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Dernier Carré "Léon Degrelle"

  • Léon Degrelle, par Frédéric Saenen

     

    Une biographie grand public ? Sans a priori ?

    La réponse est déjà dans le Prologue !

     

     

    À peine avions-nous reçu de notre fidèle petit libraire de quartier la nouvelle biographie de Léon Degrelle que nous parvenaient déjà des messages nous demandant si nous l'avions lue et, surtout, ce que nous en pensions.

     

    Nous n'avions certes pas l'intention de nous jeter toutes affaires cessantes sur cette brique épaisse car d'autres priorités se sont imposées à l'organisation de notre temps et puis, avouons que la présentation de l'éditeur ainsi que le commentaire bouffon déféqué par le mensuel Historia (ce blog au 28 février 2025) ne nous ont guère encouragé à tout laisser tomber pour sa lecture...

     

     

     

    Où est le temps...

     

    Historia HS 32 Int. SS.jpegLes temps changent. Les mentalités aussi, hélas...

     

    Qui oserait encore publier aujourd'hui un dossier sur la SS affirmant « On ne songe plus aujourd'hui à assimiler les combattants de la Waffen SS aux bourreaux des camps de concentration » ? Et confier la rédaction des articles à un Jean Mabire, spécialiste incontesté de la Waffen SS mais condamné aujourd'hui par l'encyclopédie de la bienpensance Wikipédia pour exprimer « une pensée politique classée à l'extrême droite, proche des milieux néo-fascistes » ? Ou à d'anciens Volontaires du Front de l'Est, même sous pseudonyme, tels Saint-Loup, Paul Terlin ou Henri Fernet ?

     

    Ce fut pourtant l'honneur du mensuel Historia qui sortit en 1973 son 32e Hors Série intitulé L'Internationale SS, 600.000 étrangers français, belges, suisses, etc...

     

    L'auteur de Les SS de la Toison d'Or y rappelait d'ailleurs le surnom Modeste Ier de Bourgogne donné plaisamment par ses hommes à Léon Degrelle, toujours fier et hardi. Et il en faisait le titre glorieux de son article (ce blog au 22 janvier 2016). Au lieu qu'aujourd'hui, Frédéric Saenen et, à sa suite, Historia, version woke contemporaine, en font un sobriquet sardonique : « ses légionnaires, railleurs, le surnomment Modeste Ier, roi de Bourgogne » (p. 8)...

     

    L'historien Jacques de Launay –qui rencontra Léon Degrelle en 1973– a témoigné qu'après la défaite, il ne s'agissait aucunement de raillerie : « Ses camarades de guerre l'appellent affectueusement Modeste » (Histoires secrètes de la Belgique, 1935-1945, p. 194). Ce que confirme Paul Terlin (le héros Henri Moreau, grand mutilé de guerre) qui précise l'origine du surnom, à la fois respectueux et spirituel, dans le récit des combats d'épouvante pour le village de Starosselié, en Ukraine : « Debout dans sa voiture, Léon Degrelle retrouve la voix et les gestes du tribun pour arrêter la débandade. [...] jamais brave officier ne fut aussi bon orateur. Celui que nous nommons entre nous Modeste Ier de Bourgogne, en raison de la gloriole qui accompagne ses exploits, galvanise les fuyards. [...] Magie du verbe et du courage. Les Rouges s'attendaient à tout, sauf à ce coup de gueule providentiel du chef rexiste. » (La Neige et le sang, p. 84).

     

    Historia HS 32 Saint-Loup.jpeg

     

    Nous ne pouvons, de plus, qu'engager l'amateur de sobriquets à vérifier la source de ses citations incorrectes, puisqu'il ne put jamais être question de « roi de Bourgogne », la principauté chère à Léon Degrelle étant celle du duché de Jean sans Peur, Philippe le Hardi, Philippe le Bon et Charles le Téméraire.

     

     

     

    Mais bon, les désirs de nos lecteurs nous étant tout de même quasi des ordres, nous avons enfin ouvert ce livre qui se présente comme la « première biographie grand public » de Léon Degrelle.

     

    En tenant l'ouvrage en mains –350 pages sans la moindre illustration, accompagnées d'un important appareil critique de bas de page et de plus de trente pages de notes–, nous nous demandons tout de même ce que l'éditeur considère alors comme ouvrage « non-grand public » !

     

    Autrement agréables à lire par leur style et leur mise en pages, enrichis de photographies parfois originales et toujours pertinentes, bref parfaitement « grand public » nous semblent –même si nous ne sommes pas toujours vraiment d'accord avec le contenu– les livres d'André Liénard (Légion Wallonie, ce blog au 3 mai 2021), Jean-Marie Frérotte (Le dernier fasciste, ce blog au 21 juin 2018) ou même Arnaud de la Croix (Degrelle, 1906-1994, ce blog au 13 décembre 2016) !

     

    Ici, le bouquin a tout l'air du pensum lourdement indigeste. Et, surtout, loin de l'affirmation péremptoire de la pub en quatrième de couverture d'être « Sans a priori ». Les quatorze pages du Prologue ne font en effet rien d'autre qu'exalter les a priori de l'auteur !

     

    Sans doute est-ce pour tenter de le cacher qu'il a intitulé aussi sobrement sa biographie Léon Degrelle, Mais quel est le Léon Degrelle qu'il se propose de nous présenter ?

     

    Son projet, nous assène-t-il, est de « se focaliser sur le destin d'un rejeton de la petite bourgeoisie ardennaise [...] qui, une fois relégué dans le camp des vaincus, s'est ingénié à forger avec complaisance son propre mythe » (p. 16) ; de raconter « L'histoire d'un Belge qui, sous des dehors caricaturaux et une bonhomie de façade, dissimulait un être à la fois autoritaire, assoiffé de notoriété et de pouvoir, roublard en affaires, jaloux et colérique, souvent veule et toujours comédien en représentation, doté d'une inébranlable assurance de soi qui pouvait l'amener jusqu'au déni de réalité » ! (p. 20). Mais aussi de présenter ce « fugitif, [...] trafiquant d'art, négationniste » (p. 8), incarnant « une figure repoussoir, contre-exemple absolu de l'éthique en politique » (p. 11)...

     

     

     

    LD Iberico CEDADE.jpg   LD + Lion CEDADE.jpeg

     

    Léon Degrelle « trafiquant d'art » soutient d'emblée Frédéric Saenen dans la deuxième page de son Prologue. En 1988, un scandale médiatico-judiciaire fut monté de toutes pièces : Léon Degrelle tenterait de monnayer des « trésors nationaux » espagnols à l'étranger !

     

    Mais le « trafiquant » produisit immédiatement les titres de propriété de ses antiquités et, la baudruche s'étant dégonflée à la confusion de ses calomniateurs, de rédiger illico presto la savoureuse brochure Léon Degrelle, un lion ibérique nazi publiée en espagnol par le CEDADE (Cercle Espagnol des Amis de l'Europe, ce blog au 4 février 2017). Frédéric Saenen le sait, mais pour lui, c'est sûr, il n'y a pas de fumée sans feu !

     

    Aujourd'hui le lion ibérique –toujours en Espagne en tant que trésor national inaliénable– est la propriété d'un ami de Léon Degrelle, héritier d'une grande maison de luxe.

    Ci-dessus, à gauche, la couverture de la brochure polémico-divertissante de Léon Degrelle ; une affiche tirée à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires couvrit les murs de Malaga, Madrid et Barcelone pour annoncer sa publication. À droite, Léon Degrelle pose devant le fameux lion celtibère qui ne quitta jamais ses propriétés (ici, dans sa Cabaña de Fuengirola ; photo extraite de la brochure du CEDADE).

    Ci-dessous, dans son appartement de Madrid, l'éternel amateur d'art épris de beauté et d'histoire, présente quelques-uns de ses trésors antiques.

     

    LD Antiquités.jpg

     

     

    N'en jetez plus ! Nous nageons effectivement dans le dénigrement diffamatoire plein d' « a priori », et ce, avec une jouissive complaisance !

     

    Nous craignions avoir affaire à « un énième opus politiquement correct » (ce blog au 28 février) ? Eh bien, nous serons gâtés ! Car Saenen revendique haut et fort (pp. 16-18) sa filiation avec le « critique littéraire belge Pol Vandromme » qui, dans sa sénescence, s'est dévalué en croyant noyer Léon Degrelle dans sa logorrhée haddockienne (ce blog au 14 avril 2016, mais plutôt que chez Vandromme, l'épigone reprendra le néologisme invectif egotrombinomanie chez Robert de Vroylande, ce blog au 27 octobre 2020) ; de même qu'il salue l'expertise de « l'écrivain Jonathan Littell » qui a « analysé la psyché de la masculinité fasciste » [sic] chez Léon Degrelle dans un obscène follicule scatologique (ce blog au 8 février 2018), et se place sous l'autorité de « chercheurs érudits » comme Eddy De Bruyne dont nous avons illustré les limites sévères de l'érudition (ce blog à partir du 23 mars 2017)... Mais la cerise sur le gâteau, c'est la génuflexion révérencieuse devant l'un des « historiens patentés » à la patente la plus rance de péremption qui soit, Francis Balace himself (ce blog, entre autres, au 12 mars 2019) ! Et de justifier sa prosternation devant le clown Poprof de l'Université de Liège par cette citation propre à déshonorer la recherche universitaire : « Degrelle mémorialiste appartient plus désormais au domaine du psychiatre qu'à celui de l'historien » (p. 18 ; sur les délires balaciens, voir aussi ce blog au 30 juin 2016) !

     

    Dès lors, Fédéric Saenen se fout royalement de notre balle en prétendant déduire on ne sait de quoi la nécessité de sa publication : « Il manquait donc, à l'usage du grand public francophone, une biographie complète de Léon Degrelle » !

     

    Outre que la précision « francophone » est pour le moins incongrue, ce nouvel ouvrage de la cancel culture de l'histoire du rexisme et de la Seconde Guerre mondiale en général et de Léon Degrelle en particulier ne se justifiait donc en rien. Ce qui manque au contraire de manière criante, c'est un ouvrage moderne qui rende justice au fondateur de Rex (dont l'importance historique inquiète manifestement encore), au pourfendeur des banksters (qui sévissent plus que jamais aujourd'hui) et au chantre de la révolution des âmes (toujours indispensable mais rendue héroïque dans une société qui s'ingénie à inverser toutes les valeurs) ; un ouvrage défendant enfin l'honneur de celui qui s'était donné pour mission « de repeindre de neuf chaque cœur délaissé, lassé, souillé, de recomposer une véritable communauté humaine, juste, fraternelle, de ranimer en elle les plus hautes vibrations d'âmes. » (Léon Degrelle : persiste et signe. Interviews recueillies pour la télévision française par Jean-Michel Charlier, p. 55).

     

     

     

    Autoportrait fasciste.jpgLes effets d'Autoportrait d'un fasciste, le « Dossier Noir » consacré à Léon Degrelle par Jean-Michel Charlier, tels que les imagine Alidor.

     

     

    Saenen ose parler de « biographie complète », mais jamais dans ce Prologue de présentation de son bouquin, il ne parle de sa méthode de travail, de son éventuel souci d'objectivité, de l'enquête qu'il aurait menée à charge et à décharge. On ne trouvera pas non plus d'explication de sa démarche qu'il veut manifestement étrangère à celle que s'imposa, par exemple, l'exigeant et irréprochable Jean-Michel Charlier pour la réalisation de son Dossier Noir consacré à Léon Degrelle (Autoportrait d'un fasciste) et jamais diffusé par les télévisions qui l'avaient financé (ce blog au 1er juillet 2017 : les deux liens donnant accès au film que nous avions renseignés ont également été démocratiquement rendus inopérants !) : « mon propos n'était ni de le défendre, ni de le pourfendre, mais de réaliser [...] un travail rigoureusement objectif et honnête. » (Persiste et signe, p. 11).

     

    Frédéric Saenen rejette d'ailleurs explicitement comme inutile, sinon néfaste, la « méthode Charlier » consistant à confronter tous les intéressés aux déclarations de Léon Degrelle afin de garantir une stricte impartialité dans l'information : « cette démarche aurait été peu fructueuse [...] ; qu'aurait d'ailleurs ajouté ce témoin [Fernand Kaisergruber] à son gros volume de souvenirs Nous n'irons pas à Touapse [...] ou aux quelques interviews accordées deux ans avant sa mort [ce blog, entre autres, aux 21 janvier 2017 et 29 mars 2018] ? De même pour les descendants de Degrelle : est-il jamais possible d'obtenir un portrait nuancé de cet homme de la part de celles et ceux qui ne le connurent que comme grand-père raconteur d'anecdotes truculentes ou parent au sombre passé ? Et que compter entendre d'autre de la part de ses admirateurs fanatiques que la régurgitation de sa version canonique des faits ? » (p. 17).

     

    Parmi ces « admirateurs fanatiques », figure sans doute le Cercle des Amis de Léon Degrelle que Frédéric Saenen a l'air de condamner à mort en 2017, ignorant apparemment son indispensable Correspondance privée trimestrielle dont nous rendons pourtant toujours régulièrement compte.

     

    Mais il le sait certainement puisque, juste après avoir parlé du Cercle, il fait à notre blog Dernier Carré Léon Degrelle l'honneur de lui consacrer un paragraphe de quelques lignes. Très probablement devons-nous donc également être englobés parmi les fanatiques régurgitant les canons degrelliens. C'est en effet ainsi qu'il doit considérer notre prétention d'éclairer objectivement, par un travail élémentaire de recherche et d'interprétation contextualisée de tous documents connus ou inédits, la personnalité et la vie de Léon Degrelle.

     

    Voilà qui doit être insupportable au néo-biographe qui entend faire carrière dans le sillage woke des prétendus spécialistes qu'il vient de citer. Aussi ne manquera-t-il pas de nous discréditer en traitant nos commentaires de « mises au point orientées », réduisant notre action à la promotion de « l'abonnement à [notre] bulletin annuel [qui était irrégulier, certes, mais plus ou moins trimestriel] ou la vente d'un calendrier, illustré de photos d'époque » (la verve blessante de Saenen a oublié nos cartes de vœux de Solstice, Noël et Nouvel An : ce blog au 11 décembre 2019 !) et en dénonçant l'anonymat du ou des animateurs de notre blog... Comme si notre ou nos rédacteurs courraient après quelque honneur académique ou reconnaissance officielle pour leur travail désintéressé alors que tous savent que ne pourraient le ou les « récompenser » que dénonciations et lynchage médiatique et autre...

     

     

     

    LD Bureau Fuengirola.jpg

    Léon Degrelle dans le bureau de sa Cabaña de Fuengirola, rédigeant Le Siècle de Hitler (derrière lui, la Pietà flamande du XVe siècle acquise lors du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, ce blog aux 18 octobre et 26 décembre 2024). « Sous le soleil espagnol, portant chemise claire et veston léger, [Degrelle] déambule avec des allures de vacancier dans les jardins de sa villa andalouse. Quinquagénaire, il pose en sage méditatif, assis à sa massive table de travail, absorbé par la rédaction de ses mémoires » persifle Saenen dans son Prologue (p. 10). Mais qu'attendre des souvenirs de celui dont le balacien prétend écrire la biographie ? « Degrelle s'est beaucoup (trop) raconté » (p. 17) pour lui accorder quelque crédit ! Aussi, y remédiera-t-il en réécrivant au besoin l'histoire.

     

    Par exemple par le sophisme faisant porter à Léon Degrelle la responsabilité de son état d'apatride étranger indésirable en Belgique, imposé par sa condamnation de 1945 et sa prescription toujours ajournée (sans parler de ses innombrables propositions de revenir à Bruxelles pour un véritable procès contradictoire) : « l'incivique apatride choisit après-guerre de se faire naturaliser espagnol, ce qui lui permet d'échapper habilement à la justice de son pays en s'en rendant définitivement étranger » (p. 9).

