicale avec l'ex-agent de la SS qui lui permit même de lui rendre visite à Madrid [chez Clarita Stauffer donc] quand il se fut enfui de Séville. Esperanza garde un bon souvenir de Degrelle, malgré que cette rencontre dans l'appartement où il se cachait s'acheva en bagarre et qu'ils ne se revirent plus jamais » (p. 148). On devinerait plutôt qu'Esperanza-l'allumeuse subit le même sort que Katya-la-libidineuse...

     

    C'est peut-être même Aguilera qui, au cours de ses interviews, parvint à convaincre Jean-Louis Urraca que sa mère entretenait une liaison avec Léon Degrelle. Et peut-être cette idée séduisait-elle d'ailleurs le fils rejeté par son propre père et séduit par « cet homme d'un abord affable, très cultivé, qui me considéra comme son fils, avec beaucoup plus de sensibilité que mes parents » (p. 144).

     

    Nous avons vu en effet que Jean-Louis n'a jamais rien remarqué d'anormal dans les relations entre sa mère et son hôte pendant tout le temps qu'il a passé à La Carlina. Mais qu'après avoir retrouvé des photos de « sa mère et Degrelle dans une attitude de connivence » à La Carlina, il « supposa bien qu'ils entretenaient une relation sentimentale » (p. 145). Il le confirme encore deux ans plus tard dans l'interview qu'il donne, toujours à Aguilera, pour El Temps  : « J'étais là, mais ce n'est qu'avec les photos et les lettres qu'ils s'écrivaient que j'ai su clairement ce qui se passait entre eux. » (12 mars 2013). De telles suppositions, plutôt flatteuses en ce qui le concerne, sont encore plus plaisantes pour ces journalistes d'investigation ès adultères, trop contents de lui emboîter le pas : « La mère de Jean-Louis, Hélène Cornette, va effectuer des séjours à La Carlina [...]. Pas parce que son fils lui manque, mais parce que la femme de Pedro Urraca entretient une relation amoureuse avec l'ex-officier nazi. » (El Temps, 12 mars 2013).

     

    Hélène Cornette ne confirmera évidemment jamais rien à son fils de ce qui n'a sans doute jamais existé que dans les ragots. Les photos et les lettres censées les établir (et dont nous avons vu qu'elles n'établissaient rien du tout) n'ont, selon toute probabilité, été retrouvées par Jean-Louis qu'après le décès de sa mère, car celle-ci n'était apparemment pas femme à se confier sur ce qui ressortissait à sa vie privée ou qui aurait pu mettre son couple en danger.

     

    L'incident de la photo du président de Catalogne, Lluís Companys, que son mari avait arrêté et livré aux autorités espagnoles en 1940, photo découverte par Jean-Louis dans la bibliothèque de sa mère, est éloquent à cet égard : « La question [posée par Jean-Louis à propos de cette photo] avait profondément bouleversé sa mère. [...] Elle ordonna à son fils, qui avait déjà plus de cinquante ans, de remettre immédiatement la photographie dans le livre [...]. Jean-Louis décida de voler le livre et la photographie. [...] Hélène Cornette, une maniaque de l'ordre, se rendit compte de sa disparition. Vous êtes un voleur, rendez-moi le livre que vous avez volé, téléphona-t-elle à Jean-Louis. Je lui répondis que je ne lui avais rien volé, qu'elle l'avait sûrement déplacé en rangeant ses céramiques. Mais elle ne m'a pas cru et j'ai encore reçu quelques appels de plus m'accusant d'être un voleur. Finalement, elle a abandonné l'affaire. Et nous n'avons plus jamais parlé du livre de mon père ou de l'ami supposé de mon père. » (El Temps, 12 juillet 2011).

     

     

    Tragica muerte Companys.pngLe livre dans lequel Jean-Louis Urraca trouva la photo d'un prétendu « ami » de son père lui permit d'en découvrir l'identité. Il s'agissait du président de la Généralité de Catalogne, Lluís Companys, enlevé en France par son père, Pedro Urraca, policier espagnol dont la mission était de le remettre aux autorités franquistes (ce blog au 15 mars 2025) : Joan Llarch, La mort tragique de Lluís Companys, Chronique impressionnante de la dernière étape de la vie d'un homme, depuis sa détention jusqu'à son exécution dans les fossés de Montjuich, 1978.

    « Quand j'ai atteint les pages centrales, je fus complètement tétanisé. La même photographie que j'avais entre les mains y était reproduite. Et cet homme n'était pas un ami de mon père, mais le président de la Généralité Lluís Companys, fusillé par les partisans de Franco. Cette lecture a été une révélation pour moi. J'ai découvert la véritable mission de mon père, qui n'avait rien à voir avec l'histoire qu'on m'avait racontée : qu'il était diplomate, employé dans les ambassades de Franco à l'étranger, raconte Jean-Louis], conscient désormais que le nom de Pedro Urraca sera marqué à jamais par son implication directe dans l'assassinat de Lluís Companys. » (Gemma Aguilera, « La mort de Companys a marqué l'agent 447 », El Temps, 12 juillet 2011).

     

     

    Cet incident montre bien qu'Hélène Cornette ne supporte pas qu'on viole sa sphère privée, non plus qu'on attaque la mémoire de son mari.

     

    Ne peut-on dès lors penser que l'histoire d'Hélène chez Léon Degrelle fut la suivante : en rencontrant celui-ci en 1953, elle a développé avec lui des liens qui évolueront en véritable et durable amitié. Comme le dit assez lourdement Rodríguez, « Ils partageaient un passé similaire, avec le souvenir de la Seconde Guerre mondiale, leur expérience de vaincus et de condamnés, ainsi que leurs liens avec la Belgique [...] » (p. 235). Et que cette amicale proximité permit à la mère d'entrevoir la solution à son principal problème familial : l'antagonisme devenu progressivement invivable entre son mari Pedro et son fils Jean-Louis.

     

    Celui-ci a raconté à Gemma Aguilera sa situation insupportable : « Ses parents sont pour lui de parfaits inconnus, malgré qu'ils vivent sous le même toit. [...] Entre parents et fils, tout est froideur. Les rares conversations familiales se terminent en disputes entre père et fils. [...] Hélène reste neutre dans les disputes, mais est consciente que leur affrontement est de plus en plus violent. Pour Urraca, son fils n'est qu'un misérable, un gitan qui ne fera jamais rien de bon dans la vie. » (p. 143).

     

    Dès lors, la rencontre avec Léon Degrelle tint quasiment du miracle : sa villa près d'une caserne de l'armée de l'air ; ses liens avec les officiers qui la dirigent ; ses prédispositions à toujours rendre généreusement service,... C'est donc tout naturellement que les problèmes apparemment insolubles de la famille Urraca trouvèrent leur épilogue heureux : « Hélène pensa que Degrelle était l'homme idéal pour régler la situation de son fils Jean-Louis. Urraca méprisait sa passion pour la mécanique et prétendait lui imposer la carrière militaire ou policière, et voulait le tenir éloigné de Bruxelles et Madrid. Jean-Louis allait avoir vingt ans et devait faire son service militaire en Espagne s'il voulait y vivre. Et Hélène savait qu'il ne serait pas difficile pour Degrelle d'obtenir que son fils fasse son service militaire quelque part non loin de Constantina, de préférence dans l'aviation, où il pourrait cultiver sa passion pour les moteurs. Léon se montra très favorable à ce plan » (p. 248).

     

    C'est ce qui se passa : la mission qu'Hélène s'était donnée était accomplie et elle rentra définitivement chez elle. La mission que Léon avait acceptée l'était tout autant et Jean-Louis trouva sa voie : « Degrelle respecta son engagement de canaliser Jean-Louis. Grâce à son ami le lieutenant-colonel Pérez de Eulate, Jean-Louis s'est porté volontaire dans l'armée et a été affecté à l'Escadron de Radio de la base aérienne de Tablada (Séville) Pendant son temps libre, il a commencé à travailler pour l'aviation civile en tant qu'assistant au contrôle aérien de l'aéroport de Séville. » (p. 250). « [Léon Degrelle] l'avait reçu dans sa maison, lui avait trouvé un emploi conforme à ses goûts pour les moteurs et, lorsqu'il entra à l'armée, lui donna cent pesetas pour ses premiers frais. [...] Puis Jean-Louis prit également le chemin de Madrid, riche de son expérience dans l'aviation militaire et civile. » (p. 264).

     

    Et les deux amis, Hélène et Léon, furent-ils amants pour autant ? Nous n'en savons rien et, en réalité, cela ne nous regarde pas et n'a guère d'importance. Sauf pour les journalistes en mal de scoops malsains pour présenter Léon Degrelle en nazi salace, coureur de jupons et collectionneur de belles femmes... Mais qui peut prétendre pouvoir l'affirmer ? Rien dans tous les documents qui nous ont été montrés ne nous permet en effet de l'établir.

     

     

     

    Confluent 11.1977.jpeg

    Depuis la fin de la guerre, les caricaturistes se sont toujours amusés à représenter Léon Degrelle en parfait sybarite (ici, Christian Lamquet et Claude Laverdure, pour la couverture de Confluent, mensuel namurois de novembre 1977 ; voir ce blog au 22 octobre 2019).

     

     

    Quand Jean-Louis fut enfin pris en mains et guidé vers une vie épanouissante, les deux amis ont repris leur vie, chacun de leur côté, mais toujours amis et certes pas brouillés comme nous l'avons vu dans le courrier de 1960 où Léon donne de ses nouvelles et envoie un petit cadeau au couple.

     

    Rodríguez qui finit par avoir des hallucinations à force de vouloir lire entre les lignes, y décrypte la dissimulation d'une invitation à se revoir discrètement.

     

    Plaignons surtout les élèves de ce professeur d'histoire ! En quoi cette lettre est-elle d'ailleurs différente de la toute dernière qu'il cite et où le bienfaiteur du fils d'Hélène donne une nouvelle fois de ses nouvelles à l'occasion de ses vœux pour 1962 ? Elle montre en tout cas que si invitation il y avait dans le précédent courrier de 1960, elle ne fut suivie d'aucun effet ! (traduction de la traduction espagnole de José Luis Rodríguez Jiménez).

     

    « Bien chère Hélène,

    Comment vas-tu, ma dynamique beauté ? De mon côté, je pense souvent à toi et pendant ces jours de Noël, mes pensées volent vers toi, chargées d'affection et de mes vœux.

    Que 1962 te comble, toi et ton mari, de grandes joies ! Et ne parlons plus trop du cas D., poisson-ventouse [rémora] de ta digne Ambassade ! Bien que ce dernier souhait soit difficile à réaliser, car le D. en question est un élément fort peu raisonnable. Tu ne trouves pas ?

    Yvonne te racontera toutes les nouvelles d'ici. Mais tu dois déjà en avoir eu des échos. Deux tentatives d'enlèvement : en juillet et puis en octobre. Ils veulent ma mort, ce que je ne trouve pas très gentil !

    Je te souhaite tout le bonheur. Et ne doute pas de l'ancienne et loyale affection de ton vieil ami,

    Juan »

     

     

     

    Carlina. Yvonne Ransy-Leroy, Lucette Jamin, Hélène Cornette.jpgYvonne Ransy-Leroy (à gauche), Lucette Terseleer, l'épouse du caricaturiste Paul Jamin, alias Jam (au centre), et, apparemment, Hélène Cornette (à droite), devant le porche d'entrée de La Carlina au Leo Belgicus (ce blog au 17 octobre 2018). À l'arrière-plan, la tour blanche où une mitrailleuse fut installée en octobre 1961 pour protéger la propriété (photographie datant de l'hiver 1957-58 ?).

     

     

     

    Comme l'année précédente, Léon donne de ses nouvelles en profitant de l'occasion des vœux de nouvel an. Il fait sans doute aussi allusion à des courriers précédents dont nous ignorons la teneur : qui est ce « D. » qui empêche par son comportement sans-gêne un projet d'Hélène ? Léon Degrelle a-t-il voulu aider l' « ambassade » de son amie en vain ?... Quant à « Yvonne », devenue proche d'Hélène quand celle-ci partagea son logis à La Carlina, il s'agit d'Yvonne Ransy-Leroy (ce blog au 12 mai 2025) qui pourra lui donner tous les détails sur l'enlèvement raté organisé par Zwy Aldouby en juillet 1961 (ce blog au 3 janvier 2023) ; la tentative d'octobre évoquée par Léon Degrelle est probablement à relier aux alertes consécutives au procès des candidats ravisseurs (Aldouby prendra neuf ans de prison !) qui nécessitèrent une protection renforcée de la police (et l'installation d'une mitrailleuse au sommet de la tour de La Carlina !)... Rodríguez (appliquant le confusionnisme historique pratiqué à l'envi par son confrère Francis Ballace : ce blog au 30 juin 2016) n'est pas loin de traiter Léon Degrelle de menteur, jugeant a posteriori infondées ses craintes comme les mesures prises par les autorités : « Malgré ce qu'écrit Degrelle, nous n'avons pas trouvé de documents policiers concernant une seconde tentative d'enlèvement en octobre 1961. Il y eut bien des appels anonymes à la police signalant la présence d'agents israéliens, appels qui se répétèrent des mois plus tard. » (p. 270)...

     

    De toute façon, ce que cette lettre établit clairement, c'est que les relations entre les deux amis sont restées cordiales, même sans s'être revus depuis au moins trois ans, même après le départ de son pupille Jean-Louis, et même après la vie commune qu'a entreprise Léon Degrelle avec sa future épouse, Jeanne Brevet, depuis 1959.

     

    Et elles le sont demeurées, comme avec Louise Narvaez, Duchesse de Valence, ou Clarita Stauffer, parce qu'ils furent tous de vrais amis, n'en déplaise aux professionnels du ragot, tel José Luis Rodríguez Jiménez et ses affirmations gratuites (« Entre Hélène et Degrelle surgirait une histoire d'amour », p. 235) ou Gemma Aguilera et ses récoltes de commérages (« Tout le monde considère qu'ils sont amants », p. 146).

     

     

     

    Don Juan Calina.jpg

    Don Juan de La Carlina, ou Léon Degrelle en séducteur andalou, modèle apocryphe de Don Giovanni :

    « Ma in Ispagna, son già mille e tre » !

    À noter qu'à droite, la gitane aux castagnettes n'est autre qu'Anne Lemay(-Degrelle).

    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

     

     

     

  • Hélène Cornette, une maîtresse cachée de Léon Degrelle ? [2]

     

    Sous le manteau du Caudillo [7]

     

     

    Bajo el manto.pngTémoin important s'il en est, le fils d'Hélène Cornette et Pedro Urraca Rendueles, Jean-Louis Urraca, vécut de nombreux mois à La Carlina, auprès de Léon Degrelle, mais ne remarqua jamais rien d'équivoque ou d'étrange dans le comportement du maître de maison envers sa maman. Et pour cause, sa grand-mère l'accompagna durant tout son séjour : « au début de l'été 1956, Hélène, [sa mère] Jeanne et [son fils] Jean-Louis prirent l'avion pour Madrid et, de là, le train pour Séville [...]. Celle qui resta à Constantina pour être avec son petit-fils et parce qu'elle s'y plaisait, ce fut Jeanne Compveut qui put se loger dans la petite maison accueillant les trois autres Belges. » (Bajo el manto del Caudillo, pp. 248, 250).

     

    Si Jeanne Compveut se plaisait tant à La Carlina, c'est qu' « elle avait connu Degrelle à Madrid et se déclarait fervente admiratrice du chef rexiste. » (p. 248). On imagine donc combien elle devait être attentive aux paroles, faits et gestes de son hôte et combien elle devait couver d'un regard attendri les soins que celui-ci prenait pour son petit-fils. En effet, l'idée d'Hélène avait été de satisfaire à la fois son mari qui souhaitait que son fils embrasse une carrière militaire en Espagne, et ce dernier qui ne s'intéressait qu'à la mécanique et à l'aviation. Rodríguez raconte : « [Pedro] Urraca désapprouvait la passion [de son fils] pour la mécanique, voulait lui imposer une carrière militaire ou policière et voulait le garder loin de Bruxelles et Madrid. Jean-Louis était sur le point d'avoir vingt ans et devait prester son service militaire en Espagne s'il voulait vivre là-bas ; et Hélène savait que Degrelle n'aurait pas de difficulté à faire en sorte que son fils fasse son service militaire dans un endroit proche de Constantina, de préférence dans l'aviation, où il pourrait cultiver sa passion pour les moteurs. Léon se montra très favorable à ce plan » (p. 248).

     

    Certes, pour Rodríguez, le vrai plan consistait à satisfaire les passions lubriques des deux amants : « accueillir Jean-Louis à La Carlina signifierait qu'Hélène lui rendrait visite plus souvent, ce qui lui permettrait de pratiquer le français » (p. 248) !

     

    Mais le raisonnement est particulièrement spécieux puisque la grand-mère était chargée de surveiller le séjour de son petit-fils et que par ailleurs, tout comme Jean-Louis, elle ne remarqua jamais rien qui pût éveiller quelque suspicion puisque, nous le verrons, elle continuera à fréquenter La Carlina en l'absence de sa fille (mais, pour justifier ses ragots, Gemma Aguilera ce blog au 15 mars 2025 n'hésitera pas à les mettre sur le compte de l'opinion publique et, tant qu'à faire, de Jeanne Compveut elle-même : « Entretemps, une rumeur se répand dans le village. Tout le monde considère qu'ils sont amants. Probablement que Jeanne le sait aussi », Agente 447, p. 146).

     

    De plus, l'argument de la pratique du français facilitée par la présence d'Hélène ne tient pas un instant la route puisque vivaient déjà à la Carlina « les trois Belges » dont il est question plus haut et qui accueilleront justement chez eux Jeanne Compveut. Et Rodríguez ne manque en effet pas de nous les présenter : « Joseph et Yvonne Leroy, frère et sœur, lui veuf avec deux enfants qui avaient combattu en Russie, et un troisième qui vivaient avec eux » (p. 248).

     

     

     

    Lora del Rio 10.1954.jpg

    Nous avons vu (ce blog au 15 mars 2025) que, réfugié dans la chêneraie de Majalimar, la finca d'un ami du ministre du Travail José Antonio Girón, Léon Degrelle put réaliser ses premières entreprises commerciales lui permettant d'acquérir le domaine de La Carlina en 1952. Mais auparavant, en 1949, il acquit pour un prix dérisoire un moulin abandonné, le Molino Azul, à Lora del Rio, distant d'à peine quelques kilomètres de Majalimar. Il restaura cette propriété, la décorant de céramiques et faïences sévillanes, de fontaines colorées, de jardinets suspendus et patios fleuris, de déambulatoires ombragés et frais, sans oublier l'admirable chapelle mêlant de modernes et austères structures romanes à la polychromie des azulejos baroques. De sorte que, dès le mois de juillet, s'y installèrent tout d'abord son aide de camp Robert Du Welz qui fut de l'équipée du Heinkel d'Albert Speer (ce blog au 20 mai 2016), son épouse Marie-Antoinette qui servit de secrétaire à Léon Degrelle, dactylographiant les différents textes qu'il écrivit à Majalimar (ce blog au 18 octobre 2024) et leurs enfants.

     

    Cette photo, prise par Joseph Leroy au Molino Azul en octobre 1949, montre Léon Degrelle, le bras sur les épaules de Maurice Leroy ; devant eux, Robert Du Welz, le major Georges Jacobs, premier Commandeur de la Légion Wallonie (ce blog au 24 mars 2022), Yvonne Ransy (née Leroy), sœur de Joseph et tante de Maurice ; Marie-Antoinette Du Welz et Louise-Marie Degrelle, sœur de Léon, sont assises sur le dossier du banc de pierre (les deux autres personnes ne sont pas identifiées avec certitude, la blonde adolescente étant probablement l'une des trois filles de Robert et Marie-Antoinette Du Welz).

    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

    Détail intéressant par rapport à notre dernier article concernant les gravures lapidaires remarquées par Léon Degrelle dans la petite ville flamande de Damme (ce blog au 31 mars 2025) : juste à l'entrée du Molino Azul, après le petit pont romain enjambant le Churri, ruisseau pittoresque se jetant dans le Guadalquivir tout proche, se trouve un puits protégé par une grosse arche de briques destinée à la poulie permettant de puiser l'eau. Léon Degrelle y fit placer des faïences formant la devise du chanoine de Damme « Pacem opto ». On se souvient qu'en 1938, l'éditorialiste du Pays réel s'était indigné que l'on étouffât les escroqueries du Premier ministre au nom d'une « paix » qui valut à Van Zeeland un répit provisoire, comme si on voulait dissimuler une injustice flagrante par le silence d'une paix usurpée.

     

    En plaçant ostensiblement cette devise à l'entrée de l'oasis de tranquillité qu'il réserva à ses compagnons du Front de l'Est venus le rejoindre en Espagne, Léon Degrelle réclamait haut et fort pour ses soldats –héroïques croisés contre le bolchevisme– la paix, à défaut de la justice qu'on a toujours refusée à leur sacrifice patriotique.

     

    Le Molino Azul fut vendu en 1969 à une école d'agronomie qui céda récemment, en 2022, ses merveilleux locaux pour s'installer dans la banlieue industrielle de Lora del Rio. Un site Internet permet de visiter la toujours splendide Finca Molino Azul et d'encore apprécier la sûreté des talents d'architecte et de décorateur de Léon Degrelle.

     

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    Les souvenirs de Jean-Louis Urraca concernant son séjour à La Carlina sont d'un extrême intérêt, non seulement sur l'ambiance sereine et conviviale régnant dans la bastide degrellienne, mais également à propos des relations de sa mère et de son hôte.