     

    Par exemple aussi à propos de ses « crimes de guerre » : « il n'a pas été établi qu'il aurait commis personnellement ou ordonné directement des crimes de guerre » (p. 19), mais son nom est cité dans des minutes du procès de Nuremberg, mais « son cautionnement de la répression violente », mais « sa participation à des prises de décision débouchant sur des exécutions », etc. (voir ce blog au 7 juin 2018). Pour Frédéric Saenen, c'est sûr, il n'y a jamais de fumée sans feu !

     

    Discours 11 1992 Torreon.jpg

    Pour noircir systématiquement Léon Degrelle, Saenen, qui se veut aussi pamphlétaire, n'hésite pas à chausser les pantoufles du vieux radoteur Vandromme, essayant d'adopter son outrance paradoxale : « Son talent oratoire n'est pas loin d'évoquer celui des pasteurs évangéliques superstars aux États-Unis, à la nuance près que le Messie dont il proclame l'avènement, ce n'est jamais que lui-même » (p. 11). Au bémol de la nuance près que le sujet des discours de Léon Degrelle ne fut jamais l'avènement de quelque Messie résolvant miraculeusement tout problème, mais au contraire l'indispensable, personnelle et tellement exigeante révolution des âmes permettant seule une authentique régénération nationale et européenne.

    (Ici, discours de Léon Degrelle au restaurant El Torreón del Pardo à Madrid, en novembre 1992, ce blog au 1er décembre 2020 ; sur l'art oratoire de Léon Degrelle, ce blog au 14 mars 2021).

     

     

    En conclusion de son Prologue, Frédéric Saenen se moque encore fameusement de nous en prétendant (et il souligne ces mots) « prendre enfin au sérieux » Léon Degrelle. Car jamais il ne l'écoutera ni n'essaiera même de le comprendre comme le fit Jean-Michel Charlier et entend toujours le faire le Dernier Carré Léon Degrelle.

     

    Prendre au sérieux Léon Degrelle, décrète-t-il, c'est en « déjouer les séductions ». Et se garder soigneusement d'éprouver jamais pour lui la moindre sympathie (p. 20).

     

    Voilà ce que Saenen appelle une biographie « sans a priori »...

     

    Autant que le lecteur soit prévenu et sache à quoi s'attendre.

     

     

    À suivre (peut-être)

     

     

     

     

    Les « crimes de guerre » de Léon Degrelle

     

    LD Donetz 1942.jpeg

    Horreur ! Le lieutenant Léon Degrelle fait le coup de feu contre les bolcheviques sur le Donetz en juin 1942.

     

    Abordant dans son Prologue la question des crimes de guerre de Léon Degrelle, son biographe « sans a priori » écrit d'une manière sibylline propice aux sous-entendus accusateurs : « À cet égard, la question de sa part de “responsabilité du mal” risque d'occuper encore longtemps les historiens. Son nom n'est en effet cité qu'une seule fois dans les minutes du procès de Nuremberg, très précisément dans le document PS-705 reproduisant des notes secrètes du 20 janvier 1943 relatives à une conférence du comité de travail SS sur l'espace germanique tenue le 12 janvier précédent. » Et d'ajouter en note les références de cette trace exceptionnelle –mais d'autant plus importante– de l'implication de Léon Degrelle dans le mal : « Procès des grands criminels de guerre devant le tribunal militaire international : Nuremberg, 14 novembre 1945 - 1er octobre 1946 : [documents et autre matériel de preuve]. Tome 26, Tribunal militaire international, Nuremberg, 1947-1949, p. 264. »

     

    Bigre ! Voilà du sérieux ! Même si le nom de Léon Degrelle n'est cité qu' « une seule fois », c'est quand même « dans les minutes du procès [...] des grands criminels de guerre devant le tribunal militaire international » de Nuremberg ! Ce n'est pas rien ! D'autant qu'elles reproduisent des « notes secrètes » d'une « conférence du comité de travail SS sur l'espace germanique ». Autant dire qu'il s'agissait peut-être de la préparation d'une espèce d'épuration ethnique criminelle ?...

     

    Mais au fait, pourquoi diable Frédéric Saenen épingle-t-il cette mention dans les archives du Tribunal de Nuremberg en lui consacrant pas moins de neuf lignes (cinq dans le texte du Prologue et quatre dans la note de référence) ? Et pourquoi diable, tant qu'il y est et puisqu'il a tout le matériel sous la main, ne nous cite-t-il pas précisément le court passage –trois lignes et demie seulement !– où Léon Degrelle apparaît ? Car on peut tout de même penser qu'excessivement peu nombreux sont ceux qui possèdent l'édition des quarante volumes documentant le Procès de Nuremberg...

     

    Eh bien, on vous le donne en mille, parce que ces fameuses « notes secrètes » avec le nom de Léon Degrelle ne concernent aucunement quelque travail de nettoyage de l'espace germanique par la déportation ou l'assassinat ! Elles ne font que commenter et pas que positivement ! les premières approches effectuées en janvier 1943 par le lieutenant de la Wehrmacht qu'était alors Léon Degrelle auprès de Richard Jungclaus, représentant de Himmler en Belgique, pour rejoindre la Waffen-SS.

     

    Tout cela est parfaitement documenté par Albert De Jonghe un authentique historien celui-là, et même pas degrellien pour un sou !–, dans son étude fouillée sur « La lutte Himmler-Reeder », dans les Cahiers d'Histoire de la Seconde Guerre mondiale de décembre 1978. Il cite très exactement sources et texte du rapport destiné au général Gottlob Berger, chef du Bureau central de la SS (SS-Hauptamt). Nous reproduisons sa note avec une traduction exacte, ne laissant plus de place aux extrapolations orientées de Saenen.

     

    De Jonghe LD Trib. Nuremberg.png

    Procès-verbal de la réunion du Comité SS de la Communauté de travail pour l'Espace germanique, le 12.1.1943, 12h, au SS-Hauptamt (IfZM [Institut für Zeitgeschichte München], PS-705 et NO-1783). On lit dans cette note, concernant Degrelle : « Dans l'évaluation du rapport entre religion et politique, il appert qu'en son for intérieur, Léon Degrelle est un esprit latin... C'est un catholique pratiquant qu'il nous faut prendre avec précaution ; d'autre part, c'est un homme dont nous avons encore absolument besoin politiquement. » Cfr aussi IMT [International Military Tribunal], éd. française, XXVI, p. 264.

     

    Ainsi Frédéric Saenen allume-t-il le feu de ses fumées...


    Ne fût-ce qu'évoquer le travail de vérification effectué par un Jean-Michel Charlier sur l'implication éventuelle de Léon Degrelle dans quelque crime de guerre n'entrait manifestement pas dans la démarche « scientifique » du pseudo-biographe du dernier Commandeur de la Légion Wallonie...

     

    Rappelons-en lui tout de même les conclusions définitives !

     

    « Mon tout premier soin fut de vérifier ce que m'avait solennellement affirmé Léon Degrelle : à savoir que jamais il n'avait été recherché, ni condamné comme criminel de guerre, ni même simplement poursuivi comme tel.

    Je me fis communiquer les listes officielles, établies par les Alliés, les Allemands, les Israéliens, et surtout les Soviétiques, puisque, de 1941 à 1945, Degrelle avait combattu pratiquement sans interruption sur le front de l'Est. Je consultai également les listes établies par Simon Wiesenthal (chasseur antinazi) et recensant tous les criminels nazis responsables de crimes contre l'humanité. Le nom de Degrelle ne figurait sur aucune de ces listes. [...] L'exposé des motifs de sa condamnation à mort ne relève d'ailleurs à son égard aucune accusation de crime de guerre, voire de participation, quelle qu'elle soit, à une quelconque action de représailles.

    [...] Léon Degrelle n'a été condamné à mort que pour avoir porté les armes contre les Alliés de la Belgique et avoir constitué une armée à cet effet. »

    (Léon Degrelle : persiste et signe. Interviews recueillies pour la télévision française par Jean-Michel Charlier, p. 13).

     

    Mais sans doute la place de Jean-Michel Charlier est-elle désormais dans les mêmes fosses d'aisance que celles où Saenen précipite les « fanatiques » régurgitant leurs degrelleries ?

     

    LD Himmler 1943.jpeg

    Y a-t-il pire crime que de parler avec le Reichsführer SS Heinrich Himmler et faire la « une » du mensuel National-Socialisme du 15 juin 1943, date du trente-septième anniversaire de Léon Degrelle ?

     

  • Hélène Cornette, l'amie inconnue de Léon Degrelle

     

    Sous le manteau du Caudillo [5]

     

     

    Bajo el manto.pngDepuis sa publication, nous avons passé pas mal de temps à démonter les carabistouilles présentées comme des faits historiques par le singulier prof d'unif José Luis Rodríguez Jiménez dans son bouquin Bajo el manto del Caudillo Sous le manteau du Caudillo », ce blog à partir du 1er septembre 2024).

     

    Venons-en finalement à la seule information inédite –et encore, pas tout à fait : voir ci-après !– qu'il nous présente, à savoir l'existence d'Hélène Cornette, l'épouse d'un agent secret espagnol sur la tête duquel Léon Degrelle aurait planté d'autres petites cornes.

     

    Mais qui est cette femme dont le nom évocateur ne fut, à notre connaissance, jamais prononcé par qui que ce soit dans l'entourage de Léon Degrelle ?

     

    Hélène Cornette (1908-1999) est une Française qui épousa à Paris, le 13 octobre 1930, Pedro Urraca Rendueles (1904-1989), policier espagnol. Leur fils unique, Jean-Louis, naquit le 27 juillet 1936, très tôt rejeté par son père : « Durant ces mois [de 1939-40], Hélène faisait des allers-retours à Sèvres pour voir sa mère, Jeanne, et son fils Jean-Louis qui vivait quasi en permanence avec sa grand-mère. Son père a toujours voulu éloigner son fils de lui et de sa femme, ou plutôt il n'a jamais voulu de lui. » (p. 25). Le détail du rejet du père est important car il expliquera la présence de l'adolescent chez Léon Degrelle.

     

     

    Gemma Catalan.jpegCe policier doit toute sa (relative) notoriété à son action d'agent secret en France où il parvint à arrêter l'ancien président de la Généralité de Catalogne, Lluis Companys. Celui-ci, lors d'un coup d’État en avril 1934, avait proclamé la république catalane et, après la victoire des nationalistes en 1939, s'était réfugié en France. Livré par Pedro Urraca à la justice espagnole, il fut condamné pour haute trahison et passé par les armes.

     

    Pour en savoir davantage sur ce policier et sa famille et leur rapport avec Léon Degrelle, nous ne nous référerons pas au seul Rodríguez, car ce n'est évidemment pas lui qui a découvert cette relation inédite.

     

    La journaliste catalane Gemma Aguilera a consacré, il y a une douzaine d'années, une biographie à ce policier, Agent 447, L'home que va detenir el president Companys L'Agent 447, l'homme qui a arrêté le président Companys », en catalan en 2011 ; en espagnol en 2013). Dans ce livre, l'apparition de Léon Degrelle relève plutôt de l'anecdote, ce qui la fit sans doute passer inaperçue dans la sphère degrellienne.

     

    L'auteur y dresse ce portrait assez extravagant de Léon Degrelle : « Hélène surprend son mari avec cette proposition : confier Jean-Louis aux mains d'un bon ami à elle afin qu'il le corrige comme il le mérite et qu'il l'oriente vers la carrière militaire. Il s'agit de Léon Degrelle, ex-officier de la Waffen SS condamné à mort pour crimes de guerre et alors protégé par le régime de Franco ; Hélène l'a connu à Madrid en 1946 par des amis communs. Il vit confortablement installé dans un grand domaine, La Carlina, où il s'est fait construire un manoir et quelques résidences annexes qu'il a lui-même conçues. [...] Cet homme, qui mesure 2,03 mètres et est maigre comme un clou, se présente à Jean-Louis comme un héros de guerre, bien qu'il lui ait caché que peu de jours avant la chute de l'Allemagne, il avait déjà abandonné le champ de bataille et s'était enfui loin de la progression du front allié. » (pp. 143-144 de l'édition espagnole).

     

     

     

    Affiche jugement LD Fr+Nl.png   Affiche jugement LD.jpg

     

    Léon Degrelle, « condamné à mort pour crimes de guerre » ? C'est ce qu'il se colporte gratuitement depuis toujours. Rien de plus normal qu'un criminel de guerre soit condamné à mort ! Sauf que Léon Degrelle ne l'a jamais été. Ni criminel de guerre, ni condamné de ce chef, comme le montre le placard affiché le 30 janvier 1945 sur la Grand-Place de Bruxelles : il n'y est aucunement question de quelque crime ou violence à l'égard de civils, de prisonniers ou de blessés, constitutifs de crimes de guerre selon les conventions de Genève.

     

    Léon Degrelle, un homme « qui mesure 2,03 mètres et est maigre comme un clou » ? Même le géant Otto Skorzeny, qui faisait une quinzaine de centimètres de plus que Léon Degrelle, ne mesurait « que » 1,93m (l'avis de recherche lancé par les Alliés en 1945 renseigne une taille de 6 feet 4 inches : ci-dessous à droite). Si Léon Degrelle apparaît beaucoup plus maigre qu'à l'habitude sur la photo prise dans la finca de Majalimar en 1950 en compagnie d'Otto Skorzeny (voir aussi ce blog au 3 décembre 2024), c'est qu'il avait subi, quelque temps auparavant, une grave opération de l'estomac (voir ci-après). D'après le passeport fourni par Alain Delon (ce blog au 19 août 2024), Léon Degrelle mesurait 1,78m.

     

    Sur la protection de Franco, voir ce blog au 31 mars 2021 ; sur l'évasion de Norvège à bord du Heinkel d'Albert Speer, voir ce blog aux 18 juin 2020 et 19 septembre 2024).

     

    LD Skorzeny Carlina.jpg   Wanted Skorzeny 1.jpeg

     

     

     

     

    C'est donc ce bouquin qui permit à Rodríguez d'apprendre que l'épouse du policier qui traqua l'éphémère président de Catalogne, devint une amie du nazi Degrelle. Si le peu scrupuleux historien reconnaît quand même sa dette dans ses Références archivistiques [!], le nom de la journaliste –pourtant bien marquée à gauche aussi– n'apparaît jamais dans l'Index onomastique, ni son livre dans la Bibliographie...

     

    Rodríguez portera évidemment sur ces personnes compromises dans la collaboration franco-allemande et avec le régime franquiste un regard fort négatif, –ce qui n'étonnera personne–, mais qu'il assortira de sa touche personnelle et habituelle : le flou (la mère d'Hélène est peut-être coupable de vol) et la généralisation abusive (le pillage est une habitude chez certains Français et Espagnols) qui font les bons ragots.

     

    Les jeunes gens, Hélène et Pedro, « s'étaient connus trois ans avant [leur mariage] à Biarritz, dans le sud-ouest de la France, pendant les vacances de leurs parents respectifs » (p. 23). Hélène Cornette était la fille d'un premier mariage de sa mère, Jeanne Compveut (Rodríguez qui, on le sait depuis notre premier article –ce blog au 1er septembre 2024–, est un spécialiste de l'onomastique, nous explique qu' « à cette époque, les Français ne portaient que le nom du père » !), qui s'était remariée avec un veuf dont l'entreprise d'accessoires de mode avait fait faillite. Le détail est important pour la mauvaise réputation de la famille car, suite à cette faillite, les ateliers du mari avaient été transformés en appartements, dont l'un était loué à une artiste-peintre juive. Celle-ci aurait été dénoncée par Jeanne et dévalisée grâce à son gendre Pedro Urraca : « Peu après le début de l'Occupation, et avec la complicité de sa fille et de son gendre, Jeanne Compveut se servit de l'ascendance juive de Sachs et de ses amitiés de gauche pour la dénoncer à la police allemande, pénétrer dans son appartement qu'elle louait rue de l'Université et le réserver à son propre usage, après en avoir retiré le mobilier de l'artiste-peintre et, peut-être, avoir volé une partie des objets de valeur que cette dernière n'avait pas pu emporter. La pratique du pillage des biens des personnes en fuite était une habitude chez une partie des Français et du personnel allemand dans la France occupée. C'était la même chose pendant et après la guerre espagnole. Ceci fut la première, mais non la dernière action de pillage commise par Jeanne Compveut et son gendre sur des personnes craignant pour leur vie. Urraca créa un groupe –ou du moins en fit partie– destiné à spolier les familles juives qui tentaient de fuir la persécution nazie. » (p. 27).