     

    « Je ne savais rien de ce monsieur que me présenta ma mère à notre arrivée. » Et de confier ses impressions à Rodríguez : « Jean-Louis se souvient de Léon Degrelle comme d'un homme au caractère extraverti, très affable et facile à vivre. [...] Degrelle parlait souvent avec Jean-Louis de son passé politique et militaire et de la situation en Belgique avant et après la guerre. De plus, Jean-Louis assistait aux discussions que Degrelle avait avec d'autres personnes, comme les trois réfugiés belges qu'il avait installés dans une petite maison toute proche de la finca [...]. Jean-Louis se souvient également que la vie que menait Degrelle était très calme. Il se levait tôt et se couchait tard, lisait beaucoup, écrivait, écoutait la radio, sortait de la finca pour s'occuper de différentes affaires et pour développer sa collection d'antiquités. Avec lui, il parlait toujours français, mais avec les habitants de l'endroit, il s'exprimait en espagnol, qu'il parlait bien, avec tout le vocabulaire, mais avec un accent terrible” [Pilar Cernuda, la fille de son ami José María Cernuda, décrit ainsi son accent : « une voix puissante, prononçant les “r” comme des “g” et les “g” avec un son guttural », Interviú, 23 février 1983]. Il se souvient qu'il ne fumait pas, consommait modérément les boissons alcoolisées et appréciait la gastronomie ; il regrettait les plats de sa patrie, que Jeanne [Compveut] et Hélène [Cornette] essayaient de lui préparer lors de leurs visites. Pour la propreté et la cuisine, Degrelle avait à son service une dame du village et ses deux filles, qui se relayaient sans horaire fixe, en fonction des besoins de la maison. Les travaux pour l'intérieur et les jardins ont nécessité l'embauche pendant des années de personnes du village et de ses environs, des gens qui se montraient reconnaissants pour l'emploi et le traitement perçu, et plus que surpris par tout ce que l'étranger leur demandait de réaliser. De plus, les témoignages et les photographies que l'on possède encore montrent que certains voisins étaient invités à la finca, surtout des femmes et des enfants, profitant des piscines, des fontaines et des jardins, ce qui permit au propriétaire de se construire une bonne image dans le voisinage. » (pp. 249-250).

     

     

     

    LD Carlina Ecole Filles.jpg   LD Carlina Ecole Garçons.jpg

    Léon Degrelle ouvrait régulièrement et généreusement sa finca aux habitants de Constantina, son bourg d'adoption (ici, à gauche, les élèves de l'école des filles ; à droite, ceux de l'école des garçons). Pour Rodríguez, il ne s'agissait que d'une posture intéressée pour « se construire une bonne image » et asseoir sa réputation. La réalité est pourtant bien différente : « Léon Degrelle était plongé et pleinement intégré dans la vie locale de Constantina : tous les villageois lui portaient admiration, considération et respect. [...] Quand, des années plus tard, il arriva que Léon Degrelle revînt au village, les gens le saluaient avec de vives démonstrations d’attachement, d'affection, de tendresse sincère quand ils le revoyaient marcher, comme jadis, dans la rue Mesones [avenue piétonnière commerçante de Constantina]. » (José Luis Jerez Riesco, Degrelle en el exilio, pp. 229 et 288).

    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

     

    José Luis Rodríguez Jiménez finit par résumer ainsi le séjour de Jean-Louis Urraca chez Léon Degrelle : « Jean-Louis a vécu presque un an à La Carlina. Pendant ce temps, sa mère a passé là quelques semaines, quelques autres à Madrid et est rentrée à Bruxelles. » (p. 250).

     

    Voilà qui laisse peu d'espace pour une grande histoire d'amour, surtout, nous précise le biographe, que la grand-mère Jeanne Compveut logeait sur place pour être près de son petit-fils. Et elle y restera même pendant qu'il effectuera son service militaire tout près de Séville en 1957-1958 : « Grâce à [l']ami [de Léon Degrelle,] le lieutenant-colonel Pérez de Eulate, Jean-Louis s'est porté volontaire dans l'armée en septembre de l'année suivante et a été affecté à l'Escadron de Radio de la base aérienne de Tablada (Séville) » (p. 250). Et Jean-Louis de faire régulièrement la navette Séville-La Carlina pour retrouver sa grand-mère : « Jean-Louis se déplaçait toujours de Séville à Constantina pour visiter sa grand-mère et Degrelle » (p. 264).

     

    Les choses vont se précipiter avec l'évolution de la situation familiale de Léon Degrelle parvenant enfin à revoir ses enfants. C'est en effet en septembre 1957, au moment où Jean-Louis va effectuer son service militaire, que Léon Degrelle put retrouver son fils aîné, Léon-Marie (ce blog aux 26 février 2016 et 5 novembre 2022). Les deux jeunes gens vont immédiatement nouer des liens d'amitié ainsi que Jean-Louis le confirme à la journaliste Gemma Aguilera : « avec son fils, j’avais lié une amitié et développé des liens très forts bien que nous ne nous soyons connus que quelques mois » (El Temps, 12 mars 2013). Léon Degrelle avait également envoyé son fils à Séville non seulement pour apprendre l'espagnol, mais également pour préparer son baccalauréat : il logeait chez son grand ami phalangiste José María Cernuda (1916-2009), délégué du Ministère de l'Information et du Tourisme dans la capitale andalouse.

     

    Habitant tous deux à Séville, Jean-Louis et Léon-Marie rejoignaient Constantina, cités éloignées de quelque 70 kilomètres, toutes les fins de semaine, a expliqué Jean-Louis Urraca à José Luis Rodríguez Jiménez, en fournissant le détail inédit de l'origine de la motocyclette fatale de Léon-Marie : « Avec ses économies, Jean-Louis avait acheté un scooter, une Lambretta 125, et pour encourager l'amitié entre son fils et le fils d'Hélène, ainsi que pour faciliter ses allers-retours de Séville pour passer les week-ends à La Carlina, Degrelle acheta le même modèle à son fils. » (Rodríguez, p. 256). Mais cinq mois à peine après son arrivée, un cruel accident de la circulation devait coûter la vie à Léon-Marie : « La mort de son fils [...] le toucha profondément. Chaque jour, il passait un peu de temps devant sa tombe, dans le jardin de La Carlina » précise Gemma Aguilera, également censée rapporter les propos de Jean-Louis (El Temps, 12 mars 2013), sauf que la sépulture de Léon-Marie ne se trouve évidemment pas dans les jardins de Léon Degrelle, mais dans le cimetière municipal, à plus de trois kilomètres de la finca...

     

     

     

    LD Léon-Marie Jarre 1958.jpg

    Léon-Marie se place sous la tutelle à la fois de son père Léon et de son Lion ibérique assis. À l'arrière-plan, se distingue une vaste amphore en grès vernissé. Ce merveilleux petit patio était un des endroits préférés de Léon Degrelle pour y lire et méditer. Bajo el manto del Caudillo publie une photo datant du milieu des années 1950. Nous en possédons un tirage plus médiocre ainsi qu'un autre cliché datant de 1960 où il lit auprès du vase monumental ; au verso d'une photo, Léon Degrelle le décrit ainsi : « La grosse jarre polychromée, sur le damier bleu et argent de la terrasse. »

     

    LD Jarre 1954.jpg   LD Jarre 1960.jpg

    Légende Jarre.jpg

    Tant qu'il vécut à La Carlina, Léon Degrelle ne manquait pas de se recueillir quotidiennement au cimetière paroissial San José sur la tombe de son fils unique, mort dans un accident survenu Avenida de la Palmera à Séville, le 22 février 1958 : la roue de sa moto fichée dans un rail du tram l'empêcha d'éviter le taxi venant en sens inverse. Léon-Marie projeté la tête en avant sur le trottoir fut tué sur le coup.

     

    LD+Tombe Léon-Marie Constantina.jpg

    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

     

    Pour Rodríguez, la disparition de Léon-Marie marqua la fin des relations entre la famille Urraca et Léon Degrelle : « avant que fût accompli le service militaire, la grand-mère quitta La Carlina pour s'installer dans la maison de son beau-fils et de sa fille à Madrid où ils allaient d'ailleurs fort peu. Puis Jean-Louis prit également le chemin de Madrid, riche de son expérience dans l'aviation militaire et civile. Ainsi vont les choses. Et avec les longs séjours d'Anne Degrelle à La Carlina, Hélène Cornette ne trouvait plus d'excuses pour s'y rendre. Ou bien elle décida que cette relation était déjà allée trop loin pour une étrangère exilée, même avec un passeport espagnol, et qu'elle souhaitait conserver les bénéfices de sa vie matrimoniale ; ou bien c'est lui qui avait déjà commencé une relation avec une autre femme, la fille d'un antiquaire, chose qui ne plairait à aucune de ses filles, ni à Clarita, ni à Hélène. » (Rodríguez, p. 264).

     

    Ce récit tarabiscoté de la fin de la prétendue idylle entre Léon Degrelle et Hélène Cornette est absolument vaudevillesque. Il postule en effet non seulement des relations amoureuses entre les deux intéressés ainsi qu'entre Léon et Clarita Stauffer, mais également la jalousie qui se serait emparée des quatre filles de Léon (Chantal, Anne, Godelieve et Marie-Christine), de son amie (et prétendue maîtresse aussi !) Clarita et de sa nouvelle maîtresse envers celle qui sera l'amour absolu de sa vie, présentée dédaigneusement comme « une autre femme, la fille d'un antiquaire » !

     

    Comme si Jeanne Brevet, la fille de l'ébéniste et antiquaire bien connu à Bourg-en-Bresse, Alexandre Brevet (1895-1967), et Félicie Darnand (1891-1966), sœur de Joseph Darnand (1897-1945), fondateur du Service d'Ordre Légionnaire, embryon de la Milice, pouvait –ne fût-ce que chronologiquement parlant– avoir quelque chose à voir avec les relations Cornette-Degrelle...

     

    Mariée à l'écrivain-journaliste Henry Charbonneau (1913-1982), écrivant avec Henri Gault (1929-2000, cofondateur des guides gastronomiques Gault et Millau), le livre L'Aventure est finie pour eux, signé par François Brigneau (1919-2012), Jeanne Brevet n'eût pu rencontrer Léon Degrelle avant janvier 1959 (les interviews de l'ancien chef de Rex seront publiées dans Paris-Presse L'Intransigeant du 3 au 6 février 1959), avant de former le premier chapitre du livre.

     

    Or à ce moment-là, comme nous venons de le voir, malgré que son petit-fils Jean-Louis Urraca n'avait pas encore achevé son service militaire, Jeanne Compveut avait quitté La Carlina pour l'appartement familial de Madrid. Pourquoi ? Cette grand-mère aimante n'attend-elle pas impatiemment chaque fin de semaine la visite du jeune milicien ? N'est-elle pas heureuse de pouvoir rencontrer quotidiennement Léon Degrelle dont elle est la « fervente admiratrice » ? C'est que, justement, Léon Degrelle n'est lui-même plus à La Carlina, car au moment où son fils Léon-Marie le rejoint, en septembre 1957, en Belgique, une nouvelle et violente campagne de presse est déclenchée, réclamant son extradition. Il faut qu'il se cache : ce sera d'abord, à Séville, chez son ami José Maria Cernuda (chez qui Léon-Marie restera pensionnaire), pour aboutir dans la région de Ségovie, dans une propriété du comte de Mayalde où il restera jusqu'en janvier 1958.

     

    LD SS 2.jpgPendant ces quelque trois mois d'isolement, Léon Degrelle ne restera pas inactif : il écrira les deux cents pages de l'ouvrage consacré à la SS combattante, Un million de Waffen-SS, qui ne sera publié que de manière posthume et est toujours disponible aux Éditions de l'Homme Libre  (ce blog au 13 novembre 2018).

     

    Il va aussi s'atteler à un projet qui lui tiendra particulièrement à cœur, mais qu'il n'achèvera jamais. Exprimant son amour de l'histoire et de la sagesse populaires, ce travail consistait à traduire au plus près –tout en conservant en français rimes et assonances– les maximes et dictons de l'Espagne profonde, tels que l'éditeur spécialisé dans les compilations littéraires José Bergua les a rassemblés dans le Refranero español (« Proverbes espagnols, Collection de huit mille dictons populaires, rangés, recoupés et expliqués, précédée du Livre des Proverbes moraux, d'Alonso de Barros », troisième édition, 1945). Ce livre lui fut sans doute offert (dans le but de parfaire son espagnol ?) par son hôte provisoire, José María Cernuda, très impliqué dans le maintien et le développement des traditions populaires. Ainsi fut-il à l'origine de la renaissance, en 1947, du célèbre carnaval de Cadix, qui avait été supprimé pendant la guerre civile (sur la couverture intérieure du Refranero, Léon Degrelle a noté quelques numéros de téléphone : un seul n'identifie son correspondant que par le prénom, « José María » [Cernuda]).

     

     

     

    Refranero 1.jpeg

    Léon Degrelle tenait tellement à son projet de traduction et d'adaptation du Refranero, alliant culture populaire et traditions orales qu'il promettait une substantielle récompense à qui lui rendrait son livre en cas de perte : « Ce livre, aux milliers de notes, est pour moi de la plus grande importance. En cas de perte, prière de le rapporter à : D. Léon-José de Ramirez Reína, Calle Joaquin García Morato, 37 (8.C), Madrid. Une très belle récompense sera octroyée. » Par suite de la suppression, en janvier 1980, des noms de rue à Madrid évoquant le régime franquiste, Léon Degrelle va corriger (au feutre fin rouge), son adresse officiellement redevenue « Santa Engracia » (ce blog au 10 mai 2023).

     

    Pour illustrer le travail constant de Léon Degrelle sur son recueil de moralités populaires (il comptait intituler son florilège de traductions Sagesse espagnole), nous avons choisi de vous montrer les deux pages ouvrant le chapitre « C » du répertoire, car elles manifestent la permanence des soins que le lexicographe apportait à la réalisation de cette œuvre singulière.

     

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    On y distingue les différentes strates d'écriture et de corrections grâce aux différentes encres utilisées par les différentes plumes :

    - années 1950 ; porte-plume à encre noire (+ corrections à la plume noire plus fine)

    « Chacun sent ses peines à lui Et peu les peines d'autres » corrigé en « Chacun sent ses peines à lui Et peu les peines d'autrui »

    « Ce qui est raté, ne pas s'en vanter ». Cette sentence traduit un espagnol plus trivial « La caca, callarla » (Le caca : le taire). Mais la maxime suivante rend plus exactement l'original : « Le caca, ne le remue pas » (souligné plus tard en rouge)

    « Chaque fût sent le vin qu'il a eu » corrigé en « Chaque verre sent le vin qu'il contient »

     

    - suite des années 1950 : traductions et corrections au stylo-bille rouge et au bic bleu

     « Cheveux et puceaux Beaucoup sont faux » (noir), corrigé en « Cheveux et pucelles Beaucoup sont artificielles » (bleu)

    « Chacun ressent ses peines à lui Et peu les peines d'autrui » (bleu)

    « Ce que tu as raté, inutile de t'en vanter » (rouge)

    « Chaque outre sent le vin qu'elle contient » (rouge)

     

    - années 1980 (cf. correction du nom de rue sur la page de garde) : feutre fin rouge

    « Cheveux et pucelles Beaucoup sont artificielles » (bleu), corrigé en « Chevelure et pucelles, Beaucoup sont artificielles » (rouge)

    « Des cheveux blancs et pas de cervelle dedans »

     

    - années 1990 : gros feutre rouge (utilisé systématiquement pour la préparation des enregistrements « Le Siècle de Hitler »)

    « Chacun ressent ses peines à lui Et peu celles d'autrui »

     

    Une sentence a manifestement donné du fil à retordre à l'ethnographe : « Cada día gallina, amarga la cocina » (Une poule chaque jour rend la cuisine amère). Bic rouge années 1950 : « Chaque jour un poulet lasse le brouet » devient « Chaque jour des galines lasse de la cuisine », puis (page de gauche) « Chaque jour du poulet rend amer (ou lassant) le mets ». Le gros feutre rouge propose « rend monotone », mais sans prévoir d’assonance... Tout comme plus loin « Cada loco con su tema » (Chaque fou avec ses idées) dont la proposition de traduction est barrée (« Chaque fou [...] est tout » : le gros feutre rouge propose de traduire « su tema » par « sa marotte ».

     

    Ci-dessous, la seule page où Léon Degrelle montre ses talents de caricaturiste, malheureusement sans indication sur l'identité de sa « victime ». Peut-être son ami Cernuda (dont le numéro de téléphone est renseigné à son seul prénom) : le dessin à l'encre noire date en effet de son séjour à Séville ? Mais nous ne disposons d'aucun portrait pour le vérifier...

    Refranero 3 Dessin.jpeg

     

     

     

    On le voit donc, c'est dès avant le fatal 22 février 1958, en septembre 1957 que la campagne lancée par la presse belge ayant désormais la certitude de la présence de Léon Degrelle en Espagne contraint ce dernier à se cacher le temps de cet orage, et que la famille Urraca se vit obligée de s'éloigner de Don Juan de La Carlina. En fait, cet éloignement ne sera définitif que pour Hélène qui ne profita d'ailleurs guère de la présence de son fils chez Léon Degrelle. Nous verrons bientôt que les liens avec Jean-Louis vont encore se resserrer grâce à la venue de Léon-Marie et que même la grand-mère Compveut retrouvera La Carlina.

     

    Continuons donc de rectifier la chronologie brouillonne proposée par Rodríguez.

     

    Après l'intermède de trois mois de clandestinité pendant lequel Léon-Marie a pu développer à Séville ses liens d'amitié avec Jean-Louis ponctués de virées en Lambretta, Léon Degrelle retrouve La Carlina pour être à nouveau épouvantablement frappé par le sort avec l'accident tragique de son fils.

     

    « Ce samedi 22 février [1958], vers 16 heures, sortant de la maison de son professeur particulier, [Léon-Marie] était prêt à aller passer, comme d'habitude, le week-end chez son père à La Carlina. A peu de mètres de distance de sa résidence, en essayant d'éviter un tramway, le roue de sa moto s'est coincée quelques instants dans le rail ; un taxi surgit à l'improviste et Léon-Marie freina brusquement, mais sans pouvoir éviter la terrible collision qui le projeta, la tête en avant, sur le trottoir, lui fracturant le crâne et les vertèbres cervicales, entraînant un coma profond et irréversible. Tout était consommé. Il n'eut pas le temps de se rendre compte de sa mort : au moment même où les faits se produisaient, en un instant, en un clin d’œil, il conserva sur son visage l'expression de son sourire serein, tendre et juvénile qui l'accompagnerait pour toujours dans l'éternité. [...]

    À dix heures et demie du soir, le corps sans vie du malheureux arriva à Constantina et fut installé dans la chapelle ardente qu'on aménagea dans la maison du maire. Don Juan, ainsi que Degrelle était connu dans la région, fut [...] entouré de ses amis, qui étaient toutes ces bonnes gens rustiques, aussi bien riches que pauvres, des environs de ces campagnes sauvages. Le cercueil fut veillé toute la nuit par les femmes vêtues du noir le plus strict, qui passèrent ces heures de deuil en prières permanentes, enchaînant les chapelets de manière ininterrompue dans un recueillement saisissant.

    L'enterrement eut lieu le jour suivant, le dimanche 23 février, à 13 heures. Le transfert du cercueil jusqu'au cimetière s'effectua sur les épaules des jeunes du village, amis du défunt. Le village entier, en procession silencieuse, a assisté à ces émouvantes funérailles. » (José Luis Jerez Riesco, Degrelle en el exilio, pp, 246-247).

     

    1958 Constantina Tombe Léon-Marie.jpg(Documentation © Jacques de Schutter)

     

    La mort de Léon-Marie va provoquer l'arrivée en Espagne d'Anne, la fille puînée de Léon Degrelle (ce blog au 5 novembre 2022). Arrivée qui, selon Rodríguez, aurait servi d'excuse à Hélène Cornette pour ne plus venir à La Carlina. Nous avons vu qu'un an après avoir emmené son fils à La Carlina, le bilan des séjours d'Hélène était des plus maigres : « Pendant ce temps, sa mère a passé là quelques semaines, quelques autres à Madrid et est rentrée à Bruxelles. » (p. 250).

     

    Selon toute vraisemblance et tout naturellement, les quelques semaines passées par Hélène à La Carlina lorsque son fils s'y trouvait, se situèrent en fait au début de l'arrivée de ce dernier (été 1956) afin de permettre à sa mère de faciliter la prise de contact et les relations entre Jean-Louis et Léon Degrelle...

     

     

    À suivre

     

  • Revue d'Histoire européenne

     

    Connaissez-vous la Revue d'Histoire européenne ?

     

     

    RHE 21a.jpg

     

    Depuis la disparition sacrificielle de Dominique Venner et de sa précieuse Nouvelle Revue d'Histoire en 2017, l'amateur d'Histoire non revisitée par les conformismes de la moraline contemporaine semblait définitivement mis au régime sec. Jusqu'en décembre 2019 où parut le premier numéro bimestriel de la Revue d'Histoire européenne, dont le principal dossier était consacré au Mur de Berlin, Le Mur de la honte.

     

    Cinq ans plus tard, le magazine en est à son vingt-troisième numéro et, malgré la conspiration du silence généralisée des médias installés (et surtout subventionnés par l'argent du contribuable), son succès va grandissant. Et c'est avec grand plaisir que nous engageons nos lecteurs à s'y abonner sans retard ni hésitation !

     

    Les anciens numéros sont toujours disponibles (à part quelques dossiers épuisés) et nous conseillerons surtout de vous procurer le numéro 21 (novembre 2024-janvier 2025) centré sur La Waffen-SS, Première armée européenne ?

     

    Le point d'interrogation vient du Conseiller éditorial, Guillaume Fiquet qui signe l'édito avec les désormais indispensables exonérations de mauvaises intentions : la Waffen-SS, une armée européenne ? Si on veut, « mais uniquement au regard de sa composition et de ses vagues de recrutement ». Comme si elle eût pu être européenne composée uniquement d'Allemands... Comme si le conflit s'étendant à toute l'Europe n'avait pas exigé la participation de ressortissants de toutes les nations partageant la même vision de l'histoire et la même conscience des enjeux politiques... Le point d'interrogation signifie donc qu'on ne veut pas être accusé de défendre cette Europe. En effet, « en aucun cas » il ne faudrait croire que la Revue puisse « faire l'apologie d'une organisation coupable de crimes de guerre »...

     

     

     

    Historia Sommaire.jpeg

    Le survol rapide en quatre articles sur une trentaine de pages de la Revue d'Histoire européenne ne peut prétendre dire tout ce que fut la Waffen-SS, ni même rivaliser avec la trentaine d'articles sur quelque deux cents pages de l'Historia de 1973, historique dans tous les sens du terme (ce blog au 25 mars 2025) ! Pour ne rien dire de la pertinence de la conclusion tirée par Jean Mabire développée sous le titre Ils ont, sans rien renier, tiré un trait sur leur passé. Mais, après une solide mise en perspective historique, ce sont de passionnants articles que la Revue consacre à La division SS Italia, aux Musulmans de l'Ordre noir, et surtout au Dernier rempart à Berlin que constitua La « Charlemagne ».

     

     

    Ces précautions d'usage mises à part (furent-elles nécessaires pour le dossier de la dix-neuvième publication, « Les crimes de guerre des Alliés, La mémoire effacée » ?), l'étude est des plus intéressantes, même si elle n'offre pas l'étendue du panorama, ni la puissance des récits et la précision des témoignages qui faisaient la qualité du dossier publié par Historia, voilà déjà un demi-siècle (ce blog au 25 mars 2025). Il est vrai que la plupart des articles avaient été écrits par des acteurs directs, engagés volontaires de cette nouvelle armée européenne.

     

    Ce ne peut évidemment plus être le cas aujourd'hui (et pas que pour des raisons de nécrologie !), mais ce devrait être un motif supplémentaire pour fournir des articles de la qualité la plus irréprochable et aux informations systématiquement recoupées. C'est certainement le cas pour la plupart, qui sont d'ailleurs de lecture passionnante. Il a néanmoins fallu que, pour le sujet Léon Degrelle ! qui nous intéresse particulièrement, les erreurs et les approximations foisonnent, comme si l'article avait été rédigé par quelque amateur n'ayant d'autre ressource que sa mémoire défaillante.

     

    Aussi l'encadré concernant Léon Degrelle ne pouvait-il que susciter notre réaction.

     

     

     

     

    RHE 21c 2.jpgL'encadré de la page 36 consacré à Léon Degrelle a retenu notre attention car il comporte nombre d'erreurs qu'une revue comme la vôtre ne devrait pas commettre.

    Sans doute ne s'agit-il que d'une faute de frappe, mais qui ne sera pas pardonnée par les prétendus historiens officiels qui ne cherchent qu'à être politiquement corrects : quand vous écrivez « ils sont près d'un million de Belges à l'accompagner », c'est supposons-nous « un millier » que vous vouliez écrire.

    Par contre prétendre que « la revue Rex » était « proche du fascisme italien » et que Léon Degrelle fut « arrêté par les autorités belges en raison de ses sympathies pour l'Allemagne » est un peu court et semble donner raison aux élucubrations de ces prétendus historiens officiels, car Rex ne se revendiquait pas du fascisme et Léon Degrelle, avant-guerre, publia davantage de dénonciations du nazisme que de louanges énamourées (articles critiques dans Soirées du 12 mai 1933, numéro spécial consacré à « la terreur hitlérienne », le 13 juillet 1934).

    Mais s'il est vrai qu'il fut arrêté pour faire partie d'une supposée Cinquième colonne au service de l'Allemagne et livré aux prisons françaises, il fut plus efficacement libéré par les autorités françaises de Vichy plutôt que par « les autorités du Reich ».

    Enfin si Léon Degrelle eut « l'honneur d'être reçu par Hitler en personne » le 20 février 1944, il le fut à nouveau le 27 août. Et à chaque fois, l'initiative de la rencontre revint au Führer, comme ce fut déjà le cas pour la toute première rencontre à Berlin, le 26 septembre 1936. C'est à l'occasion de cette première visite que se nouèrent les liens les plus singuliers entre le jeune trentenaire et le Chancelier du Reich qui confia à son ministre des Affaires étrangères: « Je n'ai jamais vu de tels dons chez un garçon de cet âge ! ».

    Le 20 février 1944, Hitler ne le décore pas de la croix de fer (2e classe reçue le 13 mars 1942 sur le champ de bataille ; 1ère classe conférée par le Général Ernst Rupp de la 97e Division de Chasseurs de Montagne, le 21 mai 1942), mais lui accorde la cravate de Chevalier de la Croix de Fer ; et le 27 août, il y ajoute les Feuilles de Chêne. C'est à cette occasion aussi qu'il lui confiera : « Si j'avais un fils, je voudrais qu'il soit tel que vous ».

    En Espagne, il ne travailla jamais « pour une entreprise de Travaux publics ». Il fut bien entrepreneur, s'occupant d'import-export, de sidérurgie, de construction (notamment de logements pour le personnel d'une base militaire américaine), de teinturerie, de décoration,... Mais il dut surtout échapper à plus d'une dizaine de tentatives d'enlèvement ou d'assassinat, fomentées par des mouvements d'anciens résistants, les services secrets israéliens ou les barbouzes du Général De Gaulle...

    A propos de Léon Degrelle, pour en apprendre davantage et bénéficier de sources sûres, nous ne saurions assez vous conseiller de consulter le blog du Dernier Carré Léon Degrelle.

     

     

    Voilà donc le texte de la lettre que nous avons envoyée à la Revue d'Histoire européenne. Nous avions encore bien des remarques, mais qui, en l'allongeant démesurément, auraient pu rendu notre message trop négatif !

     

    Nous aurions ainsi pu contester la date avancée pour le passage de la Légion Wallonie à la Waffen-SS, car ce n'est pas le 24 mai 1943 qu'il s'effectua. Cette date marque plus précisément la visite du Reichsführer au camp de Pieske où les Bourguignons étaient regroupés après la campagne du Caucase (ce blog au 20 octobre 2023). À l'issue de ses négociations directes avec Heinrich Himmler, Léon Degrelle le convainquit de faire la connaissance de ses Wallons, de se rendre compte de leur état d'esprit et d'apprécier leur valeur et leur détermination.

     

    Car il ne faut pas s'y tromper : contrairement à ce que sous-entend l'article sur L'internationalisation de la Waffen-SS, Léon Degrelle n'était pas prêt à se fondre à n'importe quel prix dans la SS. On nous explique en effet que « La légion Wallonie [...] est, quant à elle, versée dans la Waffen-SS » car Léon Degrelle « est parvenu à convaincre Himmler et son état-major du fait que les Wallons sont des Germains parlant français » (p. 36) ! Il n'a jamais été nécessaire de convaincre ni Himmler, ni Adolf Hitler –lecteurs de l'historien Franz Petri (ce blog au 12 mai 2016)– de la germanité des Wallons, rappelée dès 1941 par Léon Degrelle !

     

    C'est le général Gottlob Berger qui, en novembre 1942, prit l'initiative des discussions avec Léon Degrelle sur l'avenir de la Belgique sous la férule allemande. Dans son optique, toutes les régions se retrouvaient annexées à différents Gaue allemands, la Légion Wallonie étant purement et simplement incorporée à la Waffen-SS sous commandement allemand.

     

    Léon Degrelle rompit alors tout contact. Ce n'est que sur l'insistance d'Heinrich Himmler que les négociations purent reprendre, le Reichsführer se mettant lui-même aux commandes et acceptant finalement toutes les conditions fixées par Léon Degrelle, étant entendu que dans l'Europe nouvelle, le peuple belge représenté par ses élites combattantes jouirait des mêmes droits et libertés que le peuple allemand et tous ceux formant la nouvelle communauté populaire européenne : commandement belge, langue française, drapeau bourguignon et religion catholique, le tout consacré par la rencontre personnelle avec les Volontaires wallons (ce blog aux 20 juillet 2018 et 2 février 2021) !

     

     

     

    Pieske Himmler joyeux+Lippert.jpg

    Le 24 mai 1943, à l'invitation de Léon Degrelle, le Reichsführer Heinrich Himmler vient faire la connaissance des Bourguignons à l'entraînement dans le camp de Pieske (aujourd'hui en Pologne), dans une atmosphère détendue et bon enfant.

     

     

    Le passage officiel de la Légion Wallonie à la Waffen SS a été acté le 1er juin 1943. Le 27 juin, elle rejoignait le camp d'entraînement de Wildflecken où elle devint la SS-Freiwilligen-Sturmbrigade Wallonien.

     

     

    RHE 23.pngÁ la décharge de ses rédacteurs, contrairement au dernier prétendu biographe de Léon Degrelle qui, dans son gros bouquin nous référençant, ne tient aucun compte des renseignements que nous fournissons en abondance sur Léon Degrelle et la Légion Wallonie et trompe donc sciemment son lecteur (ce blog au 25 mars 2025), la Revue d'Histoire européenne ignorait tout de notre existence.

     

    Cela étant, l'optique de ses travaux est résolument positive et enrichissante. De plus, sa lecture est vraiment agréable et, en ce jour de cent trente-sixième anniversaire de la Tour Eiffel (ce blog au 20 avril 2024), nous ne pouvons que vous conseiller son dernier numéro dont le dossier central est consacré à La chute du Reich, signifiant La fin de la vieille Europe !

     

    L'article principal sur Le Führerbunker et les dernières heures d'Adolf Hitler est particulièrement captivant dans sa sobre mais incisive concision.

     

     

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  • Hélène Cornette, une maîtresse cachée de Léon Degrelle ? [1]

     

    Sous le manteau du Caudillo [6]

     

     

    Bajo el manto.pngPour documenter la relation qui s'établira entre Hélène Cornette et Léon Degrelle, nous disposons essentiellement de la documentation publiée par José Luis Rodríguez Jiménez et reçue du fils d'Hélène (des dédicaces de livres de Léon Degrelle, des photos prises à La Carlina et son témoignage) ainsi que du livre de Gemma Aguilera, Agent 447 dont la traduction espagnole de 2013 mit la puce à l'oreille de Rodríguez (ce blog au 15 mars 2025).

     

    L'auteur du recueil de ragots Bajo el manto del Caudillo rapporte la dédicace de son livre de poèmes L'Ombre des soirs, que Léon Degrelle offrit à Hélène Cornette, datée de 1953. Nous pensons qu'il s'agit bien là de la date de leur première rencontre. Cette quarantaine de pages de poésies avaient été composées à l'Hôpital Mola avant d'être publiées en 1952. Et l'hommage que Léon Degrelle y appose est tout à fait semblable à ceux qu'il rédige habituellement pour le visiteur occasionnel qui suscite sa sympathie : chaleureux et empressé. « A ma chère et belle amie Hélène Rendueles, avec l'affectueux souvenir de L. Degrelle » (p. 235).

     

     

     

    Ombre Soirs.jpeg

     

    Page de garde du livre. S'il n'est pas le premier ouvrage de Léon Degrelle à avoir été publié après la guerre (ce sera La Cohue de 1940, édité en 1949), L'Ombre des Soirs est la première œuvre à avoir été écrite pendant la convalescence du blessé à l'Hôpital Mola et daté « Saint-Sébastien, juillet 1945 » (p. 45).

     

    Le recueil est composé de trois cycles de poèmes : Les Vies Brèves ; Beauté, o ma béatitude et Je devrais. Cette luxueuse édition sur papier vergé, limitée à 675 exemplaires, est censée avoir été réalisée par le maître-imprimeur Jean Pons à Paris (en réalité Juan Pons Sastre, chef des ateliers d'impression artisanale Imprenta Becerra à Lora del Rio) pour les éditions A la Feuille de Chêne (allusion à la distinction ajoutée à la Croix de Chevalier de la Croix de Fer de Léon Degrelle par Adolf Hitler, le 27 août 1944 : ce blog au 24 janvier 2023) : « L'impression, commencée le 19 Mars 1952, a été terminée le 11 Avril de la même année. » (p. 47).

     

     

    Nous noterons qu'à cette occasion, la visiteuse renseigna à son hôte le nom de la mère de son mari, –Rendueles–, selon le faux passeport de celui-ci (sur son propre faux passeport, Hélène Cornette portait le nom du second mari de sa mère, Stoffel : voir Gemma Aguilera, p. 129). Elle n'a donc pas donné son propre nom –Cornette–, ni celui de son faux passeport, mais s'est présentée à Léon Degrelle comme l'épouse de Pedro Rendueles. Loin d'une relation intime, nous en sommes donc bien au tout début de leurs rapports, sans doute encore méfiants.

     

    Mais les relations vont rapidement s'intensifier, même si on n'est pas obligé de suivre Rodríguez dans ses supputations salaces : « Léon offrit également à Hélène un exemplaire de La Campagne de Russie, avec une dédicace plus longue qui, bien qu'il omît le mot amour, n'éviterait pas les soupçons de Pedro Urraca : Pour toi, chère Hélène, dont le prénom poétique et fameux a mû et inspiré tant de glorieux guerriers. En souvenir de temps grandioses qui ont ajouté quelque chose au patrimoine de gloire, de grandeur et de beauté des Hommes ; pour te dire l'admiration, l'attachement et l'affection qu'éprouve pour toi [Léon Degrelle] » (p. 235).

     

    On le voit, pour l'historien des conjectures, apparemment hermétique aux évocations poético-mythologiques provoquées par le seul prénom d'Hélène et étranger également aux compliments galants qu'elles permettent, une telle dédicace ne peut qu'exprimer la passion d'un amour adultère.

     

    Il n'en reste pas moins qu'à partir de ce moment les visites se renouvelèrent régulièrement : « Quant à Hélène Cornette, il existe des photographies d'elle à La Carlina, prises en juillet et septembre 1954 et en juillet et août 1955, ce qui veut dire qu'elle passa là plusieurs semaines pendant ces étés. Et cela se répéterait car les printemps se passaient entre Bruxelles et Madrid comme l'indique la lettre de Pilar Primo de Rivera à Hélène, le 19 janvier 1956 : Nous te verrons certainement par ici lors de ta visite de printemps”. » (p. 245).

     

    Les dates avancées par Rodríguez ne correspondent déjà pas tout à fait avec l'illustration qu'il publie d'une enveloppe Kodak contenant le développement du film d'un séjour d'Hélène à La Carlina qui s'avère légèrement antérieur puisqu'elle est datée du 15 juin 1954. En légende, Rodríguez explique que ces clichés constituaient le cadeau d'Hélène à Léon Degrelle pour son quarante-huitième anniversaire (p. 245). Nous corrigerons cependant encore notre fin limier car il ne s'est apparemment pas rendu compte que l'écriture de la date est de Léon Degrelle lui-même et pas d'Hélène Cornette.

     

     

    Pochette Kodak 1.jpeg

     

    Cette pochette contenant des photographies développées par Kodak est archivée de la main de Léon Degrelle : « Anniversaire 15 Juin 1954 » : il a sélectionné certaines photos pour lui et rend les autres à son amie Hélène Cornette en souvenir de la journée de son 48e anniversaire passée ensemble à La Carlina.

     

    Commentaires de Rodríguez : « Enveloppe du développement à Madrid de quelques photographies prises à La Carlina, au nom de Mme Rendueles (utilisant le second nom de son mari, prenant soin de ne pas laisser de trace des endroits où elle passe), avec une note indiquant Anniversaire 15 juin 1954 (date du 48e anniversaire de Degrelle). Elles étaient un cadeau pour lui. »

     

    Cette note manuscrite –de la main de Léon Degrelle– manifeste qu'il s'agit plutôt d'un cadeau réciproque.

     

     

    Ce qui veut dire que si cette enveloppe avec cette référence s'est retrouvée parmi les documents d'Hélène, c'est que Léon Degrelle lui en a fait cadeau en retour, voulant partager avec elle les souvenirs de joie, de soleil et de baignades, de ce jour de juin tout spécial qu'il ne manque pas de rappeler sur la pochette Kodak.

     

    La preuve en est que la plupart des photos fournies par Jean-Louis Urraca, le fils d'Hélène, à Rodríguez ont aussi été retrouvées dans les papiers de Léon Degrelle. Il ne manque que celles où figure Hélène, probablement rendues en souvenir par le jubilaire ou écartées plus tard par Jeanne, la sourcilleuse et exclusive épouse aimante de Léon Degrelle...

     

    Parmi elles probablement, les deux clichés où Hélène Cornette apparaît en maillot de bain (p. 236 –nous en avons repris un détail : ce blog au 1er septembre 2024–, et p. 247 où l'on voit également Léon Degrelle nager dans la petite piscine aux rochers) ainsi que celui de la première couverture : c'est là le seul vrai scoop de Rodríguez car c'est bien la toute première fois qu'est publiée une photo coquine de Léon Degrelle en maillot de bain, tapotant les fesses d'une statue de naïade !... Il s'agit d'un marbre du sulpteur florentin Guglielmo Pugi (1850-1915), connu pour ses diverses Vénus accroupie.

     

    Peut-être qu'appartiennent aussi à cette série de photos Kodak, celle de la grande piscine (p. 243), celle où Léon Degrelle lit dans le patio à côté de la grande jarre armoriée (p. 233) ainsi que celle où il pose dans les champs, avec La Carlina en arrière-plan (p. 240) : ces deux derniers clichés ont de toute évidence été pris le même jour car l'hôte de la finca porte en effet les mêmes vêtements. Les deux dernières photos publiées par Rodríguez ne proviennent certainement pas de cette série : l'une présente le fils d'Hélène, Jean-Louis Urraca, à cheval (p. 249), mais il est arrivé plus tard à La Carlina, en 1956 ; et l'autre est prise au cimetière de Constantina, montrant la tombe de Léon-Marie (p. 260, ce blog au 1er septembre 2024), mais le fils unique de Léon Degrelle mourut à Séville le 22 février 1958.

     

     

     

    LD Naïade.jpg

     

    La photo de couverture de Bajo el manto del Caudillo montre pour la toute première fois un Léon Degrelle en maillot de bain, assis sur le bord de la grande piscine de La Carlina. Il semble vouloir tapoter gaillardement le popotin de la statue d'une baigneuse qui en couronne le sommet (Nu accroupi, de Guglielmo Pugi) : une photo toute privée marquant la complicité entre le (la) photographe et le photographié. La scène amusait d'autant plus les protagonistes que plusieurs clichés en furent pris : celui du livre de José Luis Rodríguez Jiménez appartient aux papiers d'Hélène Cornette.

     

    En voici un second, légèrement différent (inclinaison opposée de la tête, main gauche sur la fesse de la nymphe dénudée, main droite plus en avant sur le socle de la statue) sorti des archives de Léon Degrelle (Documentation © Jacques de Schutter). Il établit bien notre hypothèse d'un partage des souvenirs immortalisés sur la pellicule de cette journée du 15 juin 1954.

     

     

    À la fin de cette même année 1954, parut la seconde édition d'Almas Ardiendo (la première, au tirage limité sur papier vergé, avait été réalisée en 1952, en même temps que L'Ombre des Soirs, par le maître-imprimeur Juan Pons, à Lora del Rio, voir ce blog au 24 janvier 2024). C'est cette nouvelle édition, au format de poche et tirée à plusieurs milliers d'exemplaires vendus une quarantaine de pesetas pièce, qui fut dédicacée à Hélène Cornette.

     

    « À toi, chère et belle Hélène, alma ardiendo ! car Dieu sait la force et la pureté du feu qui brûle en toi. Avec l'admiration et le souvenir plein d'affection de L. Degrelle. En exil, le 15 Décembre 1954. » (p. 238)

     

    À nouveau, une dédicace flatteuse dont l'auteur des Âmes qui brûlent est coutumier, identifiant ici la dédicataire au titre du livre et lui délivrant ainsi le certificat d'idéal qui doit nécessairement animer celle qui est devenue une amie. Il s'agit d'ailleurs de la dernière dédicace qui nous soit communiquée par Rodríguez, qui ne manque pas d'y reconnaître de quasi-déclarations d'amour.

     

    Nous ignorons bien sûr tout de la nature précise des relations entretenues par Hélène Cornette et son hôte puisque nous n'avons appris son existence que par ce livre. Aussi nous semble-t-il avant tout important de nous attacher aux textes authentiques qu'il nous fournit plutôt qu'aux interprétations de leur découvreur trop tenté, nous semble-t-il, d'y projeter ses propres lubies...

     

     

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    Il semble que la fonction première de la Vénus au bain de la grande piscine de La Carlina soit de recevoir de gentilles tapettes sur les fesses ! Derrière Léon Degrelle, un porche ouvre sur le panorama de Constantina. Ironiquement sans doute en l'occurrence, les azulejos qui le décorent chantent les vers de Federico García Lorca « Aire de Roma Andaluza le doraba la cabeza » (« Un air de Rome andalouse lui dorait la tête », Chant funèbre pour [le matador] Ignacio Sánchez Mejías) !...