     

     

     

    Gemma Espagnol.jpegL'édition catalane du livre de Gemma Aguilera (ci-avant) affiche le portrait de Pedro Urraca en couverture puisque c'est à lui qu'est consacrée cette biographie. Mais la traduction espagnole produit la photographie d'une foule anonyme : il s'agit de personnes regardant le cortège funèbre d'un anarchiste mort dans l'assaut d'une caserne à Barcelone en 1936 : le président de la Généralité de Catalogne, Lluís Companys, est le civil de droite (avec une pochette blanche). Vengeance posthume ourdie par la biographe de Pedro Urraca ? Sa victime lui vole en tout cas la vedette en couverture de sa propre biographie...

     

     

    « L'année 1948 commença très mal pour Urraca et sa famille. Lui-même, son épouse et sa belle-mère avaient été jugés par contumace et la Cour d'Appel de Paris avait rendu son jugement le 5 janvier, condamnant Pedro Urraca à mort pour intelligence avec l'ennemi dans la persécution de Français et lui confisquant tous ses biens. Hélène Cornette fut condamnée à cinq ans de prison, une amende de 100.000 francs, la confiscation de ses biens présents et à venir au bénéfice de la nation et l'indignité nationale, ce qui impliquait la perte de la nationalité, pour commission d'actes nuisibles à la défense nationale, en ce compris l'aide à son époux dans la collaboration avec l'ennemi et sa participation au réseau de persécution d'Espagnols et de Français. [La mère d'Hélène,] Jeanne Compveut [...] fut condamnée pour commission d'actes nuisibles à la défense nationale à deux années de prison, une amende de 100.000 francs et l'indignité nationale. Comme elle ne paya pas son amende, ses deux maisons en France [...] furent confisquées. » (p. 234).

     

    Voilà donc de bien peu recommandables personnages qui seraient entrés dans la vie d'un Léon Degrelle qui, pour avoir subi des préjudices semblables (mais sans avoir jamais été soupçonné d'avoir dépouillé qui que ce soit), ne s'en effarouchera certes pas. Selon Rodríguez, ils sont de toute façon à mettre dans le même sac, même si la Belgique ne pouvait représenter pour Hélène Cornette la même chose que pour Léon Degrelle et que les opinions géopolitiques que lui prête Rodríguez relèvent d'une évidente spéculation : « Ils partageaient un passé semblable, avec le souvenir de la Seconde Guerre mondiale, leurs expériences de vaincus et de condamnés, ainsi que les liens avec la Belgique. Ils partageaient aussi le diagnostic politique sur le danger que représentait l'Union soviétique. » (p. 235).

     

    Mais comment se sont-ils rencontrés ?

     

    Rodríguez va en faire le récit assorti de ses habituelles insinuations malveillantes (notamment quant à l'endroit où Hélène et sa famille auraient caché le produit de leurs brigandages) : « Pendant ces années [d'après-guerre], aussi bien le policier que sa famille conservèrent l'immunité diplomatique et leurs passeports aux fausses identités afin de voyager dans différents pays, y compris peut-être celui où ils avaient déposé une partie de leurs biens d'origine suspecte. Ils se rendraient également à Madrid. Ce sera surtout le cas d'Hélène qui alternait des séjours de plusieurs semaines une ou plusieurs fois par an, parfois seule avec son fils, et d'autres fois avec sa mère pour visiter ou recevoir leurs amis. C'est à cette époque qu'elle connut Pilar Primo de Rivera et Clarita Stauffer et il est fort probable que ce fut cette dernière qui présenta Hélène à Degrelle, entre lesquels se serait développée une histoire d'amour. » (p. 235). Gemma Aguilera n'est guère mieux inspirée en précisant que c'est « Léon Degrelle, ex-officier des Waffen SS condamné à mort pour crimes de guerre et alors protégé par le régime de Franco qu'Hélène connut à Madrid en 1946 grâce à des amis communs. » (p. 143)

     

    Cela nous semble pratiquement impossible car après son évasion de l'Hôpital Mola, le 21 août 1946, Léon Degrelle vécut, grâce au Cuñadisimo Ramón Serrano Suñer (ce blog au 5 août 2023), en sécurité mais strictement enfermé pendant plus d'un an dans une chambre de bonnes, Calle Goya à Madrid, chez un couple de vieux retraités ignorant son identité et ne parlant pas le français. « Le Chef de Rex [...] n'en sortit jamais une fois pendant les mois qu'il y passa. Il ne reçut aucune visite. C'était la claustration totale, car ainsi seulement sa sécurité était assurée. » (Mon Combat, p. 251).

     

     

     

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    Depuis sa disparition de l'Hôpital Mola de San Sebastián, la presse voit Léon Degrelle n'importe où : qui dans une meule de foin au pays basque (AFP, 23 août 1946), qui sur un bateau argentin (Daily Telegraph, 26 août 1946), qui en Irlande (La Libre Belgique, 6 septembre 1946), en Equateur (Le Monde, 21 septembre 1946), ou au Brésil (AFP, 18 novembre 1946)...

    Reprenant une « information » du Daily Telegraph, le quotidien flamand De Nieuwe Standaard publie une caricature de Léon Degrelle en route vers (ou revenant de) « Beunos Ayres » par le célèbre dessinateur flamand Marc Sleen (auteur de la populaire série Les Aventures de Néron et Cie, publiée dans les quotidiens belges catholiques de gauche Het Volk et La Cité). À gauche, « Le Daily Telegraph communique que, selon un rapport de Madrid, Léon Degrelle se trouve à bord du navire espagnol Monta Ayala de 2.955 tonnes affrété pour Buenos-Aires. Le navire a quitté Bilbao jeudi, jour où fut communiquée la disparition de Degrelle. » (De Nieuwe Standaard, 27 août 1946) ; à droite, l'illustration de Marc Sleen dans De Nieuwe Standaard, le 28 août 1946.

    Les 2 et 10 octobre 1947, La Dernière Heure, reprenant des informations de la presse italienne, révèle que Léon Degrelle serait le chef d'orchestre du Jazzband de l'Hôtel Rivadaria, à San Sebastián (dessin de Marcel Antoine, 1897-1959, chansonnier-dessinateur célèbre avant-guerre pour son personnage de Slache, héros caricatural bruxellois) : le Ministère des Affaires étrangères belge ne manquera pas de diligenter une enquête et son chargé d'affaires à Madrid lui enverra ses conclusions judicieuses : « L'Hôtel Rivadaria n'existe pas. [...] Je suis persuadé que Degrelle ne songerait pas à se produire dans un lieu aussi public qu'un restaurant connu de Saint-Sébastien. »

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    Ce n'est qu'à la fin de l'année 1947, quand purent s'assouplir ses conditions de vie que Léon Degrelle fit la connaissance de Clara Stauffer, par l'intermédiaire d'amis phalangistes, anciens de la Légion Azul, qui l'aidaient à correspondre avec sa famille de Bruxelles grâce à la valise diplomatique. Très impliquée dans l'aide aux réfugiés allemands pour gagner l'Amérique latine, elle connaît aussi Pierre Daye qui essaie alors de convaincre son ami Léon Degrelle de le rejoindre en Argentine.

     

    Est-ce au même moment qu'une rencontre avec Hélène Cornette eut lieu ? Nous en doutons également car, d'une part, Léon Degrelle envisageant sérieusement de s'installer à Buenos Aires ne développe alors de vie sociale qu'utile et profitable, évitant tout comportement imprudent ou périlleux. D'autre part, depuis mai 1946, Hélène Cornette et toute sa famille (mari, fils, mère) habitent, comme le souligne Gemma Aguilera, un appartement à Bruxelles et, par ailleurs, tout au long de l'année 1947, elle « accompagne son mari dans tous ses voyages en Hollande, au Luxembourg et en Suisse, alors que sa mère et le petit Jean-Louis poursuivent une vie normale dans la capitale. » (p. 128-129).

     

    L'année 1948 est, nous l'avons vu, celle où le couple fut lourdement condamné par la justice française et Pedro Urraca, promu inspecteur de première classe travaille alors au consulat général d'Espagne à Anvers et Bruxelles, chargé de la surveillance du Parti communiste espagnol en exil. Un poste qui le confine dans la sécurité des locaux de l'ambassade.

     

    Quant à Léon Degrelle, 1948 lui fut également une année des plus pénibles : il vit caché à Torremolinos dans un isolement quasi complet et apprend la mort en prison de son père et de son beau-frère Charles Raty. Sa blessure au ventre provoquée par l'explosion d'un obus sur le front du Caucase en 1942 s'infecte à nouveau, provoquant des hémorragies internes qui nécessitent une opération d'urgence. Elle se pratiquera en septembre, suivie d'une longue convalescence où il perdra une trentaine de kilos (une nouvelle opération chirurgicale sera nécessaire en octobre 1950).

     

    Ce n'est qu'au printemps 1949 que, grâce à son ami le ministre du Travail José Antonio Girón, il pourra trouver un logement sûr dans la grande finca sévillane de Majalimar où il demeurera jusqu'en 1954. Il y écrira son grand récit autobiographique Mon Combat (voir ci-avant), le poème Les Îles blanches resté inédit, le roman La Grande Bagarre (ce blog au 26 mai 2016) et Les Âmes qui brûlent, ouvrage, selon son traducteur espagnol, l'éminent académicien Gregorio Marañon, « étincelant comme une flamme, [...] d'une beauté impossible à surpasser », ce blog au 24 janvier 2023). C'est également de Majalimar qu'il se lancera dans ses premières affaires commerciales et industrielles (ce blog au 3 décembre 2024) lui permettant d'acquérir en 1952 un ancien vignoble dans le village de Constantina et d'y construire son vaste domaine de La Carlina où il emménagera définitivement en avril 1954, à la mort du propriétaire de Majalimar, emporté par un cancer de l'estomac.

     

     

     

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    Au-dessus, l'entrée principale de la finca Majalimar (photographie contemporaine) ; au-dessous, le pavillon où résida Léon Degrelle de 1949 à 1954. Ce vaste domaine agricole de 1200 ha appartenait au plus important industriel lainier de la région de Salamanque, Leandro Cascón Pablos (1883-1954), ami proche du ministre du Travail José Antonio Girón. Le pavillon occupé par Léon Degrelle, construit sur un promontoire dominant la finca, était protégé par une vaste clôture de fer forgé. L'entrée, décorée par des azulejos religieux, exprime le fervent catholicisme du propriétaire qui, tout comme Léon Degrelle (ce blog aux 2 septembre 2023 et 18 octobre 2024), effectuait fréquemment des pèlerinages, notamment en Terre Sainte. La faïence placée à droite de la porte de chêne ouvragé sous le portique d'entrée invoque la Vierge (« Ave Maria »). Au-dessus, un azulejo plus grand représentant le Christ qui désigne son cœur marqué par les stigmates de la Passion place l'habitation sous la protection du Sacré-Cœur : « Je bénirai les maisons où l'image de mon cœur sera exposée et adorée. Les personnes qui propagent cette dévotion auront leur nom gravé dans mon cœur et il n'en sera jamais effacé. »

    La tradition de consacrer sa demeure au Sacré-Cœur de Jésus remonte aux visions de Marguerite-Marie Alacoque qui, au XVIIe siècle, se vit chargée de propager le culte du Sacré-Cœur, ainsi qu'à l'institution officielle de sa fête par le pape Pie IX, deux siècles plus tard. Cette dévotion connaîtra un regain de popularité lors du Congrès eucharistique de Lourdes en août 1914 liant son culte à l'établissement de la royauté du Christ dans le monde. Comment le défenseur des Cristeros (ce blog, entre autres, au 7 février 2019), fondateur du mouvement Rex prêchant la révolution des âmes en l'honneur du Christ-Roi, n'y aurait-il pas été sensible ?

    Ci-dessous, à gauche, l'entrée du pavillon de Léon Degrelle (photographie contemporaine) ; à droite, Léon Degrelle amaigri par ses graves opérations de 1948 et 1950.

     

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    À suivre

     

     

  • Quoi de neuf ? Léon Degrelle !

     

     

    Notre blog l'illustre à suffisance : Léon Degrelle fait l'actualité quasi en permanence. Deux gros volumes le concernant viennent encore de voir le jour.

     

    Rex ter zege !

     

    Le premier, écrit en néerlandais par Bruno Cheyns, est sorti à la fin de l'année dernière et s'attache à l'histoire de Rex en Flandre : Rex ter zege Rex vaincra, Léon Degrelle et Rex en Flandre, 1935-1945 »).

     

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    Nous connaissons Bruno Cheyns pour sa biographie de Léon Degrelle, la première en néerlandais, Léon Degrelle, de Führer uit Bouillon  Léon Degrelle, le Führer qui venait de Bouillon », ce blog aux 10 décembre 2017 et 5 janvier 2018). Il s'attache cette fois à l'histoire de l'aile flamande du mouvement Rex.

     

    C'est par un article de l'hebdomadaire national-linguistique 't Pallieterke (ce blog, entre autres, au 23 février 2020) que nous avons eu connaissance de cette publication. En 2017, Bruno Cheyns nous avait invité à la présentation de son premier ouvrage, mais la réception (sans doute trop) critique que nous lui réservâmes nous a, cette fois, valu la punition d'être écarté des petits fours !

     

    Trève de plaisanteries (de plus, cette présentation se faisant en compagnie de la pythie imbuvable du Cegesoma Chantal Kesteloot –ce blog au 12 octobre 2023–, aucun regret donc !) : si la bibliographie concernant Léon Degrelle et son mouvement Rex en général est abondante, il n'existe par contre aucune étude particulière sur Rex-Vlaanderen. Et en cela, Bruno Cheyns fait certainement œuvre de pionnier.

     

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    Nous n'avons pas encore eu l'occasion de lire convenablement son volumineux ouvrage (quelque cinq cents pages !), mais nous épinglerons de son interview ces éléments quelque peu interpellants, en ce sens qu'ils illustrent l'éclairage biaisé qui, à nouveau, semble apporté à son étude.

     

    Selon l'hebdomadaire, l'auteur écrit dans son bouquin qu'aujourd'hui encore, on fait de la politique de « manière rexiste ». Et Bruno Cheyns de s'expliquer pour le Pallieterke.

     

    « Il est toujours tentant d'établir des parallèles, tellement il y en a. Mais nous devons être très prudents. Nous ne pouvons, par exemple, pas vraiment comparer la réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis à l'émergence du rexisme ou du communisme [sic !] dans les années 1930. Et pourtant, nous constatons toujours le même parcours : on parvient à capter le mécontentement social, il s'ensuit un bref succès électoral et après quelques années tout s'écroule comme un château de cartes, car il y aura toujours quelqu'un d'autre qui surgira pour mieux capter encore les frustrations.

    Le populisme n'est jamais durable. Et ça, Donald Trump l'a aussi compris. Il essaie de mettre sur pied un mouvement « Make Amerika Great Again » (MAGA) pour pérenniser son succès électoral. C'est la seule façon qui permette à ce genre de partis et de politiciens de pouvoir devenir un facteur d'importance à long terme. Rex n'y est jamais parvenu, le VNV un peu mieux. Pourquoi ? Parce que le VNV avait une base programmatique spécifique : la problématique flamande. Rex n'avait pas cette base. [...]

    De plus, nous constatons que les partis politiques négligent souvent délibérément l'aspect substantiel afin de capter autant que possible le mécontentement existant. C'est aussi ce que fit Rex à l'époque. Le parti a rarement adopté une position claire, car choisir, c'est tout simplement perdre. C'est aussi ce que nous voyons aujourd'hui : on fait rarement encore des choix clairs. C'est la meilleure façon de faire plaisir à tout le monde. La politique s'est adaptée à la nature volatile de l'électeur. La politique opte pour des programmes faciles à digérer. C'est un des côtés pervers de notre système démocratique. Une partie non négligeable de l'électorat est à la recherche de solutions faciles à des problèmes souvent très complexes.

    Dans les années 1930 aussi, nous avons constaté une infantilisation de la politique. Rex était le parti des solutions faciles. Il ne fallait surtout pas gratter trop profondément dans le programme. On verrait bien ce qui allait arriver. C'était d'ailleurs littéralement les termes de Degrelle : Nous verrons bien comment nous voterons. Je préciserai bien comment mes parlementaires voteront. La conséquence fut qu'aucun choix ne fut fait. À court terme, c'est pratique, mais au fil du temps, les électeurs perdent leurs illusions. C'est ce qui est arrivé chez Rex. Les partis aux programmes superficiels ne peuvent jamais satisfaire tous leurs électeurs. »

     

     

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    Bruno Cheyns au journal flamand 't Pallieterke : « En Flandre, nombreux furent les rexistes à rejoindre la résistance. » Son livre Rex ter zege s'ouvre d'ailleurs sur le récit du destin tragique du « rexiste » résistant Hubert d'Ydewalle qui, prisonnier en Allemagne, sera gravement blessé dans un bombardement allié et mourra dans d'atroces conditions dans un train de prisonniers évacués. Sauf que dès après les élections de 1937, Hubert d'Ydewalle avait rompu avec le rexisme. « D'Ydewalle voyait Rex dégénérer progressivement en une bande de profiteurs et d'opportunistes et se sentait trahi », analyse Bruno Cheyns.

    Selon Lionel Balland, dans un article biographique sur l'aristocrate flamand, il y a lieu d'être plus nuancé : « En juin 1937, Hubert d’Ydewalle quitte sa fonction de rédacteur en chef de l’organe de presse Le Pays Réel et celle de membre du Conseil politique de Rex pour diverses raisons : les fonds envoyés par le régime italien à Rex, le fossé entre Rex et le cardinal de Belgique [ce blog aux 8 avril 2017 et 13 mai 2018] et la personnalité de certains dirigeants de ce parti. [...] Des rexistes accusent d’Ydewalle d’avoir été contraint de laisser tomber Rex afin de sauver le futur héritage que son couple recevra de ses beaux-parents. » En effet, « À la suite des résultats des élections législatives du 24 mai 1936 qui voient la percée de Rex, la femme d’Hubert d’Ydewalle est menacée par son père, cadre du parti catholique, d’être déshéritée si Hubert ne rompt pas avec Rex »...

     

     

    Ainsi l'oracle Cheyns lance-t-il ses condamnations péremptoires associant, pour le discréditer, Trump au rexisme, réduisant son action et celle de Léon Degrelle à du « populisme » sans avenir et dénonçant l'absence de substance dans leur programme. Et de prophétiser d'ailleurs leur écroulement « comme un château de cartes »... À cela près que tout ce qu'il raconte du populisme nous semble tout autant si pas davantage adapté à la démagogie des partis traditionnels qu'au rexisme !

     

    Le richissime entrepreneur Donald Trump est avant tout un homme d'affaires qui veut urgemment rendre la prospérité à son pays en tranchant dans le vif pour l'immigration, les théories criminelles du genre, l'imposture climatique, les guerres inutiles, etc. En un mois, le bon sens est revenu au cœur de la gouvernance et des (bonnes) affaires aux États-Unis.

     

    Le tribun idéaliste Léon Degrelle voyait infiniment plus loin que les indispensables réformes matérielles. C'est la révolution des âmes qu'il entendait insuffler à ses compatriotes (mais pour Bruno Cheyns, ce ne sont là sans doute que des paroles en l'air) : « je m'étais dit, en voyant l'espèce de rébellion parfaitement normale du peuple, qu'il s'agirait de dégager celui-ci de l'égoïsme et du matérialisme, non pas en s'acharnant à promettre plus que Marx, qu'Engels, que Lénine, mais en essayant de repeindre de neuf chaque cœur délaissé, lassé, souillé, de recomposer une véritable communauté humaine, juste, fraternelle, de ranimer en elle les plus hautes vibrations d'âmes. » (Persiste et signe, p. 55).

     

    Cette profession de foi guidant son action dut naturellement être au cœur de la conversation impromptue entre Léon Degrelle, tout auréolé du triomphe électoral rexiste du 24 mai 1936, et Adolf Hitler. Apprenant sa présence à Berlin le 26 septembre, le Führer le fit en effet venir à la Chancellerie afin de jauger le discernement, le caractère, le cœur du jeune tribun.

     

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    Ce fut une « entrevue foudroyante ». Après avoir écouté « avec émotion ce jeune homme qui parlait avec passion de la grandeur du peuple auquel il appartenait », Adolf Hitler confia à son ministre des Affaires étrangères Joachim von Ribbentrop : « Je n'ai jamais vu de tels dons chez un jeune homme de cet âge » (ce blog aux 12 mai 2016 et 21 juin 2018).

     

    Léon Degrelle, quant à lui, entrait en communion avec « l'homme qui avait su redresser son pays, le sauver du chaos, de l'anarchie, de la misère, lui rendre une âme, une religion, une mission ». Rencontre qui se révéla décisive pour le reste de sa vie : « cette interprénétration instinctive, insaisissable pour le commun des mortels, nous a liés pour toujours sur le plan humain le plus haut. » (Persiste et signe, p. 181 ; sur les relations Léon Degrelle-Adolf Hitler, voir ce blog, entre autres, au 20 juillet 2018).

     

    Ce que Cheyns appelle « populisme », –en l'occurrence, un régime qui abandonne l'étalon-or pour l'étalon-travail, restaure la communauté nationale par la collaboration des classes, stimule chacun au service du bien commun, refonde un socialisme national–, et inévitablement destiné, selon lui, à l'effondrement « comme un château de cartes », produisit un empire populaire qui ne fut anéanti qu'au prix d'une effroyable guerre mondiale, emportant en même temps la promesse du renouveau bourguignon.

     

    Aujourd'hui, pour en parler, il semblerait qu'il faille s'aligner sur l'histoire officielle. Le site flamand Doorbraak a ainsi publié une recension de Rex ter zege par l'historien prolifique Pieterjan Verstraete qui, après avoir décrit le « panier de crabes » de Rex-Vlaanderen (« Degrelle [...] n'a cessé d'insulter ses partisans ») évoque la décomposition du mouvement dans toutes les directions, la collaboration (DeVlag, avec Jef Van de Wiele) comme la résistance (Armée secrète)...

     

    Beaucoup plus intéressante est l'interview publiée (en français) par Lionel Balland sur le site EuroLibertés.

     

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    Lionel Balland, spécialiste des mouvements nationalistes, est l'animateur infatigable du blog éponyme commentant « L'actualité des partis patriotiques en Europe » ; il est également l'auteur de l'indispensable Léon Degrelle et la presse rexiste.

     

    Est-ce la précision des questions posées ou la personnalité de l'interviewer, mais Bruno Cheyns répond de manière moins expéditive et beaucoup plus judicieuse que dans le journal flamand, même si nous ne partageons pas les présupposés antiflamands qu'il prête à Léon Degrelle (sur le « sentiment flamand » de celui-ci, voir ce blog au 10 juin 2016). Ne reproduisons donc ici que l'opinion de Bruno Cheyns, plus pertinente, sur la différence de traitement de la collaboration en Flandre et en Wallonie, expliquant certainement l'absence d'opposition nationaliste crédible dans la partie francophone de la Belgique.

     

    Si, après la IIe Guerre mondiale, la collaboration était mal vue, tant en Flandre qu’en Belgique francophone, au fil des années, la situation a semblé évoluer différemment en Flandre. Comment expliquez-vous cela ?

    La collaboration et la répression ont causé un traumatisme historique dans les deux parties du pays. Celui-ci y a, cependant, été traité d’une manière différente. Alors que le processus de remise en cause avait déjà commencé en Flandre au cours des premières décennies qui ont suivi la IIe Guerre mondiale, en Belgique francophone, il n’était tout simplement pas question d’aborder le sujet de la collaboration. Cela a créé la perception erronée que, en Belgique, il y avait principalement une coopération avec les Allemands du côté flamand, tandis que la Résistance s’était développée en Wallonie et à Bruxelles. En Flandre, la collaboration a été remise à l’ordre du jour politique par les nationalistes flamands dès les années 1950, de sorte qu’il y avait aussi beaucoup d’intérêt dans les cercles universitaires à dépouiller la collaboration de toute émotion et à la comprendre d’une manière plus scientifique. Cela a progressivement créé une image plus nuancée de la collaboration, ce qui a finalement également profité au processus de gestion du passé. En Wallonie, la collaboration a été presque complètement étouffée, d’abord par honte, mais peu à peu aussi pour des raisons politiques. La plupart des partis politiques wallons craignaient qu’une attitude plus nuancée à l’égard de la collaboration ne puisse à nouveau faire le lit de « l’extrême-droite ». Il était donc dans leur intérêt de maintenir en vie l’épouvantail, ce qui a très bien fonctionné. À ce jour, la Wallonie est l’une des seules régions d’Europe occidentale où l’ « extrême droite » n’a tout simplement aucune possibilité de percer.

     

     

    Une biographie « grand public »

     

    C'est un fidèle lecteur, M. Thibaut B., qui nous a prévenu de la publication d'une nouvelle biogaphie de Léon Degrelle, en nous fournissant le lien vers l'éditeur parisien Perrin.

     

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    Le texte de présentation se place résolument sous le même genre de calembour, –fiente de l'esprit qui vole selon Victor Hugo–, que le titre du film de Philippe Dutilleul (Léon Degrelle ou la Führer de vivre), Führex se voulant évidemment une variante explicative (mais appauvrie !) du sobriquet Fourex dont ses ennemis avaient affublé Léon Degrelle après la percée de Rex aux élections de 1936.

     

     

    Fourex Drapeau rouge 15.08.1936.png

    Le Drapeau rouge, 15 août 1936.

     

     

    L'annonce éditoriale se poursuit en prétendant publier la « première biographie grand public » du chef de Rex et dernier commandeur de la Légion Wallonie.

     

    Qu'est-ce que cela signifie ?

     

    Que les essais de Jean-Marie Frérotte (Le dernier fasciste), Arnaud de la Croix (Degrelle 1906-1994) ou Francis Bergeron (ce blog à partir du 30 avril 2016) sont réservés aux docteurs ès Lettres ou que les méchancetés de Charles d'Ydewalle (La triple imposture), Pol Vandromme (Le loup au cou de chien) ou Marc Magain (Un tigre de papier) ne valent rien ou pas grand-chose (nous serions là plutôt d'accord !), de même que les menteries des historiens stipendiés à la Collignon, Conway et De Bruyne  ? En tout état de cause, –et pour s'en tenir aux ouvrages publiés après la Deuxième Guerre mondiale–, la première véritable biographie grand public de Léon Degrelle est et reste –toujours aisément accessible sur le marché du livre d'occasion– le Degrelle m'a dit..., signé par Louise Narvaez, Duchesse de Valence.

     

    L'éditeur prétend surtout que cette nouvelle biographie constitue un portrait « sans a priori et sans complaisance », ce qui, tout compte fait, ne devrait normalement qu'être le propre de tout travail de recherche pour un historien consciencieux. Parlant de Léon Degrelle, il met néanmoins « ami de Tintin » entre des guillemets désapprobateurs et évoque un « partisan du négationniste Faurisson », évitant le terme plus adéquat de révisionniste...

     

    On nous a présenté l'auteur, Frédéric Saenen, comme un célinien doublé d'un spécialiste de Drieu La Rochelle. C'est sans doute vrai et nous sommes probablement bien coupable de n'avoir jamais eu la curiosité de le connaître. Ce sera bientôt chose faite...

     

     

     

    Historia mars 2025 b.jpg

    Le mensuel Historia daté de mars 2025 présente déjà l'ouvrage de Frédéric Saenen qu'il a probablement reçu en service de presse anticipé. Si tout ce qui est écrit là se retrouve effectivement dans le livre, ce n'est plus d'une « biographie grand public » que nous devrons parler, mais d'un énième opus politiquement correct ressortissant au bourrage de crânes obligatoire depuis la fin de la guerre...

     

     

    Attendons donc de voir, car la parution était annoncée pour le 20 février, mais notre petit libraire chez qui nous voulons garder nos habitudes ne nous l'a promis que pour cette fin de semaine.

     

     

    Je ne regrette rien

     

    Terminons par une note toute positive, avec ce petit livre nullement consacré à Léon Degrelle, mais écrit par un ami qui a déjà eu mille vies –dont nous pûmes partager une infime partie !

     

    Sous le titre « légionnaire » Je ne regrette rien, Francis Dossogne vient en effet de publier quelques séquences du film de sa vie.

     

    Dossogne recto.jpeg     Dossogne verso.jpeg

     

     

    L'auteur est bien connu des dénonciateurs compulsifs de l' « extrême droite » pour avoir compté parmi les fondateurs du Front de la Jeunesse (et aussi avoir été condamné, avec trois ou quatre autres supposés malfaiteurs –et néanmoins loyaux compagnons–, pour appartenir à un prétendu « noyau dur » de milice privée non autrement défini), avoir été journaliste au Nouvel Europe-Magazine, avoir représenté notre pays dans les réunions de l'Eurodroite (ce blog au 5 août 2023), etc.

     

    Mais cela ne constituera qu'une toute petite partie des multiples événements auxquels sa vie ultérieure de détective-baroudeur l'auront mêlé et dont il ne nous dira que ce qu'il nous sera permis de savoir.

     

    Le livre donne parfois l'impression de n'avoir pas été rigoureusement relu et sa concision laisse souvent le lecteur sur sa faim. Mais cette brièveté incisive aiguise toujours la curiosité, nous refusant la tentation d'abandonner la lecture avant d'avoir tourné la dernière page !

     

    Parmi les innombrables rencontres exceptionnelles jalonnant sa vie, il en est une que Francis n'oubliera certainement jamais et qu'il souligne dans ses souvenirs, c'est l'entrevue pétillante d'esprit et stimulante d'énergie avec Léon Degrelle. Le toujours flamboyant banni de Belgique accueillait volontiers ses jeunes compatriotes, surtout si comme lui, ils rayonnaient de foi et d'idéal.

     

    « Dans le mensuel [Nouvel Europe-Magazine], des textes de Léon Degrelle, de Giorgio Almirante et de Robert Brasillach avaient été, entre autres, fréquemment publiés qui faisaient écho à nos thèses et venaient sensiblement les soutenir et les exalter.

    Je me souvenais avec grande émotion de la Campagne de Russie, livre du premier auteur cité, qui avait été une référence pour nous tous en ce qu'il nous racontait son engagement dans la Légion Wallonie pour combattre le bolchevisme. Dans ma tête flottait cette description de paysage :

    Ces grands étangs étaient peuplés de milliers de joncs, pareils à des lances, hauts de trois mètres, surmontés de plumets bruns et roses... Le gel avait étreint les campagnes...

    J'avais aussi eu l'occasion de le rencontrer, en Espagne, alors qu'il était en exil loin de la Belgique. Un personnage qui m'était alors apparu bien plus grand que Napoléon dont l'homme politique avait d'ailleurs relativisé les victoires en disant qu'elles n'avaient duré que quelques journées...

    Il avait ajouté :

    – Bien peu de choses tout compte fait ! En gesticulant de tout son corps comme pris dans une transe. » (p. 77-78).