    À noter surtout que la scénette où d'autres personnes semblent présentes ne peut certes plus évoquer quelque connivence coupable entre Léon et son photographe (pour autant que ce fût bien Hélène qui photographiait Léon en maillot de bain).

    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

     

     

    Concernant justement les dédicaces, observons qu'il n'y en a que trois : la première (pour L'Ombre des Soirs) est on ne peut plus anodine, ne permettant aucunement de déduire quelque intimité entre l'auteur et la dédicataire. Les deux autres, au contraire, manifestent clairement une plus grande proximité entre les deux personnes. Mais au lieu d'y voir une manifestation d' « imprudence » (pour Almas Ardiendo) ou un aveu de relations coupables (pour La Campagne de Russie) devant inévitablement déboucher sur « les soupçons de Pedro Urraca », le mari d'Hélène, nous n'y voyons qu'artifices littéraires d'auteur cherchant à impliquer personnellement la dédicataire dans l’œuvre qu'il lui offre.

     

    Ainsi de la geste héroïque des Légionnaires wallons sur le Front de l'Est, La Campagne de Russie : Léon Degrelle se sert du prénom d'Hélène pour renvoyer à cette autre geste héroïque que fut la guerre de Troie et, en même temps, justifier l'affection qu'il lui porte.

     

    Ainsi de l'ouvrage célébrant les porteurs d'idéal, Almas ardiendo : Léon Degrelle affirme que Dieu a voulu qu'Hélène soit aussi une âme qui brûle.

     

    Remarquons enfin la conclusion de ces deux dernières dédicaces où nous retrouvons les mêmes mots : « te dire l'admiration, l'attachement et l'affection qu'éprouve pour toi [signature] » et «  Avec l'admiration et le souvenir plein d'affection de L. Degrelle ». La reprise des mêmes termes cordiaux dans la dédicace montre assez qu'ils appartiennent au registre de l'hommage certes tout personnel, mais pas à l'expression camouflée de sentiments où ne manquerait que « le mot amour » !

     

    On voit que Rodríguez fait tout son possible pour déduire des hommages à Hélène que signe Léon Degrelle dans les livres qu'il lui offre, des relations extra-conjugales. Mais, comme on le constate, rien dans les dédicaces à son amie ne nous oriente résolument dans cette direction, à moins d'adopter les a priori de Rodríguez et de solliciter les textes avec insistance !

     

    Mais, à part les trois autographes de 1953-1954, possède-t-on d'autres documents ? L' « historien » nous indique qu' « En ce qui concerne Hélène Cornette, on dispose de photographies d'elle à La Carlina prises en juillet et septembre 1954 et en juillet et août 1955, ce qui prouve qu'elle a passé là plusieurs semaines pendant ces étés. » (p. 245). Au passage, nous remarquerons qu'il n'y a en tout et pour tout que quatre visites vraiment documentées. L'auteur insinue néanmoins, en s'appuyant sur une lettre de la sœur de José Antonio à son amie espérant sa visite au printemps 1956, qu'Hélène aurait pu en profiter pour se rendre chez Léon. Nous verrons plus loin que c'est plutôt à l'été 1956 qu'elle fit le voyage, mais pour une tout autre raison qu'une visite à Pilar Primo de Rivera.

     

    Parmi toutes les photos dont nous parle Rodríguez, une seule semble avoir été dédicacée à Hélène. Mais elle n'est pas reprise dans son ouvrage ; nous la trouverons dans un article de trois pages que Gemma Aguilera a publié le 12 mars 2013 dans El Temps, hebdomadaire politico-culturel de gauche en catalan, intitulé Le charme dangereux du nazi Léon Degrelle.

     

     

     

    El Temps 12.03.2013 LD Hélène+Gemma.png

     

    Selon la journaliste Gemma Aguilera (en bas à droite, photo couleurs) que l'on serait tenté de croire sur parole tant ses reportages reçoivent d'honneurs (notamment un prix de la ville de Barcelone en 2007), « Léon Degrelle et Hélène Cornette, l'épouse de Pedro Urraca Rendueles, étaient amants. » Comment le sait-elle ? En donne-t-elle la preuve ? Non, elle reprend simplement « une rumeur déjà fort répandue », mais qu'elle n'établit par aucune référence.

     

    Sa traduction de la dédicace de Léon Degrelle n'est pas mieux inspirée : « Du plus haut de l'éloquence –musicale– chère Hélène, en pensant affectueusement à toi. La Carlina, 1954. » Non seulement elle omet la signature Juan, mais elle rate la métaphore de la lyre inspirée par la ferronnerie du balcon : cette lyre n'appartient pas à la musique, mais, comme le souligne Léon Degrelle, à l'éloquence, celle par exemple d'un autre Jean, le Chrysostome (« Bouche d'or ») que l'office byzantin de sa fête célèbre comme « la lyre éloquente [...] qui fait retentir par toute la terre les dogmes du salut ». Éloquence ressortissant, plus certainement aussi, à ses propres talents d'orateur, conférencier apprécié de Constantina. Léon Degrelle y avait d'ailleurs déjà fait allusion auprès de Jean-Louis, le fils d'Hélène Cornette, qui a conté l'anecdote à Rodríguez : « la maison avait, sur la terrasse principale, un petit balcon en fer forgé d'où l'on dominait la route d'accès à La Carlina ; et Léon disait que cet endroit était parfait pour haranguer le peuple ! » (pp. 248-249).

     

     

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    À gauche, le balcon de la terrasse dominant le grand jardin en surplomb de la route menant au Leo Belgicus du portail d'entrée de La Carlina ; à droite, la vue aérienne de La Carlina permet de situer tous ces éléments : le balcon à la lyre d'éloquence est signalé par un cadre rouge ; la Vénus accroupie, par un cadre jaune. (Documentation © Jacques de Schutter)

     

    Dans son article, Gemma Aguilera n'a pas plus de chance en commentant la photo d'un dîner d'une petite trentaine de personnes autour d'une longue table dans un restaurant de Constantina (les autres clients dînent ou prennent un verre à d'autres petites tables de la taverne) : « Banquet de noces d'une des filles de Degrelle, avec de nombreux voisins de Constantina. » Seules Godelieve (en 1960) et Anne (en 1961) se marièrent à Constantina et, comme nous le verrons, jamais Hélène n'assistera aux noces. Il s'agit certes ici d'un petit banquet, mais ne concernant en rien les filles de Léon Degrelle (seul Jean-Louis Urraca pourrait préciser les circonstances de ce repas).

     

    La photo montre à l'avant-plan la famille d'Hélène Cornette : de gauche à droite, probablement son fils Jean-Louis Urraca, un inconnu qui semble le chevalier servant de la grand-mère Jeanne Compveut assise à côté de sa fille Hélène la couvant du regard. Suivent deux personnes en l'honneur de qui le repas est peut-être offert puisqu'elles se trouvent au centre de la tablée. Ce n'est que deux places plus loin qu'on reconnaît Léon Degrelle, loin donc de sa maîtresse de prétendue notoriété publique.

     

    Ci-dessous, des fragments des deux premières pages de l'article Le charme dangereux du nazi Léon Degrelle, paru dans El Temps, le 12 mars 2013.

       

    El Temps 12.03.2013 a1.png   El Temps 12.03.2013 b2.png

     

     

    La photo montre Léon Degrelle, en pantalon de golf et chaussettes blanches à la Tintin, accoudé à un balcon au sommet d'un promontoire. La dédicace, à nouveau, semble bien innocente : « Du haut de la lyre de l'éloquence, chère Hélène, en pensant affectueusement à toi, Juan, La Carlina, 1954. »

     

     

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    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

    Un Rodríguez s'empresserait peut-être d'utiliser cette photo pour étayer sa thèse des relations amoureuses, en relevant le mot « affectueusement », combien plus personnel qu'un formel « cordialement » (mais présent dans toutes les dédicaces), et surtout la signature « Juan » qui ne pourrait, évidemment, que renvoyer à Don Juan, le séducteur impénitent de la gent féminine !

     

    Mais une telle référence serait-elle vraiment opportune ? Ne relèverait-elle pas plutôt de la muflerie la plus crasse, ravalant son éventuelle amante au rang de vulgaire numéro à enregistrer dans son interminable catalogue de conquêtes ?

     

    Ce serait oublier surtout que depuis qu'il put se réfugier dans la propriété de l'ami du ministre du Travail José Antonio Girón, Léon Degrelle s'est justement fait connaître comme « Don Juan de Majalimar ». C'est sous ce nom en effet qu'il commença à donner ses conférences historiques à succès et même à les publier, comme le rapporte d'ailleurs l'auteur de Bajo el manto del Caudillo : « Degrelle, passionné d'histoire locale, commença à écrire dans les bulletins municipaux et à donner des conférences dans les cinémas et les théâtres des villages voisins, où il mélangeait son mauvais espagnol au français, et il fit traduire en espagnol au moins un des textes de ses conférences. Il s'agit d'une brochure assez curieuse car Lora del Río, il y a 2000 ans, éditée sans date à 120 exemplaires numérotés [...] est signée par Juan de Majalimar » (p. 231). Plus tard, si le nom changea en fonction du déménagement de l'intéressé, le prénom Juan, lui, demeura inchangé : « Le 5 juillet [1956], [l'organe du parti socialiste espagnol en France] El Socialista, dans son édition de Toulouse, a fait état de trois conférences données par Degrelle les 3, 7 et 10 décembre 1955, à 19h30, au cinéma Cervantès de Constantina [...]. On indiquait également que le nom de Degrelle n'apparaissait pas dans le programme et que les conférences seraient données par la haute personnalité que nous connaissons tous sous le nom de Don Juan de la Carlinga [sic, pour Carlina]. » (p. 251).

     

     

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    (Documentation © Jacques de Schutter)

     

     

    Mais pourquoi « Juan » ? Simplement parce que depuis 1950, Léon Degrelle possède un permis de travail au nom de Don Juan Sanchis Dupré, journaliste correspondant de l'hebdomadaire phalangiste d'information politique et sociale Afan (L'Effort).

     

    C'est le phalangiste Victor de la Serna, responsable de la section « Presse » au Ministère du Travail et par ailleurs rédacteur en chef d'Afan qui signe obligeamment ce permis de travail d'autant plus original que l'hebdomadaire en question avait cessé de paraître depuis une dizaine d'années (son dernier numéro sortit en décembre 1940, après trois ans et demi d'existence).

     

    Victor de la Serna (1896-1958), qui avait également été directeur du quotidien pro-allemand Informaciones pendant la guerre, était un ami d'Otto Skorzeny (il fut témoin de son mariage avec la néerlandaise Ilse Lüthje à Madrid en mars 1954) et de Clara Stauffer (ce blog au 3 janvier 2023). Il noua des liens d'amité avec Léon Degrelle lorsqu'il fut question de l'aider à rejoindre Pierre Daye en Argentine en 1948 (ce blog au 4 mai 2016) et lui procura alors passeport, carnet d'ancien combattant ainsi que ce permis de travail.

     

     

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    Victor de la Serna, premier à gauche, est reçu, le 20 janvier 1943, dans les salons du chef de la Presse du Reich, le Dr Otto Dietrich (au centre, en uniforme de général de l'Algemeine SS), où trône le buste d'Adolf Hitler par Bernhard Bleeker (1881-1968 ; fasciné par son modèle, le sculpteur munichois en réalisa plus de vingt différents jusqu'à la fin de la guerre) ; à sa gauche, le rédacteur en chef du quotidien Arriba et à sa droite, le vice-secrétaire à l'Education populaire. Cette délégation de la presse espagnole en visite officielle auprès de ses homologues allemands était conduite par José Luis Arrese, le ministre du mouvement national FET de la JONS (qui n'apparaît pas sur la photo).

     

     

    Mais si ni les dédicaces des livres offerts, ni celle de la seule photo signée à avoir été dévoilée, célébrant l'orateur Degrelle, ne peuvent accréditer incontestablement les relations amoureuses entre le mari délaissé de Marie-Paule Lemay et l'épouse émancipée de Pedro Urraca, sur quoi peuvent alors se baser, et la journaliste, et le prof d'unif, pour établir leur scoop sur la vie sentimentale à rebondissements de Léon Degrelle ?

     

    Il reste encore le témoignage du fils d'Hélène Cornette, Jean-Louis Urraca, qu'ont rencontré nos deux bonimenteurs romanesques. Mais à nouveau, nous verrons comment la Barbara Cartland catalane et l'inspecteur Clouseau castillan ferraillent pour rendre leur histoire la plus croustillante possible...

     

     

    À suivre

     

     

  • In memoriam Léon Degrelle (1906-1994)

     

    Etsi mortuus urit !

     

    31 mars 1994 – 31 mars 2025

     

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    Mais le feu, lui, a des flammes diverses, s'élève, s'abaisse, renaît s'élance. Ce livre [Les Âmes qui brûlent], c'est du feu, avec les exaltations du feu, les démesures du feu.

     

    Si au moins, il pouvait en avoir la bienfaisante chaleur ! Si des âmes pouvaient près de lui trouver réconfort et vigueur, comme on les trouve à méditer, le soir, près d'un grand feu de bois presque silencieux. Les ondes de sa puissante vie pénètrent, et leur rayonnement, et leur recueillement. Elles s'offrent complètement, elles se livrent complètement.

     

    Le don, le vrai don est ainsi, s'anéantissant jusqu'au dernier brandon.

     

    Ici, dans mon cas personnel, il ne s'agit plus que d'un feu mort. Ma vie s'est écrasée dans des abîmes, a été submergée par des lames de fond qui ont tout recouvert.

     

    Mais je veux croire malgré tout que ces élans qui animèrent l'action d'un homme mort déjà aux yeux de la plupart des hommes –s'il a le malheur de vivre encore pour lui-même– pourront encore rejoindre spirituellement de-ci de-là, dans le monde, des cœurs anxieux...

     

    Je me souviens de trois mots que j'avais déchiffrés un jour sur une tombe de marbre noir, là-bas à Damme en Flandre, dans une église de ma patrie perdue :

     

    ETSI MORTUUS URIT.

     

    « Même mort, il brûle... »

     

    Puissent ces pages [des Âmes qui brûlent], dernier feu fugace de ce que je fus, brûler encore un instant, réchauffer encore un instant des âmes hantées par la passion de se donner et de croire, de croire malgré tout, malgré l'assurance des corrompus et des cyniques, malgré le triste goût amer que nous laissent à l'âme le souvenir de nos chutes, la conscience de notre misère et l'immense champ de ruines morales d'un monde qui est certain de ne plus avoir besoin de salut, qui s'en fait gloire et qui pourtant doit être sauvé, doit plus que jamais être sauvé.

     

    (Léon Degrelle, Les Âmes qui brûlent, chapitre I, « Le Feu et les Cendres », pp. 29-30).

     

     

     

     

     

    Edito LD PR 1938.06.29.png

    Il ne fait pas de doute que Léon Degrelle visita attentivement la belle cité de Damme, qui fut jusqu'au XIVe siècle un avant-port prospère de Bruges (Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, épousa à Damme, en 1468, Marguerite d'York, sœur du roi d'Angleterre Édouard IV).

     

    Attentif aux gravures lapidaires, il ne retint pas seulement l'inscription tombale Etsi mortuus urit, mais aussi la devise Pacem Opto du chanoine Johannes Van der Stricht, complaisamment gravée avec son blason au fronton du porche d'entrée de son vaste domaine curial du XVIe siècle, la Ferme de Saint-Christophe, à la sortie de la petite ville, de l'autre côté du canal qui la borde et mène à Bruges.

     

    L'éditorial de Léon Degrelle « Puissance de Rex », dans Le Pays réel du 29 juin 1938, appelant au succès du Congrès national de Lombeek-Notre-Dame, prévu le 10 juillet suivant (ce blog au 15 mars 2024), se sert de cette épigraphe religieuse pour dénoncer l'étouffement des prévarications de bankster du Premier ministre Paul Van Zeeland (ce blog au 14 avril 2017).

     

     

     

    Damme, c'est la patrie de Thyl Ulenspiegel, dont la chronique de Charles De Coster a célébré la Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses au pays de Flandres et ailleurs.

     

    Le malicieux garçon, effronté au cœur pur, est horrifié par la corruption et la perfidie du clergé catholique ainsi que par l'épouvantable répression de l'Inquisition contre la réforme (son père dénoncé pour ses sympathies protestantes fut livré vif au bûcher). Il rencontre alors le comte de Brederode avec qui il sympathise au lendemain de sa présentation, le 5 avril 1566, du « Compromis des Nobles » des XVII Provinces à la régente des Pays-Bas, Marguerite d'Autriche, demi-sœur du roi Philippe II d'Espagne, leur souverain. L'échec de cette requête réclamant l'arrêt de l'Inquisition et des persécutions religieuses, marqua le début de la révolte des Gueux dont Brederode fut le premier chef.

     

    Or c'est justement Hendrik, seigneur de Brederode et Vianen, vicomte d'Utrecht, dit le Grand Gueux, qui imagina la formule Etsi mortuus urit.

     

    C'est pour manifester sa ferme opposition aux placards du roi et à l'Inquisition, qu'il fit frapper un jeton « politique » dont l'origine et la description sont données dans un recueil numismatique de l'époque.

     

    Brederode Etsi 1a.png

     

    On a vu comme Brederode & les Confédérés parurent dans Bruxelles vêtus de bure grise avec de petites écuelles de bois à la ceinture, en vue de ce qu'avait dit le Comte de Berlaymont à Marguerite d'Autriche, Gouvernante des Pays-Bas, que ceux qui lui avaient présenté la Requête n'étaient que des Gueux.

     

    Mais comme Brederode n'avait fait cela que pour se moquer du Comte de Berlaymont, pour faire voir que ces Gueux dont il était le chef étaient des Gueux illustres, il fit faire une Bouteille d'or en forme de calebasse, & une écuelle du même métal, qu'il portait attachées à sa ceinture. On conserve cette bouteille & cette écuelle à Utrecht dans le Cabinet d'un curieux. On lit autour de l’Écuelle ces paroles :

    WIVEL DIE GEUX.

    Vivent les Gueux.

     

    La Maison de Brederode, pour exhorter les Nobles & les peuples à défendre leurs liberté & les privilèges de leur Patrie, fit faire cette Médaille qui est : La main de Mucius Scévola au milieu des flammes tenant une Épée, avec ces paroles :

     

    AGERE AUT PATI FORTIORA,

    ROMANUM EST.

    Entreprendre & souffrir courageusement des choses

    extrêmes, cela est digne d'un Romain.

    [...]

     

    Brederode Etsi 1.png

     

    REVERS :

    La hure d'un Sanglier au milieu des flammes & au dessous, une Croix de Bourgogne enflammée faite de deux bâtons de Laurier. On voit cette Légende :

     

    ETSI MORTUUS URIT.

    Quoiqu'il soit mort, il ne laisse pas de brûler.

     

    AU BAS :

    CALC. VIAN.

    Jeton de Vienne.

     

     

    Jeton Etsi 2.png

    L'inscription du bas est mal interprétée par l'auteur de l'Histoire métallique : « VIAN » est mis pour la ville de Vianen, dans l'actuelle province d'Utrecht, dont le comte Hendrik van Brederode était le seigneur, et non pour la capitale autrichienne !

     

    Il faut lire « Calc[ulus] Vian[en] », c'est-à-dire « Jeton [pion à calculer] de Vianen ». La forme latine de Vianen étant « Vigenna », son abréviation eût été « VIG »  ; il faut donc penser que le jeton a conservé le nom néerlandais (sans forme de déclinaison latine).

     

    La hure de sanglier et les bâtons de Bourgogne enflammés sont les emblèmes de la maison de Brederode.

     

    L'avers de la pièce porte la date 1566, celle de l'échec du Compromis des Nobles, le 5 avril, et du Banquet des Gueux organisé le lendemain par Brederode. Chaque convive prononça alors le serment Agere aut pati fortiora Agir ou souffrir davantage ») repris sur le jeton.

     

     

    On voulait marquer par cette Médaille que Brederode abattrait la Maison d'Espagne qui commençait à se consumer par les atteintes qu'il lui avait déjà données. Et en même temps, on voulait représenter que le grand coup qu'on avait frappé contre elle serait un coup dont elle se ressentirait, après même que Brederode serait mort.

     

    Ces paroles Etsi mortuus urit sont fort naturelles, car on dit que les défenses du sanglier frottées ou frappées les unes contre les autres jettent des étincelles de feu aussi bien que les bâtons de Laurier.

    On fit ces vers [...] :

    Quoiqu'on me brûle à petit feu,

    Cependant, l'on avance peu.

    Je brûle ; après ma mort, les autres, de mes flammes,

    Les Gueux, tout Gueux qu'il sont, plus il sont opprimés,

    Plus ils paraissent animés :

    C'est le propre des grandes âmes.

     

    (Supplément à l'Histoire métallique de la République de Hollande, dans lequel, outre plusieurs médailles qu'on a ajoutées, depuis la naissance de la République, jusqu'à la fin de l'année 1689, on verra toutes celles qui ont été frappées sur l'expédition de S.A. le Prince d'Orange, Roi d'Angleterre, & sur son couronnement. Et les tombeaux des personnages illustres qui ont sacrifié leur vie pour la Hollande, leur patrie.

    Amsterdam, Chez Pierre Mortier, Libraire sur le Vygen Dam, à l'Enseigne de la Ville de Paris, 1690, Avec Privilège de Nosseigneurs les États.)