     

    LD Resto.jpg

     

     

  • Léon Degrelle, le « dictateur des cours de récréation » ?

     

    Bertrand de Jouvenel, revu par Robert Brasillach

     

     

    Récemment, nous démasquions une nouvelle fois la malhonnêteté du SoirMag qui republiait des fragments du Degrelle m'a dit de la Duchesse de Valence traficotés par feu Pierre Stéphany (ce blog au 4 février 2025).

     

    Nous dénoncions la malveillante citation « un dictateur pour cour de récréation”, comme devait dire Bertrand de Jouvenel, qui l'interviewa en 1936 », contrefaisant le texte original de la Duchesse rouge : « un article de Bertrand de Jouvenel, dépeignant Degrelle en 1936 avec une grande sympathie, écrivant qu'il avait dû, au collège, être un dictateur des cours de récréation. » Car, en effet, le dictateur pour cour de récréation (un pauvre chefaillon cherchant à terroriser ses condisciples), n'est pas celui des cours de récréation (exerçant son ascendant tout de séduction sur ses camarades).

     

    Nous insistions sur le fait que cette citation n'était connue que par la brochure de Robert Brasillach, Léon Degrelle et l'avenir de “Rex”, rappelant que Bertrand de Jouvenel « déclarait trouver en Léon Degrelle comme un souvenir du dictateur des cours de récréation qu'il avait dû être » et expliquant qu'il ne fallait pas prendre l'expression de manière négative car elle « met bien l'accent sur la jeunesse extraordinaire de [Rex] et sur la vertu de cette jeunesse. » Nous ajoutions enfin que, malgré toutes nos recherches, nous n'étions pas parvenu à retrouver « le journal parisien où a paru l'article de Bertrand de Jouvenel ».

     

    1 LD L'Assaut 20.10.1936 a.pngVoilà une quête désormais achevée, grâce à l'amitié de notre fidèle lecteur T.V., passionné d'Histoire, aux riches collections minutieusement cataloguées (ce blog au 23 janvier 2021), et qui a eu l'extrême gentillesse de nous envoyer cet article de Bertrand de Jouvenel, si important pour tous ceux qui évoquent –en bien comme en mal– la jeunesse de Léon Degrelle, mais jusqu'ici parfaitement introuvable !

     

    Cet article s'intitule L'expérience Van Zeeland et le coup de foudre Degrelle et a paru dans l'hebdomadaire français L'Assaut, le 20 octobre 1936, en septième page (mais l'article était annoncé en « une »).

     

    Ce L'Assaut n'est bien sûr pas à confondre avec son homonyme belge, Hebdomadaire de Combat de la Jeunesse, également intitulé L'Assaut donc –les runes de la SS figurant les deux « S » du titre–, et édité par le Prévôt et futur Hauptscharführer Pierre Mezetta, pour sa Jeunesse Légionnaire, à partir de mai 1944.

    3 L'Assaut n°2.jpeg

     

    Quelque huit ans auparavant, L'Assaut parisien, sous-titré Hebdomadaire de Combat politique et littéraire, se voulait « un journal libre », « inféodé à aucun chef politique, à aucun parti, à aucun groupement d'intérêts » (éditorial du n° 1, 13 octobre 1936).

     

    Imprimé par Robert Denoël, l'éditeur belgo-parisien de Céline, et domicilié à son siège social, L'Assaut était dirigé par l'écrivain Alfred Fabre-Luce, alors sympathisant du Parti Populaire Français de Jacques Doriot. Il connaîtra trente-quatre numéros, du 13 octobre 1936 au 8 juin 1937, avant d'être absorbé par le quotidien La Liberté, appartenant à Jacques Doriot (où continueront d'écrire Fabre-Luce et Jouvenel, mais aussi Georges Suarez, Georges Blond, Pierre Drieu La Rochelle,...).

     

    4 L'Assaut 13.10.1936'.png

     

    Bertrand de Jouvenel dresse donc ce portrait de Léon Degrelle dans le second numéro de L'Assaut  : « Il faut se représenter Degrelle comme un étudiant. Un étudiant qui grimpe sur les épaules d'une statue et harangue ses camarades. Eux l'applaudissent en riant. Parce qu'il a de l'ardeur, parce qu'il a du cran, parce qu'il a de la gaîté, parce qu'il est ce que tous voudraient être.

    Il est comme tout le monde”. Dans un groupe de ses partisans, on ne le distingue pas. Mais il est comme personne, parce que le groupe où il se trouve est soudain animé et joyeux.

    C'est un don. Au lycée, à l'Université, nous avons connu les meneurs : on se disputait les places proches de la sienne. [...]

    D'ordinaire, ce pouvoir mystérieux, qui fait les dictateurs de la cour du lycée, s'évapore. Le garçon qu'on a jadis idolâtré, on le retrouve éteint, terni, endormi dans une position subalterne. Degrelle, lui, a compris la valeur de ce pouvoir. Il en a recherché les causes. Il a étudié les moyens de le développer et de le maintenir.

    Degrelle, m'a-t-on dit, ne sait rien. Il est possible qu'il ne soit pas fort en économie politique. [...]

    Mais Degrelle, en tout cas, sait ce que les autres ne savent pas. Que la vie publique ne comporte pas seulement des rapports d'affaires entre le gérant et les administrés. Mais aussi des rapports d'amour.

    C'est un séducteur naturel, capable d'analyser le mécanisme de la séduction. Jusqu'où va l'amour qu'il inspire, un détail vraiment cocasse le montrera. Lorsqu'il a fait un de ses grands discours, Degrelle est en nage, et il change de chemise. La chemise quittée, il arrive qu'elle soit coupée en morceaux par ses partisans, qui veulent chacun son souvenir ! »

     

     

     

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    Portrait de Léon Degrelle par Sid, le caricaturiste maison, illustrant l'article de Bertrand de Jouvenel. Ci-dessous, un autre dessin pour le même article, montre deux messieurs au bar du Rendez-vous des Belges : ils se sont détournés de la République française (appelée la Gueuse par les monarchistes) pour consommer une « gueuse lambic » (encore que la bière bruxelloise s'écrive avec un « z » !) ...

    6 LD L'Assaut 20.10.1936 c.png

     

     

     

    La première chose que nous constaterons, c'est qu'il n'est nulle part fait mention de « cour de récréation », mais, en l'occurrence, des « dictateurs de la cour du lycée ».

     

    Ce qui veut dire que malgré ses allures d'enquêteur sur sources de première main, la référence du SoirMag, feu Pierre Stéphany, n'est en aucun cas « Bertrand de Jouvenel, qui l'interviewa [Léon Degrelle] en 1936 » ! Comme tous les contempteurs de Léon Degrelle –à l'instar du méchant folliculaire Pol Vandromme (ce blog aux 4 février 2025 et 14 avril 2016)–, il n'a que traficoté le texte rapporté par Robert Brasillach dans son ouvrage Léon Degrelle et l'avenir de “Rex”.

     

    Comme nous l'avons montré dans notre article précédent, c'est effectivement le journaliste de Je suis partout qui a rapporté les impressions de Bertrand de Jouvenel sur le jeune Léon Degrelle. Impressions toutes positives («  Au lycée, à l'Université, nous avons connu les meneurs : on se disputait les places proches de la sienne ») que Brasillach développera ainsi : « Bertrand de Jouvenel évoquait un jour ces garçons autour de qui, dans les lycées et les collèges, on se range naturellement, qui font la loi dans la classe, que l'on aime et que l'on admire. » (p. 14).

     

    C'est la phrase suivante de Jouvenel (« D'ordinaire, ce pouvoir mystérieux, qui fait les dictateurs de la cour du lycée, s'évapore ») que l'auteur de L'avenir de Rex va paraphraser en utilisant une formule qui permettra malheureusement le contresens médisant : « Et, bien que la plupart du temps, ces admirations ne survivent pas à l'âge d'homme, il déclarait trouver en Léon Degrelle comme un souvenir du “dictateur des cours de récréation” qu'il avait dû être. » (p. 14).

     

    On le voit, les guillemets utilisés ici ne concernent pas une citation, mais ressortissent plus exactement à la mise en relief de quelques mots. Et comme nul n'a jamais eu accès à l'original de L'Assaut, chacun a cru pouvoir mettre l'expression sous la plume de Jouvenel, tout en se permettant, bien sûr, de l'adapter à ses intentions malhonnêtes. Personne ne pouvant imaginer, bien sûr, que si Robert Brasillach n'utilisait pas les termes précis de son confrère, c'est qu'il le citait de mémoire (en se trompant ?)... ou qu'il voulait plutôt souligner l'originalité de sa propre expression.

     

    Mais où Bertrand de Jouvenel alla-t-il chercher que Léon Degrelle disposait de « ce pouvoir mystérieux, qui fait les dictateurs de la cour du lycée », pouvoir qui, contrairement à l'habitude, ne s'évapora point ? De ses conversations avec le chef de Rex ? Nous ne le croyons pas, à lire la réaction de celui-ci sur ce qu'on a raconté de sa scolarité (voir ci-après). Nous pensons que ces renseignements lui ont plutôt été fournis par des familiers, tel le nouveau député rexiste Usmard Legros, lui-même en train de préparer sa biographie Un homme... un chef.

     

     

     

    7 Usmard Legros PR 01.07.1936.jpgLe nouveau député de Rex, Usmard Legros sur les marches du Parlement belge (Le Pays réel, 1er juillet 1936). Il publiera en 1938 Un homme... un chef. Léon Degrelle, la première biographie du chef de Rex éditée en Belgique.

     

     

    Nous y lirons en effet ce portrait : « La pension, si elle lui est supportable, le change pourtant beaucoup. [...] Sa volonté décidée toujours tendue, son initiative continuelle étonnent ses professeurs et ses condisciples [...], car ils sont déconcertés par son caractère si entier. Élève espiègle, vif, spirituel, il agace parfois et fascine toujours par sa facilité et son abondance littéraires. [...] Voici la Poésie et la Rhétorique qui sont bien faites pour l'épanouissement des jeunes talents ! L'élève qui ne s'y révèle pas reste souvent toute sa vie un médiocre. Léon Degrelle s'impose de plus en plus dans la littérature qui l'attire. » (pp. 42-43).

     

    Bertrand de Jouvenel n'a bien sûr alors pas encore pu lire cette biographie, mais il a pu apprendre que dès ses études secondaires, Léon Degrelle, « ce gaillard débordant de santé et d'optimisme », a fasciné et séduit. Usmard Legros rapportera également cette querelle marquant l'autorité de l'adolescent s'imposant dans la cour de récréation : « un incident de récréation assez grave, marqua son entrée chez les Jésuites. Trop bouillant ou trop provincial on ne sait, il se prit de querelle avec un jeune pédant qui, au réfectoire, se servait d'un couvert frappé d'armoiries. Le jeune nobilion, au cours d'une discussion, lui lança son mépris, en criant “roture”. D'un bond, l'attrapant par la tête, Léon Degrelle le conduisit sous le robinet et l'aspergea d'abondance en lui disant : Roture te nettoie, défends toi Chevalier !”. Un préfet perspicace fit comme au tribunal, il punit les deux querelleurs pour coups réciproques... » (p. 42).

     

     

     

    8 LD L'Assaut E. d'Astier 06.04.1937 a.png

    L'Assaut, malgré l'article de Bertrand de Jouvenel salué par Le Pays réel pour avoir écrit avec « sympathie sur le mouvement rexiste, totalement incompréhensible pour la majorité des Français » (ce blog au 4 février 2025), n'est pas un journal favorable à Rex et à son chef Léon Degrelle. Il soutiendra d'ailleurs ouvertement Paul Van Zeeland lors de l'élection législative partielle bruxelloise du 11 avril 1937, notamment dans l'article ci-dessus signé, le 6 avril, par Emmanuel d'Astier. Le Soir s'en fera généreusement l'écho au matin même des élections : « Un hebdomadaire français, L'Assaut, créé par M. Fabre-Luce pour combattre dans son pays le Front populaire, vient de rendre au Premier ministre belge un hommage qu'il n'est pas superflu de reproduire ici. [...] Les Belges seront assurément sensibles à un hommage qui leur est ainsi indirectement rendu. Les électeurs de l'arrondissement de Bruxelles s'en souviendront dimanche. » (Le Soir, 11 avril 1937, p. 2).

     

    L'Assaut enfoncera encore son clou pro-Van Zeeland au lendemain de l'élection, le 13 avril, dans un article signé cette fois par son rédacteur en chef.

     

    9 LD L'Assaut Fabre 13.04.1937 a.png

     

     

     

    Léon Degrelle n'était sans doute pas vraiment d'accord avec l'image de son adolescence donnée par Jouvenel, car Robert Brasillach le reprend en insistant sur le bien-fondé de ce trait de caractère qu'il a lui-même traduit en « dictateur des cours de récréation » : « Je ne pense pas qu'on doive se fâcher de ce mot, et Léon Degrelle moins que quiconque. ». Et pourquoi ? Parce qu'il exalte par excellence la puissance triomphale de la jeunesse : « Il met bien l'accent sur la jeunesse extraordinaire de ce mouvement, et sur la vertu de cette jeunesse ». Et d'insister : « Il est aisé de voir que c'est à Louvain que s'est formé le dictateur des cours de récréation. Non que des préoccupations plus sérieuses n'aient pas, à cet instant, déjà conquis Léon Degrelle et ses amis. Mais on s'en voudrait d'oublier cette chaude atmosphère de gaieté, de brasseries, de chahuts d'étudiants, de passion joueuse, qui donne aux abstractions (la jeunesse aime toujours les abstractions) une telle couleur vivante. Il s'amusa beaucoup. En un siècle où ne sait plus rire, avoue-t-il franchement, nous avons ri. Et d'ajouter avec gravité : La farce est un apostolat. La farce est une école. On y apprend à être inventif, décidé. Qui sait si la farce, après tout, n'est pas une excellente préparation politique ? Au moins enseigne-t-elle le mépris des conformismes, sans lequel je ne crois pas qu'on puisse jamais rien faire de bon. » (pp. 14-15).

     

    En prétendant répondre à Bertrand de Jouvenel, c'est pourtant la formule précise de Robert Brasillach que la Duchesse de Valence reprend, preuve assez flagrante que Léon Degrelle avait encore moins apprécié l'expression « dictateur des cours de récréation » que « dictateur de la cour du lycée ».

     

     

    Lt 03.04.1937 Brasillach Almeras Rex.jpg

    Robert Brasillach s'est passionné pour Rex et Léon Degrelle. En voyage en Italie, il se presse de rentrer pour vivre à Bruxelles l'élection législative partielle du 11 avril 1937 qui opposa Léon Degrelle au Premier ministre Van Zeeland, candidat unique du Système. Ci-dessus, le mot adressé par l'écrivain-poète à son ami le journaliste Roger d'Almeras, annonçant son départ pour la Belgique. Son compte rendu sera bien entendu publié dans l'hebdomadaire Je suis partout du 17 avril 1937. L'article prend le parfait contre-pied d'Alfred Fabre-Luce, comme on le voit à travers cette présentation du talent oratoire du tribun de Rex.

    « Je crois être assez insensible à l'art de l'éloquence. [...] L'éloquence de Léon Degrelle m'a toujours plu parce qu'elle est simple, directe, jamais ennuyeuse, jamais fausse. Mais je n'ai jamais rien entendu qui approche le discours de Léon Degrelle à la veille de l'élection du 11 avril.

    Je plaindrais ceux qui n'y ont pas été sensibles. Dans cette foule debout, qui aurait dû être fatiguée par l'attente interminable, la chaleur, je n'ai vu que des visages tendus, émerveillés, et parfois de longs cris interrompaient Léon Degrelle. Lentement, l'orateur extraordinaire construisait son poème devant nous. Je ne puis employer d'autres mots. Déjà, un jour où il avait tenu neuf réunions, je le savais, à la dernière, il n'avait parlé que... du printemps. Les orateurs communistes venus pour manifester n'avaient pas bougé : manifeste-t-on contre le printemps ? Cette fois, c'est de son pays que parle Léon Degrelle. Il écarte la haine, la division. Parmi les soutiens de son adversaire, il trouve les assassins de prêtres, les brûleurs d'églises. [...] Mais lui, ce soir, puisque le mot d'ordre de M. Van Zeeland est : "Votez belge", il veut chercher à savoir ce que c'est que la Belgique.