     

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    Aujourd'hui, à notre connaissance, des messes de requiem pour le repos de l'âme de Léon Degrelle seront célébrées un peu partout en Belgique, Espagne, France, Italie et Mexique.

     

  • Léon Degrelle, par Frédéric Saenen

     

    Une biographie grand public ? Sans a priori ?

    La réponse est déjà dans le Prologue !

     

     

    À peine avions-nous reçu de notre fidèle petit libraire de quartier la nouvelle biographie de Léon Degrelle que nous parvenaient déjà des messages nous demandant si nous l'avions lue et, surtout, ce que nous en pensions.

     

    Nous n'avions certes pas l'intention de nous jeter toutes affaires cessantes sur cette brique épaisse car d'autres priorités se sont imposées à l'organisation de notre temps et puis, avouons que la présentation de l'éditeur ainsi que le commentaire bouffon déféqué par le mensuel Historia (ce blog au 28 février 2025) ne nous ont guère encouragé à tout laisser tomber pour sa lecture...

     

     

     

    Où est le temps...

     

    Historia HS 32 Int. SS.jpegLes temps changent. Les mentalités aussi, hélas...

     

    Qui oserait encore publier aujourd'hui un dossier sur la SS affirmant « On ne songe plus aujourd'hui à assimiler les combattants de la Waffen SS aux bourreaux des camps de concentration » ? Et confier la rédaction des articles à un Jean Mabire, spécialiste incontesté de la Waffen SS mais condamné aujourd'hui par l'encyclopédie de la bienpensance Wikipédia pour exprimer « une pensée politique classée à l'extrême droite, proche des milieux néo-fascistes » ? Ou à d'anciens Volontaires du Front de l'Est, même sous pseudonyme, tels Saint-Loup, Paul Terlin ou Henri Fernet ?

     

    Ce fut pourtant l'honneur du mensuel Historia qui sortit en 1973 son 32e Hors Série intitulé L'Internationale SS, 600.000 étrangers français, belges, suisses, etc...

     

    L'auteur de Les SS de la Toison d'Or y rappelait d'ailleurs le surnom Modeste Ier de Bourgogne donné plaisamment par ses hommes à Léon Degrelle, toujours fier et hardi. Et il en faisait le titre glorieux de son article (ce blog au 22 janvier 2016). Au lieu qu'aujourd'hui, Frédéric Saenen et, à sa suite, Historia, version woke contemporaine, en font un sobriquet sardonique : « ses légionnaires, railleurs, le surnomment Modeste Ier, roi de Bourgogne » (p. 8)...

     

    L'historien Jacques de Launay –qui rencontra Léon Degrelle en 1973– a témoigné qu'après la défaite, il ne s'agissait aucunement de raillerie : « Ses camarades de guerre l'appellent affectueusement Modeste » (Histoires secrètes de la Belgique, 1935-1945, p. 194). Ce que confirme Paul Terlin (le héros Henri Moreau, grand mutilé de guerre) qui précise l'origine du surnom, à la fois respectueux et spirituel, dans le récit des combats d'épouvante pour le village de Starosselié, en Ukraine : « Debout dans sa voiture, Léon Degrelle retrouve la voix et les gestes du tribun pour arrêter la débandade. [...] jamais brave officier ne fut aussi bon orateur. Celui que nous nommons entre nous Modeste Ier de Bourgogne, en raison de la gloriole qui accompagne ses exploits, galvanise les fuyards. [...] Magie du verbe et du courage. Les Rouges s'attendaient à tout, sauf à ce coup de gueule providentiel du chef rexiste. » (La Neige et le sang, p. 84).

     

    Historia HS 32 Saint-Loup.jpeg

     

    Nous ne pouvons, de plus, qu'engager l'amateur de sobriquets à vérifier la source de ses citations incorrectes, puisqu'il ne put jamais être question de « roi de Bourgogne », la principauté chère à Léon Degrelle étant celle du duché de Jean sans Peur, Philippe le Hardi, Philippe le Bon et Charles le Téméraire (en fait, le néo-biographe ne fait que paraphraser mais sans donner la référence l'inculte Wim Dannau qui écrit à la page 11 du premier volume de son Ainsi parla léon degrelle : « Ses hommes de la Légion Wallonie ne l'appelaient-ils pas Modeste Ier, Roi de Bourgogne ? »

     

     

     

    Mais bon, les désirs de nos lecteurs nous étant tout de même quasi des ordres, nous avons enfin ouvert ce livre qui se présente comme la « première biographie grand public » de Léon Degrelle.

     

    En tenant l'ouvrage en mains –350 pages sans la moindre illustration, accompagnées d'un important appareil critique de bas de page et de plus de trente pages de notes–, nous nous demandons tout de même ce que l'éditeur considère alors comme ouvrage « non-grand public » !

     

    Autrement agréables à lire par leur style et leur mise en pages, enrichis de photographies parfois originales et toujours pertinentes, bref parfaitement « grand public » nous semblent –même si nous ne sommes pas toujours vraiment d'accord avec le contenu– les livres d'André Liénard (Légion Wallonie, ce blog au 3 mai 2021), Jean-Marie Frérotte (Le dernier fasciste, ce blog au 21 juin 2018) ou même Arnaud de la Croix (Degrelle, 1906-1994, ce blog au 13 décembre 2016) !

     

    Ici, le bouquin a tout l'air du pensum lourdement indigeste. Et, surtout, loin de l'affirmation péremptoire de la pub en quatrième de couverture d'être « Sans a priori ». Les quatorze pages du Prologue ne font en effet rien d'autre qu'exalter les a priori de l'auteur !

     

    Sans doute est-ce pour tenter de le cacher qu'il a intitulé aussi sobrement sa biographie Léon Degrelle, Mais quel est le Léon Degrelle qu'il se propose de nous présenter ?

     

    Son projet, nous assène-t-il, est de « se focaliser sur le destin d'un rejeton de la petite bourgeoisie ardennaise [...] qui, une fois relégué dans le camp des vaincus, s'est ingénié à forger avec complaisance son propre mythe » (p. 16) ; de raconter « L'histoire d'un Belge qui, sous des dehors caricaturaux et une bonhomie de façade, dissimulait un être à la fois autoritaire, assoiffé de notoriété et de pouvoir, roublard en affaires, jaloux et colérique, souvent veule et toujours comédien en représentation, doté d'une inébranlable assurance de soi qui pouvait l'amener jusqu'au déni de réalité » ! (p. 20). Mais aussi de présenter ce « fugitif, [...] trafiquant d'art, négationniste » (p. 8), incarnant « une figure repoussoir, contre-exemple absolu de l'éthique en politique » (p. 11)...

     

     

     

    LD Iberico CEDADE.jpg   LD + Lion CEDADE.jpeg

     

    Léon Degrelle « trafiquant d'art » soutient d'emblée Frédéric Saenen dans la deuxième page de son Prologue. En 1988, un scandale médiatico-judiciaire fut monté de toutes pièces : Léon Degrelle tenterait de monnayer des « trésors nationaux » espagnols à l'étranger !

     

    Mais le « trafiquant » produisit immédiatement les titres de propriété de ses antiquités et, la baudruche s'étant dégonflée à la confusion de ses calomniateurs, de rédiger illico presto la savoureuse brochure Léon Degrelle, un lion ibérique nazi publiée en espagnol par le CEDADE (Cercle Espagnol des Amis de l'Europe, ce blog au 4 février 2017). Frédéric Saenen le sait, mais pour lui, c'est sûr, il n'y a pas de fumée sans feu !

     

    Aujourd'hui le lion ibérique –toujours en Espagne en tant que trésor national inaliénable– est la propriété d'un ami de Léon Degrelle, héritier d'une grande maison de luxe.

     

    Ci-dessus, à gauche, la couverture de la brochure polémico-divertissante de Léon Degrelle ; une affiche tirée à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires couvrit les murs de Malaga, Madrid et Barcelone pour annoncer sa publication. À droite, Léon Degrelle pose devant le fameux lion celtibère qui ne quitta jamais ses propriétés (ici, dans sa Cabaña de Fuengirola ; photo extraite de la brochure du CEDADE).

     

    Ci-dessous, dans son appartement de Madrid, l'éternel amateur d'art épris de beauté et d'histoire, présente quelques-uns de ses trésors antiques.

     

    LD Antiquités.jpg

     

     

    N'en jetez plus ! Nous nageons effectivement dans le dénigrement diffamatoire plein d' « a priori », et ce, avec une jouissive complaisance !

     

    Nous craignions avoir affaire à « un énième opus politiquement correct » (ce blog au 28 février) ? Eh bien, nous serons gâtés ! Car Saenen revendique haut et fort (pp. 16-18) sa filiation avec le « critique littéraire belge Pol Vandromme » qui, dans sa sénescence, s'est dévalué en croyant noyer Léon Degrelle dans sa logorrhée haddockienne (ce blog au 14 avril 2016, mais plutôt que chez Vandromme, l'épigone reprendra le néologisme invectif egotrombinomanie chez Robert de Vroylande, ce blog au 27 octobre 2020) ; de même qu'il salue l'expertise de « l'écrivain Jonathan Littell » qui a « analysé la psyché de la masculinité fasciste » [sic] chez Léon Degrelle dans un obscène follicule scatologique (ce blog au 8 février 2018), et se place sous l'autorité de « chercheurs érudits » comme Eddy De Bruyne dont nous avons illustré les limites sévères de l'érudition (ce blog à partir du 23 mars 2017)... Mais la cerise sur le gâteau, c'est la génuflexion révérencieuse devant l'un des « historiens patentés » à la patente la plus rance de péremption qui soit, Francis Balace himself (ce blog, entre autres, au 12 mars 2019) ! Et de justifier sa prosternation devant le clown Poprof de l'Université de Liège par cette citation propre à déshonorer la recherche universitaire : « Degrelle mémorialiste appartient plus désormais au domaine du psychiatre qu'à celui de l'historien » (p. 18 ; sur les délires balaciens, voir aussi ce blog au 30 juin 2016) !

     

    Dès lors, Fédéric Saenen se fout royalement de notre balle en prétendant déduire on ne sait de quoi la nécessité de sa publication : « Il manquait donc, à l'usage du grand public francophone, une biographie complète de Léon Degrelle » !

     

    Outre que la précision « francophone » est pour le moins incongrue, ce nouvel ouvrage de la cancel culture de l'histoire du rexisme et de la Seconde Guerre mondiale en général et de Léon Degrelle en particulier ne se justifiait donc en rien. Ce qui manque au contraire de manière criante, c'est un ouvrage moderne qui rende justice au fondateur de Rex (dont l'importance historique inquiète manifestement encore), au pourfendeur des banksters (qui sévissent plus que jamais aujourd'hui) et au chantre de la révolution des âmes (toujours indispensable mais rendue héroïque dans une société qui s'ingénie à inverser toutes les valeurs) ; un ouvrage défendant enfin l'honneur de celui qui s'était donné pour mission « de repeindre de neuf chaque cœur délaissé, lassé, souillé, de recomposer une véritable communauté humaine, juste, fraternelle, de ranimer en elle les plus hautes vibrations d'âmes. » (Léon Degrelle : persiste et signe. Interviews recueillies pour la télévision française par Jean-Michel Charlier, p. 55).

     

     

     

    Autoportrait fasciste.jpgLes effets d'Autoportrait d'un fasciste, le « Dossier Noir » consacré à Léon Degrelle par Jean-Michel Charlier, tels que les imagine Alidor.

     

     

    Saenen ose parler de « biographie complète », mais jamais dans ce Prologue de présentation de son bouquin, il ne parle de sa méthode de travail, de son éventuel souci d'objectivité, de l'enquête qu'il aurait menée à charge et à décharge. On ne trouvera pas non plus d'explication de sa démarche qu'il veut manifestement étrangère à celle que s'imposa, par exemple, l'exigeant et irréprochable Jean-Michel Charlier pour la réalisation de son Dossier Noir consacré à Léon Degrelle (Autoportrait d'un fasciste) et jamais diffusé par les télévisions qui l'avaient financé (ce blog au 1er juillet 2017 : les deux liens donnant accès au film que nous avions renseignés ont également été démocratiquement rendus inopérants !) : « mon propos n'était ni de le défendre, ni de le pourfendre, mais de réaliser [...] un travail rigoureusement objectif et honnête. » (Persiste et signe, p. 11).

     

    Frédéric Saenen rejette d'ailleurs explicitement comme inutile, sinon néfaste, la « méthode Charlier » consistant à confronter tous les intéressés aux déclarations de Léon Degrelle afin de garantir une stricte impartialité dans l'information : « cette démarche aurait été peu fructueuse [...] ; qu'aurait d'ailleurs ajouté ce témoin [Fernand Kaisergruber] à son gros volume de souvenirs Nous n'irons pas à Touapse [...] ou aux quelques interviews accordées deux ans avant sa mort [ce blog, entre autres, aux 21 janvier 2017 et 29 mars 2018] ? De même pour les descendants de Degrelle : est-il jamais possible d'obtenir un portrait nuancé de cet homme de la part de celles et ceux qui ne le connurent que comme grand-père raconteur d'anecdotes truculentes ou parent au sombre passé ? Et que compter entendre d'autre de la part de ses admirateurs fanatiques que la régurgitation de sa version canonique des faits ? » (p. 17).

     

    Parmi ces « admirateurs fanatiques », figure sans doute le Cercle des Amis de Léon Degrelle que Frédéric Saenen a l'air de condamner à mort en 2017, ignorant apparemment son indispensable Correspondance privée trimestrielle dont nous rendons pourtant toujours régulièrement compte.

     

    Mais il le sait certainement puisque, juste après avoir parlé du Cercle, il fait à notre blog Dernier Carré Léon Degrelle l'honneur de lui consacrer un paragraphe de quelques lignes. Très probablement devons-nous donc également être englobés parmi les fanatiques régurgitant les canons degrelliens. C'est en effet ainsi qu'il doit considérer notre prétention d'éclairer objectivement, par un travail élémentaire de recherche et d'interprétation contextualisée de tous documents connus ou inédits, la personnalité et la vie de Léon Degrelle.

     

    Voilà qui doit être insupportable au néo-biographe qui entend faire carrière dans le sillage woke des prétendus spécialistes qu'il vient de citer. Aussi ne manquera-t-il pas de nous discréditer en traitant nos commentaires de « mises au point orientées », réduisant notre action à la promotion de « l'abonnement à [notre] bulletin annuel [qui était irrégulier, certes, mais plus ou moins trimestriel] ou la vente d'un calendrier, illustré de photos d'époque » (la verve blessante de Saenen a oublié nos cartes de vœux de Solstice, Noël et Nouvel An : ce blog au 11 décembre 2019 !) et en dénonçant l'anonymat du ou des animateurs de notre blog... Comme si notre ou nos rédacteurs courraient après quelque honneur académique ou reconnaissance officielle pour leur travail désintéressé alors que tous savent que ne pourraient le ou les « récompenser » que dénonciations et lynchage médiatique et autre...

     

     

     

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    Léon Degrelle dans le bureau de sa Cabaña de Fuengirola, rédigeant Le Siècle de Hitler (derrière lui, la Pietà flamande du XVe siècle acquise lors du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, ce blog aux 18 octobre et 26 décembre 2024). « Sous le soleil espagnol, portant chemise claire et veston léger, [Degrelle] déambule avec des allures de vacancier dans les jardins de sa villa andalouse. Quinquagénaire, il pose en sage méditatif, assis à sa massive table de travail, absorbé par la rédaction de ses mémoires » persifle Saenen dans son Prologue (p. 10). Mais qu'attendre des souvenirs de celui dont le balacien prétend écrire la biographie ? « Degrelle s'est beaucoup (trop) raconté » (p. 17) pour lui accorder quelque crédit ! Aussi, y remédiera-t-il en réécrivant au besoin l'histoire.

     

    Par exemple par le sophisme faisant porter à Léon Degrelle la responsabilité de son état d'apatride étranger indésirable en Belgique, imposé par sa condamnation de 1945 et sa prescription toujours ajournée (sans parler de ses innombrables propositions de revenir à Bruxelles pour un véritable procès contradictoire) : « l'incivique apatride choisit après-guerre de se faire naturaliser espagnol, ce qui lui permet d'échapper habilement à la justice de son pays en s'en rendant définitivement étranger » (p. 9).

     

    Par exemple aussi à propos de ses « crimes de guerre » : « il n'a pas été établi qu'il aurait commis personnellement ou ordonné directement des crimes de guerre » (p. 19), mais son nom est cité dans des minutes du procès de Nuremberg, mais « son cautionnement de la répression violente », mais « sa participation à des prises de décision débouchant sur des exécutions », etc. (voir ce blog au 7 juin 2018). Pour Frédéric Saenen, c'est sûr, il n'y a jamais de fumée sans feu !

     

    Discours 11 1992 Torreon.jpg

    Pour noircir systématiquement Léon Degrelle, Saenen, qui se veut aussi pamphlétaire, n'hésite pas à chausser les pantoufles du vieux radoteur Vandromme, essayant d'adopter son outrance paradoxale : « Son talent oratoire n'est pas loin d'évoquer celui des pasteurs évangéliques superstars aux États-Unis, à la nuance près que le Messie dont il proclame l'avènement, ce n'est jamais que lui-même » (p. 11). Au bémol de la nuance près que le sujet des discours de Léon Degrelle ne fut jamais l'avènement de quelque Messie résolvant miraculeusement tout problème, mais au contraire l'indispensable, personnelle et tellement exigeante révolution des âmes permettant seule une authentique régénération nationale et européenne.

    (Ici, discours de Léon Degrelle au restaurant El Torreón del Pardo à Madrid, en novembre 1992, ce blog au 1er décembre 2020 ; sur l'art oratoire de Léon Degrelle, ce blog au 14 mars 2021).

     

     

    En conclusion de son Prologue, Frédéric Saenen se moque encore fameusement de nous en prétendant (et il souligne ces mots) « prendre enfin au sérieux » Léon Degrelle. Car jamais il ne l'écoutera ni n'essaiera même de le comprendre comme le fit Jean-Michel Charlier et entend toujours le faire le Dernier Carré Léon Degrelle.

     

    Prendre au sérieux Léon Degrelle, décrète-t-il, c'est en « déjouer les séductions ». Et se garder soigneusement d'éprouver jamais pour lui la moindre sympathie (p. 20).

     

    Voilà ce que Saenen appelle une biographie « sans a priori »...

     

    Autant que le lecteur soit prévenu et sache à quoi s'attendre.

     

     

    À suivre (peut-être)

     

     

     

     

    Les « crimes de guerre » de Léon Degrelle

     

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    Horreur ! Le lieutenant Léon Degrelle fait le coup de feu contre les bolcheviques sur le Donetz en juin 1942.

     

    Abordant dans son Prologue la question des crimes de guerre de Léon Degrelle, son biographe « sans a priori » écrit d'une manière sibylline propice aux sous-entendus accusateurs : « À cet égard, la question de sa part de “responsabilité du mal” risque d'occuper encore longtemps les historiens. Son nom n'est en effet cité qu'une seule fois dans les minutes du procès de Nuremberg, très précisément dans le document PS-705 reproduisant des notes secrètes du 20 janvier 1943 relatives à une conférence du comité de travail SS sur l'espace germanique tenue le 12 janvier précédent. » Et d'ajouter en note les références de cette trace exceptionnelle –mais d'autant plus importante– de l'implication de Léon Degrelle dans le mal : « Procès des grands criminels de guerre devant le tribunal militaire international : Nuremberg, 14 novembre 1945 - 1er octobre 1946 : [documents et autre matériel de preuve]. Tome 26, Tribunal militaire international, Nuremberg, 1947-1949, p. 264. »

     

    Bigre ! Voilà du sérieux ! Même si le nom de Léon Degrelle n'est cité qu' « une seule fois », c'est quand même « dans les minutes du procès [...] des grands criminels de guerre devant le tribunal militaire international » de Nuremberg ! Ce n'est pas rien ! D'autant qu'elles reproduisent des « notes secrètes » d'une « conférence du comité de travail SS sur l'espace germanique ». Autant dire qu'il s'agissait peut-être de la préparation d'une espèce d'épuration ethnique criminelle ?...

     

    Mais au fait, pourquoi diable Frédéric Saenen épingle-t-il cette mention dans les archives du Tribunal de Nuremberg en lui consacrant pas moins de neuf lignes (cinq dans le texte du Prologue et quatre dans la note de référence) ? Et pourquoi diable, tant qu'il y est et puisqu'il a tout le matériel sous la main, ne nous cite-t-il pas précisément le court passage –trois lignes et demie seulement !– où Léon Degrelle apparaît ? Car on peut tout de même penser qu'excessivement peu nombreux sont ceux qui possèdent l'édition des quarante volumes documentant le Procès de Nuremberg...

     

    Eh bien, on vous le donne en mille, parce que ces fameuses « notes secrètes » avec le nom de Léon Degrelle ne concernent aucunement quelque travail de nettoyage de l'espace germanique par la déportation ou l'assassinat ! Elles ne font que commenter et pas que positivement ! les premières approches effectuées en janvier 1943 par le lieutenant de la Wehrmacht qu'était alors Léon Degrelle auprès de Richard Jungclaus, représentant de Himmler en Belgique, pour rejoindre la Waffen-SS.

     

    Tout cela est parfaitement documenté par Albert De Jonghe un authentique historien celui-là, et même pas degrellien pour un sou !–, dans son étude fouillée sur « La lutte Himmler-Reeder », dans les Cahiers d'Histoire de la Seconde Guerre mondiale de décembre 1978. Il cite très exactement sources et texte du rapport destiné au général Gottlob Berger, chef du Bureau central de la SS (SS-Hauptamt). Nous reproduisons sa note avec une traduction exacte, ne laissant plus de place aux extrapolations orientées de Saenen.

     

    De Jonghe LD Trib. Nuremberg.png

    Procès-verbal de la réunion du Comité SS de la Communauté de travail pour l'Espace germanique, le 12.1.1943, 12h, au SS-Hauptamt (IfZM [Institut für Zeitgeschichte München], PS-705 et NO-1783). On lit dans cette note, concernant Degrelle : « Dans l'évaluation du rapport entre religion et politique, il appert qu'en son for intérieur, Léon Degrelle est un esprit latin... C'est un catholique pratiquant qu'il nous faut prendre avec précaution ; d'autre part, c'est un homme dont nous avons encore absolument besoin politiquement. » Cfr aussi IMT [International Military Tribunal], éd. française, XXVI, p. 264.

     

    Ainsi Frédéric Saenen allume-t-il le feu de ses fumées...


    Ne fût-ce qu'évoquer le travail de vérification effectué par un Jean-Michel Charlier sur l'implication éventuelle de Léon Degrelle dans quelque crime de guerre n'entrait manifestement pas dans la démarche « scientifique » du pseudo-biographe du dernier Commandeur de la Légion Wallonie...

     

    Rappelons-en lui tout de même les conclusions définitives !

     

    « Mon tout premier soin fut de vérifier ce que m'avait solennellement affirmé Léon Degrelle : à savoir que jamais il n'avait été recherché, ni condamné comme criminel de guerre, ni même simplement poursuivi comme tel.

    Je me fis communiquer les listes officielles, établies par les Alliés, les Allemands, les Israéliens, et surtout les Soviétiques, puisque, de 1941 à 1945, Degrelle avait combattu pratiquement sans interruption sur le front de l'Est. Je consultai également les listes établies par Simon Wiesenthal (chasseur antinazi) et recensant tous les criminels nazis responsables de crimes contre l'humanité. Le nom de Degrelle ne figurait sur aucune de ces listes. [...] L'exposé des motifs de sa condamnation à mort ne relève d'ailleurs à son égard aucune accusation de crime de guerre, voire de participation, quelle qu'elle soit, à une quelconque action de représailles.

    [...] Léon Degrelle n'a été condamné à mort que pour avoir porté les armes contre les Alliés de la Belgique et avoir constitué une armée à cet effet. »

    (Léon Degrelle : persiste et signe. Interviews recueillies pour la télévision française par Jean-Michel Charlier, p. 13).

     

    Mais sans doute la place de Jean-Michel Charlier est-elle désormais dans les mêmes fosses d'aisance que celles où Saenen précipite les « fanatiques » régurgitant leurs degrelleries ?

     

    LD Himmler 1943.jpeg

    Y a-t-il pire crime que de parler avec le Reichsführer SS Heinrich Himmler et faire la « une » du mensuel National-Socialisme du 15 juin 1943, date du trente-septième anniversaire de Léon Degrelle ?

     

  • Hélène Cornette, l'amie inconnue de Léon Degrelle

     

    Sous le manteau du Caudillo [5]

     

     

    Bajo el manto.pngDepuis sa publication, nous avons passé pas mal de temps à démonter les carabistouilles présentées comme des faits historiques par le singulier prof d'unif José Luis Rodríguez Jiménez dans son bouquin Bajo el manto del Caudillo Sous le manteau du Caudillo », ce blog à partir du 1er septembre 2024).

     

    Venons-en finalement à la seule information inédite –et encore, pas tout à fait : voir ci-après !– qu'il nous présente, à savoir l'existence d'Hélène Cornette, l'épouse d'un agent secret espagnol sur la tête duquel Léon Degrelle aurait planté d'autres petites cornes.

     

    Mais qui est cette femme dont le nom évocateur ne fut, à notre connaissance, jamais prononcé par qui que ce soit dans l'entourage de Léon Degrelle ?

     

    Hélène Cornette (1908-1999) est une Française qui épousa à Paris, le 13 octobre 1930, Pedro Urraca Rendueles (1904-1989), policier espagnol. Leur fils unique, Jean-Louis, naquit le 27 juillet 1936, très tôt rejeté par son père : « Durant ces mois [de 1939-40], Hélène faisait des allers-retours à Sèvres pour voir sa mère, Jeanne, et son fils Jean-Louis qui vivait quasi en permanence avec sa grand-mère. Son père a toujours voulu éloigner son fils de lui et de sa femme, ou plutôt il n'a jamais voulu de lui. » (p. 25). Le détail du rejet du père est important car il expliquera la présence de l'adolescent chez Léon Degrelle.

     

     

    Gemma Catalan.jpegCe policier doit toute sa (relative) notoriété à son action d'agent secret en France où il parvint à arrêter l'ancien président de la Généralité de Catalogne, Lluis Companys. Celui-ci, lors d'un coup d’État en avril 1934, avait proclamé la république catalane et, après la victoire des nationalistes en 1939, s'était réfugié en France. Livré par Pedro Urraca à la justice espagnole, il fut condamné pour haute trahison et passé par les armes.

     

    Pour en savoir davantage sur ce policier et sa famille et leur rapport avec Léon Degrelle, nous ne nous référerons pas au seul Rodríguez, car ce n'est évidemment pas lui qui a découvert cette relation inédite.

     

    La journaliste catalane Gemma Aguilera a consacré, il y a une douzaine d'années, une biographie à ce policier, Agent 447, L'home que va detenir el president Companys L'Agent 447, l'homme qui a arrêté le président Companys », en catalan en 2011 ; en espagnol en 2013). Dans ce livre, l'apparition de Léon Degrelle relève plutôt de l'anecdote, ce qui la fit sans doute passer inaperçue dans la sphère degrellienne.

     

    L'auteur y dresse ce portrait assez extravagant de Léon Degrelle : « Hélène surprend son mari avec cette proposition : confier Jean-Louis aux mains d'un bon ami à elle afin qu'il le corrige comme il le mérite et qu'il l'oriente vers la carrière militaire. Il s'agit de Léon Degrelle, ex-officier de la Waffen SS condamné à mort pour crimes de guerre et alors protégé par le régime de Franco ; Hélène l'a connu à Madrid en 1946 par des amis communs. Il vit confortablement installé dans un grand domaine, La Carlina, où il s'est fait construire un manoir et quelques résidences annexes qu'il a lui-même conçues. [...] Cet homme, qui mesure 2,03 mètres et est maigre comme un clou, se présente à Jean-Louis comme un héros de guerre, bien qu'il lui ait caché que peu de jours avant la chute de l'Allemagne, il avait déjà abandonné le champ de bataille et s'était enfui loin de la progression du front allié. » (pp. 143-144 de l'édition espagnole).

     

     

     

    Affiche jugement LD Fr+Nl.png   Affiche jugement LD.jpg

     

    Léon Degrelle, « condamné à mort pour crimes de guerre » ? C'est ce qu'il se colporte gratuitement depuis toujours. Rien de plus normal qu'un criminel de guerre soit condamné à mort ! Sauf que Léon Degrelle ne l'a jamais été. Ni criminel de guerre, ni condamné de ce chef, comme le montre le placard affiché le 30 janvier 1945 sur la Grand-Place de Bruxelles : il n'y est aucunement question de quelque crime ou violence à l'égard de civils, de prisonniers ou de blessés, constitutifs de crimes de guerre selon les conventions de Genève.

     

    Léon Degrelle, un homme « qui mesure 2,03 mètres et est maigre comme un clou » ? Même le géant Otto Skorzeny, qui faisait une quinzaine de centimètres de plus que Léon Degrelle, ne mesurait « que » 1,93m (l'avis de recherche lancé par les Alliés en 1945 renseigne une taille de 6 feet 4 inches : ci-dessous à droite). Si Léon Degrelle apparaît beaucoup plus maigre qu'à l'habitude sur la photo prise dans la finca de Majalimar en 1950 en compagnie d'Otto Skorzeny (voir aussi ce blog au 3 décembre 2024), c'est qu'il avait subi, quelque temps auparavant, une grave opération de l'estomac (voir ci-après). D'après le passeport fourni par Alain Delon (ce blog au 19 août 2024), Léon Degrelle mesurait 1,78m.

     

    Sur la protection de Franco, voir ce blog au 31 mars 2021 ; sur l'évasion de Norvège à bord du Heinkel d'Albert Speer, voir ce blog aux 18 juin 2020 et 19 septembre 2024).

     

    LD Skorzeny Carlina.jpg   Wanted Skorzeny 1.jpeg

     

     

     

     

    C'est donc ce bouquin qui permit à Rodríguez d'apprendre que l'épouse du policier qui traqua l'éphémère président de Catalogne, devint une amie du nazi Degrelle. Si le peu scrupuleux historien reconnaît quand même sa dette dans ses Références archivistiques [!], le nom de la journaliste –pourtant bien marquée à gauche aussi– n'apparaît jamais dans l'Index onomastique, ni son livre dans la Bibliographie...

     

    Rodríguez portera évidemment sur ces personnes compromises dans la collaboration franco-allemande et avec le régime franquiste un regard fort négatif, –ce qui n'étonnera personne–, mais qu'il assortira de sa touche personnelle et habituelle : le flou (la mère d'Hélène est peut-être coupable de vol) et la généralisation abusive (le pillage est une habitude chez certains Français et Espagnols) qui font les bons ragots.

     

    Les jeunes gens, Hélène et Pedro, « s'étaient connus trois ans avant [leur mariage] à Biarritz, dans le sud-ouest de la France, pendant les vacances de leurs parents respectifs » (p. 23). Hélène Cornette était la fille d'un premier mariage de sa mère, Jeanne Compveut (Rodríguez qui, on le sait depuis notre premier article –ce blog au 1er septembre 2024–, est un spécialiste de l'onomastique, nous explique qu' « à cette époque, les Français ne portaient que le nom du père » !), qui s'était remariée avec un veuf dont l'entreprise d'accessoires de mode avait fait faillite. Le détail est important pour la mauvaise réputation de la famille car, suite à cette faillite, les ateliers du mari avaient été transformés en appartements, dont l'un était loué à une artiste-peintre juive. Celle-ci aurait été dénoncée par Jeanne et dévalisée grâce à son gendre Pedro Urraca : « Peu après le début de l'Occupation, et avec la complicité de sa fille et de son gendre, Jeanne Compveut se servit de l'ascendance juive de Sachs et de ses amitiés de gauche pour la dénoncer à la police allemande, pénétrer dans son appartement qu'elle louait rue de l'Université et le réserver à son propre usage, après en avoir retiré le mobilier de l'artiste-peintre et, peut-être, avoir volé une partie des objets de valeur que cette dernière n'avait pas pu emporter. La pratique du pillage des biens des personnes en fuite était une habitude chez une partie des Français et du personnel allemand dans la France occupée. C'était la même chose pendant et après la guerre espagnole. Ceci fut la première, mais non la dernière action de pillage commise par Jeanne Compveut et son gendre sur des personnes craignant pour leur vie. Urraca créa un groupe –ou du moins en fit partie– destiné à spolier les familles juives qui tentaient de fuir la persécution nazie. » (p. 27).

     

     

     

    Gemma Espagnol.jpegL'édition catalane du livre de Gemma Aguilera (ci-avant) affiche le portrait de Pedro Urraca en couverture puisque c'est à lui qu'est consacrée cette biographie. Mais la traduction espagnole produit la photographie d'une foule anonyme : il s'agit de personnes regardant le cortège funèbre d'un anarchiste mort dans l'assaut d'une caserne à Barcelone en 1936 : le président de la Généralité de Catalogne, Lluís Companys, est le civil de droite (avec une pochette blanche). Vengeance posthume ourdie par la biographe de Pedro Urraca ? Sa victime lui vole en tout cas la vedette en couverture de sa propre biographie...

     

     

    « L'année 1948 commença très mal pour Urraca et sa famille. Lui-même, son épouse et sa belle-mère avaient été jugés par contumace et la Cour d'Appel de Paris avait rendu son jugement le 5 janvier, condamnant Pedro Urraca à mort pour intelligence avec l'ennemi dans la persécution de Français et lui confisquant tous ses biens. Hélène Cornette fut condamnée à cinq ans de prison, une amende de 100.000 francs, la confiscation de ses biens présents et à venir au bénéfice de la nation et l'indignité nationale, ce qui impliquait la perte de la nationalité, pour commission d'actes nuisibles à la défense nationale, en ce compris l'aide à son époux dans la collaboration avec l'ennemi et sa participation au réseau de persécution d'Espagnols et de Français. [La mère d'Hélène,] Jeanne Compveut [...] fut condamnée pour commission d'actes nuisibles à la défense nationale à deux années de prison, une amende de 100.000 francs et l'indignité nationale. Comme elle ne paya pas son amende, ses deux maisons en France [...] furent confisquées. » (p. 234).

     

    Voilà donc de bien peu recommandables personnages qui seraient entrés dans la vie d'un Léon Degrelle qui, pour avoir subi des préjudices semblables (mais sans avoir jamais été soupçonné d'avoir dépouillé qui que ce soit), ne s'en effarouchera certes pas. Selon Rodríguez, ils sont de toute façon à mettre dans le même sac, même si la Belgique ne pouvait représenter pour Hélène Cornette la même chose que pour Léon Degrelle et que les opinions géopolitiques que lui prête Rodríguez relèvent d'une évidente spéculation : « Ils partageaient un passé semblable, avec le souvenir de la Seconde Guerre mondiale, leurs expériences de vaincus et de condamnés, ainsi que les liens avec la Belgique. Ils partageaient aussi le diagnostic politique sur le danger que représentait l'Union soviétique. » (p. 235).

     

    Mais comment se sont-ils rencontrés ?

     

    Rodríguez va en faire le récit assorti de ses habituelles insinuations malveillantes (notamment quant à l'endroit où Hélène et sa famille auraient caché le produit de leurs brigandages) : « Pendant ces années [d'après-guerre], aussi bien le policier que sa famille conservèrent l'immunité diplomatique et leurs passeports aux fausses identités afin de voyager dans différents pays, y compris peut-être celui où ils avaient déposé une partie de leurs biens d'origine suspecte. Ils se rendraient également à Madrid. Ce sera surtout le cas d'Hélène qui alternait des séjours de plusieurs semaines une ou plusieurs fois par an, parfois seule avec son fils, et d'autres fois avec sa mère pour visiter ou recevoir leurs amis. C'est à cette époque qu'elle connut Pilar Primo de Rivera et Clarita Stauffer et il est fort probable que ce fut cette dernière qui présenta Hélène à Degrelle, entre lesquels se serait développée une histoire d'amour. » (p. 235). Gemma Aguilera n'est guère mieux inspirée en précisant que c'est « Léon Degrelle, ex-officier des Waffen SS condamné à mort pour crimes de guerre et alors protégé par le régime de Franco qu'Hélène connut à Madrid en 1946 grâce à des amis communs. » (p. 143)

     

    Cela nous semble pratiquement impossible car après son évasion de l'Hôpital Mola, le 21 août 1946, Léon Degrelle vécut, grâce au Cuñadisimo Ramón Serrano Suñer (ce blog au 5 août 2023), en sécurité mais strictement enfermé pendant plus d'un an dans une chambre de bonnes, Calle Goya à Madrid, chez un couple de vieux retraités ignorant son identité et ne parlant pas le français. « Le Chef de Rex [...] n'en sortit jamais une fois pendant les mois qu'il y passa. Il ne reçut aucune visite. C'était la claustration totale, car ainsi seulement sa sécurité était assurée. » (Mon Combat, p. 251).

     

     

     

    Nieuwe Standaard 1946.08.27.png   Nieuwe Standaard 1946.08.28.png

    Depuis sa disparition de l'Hôpital Mola de San Sebastián, la presse voit Léon Degrelle n'importe où : qui dans une meule de foin au pays basque (AFP, 23 août 1946), qui sur un bateau argentin (Daily Telegraph, 26 août 1946), qui en Irlande (La Libre Belgique, 6 septembre 1946), en Equateur (Le Monde, 21 septembre 1946), ou au Brésil (AFP, 18 novembre 1946)...

    Reprenant une « information » du Daily Telegraph, le quotidien flamand De Nieuwe Standaard publie une caricature de Léon Degrelle en route vers (ou revenant de) « Beunos Ayres » par le célèbre dessinateur flamand Marc Sleen (auteur de la populaire série Les Aventures de Néron et Cie, publiée dans les quotidiens belges catholiques de gauche Het Volk et La Cité). À gauche, « Le Daily Telegraph communique que, selon un rapport de Madrid, Léon Degrelle se trouve à bord du navire espagnol Monta Ayala de 2.955 tonnes affrété pour Buenos-Aires. Le navire a quitté Bilbao jeudi, jour où fut communiquée la disparition de Degrelle. » (De Nieuwe Standaard, 27 août 1946) ; à droite, l'illustration de Marc Sleen dans De Nieuwe Standaard, le 28 août 1946.

    Les 2 et 10 octobre 1947, La Dernière Heure, reprenant des informations de la presse italienne, révèle que Léon Degrelle serait le chef d'orchestre du Jazzband de l'Hôtel Rivadaria, à San Sebastián (dessin de Marcel Antoine, 1897-1959, chansonnier-dessinateur célèbre avant-guerre pour son personnage de Slache, héros caricatural bruxellois) : le Ministère des Affaires étrangères belge ne manquera pas de diligenter une enquête et son chargé d'affaires à Madrid lui enverra ses conclusions judicieuses : « L'Hôtel Rivadaria n'existe pas. [...] Je suis persuadé que Degrelle ne songerait pas à se produire dans un lieu aussi public qu'un restaurant connu de Saint-Sébastien. »

    DH 1947.10.02 LD chef orchestre.JPG   DH 1947.10.10 LD orchestre Marcel Antoine.JPG

     

     

     

    Ce n'est qu'à la fin de l'année 1947, quand purent s'assouplir ses conditions de vie que Léon Degrelle fit la connaissance de Clara Stauffer, par l'intermédiaire d'amis phalangistes, anciens de la Légion Azul, qui l'aidaient à correspondre avec sa famille de Bruxelles grâce à la valise diplomatique. Très impliquée dans l'aide aux réfugiés allemands pour gagner l'Amérique latine, elle connaît aussi Pierre Daye qui essaie alors de convaincre son ami Léon Degrelle de le rejoindre en Argentine.

     

    Est-ce au même moment qu'une rencontre avec Hélène Cornette eut lieu ? Nous en doutons également car, d'une part, Léon Degrelle envisageant sérieusement de s'installer à Buenos Aires ne développe alors de vie sociale qu'utile et profitable, évitant tout comportement imprudent ou périlleux. D'autre part, depuis mai 1946, Hélène Cornette et toute sa famille (mari, fils, mère) habitent, comme le souligne Gemma Aguilera, un appartement à Bruxelles et, par ailleurs, tout au long de l'année 1947, elle « accompagne son mari dans tous ses voyages en Hollande, au Luxembourg et en Suisse, alors que sa mère et le petit Jean-Louis poursuivent une vie normale dans la capitale. » (p. 128-129).

     

    L'année 1948 est, nous l'avons vu, celle où le couple fut lourdement condamné par la justice française et Pedro Urraca, promu inspecteur de première classe travaille alors au consulat général d'Espagne à Anvers et Bruxelles, chargé de la surveillance du Parti communiste espagnol en exil. Un poste qui le confine dans la sécurité des locaux de l'ambassade.

     

    Quant à Léon Degrelle, 1948 lui fut également une année des plus pénibles : il vit caché à Torremolinos dans un isolement quasi complet et apprend la mort en prison de son père et de son beau-frère Charles Raty. Sa blessure au ventre provoquée par l'explosion d'un obus sur le front du Caucase en 1942 s'infecte à nouveau, provoquant des hémorragies internes qui nécessitent une opération d'urgence. Elle se pratiquera en septembre, suivie d'une longue convalescence où il perdra une trentaine de kilos (une nouvelle opération chirurgicale sera nécessaire en octobre 1950).

     

    Ce n'est qu'au printemps 1949 que, grâce à son ami le ministre du Travail José Antonio Girón, il pourra trouver un logement sûr dans la grande finca sévillane de Majalimar où il demeurera jusqu'en 1954. Il y écrira son grand récit autobiographique Mon Combat (voir ci-avant), le poème Les Îles blanches resté inédit, le roman La Grande Bagarre (ce blog au 26 mai 2016) et Les Âmes qui brûlent, ouvrage, selon son traducteur espagnol, l'éminent académicien Gregorio Marañon, « étincelant comme une flamme, [...] d'une beauté impossible à surpasser », ce blog au 24 janvier 2023). C'est également de Majalimar qu'il se lancera dans ses premières affaires commerciales et industrielles (ce blog au 3 décembre 2024) lui permettant d'acquérir en 1952 un ancien vignoble dans le village de Constantina et d'y construire son vaste domaine de La Carlina où il emménagera définitivement en avril 1954, à la mort du propriétaire de Majalimar, emporté par un cancer de l'estomac.