    Et il fait le portrait de son peuple. Je pense à Péguy, avec ses mots charnels, sa patiente construction d'un univers. [...] De ses mains, il semble modeler un visage invisible. Et pendant une heure et demie, la Belgique, avec ses arts, ses paysages, ses saints, ses génies, son histoire, son Empire, devant nous s'anime et vit. Il parle de la mer par où s'en allèrent les conquérants et les saints, ces soixante-dix kilomètres de mer qui suffisent à la Belgique pour son rêve. A un moment il invoque ses rois morts, et je ne suis pas sûr que la foule, emportée par la ferveur, ne les ait pas vus, réellement, se lever dans la lumière. Je le répète, je n'ai jamais rien entendu de pareil. » (Je suis partout, 17 avril 1937, p. 5)

     

    Je suis partout 17.04.1937.png

     

     

     

    Rien n'assombrit jamais l'amitié que nouèrent les deux jeunes idéalistes : à la veille de son exécution inique, Robert Brasillach donnera encore à d'ultimes vers, le titre degrellien qui l'avait vivement impressionné quelque dix ans auparavant, Mon pays me fait mal (ce blog au 12 novembre 2020), et Léon Degrelle ne manqua jamais, de son exil espagnol, de rendre hommage au poète qui le marqua indéfectiblement (ce blog au 25 octobre 2019).

     

     

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    À gauche, la plaquette Mon Pays me fait mal, de Léon Degrelle, tirée en 1927 à 240 exemplaires ; à droite, le treizième des Poèmes de Fresnes, écrit par Robert Brasillach, à la veille d'être fusillé le 6 février 1945.

     

     

     

    Il n'empêche que Léon Degrelle ne se vit jamais en dictateur de quoi que ce soit, même pas des cours de récréation ! C'est ce qu'il tint à rappeler dans sa première biographie « autorisée », publiée sous la signature de Louise Narvaez, Duchesse de Valence. Nous avons vu (ce blog au 4 février 2025) comment, immédiatement, les points avaient été mis sur les « i ». La Duchesse affirmait n'avoir pas cru Bertrand de Jouvenel « dépeignant Degrelle en 1936 avec une grande sympathie, écrivant qu'il avait dû, au collège, être un dictateur des cours de récréation », et rapportait les propos mêmes de Léon Degrelle décrivant son entrée difficile au pensionnat :

    «  Jamais je n'avais quitté la maison, écrivit-il un jour. [...] De mon univers de gamin des bois, on me plongeait brusquement dans une lourde casemate, parmi deux cents “aristos”, à peu près tous garçons des villes, moitié noblesse, moitié grosse bourgeoisie. Je ne connaissais personne. Brusquement, ces hautes murailles grises, ces visages inconnus ! Je me cachais pendant la récréation, pour rester seul. À table, je me tenais muet, raide comme un piquet. On m'avait baptisé “amidon”. »

     

    L'anecdote de ce brocart, attesté par le principal intéressé, est tout de même assez incompatible avec l'histoire du « dictateur des cours de récréation ». Même Arnaud de la Croix, auteur d'une biographie faisant de Léon Degrelle –à l'instar, prétend-il, de son modèle Godefroid de Bouillon– un antisémite compulsif, a relevé cette invraisemblance : « De son côté, le journaliste français Bertrand de Jouvenel, qui interviewa Hitler en 1936, voit en Degrelle un dictateur des cours de récréation”. [...] Pourtant, dans son collège namurois, ses condisciples surnomment le jeune campagnard Amidon : un détail qui ne cadre guère avec le portrait supposé de meneur extraverti qui aurait, dès les années de collège, imposé aux autres son autorité. » (p. 22).

     

    Néanmoins l'expression, facile à détourner, est intéressante à conserver. Et donc, pour concilier les deux anecdotes, Stéphany, comme nous l'avons vu, va inventer une nouvelle origine au surnom : il proviendrait de l'insupportable arrogance de Léon à la chevelure gominée au Bakerfix (ce blog au 4 février 2025) !

     

     

     

     

    12 LD + Raty.pngLe collégien Léon Degrelle, à l'époque de ses deux dernières années d'humanités (Poésie et Rhétorique) : il a seize ou dix-sept ans, aux côtés de Charles Raty qui épousera Jeanne, sa sœur aînée (ce blog au 13 mars 2023).

     

     

    Pour connaître le vrai collégien Léon Degrelle, outre l'ouvrage –fidèle expression de Léon Degrelle lui-même– de la Duchesse de Valence, nous nous reporterons aussi sûrement vers l'autobiographie que l'exilé en Espagne écrivit pour ses enfants dont il était séparé depuis la fin de la guerre : elle fut publiée, dans les années 2000, sous le titre Mon Combat.

     

    « Collégien, il sera un élève à l'esprit vif, toujours en éveil, à la répartie vive ; les premières semaines lui paraîtront dures : il est dépaysé, il ne connaît personne, il se sent étranger dans ce grand collège où il croit qu'il ne s'habituera jamais... Il pense avec une nostalgie poignante à sa chère vieille maison si paisible, si accueillante, à ses parents, à sa mère surtout, et sa tendresse est grandie par l'absence... Très timide, un peu farouche même, il faudra tout un temps pour qu'il se lie à d'autres élèves ; il a l'impression qu'on rit de lui, car un garçon a imité, pour se moquer, son accent de Bouillon qui est plus dur que le parler chantant de la vallée de la Meuse. Et puis il est paralysé par la crainte de l'échec en classe : au Collège Saint Pierre, il était second ; bon ; mais on n'était que deux, et quand les oncles et tantes s'informaient de ses études, les sœurs criaient en s'esclaffant "il est dernier, dernier"... Ce qui était tout de même un peu vrai ; si cela devenait tout à fait vrai dans cette classe de trente élèves, quelle honte... Voilà les premiers concours. Qu'est-ce que cela va donner ? Le cœur battant, Léon attend les résultats. Quelle joie ! Il est parmi les premiers ! Du coup, il reprend confiance et voit le collège sous des couleurs plus riantes. Il quitte la classe en sifflotant dans le rang, ce qui lui vaut un bref rappel à l'ordre... Allons, ce n'est plus la vie quiète de Bouillon, ici, mais enfin, on peut y connaître aussi des bons jours ; et il écrira fièrement ses premiers succès à ses parents. » (p. 68).

     

     

  • Un "copié-collé" traficoté du livre de la Duchesse de Valence !

     

    Le portrait médisant de Léon Degrelle,

    dans le SoirMag

     

    Feu Jean-Paul Chayrigues, marquis de Olmetta, a livré, dans ses Portraits anecdotiques, de Jean Gabin à Jany Le Pen, des souvenirs sur Léon Degrelle, parfois embellis par une mémoire –noblesse oblige– plutôt encline à l'idéalisation qu'au dénigrement (ce blog au 23 janvier 2025).

     

    Rien de tout cela, bien au contraire, chez le très politiquement correct SoirMag ! Voilà plusieurs semaines qu'il publie quelques « bonnes pages » d'un vieux bouquin de 2017 sur la Belgique de l'entre-deux-guerres commis par Pierre Stéphany (1925-2020).

     

    Concernant la Belgique des années 30, il fallait bien qu'on en arrivât à parler de Léon Degrelle. Et c'est ce qui est arrivé cette semaine. Mais sans la moindre empathie pour son sujet, ni même la distanciation que l'objectivité eût dû apporter à l'écriture.

     

     

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    Le SoirMag veut nous parler du Léon Degrelle des années 1920-1930 (il est alors âgé d'entre 14 et 24 ans), mais pour illustrer son propos, rien de tel que des photos anachroniques de la maturité : le congrès refondateur de Lombeek, le 10 juillet 1938 (ce blog au 15 mars 2024 ; Léon Degrelle a 32 ans !) ou, mieux car il y a des croix gammées, le discours au Palais de Chaillot, à Paris, le 5 mars 1944 (Léon Degrelle a 37 ans !)...

     

     

    Mais si chez les gens bien nés, le bon sang ne peut mentir, chez les pisse-copies de l'histoire officielle, c'est la course aux affirmations gratuites, aux travestissements, aux mensonges délibérés, aux insultes... Plus le temps passe d'ailleurs, moins il y a de retenue : la surenchère aux affabulations les plus délirantes est seule admise. Tant, faut-il croire, il est important –essentiel !– de laver le cerveau de nos contemporains et d'y boulonner le postulat du on sait où ça a mené ! Et du plus jamais ça !...

     

    Rien de positif ne peut plus être dit sur Léon Degrelle et ça commence donc dès avant sa naissance : « dans ce jardin [de l'Association Catholique de la Jeunesse Belge] apparut un jour, par un de ces accidents qu'en botanique on appelle aberration, une fleur phénoménale et bientôt monstrueuse »: Léon Degrelle, « le saltimbanque dépourvu du sens des réalités à cause de qui des milliers d'hommes connurent la mort et le déshonneur » !

     

    Après une telle « mise en bouche » outrancière et extravagante, nous voilà prévenus : tout ce qui sera dit sur Léon Degrelle, même les choses les plus anodines, sera au moins placé dans un contexte négatif.

     

    Ce traitement résolument hostile est d'autant plus spectaculaire que tous les renseignements sur l'enfant de Bouillon consisteront en simples copiés-collés traficotés de la biographie publiée par la Duchesse de Valence, Degrelle m'a dit, mais bien sûr sans jamais le dire, comme si les infos provenaient de recherches personnelles !

     

     

    Une famille catholique

    Pour éclairer son engagement de « meneur d'âmes », la Duchesse de Valence écrit : « Léon Degrelle eut trois oncles jésuites. Son père en avait eu trois, lui aussi. Un autre oncle de Léon Degrelle était curé de campagne ». Et de conclure logiquement : « Au fond, je crois, le grand rêve de sa vie eût été d'être un meneur d'âmes. [...] Pendant des années, il ne fut, au fond de lui-même que cela : un croyant qui voulait projeter sa foi dans la vie des autres. » (p. 29).

     

    Dans le SoirMag, cela devient : « Léon Degrelle avait à lui seul trois oncles jésuites et un autre curé. » Mais la conclusion est autre car la religion ne peut évidemment avoir aucune prise sur lui : « On le mit en pension à Namur dans un collège dont le nom lui convenait mal : Notre-Dame-de-la-Paix. »

     

    Léon Degrelle n'est-il pas en effet qu'un homme cherchant la bagarre, les disputes, l'affrontement ?...

     

     

     

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    Une famille unie dans la foi : l'enfant de chœur Léon Degrelle (à gauche, dix ans) lors de la Communion solennelle, en 1916, de sa sœur aînée Madeleine, douze ans (ce blog au 20 mars 2020) ; à droite, son petit frère Édouard, huit ans, également enfant de chœur, qui sera assassiné dans sa pharmacie, le 8 juillet 1944 ; à l'avant-plan Louise-Marie, neuf ans, et Suzanne, la petite dernière, née quelque quatre ans plus tôt. Le petit Léon servira ponctuellement la messe du matin du curé de Bouillon : « Comme tous les Degrelle, il posséda dès son enfance une foi vive, priant avec passion, partant, dès l'âge de huit ans, chaque matin, à cinq heures et demie, à travers l'ombre, la neige, les pluies de l'hiver ardennais, à l'église de sa paroisse. » (Degrelle m'a dit, p. 29).

     

     

     

    Le surnom

    Interrogé par la Duchesse de Valence, Léon Degrelle a raconté la brutalité du changement que représenta dans sa vie son entrée au pensionnat des jésuites namurois : « De mon univers de gamin des bois, on me plongeait brusquement dans une lourde casemate, parmi deux cents “aristos”, à peu près tous garçons des villes, moitié noblesse, moitié grosse bourgeoisie. Je ne connaissais personne. Brusquement, ces hautes murailles grises, ces visages inconnus ! Je me cachais pendant la récréation, pour rester seul. À table, je me tenais muet, raide comme un piquet. On m'avait baptisé “amidon”. » (Degrelle m'a dit, p. 37).

     

    Dans le SoirMag, cette expérience de harcèlement qui eût pu être traumatisante, devient au contraire la manifestation hautaine du mépris qu'avait l'adolescent déraciné pour ses condisciples: « Péremptoire, l'oeil noir impérieux, le nez en avant et les cheveux collés au Bakerfix, il impressionnait ses condisciples, qui le surnommèrent “l'amidon” ».

     

    Nous sommes ici dans une pure fabulation : Léon Degrelle vient d'expliquer l'origine du surnom par son maintien « raide comme un piquet », mais l'antirexiste de service prétend plutôt y voir la dénonciation de son attitude prétentieuse, « les cheveux collés au Bakerfix » ! Rappelons-nous que nous sommes en 1921 et que Léon Degrelle vient d'avoir quinze ans. Nous pourrons alors difficilement nous imaginer le gamin exilé sortir du dortoir du pensionnat jésuite les cheveux consciencieusement gominés ! D'autant plus que la brillantine Bakerfit promotionnée par la sulfureuse Joséphine Baker n'arriva en Belgique que dans les années... 1930 !

     

     

     

    Bakerfix LLB 08.04.1931.png

    La première apparition publicitaire de la marque Bakerfix dont Stéphany se gargarise en voulant se moquer de la coquetterie supposée du jeune Léon Degrelle en 1921 ne se retrouve que dans le quotidien catholique bruxellois La Libre Belgique du 8 avril 1931. Ci-dessous : publicités explicitant le nom de la marque par celui de l'artiste (Le Soir, 3 avril 1933 ; La Dernière Heure, 12 octobre 1933).

    Bakerfix Soir 03.04.1933.png   Bakerfix DH 12.10.1933.png

     

     

    Pourtant Léon Degrelle a bien expliqué comment il a pu se débarrasser intelligemment de ce surnom : « Les programmes des Jésuites ne correspondaient pas avec ceux de mon “Institut”. J'étais d'un an en retard en mathématiques et en grec. Mais les Jésuites sont des maîtres-hommes. Au bout de huit jours, mon professeur m'avait pris en main. Le premier concours était le concours de français, heureusement. Je sortis premier sur trente. Le soir même, le sobriquet “amidon” disparaissait. Oui, j'ai pioché. Dès la fin du trimestre, j'avais rattrapé la classe en mathématiques et en grec, et j'obtenais dans ces deux branches les huit dixièmes des points. » (p. 38)

     

    Mais le chroniqueur de l'entre-deux-guerres, apprenant cette faiblesse momentanée en mathématiques, va la traiter bien différemment : « En mathématiques, il apprit juste de quoi pouvoir plus tard bricoler des lettres de change et trafiquer des comptes afin d'éteindre une dette en en faisant une autre » !

     

    Léon Degrelle n'est-il pas en effet qu'un escroc ?

     

     

    Gabriele d'Annunzio

    Neuf pages plus loin, la Duchesse de Valence explique comment Léon Degrelle connut par la presse« le coup de Fiume » de Gabriele D'Annunzio et « la marche sur Rome » des Chemises Noires (ce blog au 3 mai 2024) : « Au moment du coup de force sur la ville adriatique de Fiume [par le grand poète et condottiere italien Gabriele d'Annunzio], Léon Degrelle, âgé alors d'une douzaine d'années, était en vacances de Noël chez un cousin, curé de village et humaniste. Cet intellectuel était abonné à quatre journaux, ce qui avait paru au petit Léon Degrelle une magnificence absolument fantastique. » (p. 47)

     

     

     

    LD 12 ans.pngLéon Degrelle a douze ans lorsqu'il s'enthousiasme pour le Condottiere à l'extravagance poétique, Gabriele d'Annunzio.