     

     

     

    Majalimar Entrée Finca.jpg

    Majalimar Pavillon LD 1949a.jpg

    Au-dessus, l'entrée principale de la finca Majalimar (photographie contemporaine) ; au-dessous, le pavillon où résida Léon Degrelle de 1949 à 1954. Ce vaste domaine agricole de 1200 ha appartenait au plus important industriel lainier de la région de Salamanque, Leandro Cascón Pablos (1883-1954), ami proche du ministre du Travail José Antonio Girón. Le pavillon occupé par Léon Degrelle, construit sur un promontoire dominant la finca, était protégé par une vaste clôture de fer forgé. L'entrée, décorée par des azulejos religieux, exprime le fervent catholicisme du propriétaire qui, tout comme Léon Degrelle (ce blog aux 2 septembre 2023 et 18 octobre 2024), effectuait fréquemment des pèlerinages, notamment en Terre Sainte. La faïence placée à droite de la porte de chêne ouvragé sous le portique d'entrée invoque la Vierge (« Ave Maria »). Au-dessus, un azulejo plus grand représentant le Christ qui désigne son cœur marqué par les stigmates de la Passion place l'habitation sous la protection du Sacré-Cœur : « Je bénirai les maisons où l'image de mon cœur sera exposée et adorée. Les personnes qui propagent cette dévotion auront leur nom gravé dans mon cœur et il n'en sera jamais effacé. »

    La tradition de consacrer sa demeure au Sacré-Cœur de Jésus remonte aux visions de Marguerite-Marie Alacoque qui, au XVIIe siècle, se vit chargée de propager le culte du Sacré-Cœur, ainsi qu'à l'institution officielle de sa fête par le pape Pie IX, deux siècles plus tard. Cette dévotion connaîtra un regain de popularité lors du Congrès eucharistique de Lourdes en août 1914 liant son culte à l'établissement de la royauté du Christ dans le monde. Comment le défenseur des Cristeros (ce blog, entre autres, au 7 février 2019), fondateur du mouvement Rex prêchant la révolution des âmes en l'honneur du Christ-Roi, n'y aurait-il pas été sensible ?

    Ci-dessous, à gauche, l'entrée du pavillon de Léon Degrelle (photographie contemporaine) ; à droite, Léon Degrelle amaigri par ses graves opérations de 1948 et 1950.

     

    Majalimar Pavillon LD Entrée1.jpg   Majalimar LD amaigri 1.jpg

     

     

     

    À suivre

     

     

  • Quoi de neuf ? Léon Degrelle !

     

     

    Notre blog l'illustre à suffisance : Léon Degrelle fait l'actualité quasi en permanence. Deux gros volumes le concernant viennent encore de voir le jour.

     

    Rex ter zege !

     

    Le premier, écrit en néerlandais par Bruno Cheyns, est sorti à la fin de l'année dernière et s'attache à l'histoire de Rex en Flandre : Rex ter zege Rex vaincra, Léon Degrelle et Rex en Flandre, 1935-1945 »).

     

    Rex ter zege.jpeg

     

    Nous connaissons Bruno Cheyns pour sa biographie de Léon Degrelle, la première en néerlandais, Léon Degrelle, de Führer uit Bouillon  Léon Degrelle, le Führer qui venait de Bouillon », ce blog aux 10 décembre 2017 et 5 janvier 2018). Il s'attache cette fois à l'histoire de l'aile flamande du mouvement Rex.

     

    C'est par un article de l'hebdomadaire national-linguistique 't Pallieterke (ce blog, entre autres, au 23 février 2020) que nous avons eu connaissance de cette publication. En 2017, Bruno Cheyns nous avait invité à la présentation de son premier ouvrage, mais la réception (sans doute trop) critique que nous lui réservâmes nous a, cette fois, valu la punition d'être écarté des petits fours !

     

    Trève de plaisanteries (de plus, cette présentation se faisant en compagnie de la pythie imbuvable du Cegesoma Chantal Kesteloot –ce blog au 12 octobre 2023–, aucun regret donc !) : si la bibliographie concernant Léon Degrelle et son mouvement Rex en général est abondante, il n'existe par contre aucune étude particulière sur Rex-Vlaanderen. Et en cela, Bruno Cheyns fait certainement œuvre de pionnier.

     

    Lancement-Rex-ter-Zege.jpg

     

    Nous n'avons pas encore eu l'occasion de lire convenablement son volumineux ouvrage (quelque cinq cents pages !), mais nous épinglerons de son interview ces éléments quelque peu interpellants, en ce sens qu'ils illustrent l'éclairage biaisé qui, à nouveau, semble apporté à son étude.

     

    Selon l'hebdomadaire, l'auteur écrit dans son bouquin qu'aujourd'hui encore, on fait de la politique de « manière rexiste ». Et Bruno Cheyns de s'expliquer pour le Pallieterke.

     

    « Il est toujours tentant d'établir des parallèles, tellement il y en a. Mais nous devons être très prudents. Nous ne pouvons, par exemple, pas vraiment comparer la réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis à l'émergence du rexisme ou du communisme [sic !] dans les années 1930. Et pourtant, nous constatons toujours le même parcours : on parvient à capter le mécontentement social, il s'ensuit un bref succès électoral et après quelques années tout s'écroule comme un château de cartes, car il y aura toujours quelqu'un d'autre qui surgira pour mieux capter encore les frustrations.

    Le populisme n'est jamais durable. Et ça, Donald Trump l'a aussi compris. Il essaie de mettre sur pied un mouvement « Make Amerika Great Again » (MAGA) pour pérenniser son succès électoral. C'est la seule façon qui permette à ce genre de partis et de politiciens de pouvoir devenir un facteur d'importance à long terme. Rex n'y est jamais parvenu, le VNV un peu mieux. Pourquoi ? Parce que le VNV avait une base programmatique spécifique : la problématique flamande. Rex n'avait pas cette base. [...]

    De plus, nous constatons que les partis politiques négligent souvent délibérément l'aspect substantiel afin de capter autant que possible le mécontentement existant. C'est aussi ce que fit Rex à l'époque. Le parti a rarement adopté une position claire, car choisir, c'est tout simplement perdre. C'est aussi ce que nous voyons aujourd'hui : on fait rarement encore des choix clairs. C'est la meilleure façon de faire plaisir à tout le monde. La politique s'est adaptée à la nature volatile de l'électeur. La politique opte pour des programmes faciles à digérer. C'est un des côtés pervers de notre système démocratique. Une partie non négligeable de l'électorat est à la recherche de solutions faciles à des problèmes souvent très complexes.

    Dans les années 1930 aussi, nous avons constaté une infantilisation de la politique. Rex était le parti des solutions faciles. Il ne fallait surtout pas gratter trop profondément dans le programme. On verrait bien ce qui allait arriver. C'était d'ailleurs littéralement les termes de Degrelle : Nous verrons bien comment nous voterons. Je préciserai bien comment mes parlementaires voteront. La conséquence fut qu'aucun choix ne fut fait. À court terme, c'est pratique, mais au fil du temps, les électeurs perdent leurs illusions. C'est ce qui est arrivé chez Rex. Les partis aux programmes superficiels ne peuvent jamais satisfaire tous leurs électeurs. »

     

     

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    Bruno Cheyns au journal flamand 't Pallieterke : « En Flandre, nombreux furent les rexistes à rejoindre la résistance. » Son livre Rex ter zege s'ouvre d'ailleurs sur le récit du destin tragique du « rexiste » résistant Hubert d'Ydewalle qui, prisonnier en Allemagne, sera gravement blessé dans un bombardement allié et mourra dans d'atroces conditions dans un train de prisonniers évacués. Sauf que dès après les élections de 1937, Hubert d'Ydewalle avait rompu avec le rexisme. « D'Ydewalle voyait Rex dégénérer progressivement en une bande de profiteurs et d'opportunistes et se sentait trahi », analyse Bruno Cheyns.

    Selon Lionel Balland, dans un article biographique sur l'aristocrate flamand, il y a lieu d'être plus nuancé : « En juin 1937, Hubert d’Ydewalle quitte sa fonction de rédacteur en chef de l’organe de presse Le Pays Réel et celle de membre du Conseil politique de Rex pour diverses raisons : les fonds envoyés par le régime italien à Rex, le fossé entre Rex et le cardinal de Belgique [ce blog aux 8 avril 2017 et 13 mai 2018] et la personnalité de certains dirigeants de ce parti. [...] Des rexistes accusent d’Ydewalle d’avoir été contraint de laisser tomber Rex afin de sauver le futur héritage que son couple recevra de ses beaux-parents. » En effet, « À la suite des résultats des élections législatives du 24 mai 1936 qui voient la percée de Rex, la femme d’Hubert d’Ydewalle est menacée par son père, cadre du parti catholique, d’être déshéritée si Hubert ne rompt pas avec Rex »...

     

     

    Ainsi l'oracle Cheyns lance-t-il ses condamnations péremptoires associant, pour le discréditer, Trump au rexisme, réduisant son action et celle de Léon Degrelle à du « populisme » sans avenir et dénonçant l'absence de substance dans leur programme. Et de prophétiser d'ailleurs leur écroulement « comme un château de cartes »... À cela près que tout ce qu'il raconte du populisme nous semble tout autant si pas davantage adapté à la démagogie des partis traditionnels qu'au rexisme !

     

    Le richissime entrepreneur Donald Trump est avant tout un homme d'affaires qui veut urgemment rendre la prospérité à son pays en tranchant dans le vif pour l'immigration, les théories criminelles du genre, l'imposture climatique, les guerres inutiles, etc. En un mois, le bon sens est revenu au cœur de la gouvernance et des (bonnes) affaires aux États-Unis.

     

    Le tribun idéaliste Léon Degrelle voyait infiniment plus loin que les indispensables réformes matérielles. C'est la révolution des âmes qu'il entendait insuffler à ses compatriotes (mais pour Bruno Cheyns, ce ne sont là sans doute que des paroles en l'air) : « je m'étais dit, en voyant l'espèce de rébellion parfaitement normale du peuple, qu'il s'agirait de dégager celui-ci de l'égoïsme et du matérialisme, non pas en s'acharnant à promettre plus que Marx, qu'Engels, que Lénine, mais en essayant de repeindre de neuf chaque cœur délaissé, lassé, souillé, de recomposer une véritable communauté humaine, juste, fraternelle, de ranimer en elle les plus hautes vibrations d'âmes. » (Persiste et signe, p. 55).

     

    Cette profession de foi guidant son action dut naturellement être au cœur de la conversation impromptue entre Léon Degrelle, tout auréolé du triomphe électoral rexiste du 24 mai 1936, et Adolf Hitler. Apprenant sa présence à Berlin le 26 septembre, le Führer le fit en effet venir à la Chancellerie afin de jauger le discernement, le caractère, le cœur du jeune tribun.

     

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    Ce fut une « entrevue foudroyante ». Après avoir écouté « avec émotion ce jeune homme qui parlait avec passion de la grandeur du peuple auquel il appartenait », Adolf Hitler confia à son ministre des Affaires étrangères Joachim von Ribbentrop : « Je n'ai jamais vu de tels dons chez un jeune homme de cet âge » (ce blog aux 12 mai 2016 et 21 juin 2018).

     

    Léon Degrelle, quant à lui, entrait en communion avec « l'homme qui avait su redresser son pays, le sauver du chaos, de l'anarchie, de la misère, lui rendre une âme, une religion, une mission ». Rencontre qui se révéla décisive pour le reste de sa vie : « cette interprénétration instinctive, insaisissable pour le commun des mortels, nous a liés pour toujours sur le plan humain le plus haut. » (Persiste et signe, p. 181 ; sur les relations Léon Degrelle-Adolf Hitler, voir ce blog, entre autres, au 20 juillet 2018).

     

    Ce que Cheyns appelle « populisme », –en l'occurrence, un régime qui abandonne l'étalon-or pour l'étalon-travail, restaure la communauté nationale par la collaboration des classes, stimule chacun au service du bien commun, refonde un socialisme national–, et inévitablement destiné, selon lui, à l'effondrement « comme un château de cartes », produisit un empire populaire qui ne fut anéanti qu'au prix d'une effroyable guerre mondiale, emportant en même temps la promesse du renouveau bourguignon.

     

    Aujourd'hui, pour en parler, il semblerait qu'il faille s'aligner sur l'histoire officielle. Le site flamand Doorbraak a ainsi publié une recension de Rex ter zege par l'historien prolifique Pieterjan Verstraete qui, après avoir décrit le « panier de crabes » de Rex-Vlaanderen (« Degrelle [...] n'a cessé d'insulter ses partisans ») évoque la décomposition du mouvement dans toutes les directions, la collaboration (DeVlag, avec Jef Van de Wiele) comme la résistance (Armée secrète)...

     

    Beaucoup plus intéressante est l'interview publiée (en français) par Lionel Balland sur le site EuroLibertés.

     

    Cheyns EuroLibertés.png

     

    Lionel Balland, spécialiste des mouvements nationalistes, est l'animateur infatigable du blog éponyme commentant « L'actualité des partis patriotiques en Europe » ; il est également l'auteur de l'indispensable Léon Degrelle et la presse rexiste.

     

    Est-ce la précision des questions posées ou la personnalité de l'interviewer, mais Bruno Cheyns répond de manière moins expéditive et beaucoup plus judicieuse que dans le journal flamand, même si nous ne partageons pas les présupposés antiflamands qu'il prête à Léon Degrelle (sur le « sentiment flamand » de celui-ci, voir ce blog au 10 juin 2016). Ne reproduisons donc ici que l'opinion de Bruno Cheyns, plus pertinente, sur la différence de traitement de la collaboration en Flandre et en Wallonie, expliquant certainement l'absence d'opposition nationaliste crédible dans la partie francophone de la Belgique.

     

    Si, après la IIe Guerre mondiale, la collaboration était mal vue, tant en Flandre qu’en Belgique francophone, au fil des années, la situation a semblé évoluer différemment en Flandre. Comment expliquez-vous cela ?

    La collaboration et la répression ont causé un traumatisme historique dans les deux parties du pays. Celui-ci y a, cependant, été traité d’une manière différente. Alors que le processus de remise en cause avait déjà commencé en Flandre au cours des premières décennies qui ont suivi la IIe Guerre mondiale, en Belgique francophone, il n’était tout simplement pas question d’aborder le sujet de la collaboration. Cela a créé la perception erronée que, en Belgique, il y avait principalement une coopération avec les Allemands du côté flamand, tandis que la Résistance s’était développée en Wallonie et à Bruxelles. En Flandre, la collaboration a été remise à l’ordre du jour politique par les nationalistes flamands dès les années 1950, de sorte qu’il y avait aussi beaucoup d’intérêt dans les cercles universitaires à dépouiller la collaboration de toute émotion et à la comprendre d’une manière plus scientifique. Cela a progressivement créé une image plus nuancée de la collaboration, ce qui a finalement également profité au processus de gestion du passé. En Wallonie, la collaboration a été presque complètement étouffée, d’abord par honte, mais peu à peu aussi pour des raisons politiques. La plupart des partis politiques wallons craignaient qu’une attitude plus nuancée à l’égard de la collaboration ne puisse à nouveau faire le lit de « l’extrême-droite ». Il était donc dans leur intérêt de maintenir en vie l’épouvantail, ce qui a très bien fonctionné. À ce jour, la Wallonie est l’une des seules régions d’Europe occidentale où l’ « extrême droite » n’a tout simplement aucune possibilité de percer.

     

     

    Une biographie « grand public »

     

    C'est un fidèle lecteur, M. Thibaut B., qui nous a prévenu de la publication d'une nouvelle biogaphie de Léon Degrelle, en nous fournissant le lien vers l'éditeur parisien Perrin.

     

    Degrelle Perrin.png

     

    Le texte de présentation se place résolument sous le même genre de calembour, –fiente de l'esprit qui vole selon Victor Hugo–, que le titre du film de Philippe Dutilleul (Léon Degrelle ou la Führer de vivre), Führex se voulant évidemment une variante explicative (mais appauvrie !) du sobriquet Fourex dont ses ennemis avaient affublé Léon Degrelle après la percée de Rex aux élections de 1936.

     

     

    Fourex Drapeau rouge 15.08.1936.png

    Le Drapeau rouge, 15 août 1936.

     

     

    L'annonce éditoriale se poursuit en prétendant publier la « première biographie grand public » du chef de Rex et dernier commandeur de la Légion Wallonie.

     

    Qu'est-ce que cela signifie ?

     

    Que les essais de Jean-Marie Frérotte (Le dernier fasciste), Arnaud de la Croix (Degrelle 1906-1994) ou Francis Bergeron (ce blog à partir du 30 avril 2016) sont réservés aux docteurs ès Lettres ou que les méchancetés de Charles d'Ydewalle (La triple imposture), Pol Vandromme (Le loup au cou de chien) ou Marc Magain (Un tigre de papier) ne valent rien ou pas grand-chose (nous serions là plutôt d'accord !), de même que les menteries des historiens stipendiés à la Collignon, Conway et De Bruyne  ? En tout état de cause, –et pour s'en tenir aux ouvrages publiés après la Deuxième Guerre mondiale–, la première véritable biographie grand public de Léon Degrelle est et reste –toujours aisément accessible sur le marché du livre d'occasion– le Degrelle m'a dit..., signé par Louise Narvaez, Duchesse de Valence.

     

    L'éditeur prétend surtout que cette nouvelle biographie constitue un portrait « sans a priori et sans complaisance », ce qui, tout compte fait, ne devrait normalement qu'être le propre de tout travail de recherche pour un historien consciencieux. Parlant de Léon Degrelle, il met néanmoins « ami de Tintin » entre des guillemets désapprobateurs et évoque un « partisan du négationniste Faurisson », évitant le terme plus adéquat de révisionniste...

     

    On nous a présenté l'auteur, Frédéric Saenen, comme un célinien doublé d'un spécialiste de Drieu La Rochelle. C'est sans doute vrai et nous sommes probablement bien coupable de n'avoir jamais eu la curiosité de le connaître. Ce sera bientôt chose faite...

     

     

     

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    Le mensuel Historia daté de mars 2025 présente déjà l'ouvrage de Frédéric Saenen qu'il a probablement reçu en service de presse anticipé. Si tout ce qui est écrit là se retrouve effectivement dans le livre, ce n'est plus d'une « biographie grand public » que nous devrons parler, mais d'un énième opus politiquement correct ressortissant au bourrage de crânes obligatoire depuis la fin de la guerre...

     

     

    Attendons donc de voir, car la parution était annoncée pour le 20 février, mais notre petit libraire chez qui nous voulons garder nos habitudes ne nous l'a promis que pour cette fin de semaine.

     

     

    Je ne regrette rien

     

    Terminons par une note toute positive, avec ce petit livre nullement consacré à Léon Degrelle, mais écrit par un ami qui a déjà eu mille vies –dont nous pûmes partager une infime partie !

     

    Sous le titre « légionnaire » Je ne regrette rien, Francis Dossogne vient en effet de publier quelques séquences du film de sa vie.

     

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    L'auteur est bien connu des dénonciateurs compulsifs de l' « extrême droite » pour avoir compté parmi les fondateurs du Front de la Jeunesse (et aussi avoir été condamné, avec trois ou quatre autres supposés malfaiteurs –et néanmoins loyaux compagnons–, pour appartenir à un prétendu « noyau dur » de milice privée non autrement défini), avoir été journaliste au Nouvel Europe-Magazine, avoir représenté notre pays dans les réunions de l'Eurodroite (ce blog au 5 août 2023), etc.

     

    Mais cela ne constituera qu'une toute petite partie des multiples événements auxquels sa vie ultérieure de détective-baroudeur l'auront mêlé et dont il ne nous dira que ce qu'il nous sera permis de savoir.

     

    Le livre donne parfois l'impression de n'avoir pas été rigoureusement relu et sa concision laisse souvent le lecteur sur sa faim. Mais cette brièveté incisive aiguise toujours la curiosité, nous refusant la tentation d'abandonner la lecture avant d'avoir tourné la dernière page !

     

    Parmi les innombrables rencontres exceptionnelles jalonnant sa vie, il en est une que Francis n'oubliera certainement jamais et qu'il souligne dans ses souvenirs, c'est l'entrevue pétillante d'esprit et stimulante d'énergie avec Léon Degrelle. Le toujours flamboyant banni de Belgique accueillait volontiers ses jeunes compatriotes, surtout si comme lui, ils rayonnaient de foi et d'idéal.

     

    « Dans le mensuel [Nouvel Europe-Magazine], des textes de Léon Degrelle, de Giorgio Almirante et de Robert Brasillach avaient été, entre autres, fréquemment publiés qui faisaient écho à nos thèses et venaient sensiblement les soutenir et les exalter.

    Je me souvenais avec grande émotion de la Campagne de Russie, livre du premier auteur cité, qui avait été une référence pour nous tous en ce qu'il nous racontait son engagement dans la Légion Wallonie pour combattre le bolchevisme. Dans ma tête flottait cette description de paysage :

    Ces grands étangs étaient peuplés de milliers de joncs, pareils à des lances, hauts de trois mètres, surmontés de plumets bruns et roses... Le gel avait étreint les campagnes...

    J'avais aussi eu l'occasion de le rencontrer, en Espagne, alors qu'il était en exil loin de la Belgique. Un personnage qui m'était alors apparu bien plus grand que Napoléon dont l'homme politique avait d'ailleurs relativisé les victoires en disant qu'elles n'avaient duré que quelques journées...

    Il avait ajouté :

    – Bien peu de choses tout compte fait ! En gesticulant de tout son corps comme pris dans une transe. » (p. 77-78).

     

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  • Léon Degrelle, le « dictateur des cours de récréation » ?

     

    Bertrand de Jouvenel, revu par Robert Brasillach

     

     

    Récemment, nous démasquions une nouvelle fois la malhonnêteté du SoirMag qui republiait des fragments du Degrelle m'a dit de la Duchesse de Valence traficotés par feu Pierre Stéphany (ce blog au 4 février 2025).

     

    Nous dénoncions la malveillante citation « un dictateur pour cour de récréation”, comme devait dire Bertrand de Jouvenel, qui l'interviewa en 1936 », contrefaisant le texte original de la Duchesse rouge : « un article de Bertrand de Jouvenel, dépeignant Degrelle en 1936 avec une grande sympathie, écrivant qu'il avait dû, au collège, être un dictateur des cours de récréation. » Car, en effet, le dictateur pour cour de récréation (un pauvre chefaillon cherchant à terroriser ses condisciples), n'est pas celui des cours de récréation (exerçant son ascendant tout de séduction sur ses camarades).

     

    Nous insistions sur le fait que cette citation n'était connue que par la brochure de Robert Brasillach, Léon Degrelle et l'avenir de “Rex”, rappelant que Bertrand de Jouvenel « déclarait trouver en Léon Degrelle comme un souvenir du dictateur des cours de récréation qu'il avait dû être » et expliquant qu'il ne fallait pas prendre l'expression de manière négative car elle « met bien l'accent sur la jeunesse extraordinaire de [Rex] et sur la vertu de cette jeunesse. » Nous ajoutions enfin que, malgré toutes nos recherches, nous n'étions pas parvenu à retrouver « le journal parisien où a paru l'article de Bertrand de Jouvenel ».

     

    1 LD L'Assaut 20.10.1936 a.pngVoilà une quête désormais achevée, grâce à l'amitié de notre fidèle lecteur T.V., passionné d'Histoire, aux riches collections minutieusement cataloguées (ce blog au 23 janvier 2021), et qui a eu l'extrême gentillesse de nous envoyer cet article de Bertrand de Jouvenel, si important pour tous ceux qui évoquent –en bien comme en mal– la jeunesse de Léon Degrelle, mais jusqu'ici parfaitement introuvable !

     

    Cet article s'intitule L'expérience Van Zeeland et le coup de foudre Degrelle et a paru dans l'hebdomadaire français L'Assaut, le 20 octobre 1936, en septième page (mais l'article était annoncé en « une »).

     

    Ce L'Assaut n'est bien sûr pas à confondre avec son homonyme belge, Hebdomadaire de Combat de la Jeunesse, également intitulé L'Assaut donc –les runes de la SS figurant les deux « S » du titre–, et édité par le Prévôt et futur Hauptscharführer Pierre Mezetta, pour sa Jeunesse Légionnaire, à partir de mai 1944.

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    Quelque huit ans auparavant, L'Assaut parisien, sous-titré Hebdomadaire de Combat politique et littéraire, se voulait « un journal libre », « inféodé à aucun chef politique, à aucun parti, à aucun groupement d'intérêts » (éditorial du n° 1, 13 octobre 1936).

     

    Imprimé par Robert Denoël, l'éditeur belgo-parisien de Céline, et domicilié à son siège social, L'Assaut était dirigé par l'écrivain Alfred Fabre-Luce, alors sympathisant du Parti Populaire Français de Jacques Doriot. Il connaîtra trente-quatre numéros, du 13 octobre 1936 au 8 juin 1937, avant d'être absorbé par le quotidien La Liberté, appartenant à Jacques Doriot (où continueront d'écrire Fabre-Luce et Jouvenel, mais aussi Georges Suarez, Georges Blond, Pierre Drieu La Rochelle,...).

     

    4 L'Assaut 13.10.1936'.png

     

    Bertrand de Jouvenel dresse donc ce portrait de Léon Degrelle dans le second numéro de L'Assaut  : « Il faut se représenter Degrelle comme un étudiant. Un étudiant qui grimpe sur les épaules d'une statue et harangue ses camarades. Eux l'applaudissent en riant. Parce qu'il a de l'ardeur, parce qu'il a du cran, parce qu'il a de la gaîté, parce qu'il est ce que tous voudraient être.

    Il est comme tout le monde”. Dans un groupe de ses partisans, on ne le distingue pas. Mais il est comme personne, parce que le groupe où il se trouve est soudain animé et joyeux.

    C'est un don. Au lycée, à l'Université, nous avons connu les meneurs : on se disputait les places proches de la sienne. [...]

    D'ordinaire, ce pouvoir mystérieux, qui fait les dictateurs de la cour du lycée, s'évapore. Le garçon qu'on a jadis idolâtré, on le retrouve éteint, terni, endormi dans une position subalterne. Degrelle, lui, a compris la valeur de ce pouvoir. Il en a recherché les causes. Il a étudié les moyens de le développer et de le maintenir.

    Degrelle, m'a-t-on dit, ne sait rien. Il est possible qu'il ne soit pas fort en économie politique. [...]

    Mais Degrelle, en tout cas, sait ce que les autres ne savent pas. Que la vie publique ne comporte pas seulement des rapports d'affaires entre le gérant et les administrés. Mais aussi des rapports d'amour.

    C'est un séducteur naturel, capable d'analyser le mécanisme de la séduction. Jusqu'où va l'amour qu'il inspire, un détail vraiment cocasse le montrera. Lorsqu'il a fait un de ses grands discours, Degrelle est en nage, et il change de chemise. La chemise quittée, il arrive qu'elle soit coupée en morceaux par ses partisans, qui veulent chacun son souvenir ! »

     

     

     

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    Portrait de Léon Degrelle par Sid, le caricaturiste maison, illustrant l'article de Bertrand de Jouvenel. Ci-dessous, un autre dessin pour le même article, montre deux messieurs au bar du Rendez-vous des Belges : ils se sont détournés de la République française (appelée la Gueuse par les monarchistes) pour consommer une « gueuse lambic » (encore que la bière bruxelloise s'écrive avec un « z » !) ...

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    La première chose que nous constaterons, c'est qu'il n'est nulle part fait mention de « cour de récréation », mais, en l'occurrence, des « dictateurs de la cour du lycée ».

     

    Ce qui veut dire que malgré ses allures d'enquêteur sur sources de première main, la référence du SoirMag, feu Pierre Stéphany, n'est en aucun cas « Bertrand de Jouvenel, qui l'interviewa [Léon Degrelle] en 1936 » ! Comme tous les contempteurs de Léon Degrelle –à l'instar du méchant folliculaire Pol Vandromme (ce blog aux 4 février 2025 et 14 avril 2016)–, il n'a que traficoté le texte rapporté par Robert Brasillach dans son ouvrage Léon Degrelle et l'avenir de “Rex”.

     

    Comme nous l'avons montré dans notre article précédent, c'est effectivement le journaliste de Je suis partout qui a rapporté les impressions de Bertrand de Jouvenel sur le jeune Léon Degrelle. Impressions toutes positives («  Au lycée, à l'Université, nous avons connu les meneurs : on se disputait les places proches de la sienne ») que Brasillach développera ainsi : « Bertrand de Jouvenel évoquait un jour ces garçons autour de qui, dans les lycées et les collèges, on se range naturellement, qui font la loi dans la classe, que l'on aime et que l'on admire. » (p. 14).

     

    C'est la phrase suivante de Jouvenel (« D'ordinaire, ce pouvoir mystérieux, qui fait les dictateurs de la cour du lycée, s'évapore ») que l'auteur de L'avenir de Rex va paraphraser en utilisant une formule qui permettra malheureusement le contresens médisant : « Et, bien que la plupart du temps, ces admirations ne survivent pas à l'âge d'homme, il déclarait trouver en Léon Degrelle comme un souvenir du “dictateur des cours de récréation” qu'il avait dû être. » (p. 14).

     

    On le voit, les guillemets utilisés ici ne concernent pas une citation, mais ressortissent plus exactement à la mise en relief de quelques mots. Et comme nul n'a jamais eu accès à l'original de L'Assaut, chacun a cru pouvoir mettre l'expression sous la plume de Jouvenel, tout en se permettant, bien sûr, de l'adapter à ses intentions malhonnêtes. Personne ne pouvant imaginer, bien sûr, que si Robert Brasillach n'utilisait pas les termes précis de son confrère, c'est qu'il le citait de mémoire (en se trompant ?)... ou qu'il voulait plutôt souligner l'originalité de sa propre expression.

     

    Mais où Bertrand de Jouvenel alla-t-il chercher que Léon Degrelle disposait de « ce pouvoir mystérieux, qui fait les dictateurs de la cour du lycée », pouvoir qui, contrairement à l'habitude, ne s'évapora point ? De ses conversations avec le chef de Rex ? Nous ne le croyons pas, à lire la réaction de celui-ci sur ce qu'on a raconté de sa scolarité (voir ci-après). Nous pensons que ces renseignements lui ont plutôt été fournis par des familiers, tel le nouveau député rexiste Usmard Legros, lui-même en train de préparer sa biographie Un homme... un chef.

     

     

     

    7 Usmard Legros PR 01.07.1936.jpgLe nouveau député de Rex, Usmard Legros sur les marches du Parlement belge (Le Pays réel, 1er juillet 1936). Il publiera en 1938 Un homme... un chef. Léon Degrelle, la première biographie du chef de Rex éditée en Belgique.

     

     

    Nous y lirons en effet ce portrait : « La pension, si elle lui est supportable, le change pourtant beaucoup. [...] Sa volonté décidée toujours tendue, son initiative continuelle étonnent ses professeurs et ses condisciples [...], car ils sont déconcertés par son caractère si entier. Élève espiègle, vif, spirituel, il agace parfois et fascine toujours par sa facilité et son abondance littéraires. [...] Voici la Poésie et la Rhétorique qui sont bien faites pour l'épanouissement des jeunes talents ! L'élève qui ne s'y révèle pas reste souvent toute sa vie un médiocre. Léon Degrelle s'impose de plus en plus dans la littérature qui l'attire. » (pp. 42-43).

     

    Bertrand de Jouvenel n'a bien sûr alors pas encore pu lire cette biographie, mais il a pu apprendre que dès ses études secondaires, Léon Degrelle, « ce gaillard débordant de santé et d'optimisme », a fasciné et séduit. Usmard Legros rapportera également cette querelle marquant l'autorité de l'adolescent s'imposant dans la cour de récréation : « un incident de récréation assez grave, marqua son entrée chez les Jésuites. Trop bouillant ou trop provincial on ne sait, il se prit de querelle avec un jeune pédant qui, au réfectoire, se servait d'un couvert frappé d'armoiries. Le jeune nobilion, au cours d'une discussion, lui lança son mépris, en criant “roture”. D'un bond, l'attrapant par la tête, Léon Degrelle le conduisit sous le robinet et l'aspergea d'abondance en lui disant : Roture te nettoie, défends toi Chevalier !”. Un préfet perspicace fit comme au tribunal, il punit les deux querelleurs pour coups réciproques... » (p. 42).

     

     

     

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    L'Assaut, malgré l'article de Bertrand de Jouvenel salué par Le Pays réel pour avoir écrit avec « sympathie sur le mouvement rexiste, totalement incompréhensible pour la majorité des Français » (ce blog au 4 février 2025), n'est pas un journal favorable à Rex et à son chef Léon Degrelle. Il soutiendra d'ailleurs ouvertement Paul Van Zeeland lors de l'élection législative partielle bruxelloise du 11 avril 1937, notamment dans l'article ci-dessus signé, le 6 avril, par Emmanuel d'Astier. Le Soir s'en fera généreusement l'écho au matin même des élections : « Un hebdomadaire français, L'Assaut, créé par M. Fabre-Luce pour combattre dans son pays le Front populaire, vient de rendre au Premier ministre belge un hommage qu'il n'est pas superflu de reproduire ici. [...] Les Belges seront assurément sensibles à un hommage qui leur est ainsi indirectement rendu. Les électeurs de l'arrondissement de Bruxelles s'en souviendront dimanche. » (Le Soir, 11 avril 1937, p. 2).

     

    L'Assaut enfoncera encore son clou pro-Van Zeeland au lendemain de l'élection, le 13 avril, dans un article signé cette fois par son rédacteur en chef.

     

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    Léon Degrelle n'était sans doute pas vraiment d'accord avec l'image de son adolescence donnée par Jouvenel, car Robert Brasillach le reprend en insistant sur le bien-fondé de ce trait de caractère qu'il a lui-même traduit en « dictateur des cours de récréation » : « Je ne pense pas qu'on doive se fâcher de ce mot, et Léon Degrelle moins que quiconque. ». Et pourquoi ? Parce qu'il exalte par excellence la puissance triomphale de la jeunesse : « Il met bien l'accent sur la jeunesse extraordinaire de ce mouvement, et sur la vertu de cette jeunesse ». Et d'insister : « Il est aisé de voir que c'est à Louvain que s'est formé le dictateur des cours de récréation. Non que des préoccupations plus sérieuses n'aient pas, à cet instant, déjà conquis Léon Degrelle et ses amis. Mais on s'en voudrait d'oublier cette chaude atmosphère de gaieté, de brasseries, de chahuts d'étudiants, de passion joueuse, qui donne aux abstractions (la jeunesse aime toujours les abstractions) une telle couleur vivante. Il s'amusa beaucoup. En un siècle où ne sait plus rire, avoue-t-il franchement, nous avons ri. Et d'ajouter avec gravité : La farce est un apostolat. La farce est une école. On y apprend à être inventif, décidé. Qui sait si la farce, après tout, n'est pas une excellente préparation politique ? Au moins enseigne-t-elle le mépris des conformismes, sans lequel je ne crois pas qu'on puisse jamais rien faire de bon. » (pp. 14-15).

     

    En prétendant répondre à Bertrand de Jouvenel, c'est pourtant la formule précise de Robert Brasillach que la Duchesse de Valence reprend, preuve assez flagrante que Léon Degrelle avait encore moins apprécié l'expression « dictateur des cours de récréation » que « dictateur de la cour du lycée ».

     

     

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    Robert Brasillach s'est passionné pour Rex et Léon Degrelle. En voyage en Italie, il se presse de rentrer pour vivre à Bruxelles l'élection législative partielle du 11 avril 1937 qui opposa Léon Degrelle au Premier ministre Van Zeeland, candidat unique du Système. Ci-dessus, le mot adressé par l'écrivain-poète à son ami le journaliste Roger d'Almeras, annonçant son départ pour la Belgique. Son compte rendu sera bien entendu publié dans l'hebdomadaire Je suis partout du 17 avril 1937. L'article prend le parfait contre-pied d'Alfred Fabre-Luce, comme on le voit à travers cette présentation du talent oratoire du tribun de Rex.

    « Je crois être assez insensible à l'art de l'éloquence. [...] L'éloquence de Léon Degrelle m'a toujours plu parce qu'elle est simple, directe, jamais ennuyeuse, jamais fausse. Mais je n'ai jamais rien entendu qui approche le discours de Léon Degrelle à la veille de l'élection du 11 avril.

    Je plaindrais ceux qui n'y ont pas été sensibles. Dans cette foule debout, qui aurait dû être fatiguée par l'attente interminable, la chaleur, je n'ai vu que des visages tendus, émerveillés, et parfois de longs cris interrompaient Léon Degrelle. Lentement, l'orateur extraordinaire construisait son poème devant nous. Je ne puis employer d'autres mots. Déjà, un jour où il avait tenu neuf réunions, je le savais, à la dernière, il n'avait parlé que... du printemps. Les orateurs communistes venus pour manifester n'avaient pas bougé : manifeste-t-on contre le printemps ? Cette fois, c'est de son pays que parle Léon Degrelle. Il écarte la haine, la division. Parmi les soutiens de son adversaire, il trouve les assassins de prêtres, les brûleurs d'églises. [...] Mais lui, ce soir, puisque le mot d'ordre de M. Van Zeeland est : "Votez belge", il veut chercher à savoir ce que c'est que la Belgique.

    Et il fait le portrait de son peuple. Je pense à Péguy, avec ses mots charnels, sa patiente construction d'un univers. [...] De ses mains, il semble modeler un visage invisible. Et pendant une heure et demie, la Belgique, avec ses arts, ses paysages, ses saints, ses génies, son histoire, son Empire, devant nous s'anime et vit. Il parle de la mer par où s'en allèrent les conquérants et les saints, ces soixante-dix kilomètres de mer qui suffisent à la Belgique pour son rêve. A un moment il invoque ses rois morts, et je ne suis pas sûr que la foule, emportée par la ferveur, ne les ait pas vus, réellement, se lever dans la lumière. Je le répète, je n'ai jamais rien entendu de pareil. » (Je suis partout, 17 avril 1937, p. 5)

     

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    Rien n'assombrit jamais l'amitié que nouèrent les deux jeunes idéalistes : à la veille de son exécution inique, Robert Brasillach donnera encore à d'ultimes vers, le titre degrellien qui l'avait vivement impressionné quelque dix ans auparavant, Mon pays me fait mal (ce blog au 12 novembre 2020), et Léon Degrelle ne manqua jamais, de son exil espagnol, de rendre hommage au poète qui le marqua indéfectiblement (ce blog au 25 octobre 2019).

     

     

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    À gauche, la plaquette Mon Pays me fait mal, de Léon Degrelle, tirée en 1927 à 240 exemplaires ; à droite, le treizième des Poèmes de Fresnes, écrit par Robert Brasillach, à la veille d'être fusillé le 6 février 1945.

     

     

     

    Il n'empêche que Léon Degrelle ne se vit jamais en dictateur de quoi que ce soit, même pas des cours de récréation ! C'est ce qu'il tint à rappeler dans sa première biographie « autorisée », publiée sous la signature de Louise Narvaez, Duchesse de Valence. Nous avons vu (ce blog au 4 février 2025) comment, immédiatement, les points avaient été mis sur les « i ». La Duchesse affirmait n'avoir pas cru Bertrand de Jouvenel « dépeignant Degrelle en 1936 avec une grande sympathie, écrivant qu'il avait dû, au collège, être un dictateur des cours de récréation », et rapportait les propos mêmes de Léon Degrelle décrivant son entrée difficile au pensionnat :

    «  Jamais je n'avais quitté la maison, écrivit-il un jour. [...] De mon univers de gamin des bois, on me plongeait brusquement dans une lourde casemate, parmi deux cents “aristos”, à peu près tous garçons des villes, moitié noblesse, moitié grosse bourgeoisie. Je ne connaissais personne. Brusquement, ces hautes murailles grises, ces visages inconnus ! Je me cachais pendant la récréation, pour rester seul. À table, je me tenais muet, raide comme un piquet. On m'avait baptisé “amidon”. »

     

    L'anecdote de ce brocart, attesté par le principal intéressé, est tout de même assez incompatible avec l'histoire du « dictateur des cours de récréation ». Même Arnaud de la Croix, auteur d'une biographie faisant de Léon Degrelle –à l'instar, prétend-il, de son modèle Godefroid de Bouillon– un antisémite compulsif, a relevé cette invraisemblance : « De son côté, le journaliste français Bertrand de Jouvenel, qui interviewa Hitler en 1936, voit en Degrelle un dictateur des cours de récréation”. [...] Pourtant, dans son collège namurois, ses condisciples surnomment le jeune campagnard Amidon : un détail qui ne cadre guère avec le portrait supposé de meneur extraverti qui aurait, dès les années de collège, imposé aux autres son autorité. » (p. 22).

     

    Néanmoins l'expression, facile à détourner, est intéressante à conserver. Et donc, pour concilier les deux anecdotes, Stéphany, comme nous l'avons vu, va inventer une nouvelle origine au surnom : il proviendrait de l'insupportable arrogance de Léon à la chevelure gominée au Bakerfix (ce blog au 4 février 2025) !

     

     

     

     

    12 LD + Raty.pngLe collégien Léon Degrelle, à l'époque de ses deux dernières années d'humanités (Poésie et Rhétorique) : il a seize ou dix-sept ans, aux côtés de Charles Raty qui épousera Jeanne, sa sœur aînée (ce blog au 13 mars 2023).

     

     

    Pour connaître le vrai collégien Léon Degrelle, outre l'ouvrage –fidèle expression de Léon Degrelle lui-même– de la Duchesse de Valence, nous nous reporterons aussi sûrement vers l'autobiographie que l'exilé en Espagne écrivit pour ses enfants dont il était séparé depuis la fin de la guerre : elle fut publiée, dans les années 2000, sous le titre Mon Combat.

     

    « Collégien, il sera un élève à l'esprit vif, toujours en éveil, à la répartie vive ; les premières semaines lui paraîtront dures : il est dépaysé, il ne connaît personne, il se sent étranger dans ce grand collège où il croit qu'il ne s'habituera jamais... Il pense avec une nostalgie poignante à sa chère vieille maison si paisible, si accueillante, à ses parents, à sa mère surtout, et sa tendresse est grandie par l'absence... Très timide, un peu farouche même, il faudra tout un temps pour qu'il se lie à d'autres élèves ; il a l'impression qu'on rit de lui, car un garçon a imité, pour se moquer, son accent de Bouillon qui est plus dur que le parler chantant de la vallée de la Meuse. Et puis il est paralysé par la crainte de l'échec en classe : au Collège Saint Pierre, il était second ; bon ; mais on n'était que deux, et quand les oncles et tantes s'informaient de ses études, les sœurs criaient en s'esclaffant "il est dernier, dernier"... Ce qui était tout de même un peu vrai ; si cela devenait tout à fait vrai dans cette classe de trente élèves, quelle honte... Voilà les premiers concours. Qu'est-ce que cela va donner ? Le cœur battant, Léon attend les résultats. Quelle joie ! Il est parmi les premiers ! Du coup, il reprend confiance et voit le collège sous des couleurs plus riantes. Il quitte la classe en sifflotant dans le rang, ce qui lui vaut un bref rappel à l'ordre... Allons, ce n'est plus la vie quiète de Bouillon, ici, mais enfin, on peut y connaître aussi des bons jours ; et il écrira fièrement ses premiers succès à ses parents. » (p. 68).