     

     

     

    Pour le SoirMag, il s'agit là de l'origine fasciste du personnage et de sa prétendue obsession du pouvoir : « un jour, en vacance chez l'oncle curé, Léon constata que celui-ci était abonné à quatre journaux. Le garçon les dévorait tous. C'est là qu'il apprit l'aventure de Mussolini et découvrit d'Annunzio, le poète condottière –“Giovinezza, primera di Belleza...”– dont les vers poussaient les jeunes à rejoindre les Chemises noires. L'idée fixe du pouvoir » !

     

    Léon Degrelle n'est-il pas en effet qu'un fasciste avide de puissance despotique ?

     

    Il nous faudra tout de même apprendre à la gazette –nous voulons croire qu'elle n'a pas été capable de recopier le texte original– que l'hymne fasciste n'est pas « Jeunesse, première de Beauté », mais « Jeunesse, Printemps de Beauté » : Primavera et non Primera ! À l'évidence, les collaborateurs du SoirMag n'ont malheureusement jamais pris plaisir à chanter cet hymne, à la mélodie entraînante et plutôt grisante.

     

     

    Bertrand de Jouvenel

    Ces contresens présentés comme des évidences constituent le fonds de commerce de l'échotier acquis au wokisme, comme on dit maintenant. Il poursuit donc sa démonstration en faisant semblant de se placer sous l'autorité d'un écrivain français qui aurait percé son contemporain à jour : « Ainsi se préparait “un dictateur pour cour de récréation”, comme devait dire Bertrand de Jouvenel, qui l'interviewa en 1936. » Mais l'imposteur n'a, pour sûr, pas lu le texte original (il aurait d'ailleurs été bien en peine de citer le titre du journal de 1936 ! il ne s'agit d'ailleurs pas d'une interview, mais d'un article comme le disent tous ceux qui en parlent en connaissance de cause). Sans doute seulement, comme pour tout son article, n'a-t-il lu que l'évocation de la Duchesse de Valence expliquant la parfaite bienveillance de l'écrivain qui, à son avis, se trompait en utilisant cette expression de manière conjecturale : « J'ai relu, dans un journal parisien, un article de Bertrand de Jouvenel, dépeignant Degrelle en 1936 avec une grande sympathie, écrivant qu'il avait dû, au collège, être un dictateur des cours de récréation. Je n'en crois absolument rien. Toutes les confidences que Degrelle m'a faites sur ces années de collège me donnent, au contraire, la certitude qu'il vivait, comme il a toujours vécu, en marge des autres ; distant (c'est-à-dire replié dans la compagnie de ses pensées), il devait être peu liant et peu lié. » (p. 52).

     

    Nous n'avons pas retrouvé le journal parisien où a paru l'article de Bertrand de Jouvenel (qui, en 1936 toujours, publia dans Paris-Midi une interview fracassante d'Adolf Hitler : ce blog au 7 septembre 2021). Sans doute cet article doit-il exister car Le Pays réel du 14 mars 1938 s'en souvenait encore : « Bertrand de Jouvenel, journaliste de grande classe, est un des rares esprits d'outre-Quiévrain qui se soient penchés avec intérêt et sympathie sur le mouvement rexiste, totalement incompréhensible pour la majorité des Français. »

     

     

     

    Paris-Midi 22.03.1936 LD.png

    C'est dans le Paris-Midi du 28 février 1936 que Bertrand de Jouvenel publia, en exclusivité, une interview sensationnelle du Chancelier allemand Adolf Hitler. Un mois plus tard, le 22 mars, le même journal publiait un portrait en demi-teinte de Léon Degrelle, mais d'une autre illustre signature. C'était le premier volet d'une série Trois candidats dictateurs se disputent la Belgique (le second concernait Joris Van Severen, raciste et chef des “Dinasos” ; le troisième, Paul Hoornaert, fasciste et chef de la “Légion Nationale”). Ces reportages étaient l’œuvre de Jacques Ploncard (d'Assac, 1910-2005), condamné à mort en 1947, réfugié au Portugal où il sera conseiller du Premier ministre Salazar ; auteur reconnu de nombreux ouvrages sur le corporatisme, le nationalisme, la franc-maçonnerie, le communisme,...

     

     

    Mais le tout premier à évoquer la bienveillante curiosité de Bertrand de Jouvenel pour Léon Degrelle est Robert Brasillach, dans son opuscule Léon Degrelle et l'avenir de “Rex” (ce blog au 12 novembre 2020). C'est d'ailleurs lui qui est à l'origine des références postérieures.

     

    Robert Brasillach cite le mot, mais en le commentant abondamment, pour bien préciser le sens tout positif à donner à l'expression insolite utilisée par Jouvenel : « A son sujet [Léon Degrelle], Bertrand de Jouvenel évoquait un jour ces garçons autour de qui, dans les lycées et les collèges, on se range naturellement, qui font la loi dans la classe, que l'on aime et que l'on admire. Et, bien que la plupart du temps, ces admirations ne survivent pas à l'âge d'homme, il déclarait trouver en Léon Degrelle comme un souvenir du “dictateur des cours de récréation” qu'il avait dû être. Je ne pense pas qu'on doive se fâcher de ce mot, et Léon Degrelle moins que quiconque. Car il met bien l'accent sur la jeunesse extraordinaire de ce mouvement, et sur la vertu de cette jeunesse, malgré les railleries des gens de bon sens. Il est aisé de voir que c'est à Louvain que s'est formé le dictateur des cours de récréation. Non que des proccupations plus sérieuses n'aient pas, à cet instant, déjà conquis Léon Degrelle et ses amis. Mais on s'en voudrait d'oublier cette chaude atmosphère de gaieté, de brasseries, de chahuts d'étudiants, de passion joueuse, qui donne aux abstractions (la jeunesse aime toujours les abstractions) une couleur vivante. » (p. 14).

     

     

     

    LD ACJB+Nothomb.jpg

    L'étudiant Léon Degrelle vu par Alidor (Jam, au Pays réel), face à l'un des pisse-vinaigre qui deviendra un ponte du Parti Catholique, le sénateur Pierre Nothomb (qui, à la demande de Léon Degrelle, écrira néanmoins en quelques jours pour les éditions Rex, Le Roi Albert, au lendemain de l'accident mortel du souverain, le 17 février 1934).

     

     

    Singulière, l'expression le fut assurément, qui connut une fortune telle que c'est généralement tout ce qu'on retient de Jouvenel quand on parle du rexisme. Mais c'est le plus souvent en maquillant son propos. C'est ainsi que Stéphany fait de « dictateur des cours de récréation », « dictateur pour cour de récréation ». Ce qui signifie que le dictateur qu'aurait aspiré à être Léon Degrelle n'était tout juste bon qu'à exercer ses abus de pouvoir dans les cours de récréation des écoles. Alors que Jouvenel, supputant la biographie de Léon Degrelle, voulait dire –comme le souligne Brasillach– que le jeune collégien jouissait d'une telle autorité naturelle dans son école qu'il avait sûrement dû être le dictateur de ses cours de récréation. On verra aussi pareil travestissement non anodin chez le vieux méchant atrabilaire Pol Vandromme prétendant citer Jouvenel, mais écrivant « dictateur de cour de récréation » (Le loup au cou de chien, p. 19 ; ce blog au 14 avril 2016) : le passage du pluriel au singulier marque aussi un changement de sens. Il entend ridiculiser le prétendu apprenti-dictateur, en raillant jusqu'à sa dénomination par son déterminant : un dictateur de cour de récréation, c'est un dictateur pour rire, un dictateur de carnaval !...

     

    Le décor sournoisement calomnieux étant planté, Pierre Stéphany peut désormais mettre allègrement ses pas dans les poncifs injurieux des pseudo-historiens officiels (ce blog, entre autres, au 18 mars 2016) : c'est ainsi que l'étudiant des jésuites qui, en 1925, se fit avec succès le champion de Charles Maurras auprès des jeunes catholiques belges (ce blog aux 29 mars 2017 et 2 mars 2021) n'est qu'un « démagogue dont l'égocentrisme agité allait sous peu tourner à la paranoïa », « l'hurluberlu qui avait été le boutefeu » de la condamnation par l'Eglise de l'Action française...

     

     

     

    Pays réel 03.11.1936 Maurras.pngLa condamnation du Vatican en 1926 n'empêche pas Charles Maurras de poursuivre son combat politique. Ses articles virulents contre Léon Blum le feront condamner dix ans plus tard à la prison ferme pour « complicité de provocation au meurtre ». Il purgera sa peine à la prison de la Santé du 29 octobre 1936 au 6 juillet 1937. Le Pays réel publie cet écho le 3 novembre 1936.

     

     

    L'auteur de ce pensum inutile et sans intérêt est décédé depuis quelque cinq ans. Sa longévité rédactionnelle vient certainement de son talent manifeste de raconteur d'histoires : ce fut un prolifique scénariste de bandes dessinées pour l'hebdomadaire Tintin des années 50 à 80, avant de se faire le ragoteur singulier d'affaires criminelles piquantes ou d'épisodes de guerre romancés de manière insolite.

     

    Un des sommets de son art de potins de commère est sans doute son gros bouquin (350 pages) sur Le monde de Pan, l'hebdomadaire satirique bruxellois animé par Alidor, l'ancien Jam de Rex. Là aussi, sa petite vingtaine d'évocations de Léon Degrelle seront prisonnières des clichés obligatoires pour se faire publier... Ainsi de son talent oratoire : il fallait « écouter l'aspirant dictateur lors des meetings délirants qu'il donnait au Palais des Sports à Bruxelles dans le plus pur style hitlérien [...] avec lequel le comédien fanatisait les foules. » (p. 175)

     

     

  • Le portrait « anecdotique » de Léon Degrelle, par Jean-Paul Chayrigues de Olmetta

     

    C'est par un court article de Robert Spieler dans le numéro spécial historique de Rivarol consacré à la disparition de Jean-Marie Le Pen que nous avons appris la parution des Portraits anecdotiques de Jean-Paul Chayrigues de Olmetta, malheureusement décédé le 4 décembre 2024, trois mois seulement après cette publication.

     

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    Le passionnant rédacteur de la toujours spirituelle et instructive Chronique de la France asservie et... résistante se faisait l'écho du récit fait pas le « Marquis » (les guillemets sont de R. Spieler ; Jean-Paul Chayrigues 1943-2024 était, paraît-il, marquis de Olmetta) de l'incendie criminel de la maison de Jean-Marie Le Pen en 2015 : l'encore président d'honneur du Front National, âgé alors de 86 ans, put échapper à une mort atroce en sautant par une fenêtrre du premier étage ! Robert Spieler terminait son article en précisant que le livre du Marquis comportait également, parmi de nombreux autres, des souvenirs sur Léon Degrelle.

     

    Nous nous sommes rapidement procuré le livre pour découvrir un peu moins de trois pages d'évocations fort sympathiques, mais fourmillant d'informations non vérifiées, constituant probablement autant de réminiscences contaminées par une mémoire infidèle.

     

    Les erreurs se nichent en effet un peu partout dans les détails historiques : ce n'est pas « dans sa vingtième année » mais dans sa trentième que Léon Degrelle constitua le mouvement REX (et non le parti : ce blog au 12 novembre 2020) et on ne peut vraiment pas dire que son succès électoral de 1936 ainsi que les « foules considérables » qu'il entraîna (ainsi des 60.000 participants au formidable congrès de Lombeek, le 10 juillet 1938 : ce blog au 15 mars 2024), se firent « avec la bénédiction des plus hautes autorités religieuses » ! Car dès 1934, l'évêque de Tournai fit échouer le « Banquet des 7000 », grandiose réunion des jeunes catholiques sous la bannière rexiste ; un an plus tard, le 20 novembre 1935, un décret de l'épiscopat enjoignit les religieux belges à rester à l'écart de Rex, interdit la vente de ses journaux aux portes des églises ainsi que toute activité rexiste aux abords des collèges et instituts catholiques ; en mars 1936, l'Action Catholique de la Jeunesse Belge déclara inadmissible l'adhésion de ses membres au mouvement rexiste ; enfin, l'hostilité des « plus hautes autorités religieuses » au rexisme culminera dans le fameux « coup de crosse » du cardinal-primat de Belgique, le 9 avril 1937, à l'avant-veille même des élections opposant Léon Degrelle au Premier ministre Van Zeeland, candidat unique du rassemblement « démocratique » d'opposition à Rex de tous les partis (communistes compris !) : l'archevêque de Malines interdisait aux catholiques non seulement de voter pour Léon Degrelle, mais également de se réfugier dans l'abstention (ce blog au 6 mai 2016) !

     

     

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    À la Une de la presse « démocratique », le 10 avril 1937 : ci-dessus, Le Vingtième Siècle, quotidien catholique où, quelque huit ans auparavant, Léon Degrelle fit ses éclatants débuts de journaliste d'investigation (ce blog au 7 février 2019) ; ci-dessous, Le Peuple, quotidien socialiste, La Dernière Heure, quotidien libéral, et Le Soir, quotidien franc-maçon.

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    De même, si « Léon Degrelle s'engage sur le front de l'Est sous l'uniforme allemand », ce n'est pas qu' « aveuglé par son anticommunisme viscéral », mais éclairé surtout par la nécessité de rendre une place honorable à la Belgique au sein de l'Europe nouvelle (ce blog au 2 novembre 2020).

     

    L'odyssée depuis la Norvège jusque l'Espagne atteinte à la dernière extrémité est également imaginaire alors qu'en l'occurrence, la réalité est aussi palpitante que la fiction : « Aux commandes de son petit avion [en réalité le gros Heinkel 111 du ministre Speer piloté par le pilote Albert Duhinger : ce blog au 20 mai 2016], alors qu'il fuyait sans trop savoir où [en réalité, le seul port de salut était bien l'Espagne, dont la frontière était théoriquement accessible au rayon d'action de l'avion : ce blog au 19 septembre 2024], il s'écrasa sur une plage de Malaga... » [à court d'essence, l'avion s'écrasa plutôt sur celle de San Sebastián, à la frontière franco-espagnole : Málaga, quelque 800 km plus loin, à l'autre extrémité de la péninsule, était absolument inaccessible !].

     

    Concernant les cendres du défunt, la réalité dépasse, là, de loin la fiction, car si Léon Degrelle n'a nullement « imploré la grâce d'être enterré en terre belge dans une ultime supplique à son souverain  », le roi des Belges a quand même signé une dernière Lex Degrelliana « d'interdiction d'accès au territoire belge des restes mortels de Léon Degrelle » (ce blog au 31 mars 2019). Une partie des cendres est cependant bien en Belgique : pas « dans la campagne bruxelloise », mais au Tombeau du Géant Léon Degrelle, dans sa terre natale ardennaise de Bouillon (ce blog aux 31 mars 2019 et 15 juin 2024).

     

     

     

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    Le dessin de couverture ainsi que les illustrations des têtes de chapitre sont l’œuvre de Françoise Pichard, mieux connue sous le pseudonyme Chard, son nom de dessinatrice de presse pour l'hebdomadaire de l'opposition nationale et européenne, Rivarol.

     

     

     

    Nous regretterons enfin que le Marquis se soit laissé influencé par les soi-disant tintinologues en écrivant que Léon Degrelle « aurait servi de modèle à Hergé pour Tintin... On comprend que le célèbre dessinateur ait toujours démenti ! »

     

    En vérité, Hergé n'a jamais rien démenti, ne fût-ce que parce que cette filiation n'a été explicitée par Léon Degrelle que dans Tintin mon copain, l'hommage qu'il rendit à Hergé après son décès (l'aveu lui avait néanmoins déjà échappé du vivant du dessinateur en 1975 dans ses interviews à Jean-Michel Charlier : ce blog au 2 mai 2016). Il s'y en est d'ailleurs expliqué très simplement : « Dans mon refuge, je n'allais pas compromettre un vieux frère comme Georges, qui avait déjà fort à faire pour désherber dans ses albums les quelques nez crochus que la Résistance avait dénichés à la loupe ! » (Tintin mon copain, p. 195 ; ce blog au 5 janvier 2022). Pour sa part, Hergé n'a jamais hésité à rendre hommage à son ami Léon Degrelle ainsi qu'à lui reconnaitre explicitement sa dette dans sa conception de la bande dessinée (ce blog au 1er février 2016).

     

    Cela dit, l'amicale sympathie de Jean-Paul Chayrigues de Olmetta pour Léon Degrelle ne fait aucun doute, ses approximations ne relevant que du journalisme radiophonique, rédigeant de mémoire de brefs portraits non destinés originellement à la publication.

     

    On retiendra donc avec plaisir ces phrases chaleureuses (l'étonnement naïf de l'auteur s'émerveillant que Léon Degrelle pût utiliser « un français parlé parfaitement alors qu'il n'en avait plus la pratique quotidienne depuis des décennies » est plus qu'attendrissant) et rendant justice à l'histoire du désormais proscrit, mais aussi à la clairvoyance de celui qui analyse pour lui la situation géopolitique du moment  :

    « Oui, j'ai aimé rencontrer plusieurs fois Léon Degrelle. Combattant héroïque, de simple soldat il deviendra général, décoré de la croix de fer par Hitler lui-même. Le Führer dira que Degrelle est le fils qu'il a rêvé d'avoir. Léon, lui, se posera en héritier spirituel du chef du Troisième Reich. Nous étions en pleine guerre du Golfe et le raisonnement politique de Léon prouvait sa connaissance du dossier. La hauteur de vue et les analyses politiques sont éblouissantes. »

     

    Nous aurions aimé néanmoins que l'auteur en dise davantage sur la réunion qu'il put surprendre « dans un grand hôtel de Palma de Majorque » où « dans une immense salle à manger, décorée de bannières à svastikas et d'un portrait d'Hitler, une cinquantaine d'officiers supérieurs du Troisième Reich en uniformes d'été de cérémonie (blancs) constellés de décorations, festoyaient avec Léon Degrelle... Ils étaient venus pour fêter son anniversaire depuis le Paraguay, le Brésil, l'Équateur, etc. sans inquiétude ! »...

     

     

     

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    Léon Degrelle et Jean Vermeire (portant tous deux la médaille Honneur-Bravoure-Fidélité) rejoignent les Bourguignons en passant devant les familles et les amis.

     

     

    À notre connaissance, Léon Degrelle ne s'est rendu qu'une seule fois à Palma de Majorque : c'était à la mi-juin 1989 pour son quatre-vingt-troisième anniversaire. Le SS-Hauptsturmführer Jean Vermeire qui y possédait une opulente propriété put réunir à cette occasion une quarantaine d'anciens Bourguignons de la Légion Wallonie (à qui il avait été demandé de porter la chemise blanche), accompagnés de leur épouse et de quelques amis. Une belle réunion de retrouvailles fut organisée dans le parc de la villa avec remise d'une médaille commémorative reproduisant l'insigne rexiste « Honneur – Bravoure – Fidélité » (ce blog au 11 mai 2020). La journée s'acheva par un banquet dans un grand restaurant de cuisine majorquine à Palma, le Bona Celler, « la bonne cave » en catalan.

     

     

     

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    Le restaurant Bona Celler, le 12 juin 1989 : ci-dessous, Léon Degrelle parle avec le Chevalier de la Croix de Fer Jacques Leroy (derrière lui, Jean Vermeire ; Fernand Kaisergruber se trouve derrière Léon Degrelle ; le grand mutilé de guerre Henri Moreau se reconnaît de profil à l'avant-plan).

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    C'est probablement à cet événement exceptionnel que la Providence permit au Marquis d'assister par un miraculeux hasard : « Sans savoir que je le connaîtrais longtemps après, j'avais assisté, des années auparavant et malgré moi, à un moment étonnant dans un grand hôtel de Palma de Majorque » !

     

    Le souvenir qui lui est resté en mémoire en fut tout adorné d'une ambiance et d'une décoration merveilleusement fantasmées. Peut-être le Marquis a-t-il pensé avoir surpris une réunion de l'Internationale néo-nazie fêtant –fort peu discrètement– son chef Léon Degrelle ?...

     

     

     

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    Le discours de Léon Degrelle clôturant le banquet du 12 juin 1989.

     

  • L'ami que Léon Degrelle devait compromettre

     

    Jean-Marie Le Pen (1928-2025)

     

     

    « Beaucoup de gens qu’il aime l’attendent là-haut. » a posté Marine Le Pen sur les réseaux sociaux, au lendemain (8 janvier 2025) du décès de son père.

     

    Assurément. Et au premier rang de ceux-là s'est bien évidemment trouvé son ami Léon Degrelle.

     

     

     

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    Plusieurs sites nécrologiques ont annoncé la mort du chef historique du Front national, permettant aux amis, sympathisants et à tout un chacun d'exprimer sa tristesse, sa sympathie, son attachement aussi aux valeurs défendues par le défunt. Ci-dessus, Libra Memoria ; ci-dessous, Alanna.

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    jean-marie le pen,front national,marine le pen,serp,tintin,nouvel europe-magazine,forces nouvelles,front de la jeunesse,olivier mathieu,armand gérard,patrick poivre d'arvor,chard,rivarol,léon gaultier,michel faci,pnfe,charles villeneuve,gérard carreyrou,michel noirJean-Marie Le Pen eut le bonheur de connaître personnellement Léon Degrelle déjà bien avant la réalisation, dans les années 1970, de Léon DEGRELLE, de « REX » au Front de l'Est, le double album 33T de la SERP qu'il dirigeait (Société d'études et de relations publiques, spécialisée dans l'édition de documents historiques sonores, ce blog au 19 août 2024).

     

    C'est alors qu'une amitié indéfectible se noua entre les deux hommes (fait exceptionnel : ils se tutoyaient !), même si elle fut parfois traversée par des orages toujours suscités par les menteurs et autres vautours de la politique, essayant de pourrir l'existence du tribun contemporain par le discrédit jeté calomnieusement sur le chef vaincu d'hier.

     

    Aujourd'hui encore, le nauséeux patapouf turpide qui sert de correspondant parisien à RTL n'a pas manqué de reprendre l'exercice, croyant salir la mémoire du Menhir en soulignant ses liens avec Léon Degrelle, présenté quant à lui par les désormais inévitables poncifs « les rodomontades et la vantardise de Léon Degrelle qui se prétendait le modèle de Tintin », etc.

     

     

     

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    Empêché de participer à un débat à l'Université Libre de Bruxelles par des casseurs soutenus par le Cercle dit du « libre-examen », le 24 février 1977, Jean-Marie Le Pen put s'exprimer au Front de la Jeunesse, l'organisation de jeunes étudiants et travailleurs identitaires qui allaient donner naissance en Belgique au Parti des Forces Nouvelles (photo du mensuel Nouvel Europe-Magazine, avril 1977). Il est piquant de noter que ce sont ces mouvements qui ont le plus activement soutenu la divulgation de l'origine du personnage de Tintin inspiré par Léon Degrelle : articles de Forces Nouvelles (ce blog au 21 septembre 2020), conférences d'Olivier Mathieu au PFN (ce blog au 1er février 2016), publications d'Armand Gérard (ce blog aux 27 janvier 2016 et huit articles, du 21 septembre au 1er décembre 2020)...

     

     

    C'est Patrick Poivre d'Arvor (qu'aujourd'hui une foultitude de femmes enfin désinhibées accusent de viol) qui, s'érigeant en donneur de leçons morales et politiques, imagina le scoop des liens scandaleux entre les deux orateurs populaires. Le 21 mai 1992, recevant Jean-Marie Le Pen dans son émission Le Droit de Savoir, PPDA espérait le désarçonner en diffusant une séquence intitulée Léon Degrelle, un ami compromettant. Cette interview toute banale était présentée comme un exploit journalistique : « Derrière ce patronyme espagnol (Señor José Léon de Ramirez y Reina) se dissimule le dernier des grands généraux de la SS. Nous l’avons retrouvé : de son vrai nom, Léon Degrelle ! »

     

    De temps à autre, une bulle en haut de l'écran était chargée de montrer en direct la réaction de Jean-Marie Le Pen, qu'on eût voulu embêté, furieux, indigné face à celui qu'on présentait comme « condamné à mort par les tribunaux belges, soldat de l'Ordre noir qui n'a rien renié, même pas une poignée de main avec Hitler ! »

     

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    Mais c'est une mine franchement réjouie qui accueillit sans désemparer les appréciations parfois sévères, voire cinglantes mais toujours justes de Léon Degrelle à son propos, toutes confidences qui n'étaient d'évidence pas destinées à la publication : les envoyés camouflés de TF1 prétendument venus pour un témoignage sur la fin du dernier conflit mondial, préparaient en réalité leur mauvais coup en enregistrant surtout, entre les prises de vue « officielles », les bavardages qu'ils avaient focalisés sur Jean-Marie Le Pen. Comment mieux discréditer le chef du Front National qu'en mettant en lumière les liens l'unissant à un ami aussi compromettant que Léon Degrelle !

     

    Et l'ancien chef charismatique de Rex, mis en confiance par ces bonimenteurs déloyaux, de ne pas ménager ses confidences...

     

    La nature amicale de leurs relations : « Nous sommes de vieux copains, depuis toujours. On se parle très souvent au téléphone et il va venir me voir ici... »

     

    Faire payer les meetings : une astuce de Léon Degrelle suggérée à Jean-Marie Le Pen : « Je lui ai donné le conseil de faire payer le public à ses meetings. Personne ne faisait payer des meetings. Moi, à Rex, les gens payaient. J’ai rapporté des dizaines de millions au mouvement rexiste par mes meetings. Un grand orateur pour moi, c’est la même chose qu’un grand musicien. On paie bien pour aller voir Julio Iglesias. Et pour aller voir Le Pen à la veille des élections, il y avait huit mille personnes qui payaient 40 francs français !... »

     

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    Ce que pense Léon Degrelle de Jean-Marie Le Pen ? Un grand orateur politique, mais plutôt étranger à la Révolution des Âmes : « C’est le plus grand orateur français. Et en politique, ça c’est très important. Il est merveilleux de souplesse et d’humour, c’est un homme qui atteint le public, qui passe ses ondes au public et c’est ça, avant tout, qui a fait son succès. Il a maintenant 15 % des votes. C’est tout de même 4 millions de Français ! Ce que fait Le Pen, sous de nombreux aspects, est remarquable. Notamment sa jeunesse. Moi, je vois ici venir des centaines et des centaines de jeunes garçons très brillants, ayant une grande culture et qui sont lepénistes. Le mouvement lepéniste, ce n’est pas un mouvement de salauds ; le mouvement lepéniste, c’est vraiment une élite française. »

     

    « J’essaie de l’orienter… Mais nous, nous avions, nous autres, une vie bien plus monacale. Il est bien plus partisan de la bonne vie que du sacrifice ! Il se donne beaucoup de mal, mais enfin, un bon dîner, cela lui fait beaucoup de plaisir… Tandis que pour Hitler, ça ne comptait pas. La vie matérielle, ça n’existait pas. Et puis… il ne donne pas sa vie totalement comme nous le faisions... »

     

    Cerise sur le gâteau : ce que pense Jean-Marie Le Pen d'Adolf Hitler ? « Ah, bien je crois que… mais, heu… vous allez me faire dire des horreurs après ça, hein ?… Je crois… qu’il l’admire beaucoup, oui… »

     

     

     

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    Jean-Marie Le Pen n'avait pas vraiment besoin de l'amitié compromettante de Léon Degrelle pour être associé systématiquement au national-socialisme : sa propre fille s'est servie sans vergogne du fondateur du Front national comme d'un repoussoir négationniste dans sa recherche éperdue de « dédiabolisation » (dessin de Chard dans Rivarol, 14 avril 2021).

     

     

    De quoi embarrasser le président du Front National ? C'était bien mal connaître la puissance de son discernement (il avait évidemment repéré le piège du souillon des bonnes mœurs qu'est le présentateur de TF1 à particule usurpée), sa capacité d'adaptation et de riposte associée à sa liberté de pensée et surtout la générosité et la bienveillance de son amitié.

     

    Sa réaction ? Il dressa instantanément à l'antenne un portrait historique des plus concis et soigneux du fils qu'Adolf Hitler se fût choisi !

     

    « Je crois que Degrelle n'a pas été accusé de crimes de guerre. Il a été condamné par contumace mais propose depuis plusieurs décennies d'être jugé publiquement. La Résistance belge une trentaine de personnes, je pense n'a pas accepté ce défi. C'est une affaire belge dans laquelle je ne veux pas interférer mais j'ai lu Léon Degrelle: c'est un personnage considérable, historique et ses livres sont remarquables. »

     

    Il n'empêche que Léon Degrelle fut très heurté par la trahison de ces soi-disant professionnels de l'information et, lorsqu'il le put (il avait été hospitalisé, victime d'un accident), il envoya une longue lettre d'excuses et d'explications à Jean-Marie Le Pen, le 3 février 1993.

     

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    « Les reporters –dont j’ignorais tout– s’amenèrent à Malaga juste deux heures après que, chutant sur mon trottoir, je m’étais fracturé la base du crâne. N’empêche, ils s’amenèrent à la clinique, la mettant tellement en révolution que le lendemain matin –alors que j’avais été l’objet de soins médicaux jusqu’à trois heures du matin–, je m’habillai comme je le pus et –sans dire un mot au personnel de service– je repartis pour ma maison à l’heure primitivement fixée du rendez-vous. Je donnai alors deux grosses heures d’interview sur les dernières semaines de la guerre, comme prévu !

     

    Mes bonshommes allaient repartir quand ma femme vint leur offrir un verre d’apéritif. Alors on échangea quelques propos sur l’actualité politique, tout à fait hors d’interview. A ce moment-là, ma femme s’aperçut qu’un appareil marchait encore, le fit remarquer vivement. Les autres s’écrièrent aussitôt qu’ils l’ignoraient et jurèrent que ces propos seraient biffés. Escroquerie complète ! Mes deux heures d’interview, c’était du bidon ! On m’avait piégé ! On tripoterait mes ultimes propos uniquement pour te nuire. Jamais d’ailleurs ces escrocs ne me communiquèrent rien, pas même un mot de reconnaissance pour l’interview de la chaîne américaine, pour lequel je m’étais donné tant de mal qu’à la fin, le sang me coulait de l’oreille droite et qu’on dut me reconduire aussitôt, pour plusieurs semaines, à la clinique ! »

     

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    L'espiègle Jean-Marie se rendit néanmoins une malicieuse petite justice en laissant mariner (!) son contempteur malgré lui un petit trimestre dans son inquiétude avant de le rassurer par un exposé clair de la situation ainsi que le rappel réconfortant de sa fidèle amitié, le 26 avril suivant.

     

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    « Ces deux opérations médiatiques parallèles de TF1, Le Droit de Savoir, et d’A2, Envoyé Spécial, étaient de pure désinformation et avaient pour but d’attirer le Front National sur le terrain d’un nazisme qui est aujourd’hui beaucoup plus que dans l’immédiat après-guerre l’accusation mortelle politiquement.

     

    Les journalistes voyous ont certes pu compter sur quelques idiots utiles comme l'ancien légionnaire de Montoire et sur quelques salauds authentiques comme Léon Gaultier [ancien de la Division SS Charlemagne, cofondateur avec Jean-Marie Le Pen, en 1963, de la SERP, également membre fondateur, en 1972, du conseil national du Front national, mais qui se distanciera progressivement de Jean-Marie Le Pen] et Faci [Michel Faci, condamné à de multiples reprises pour des vols et des trafics, responsable du Parti Nationaliste Français et Européen (PNFE), groupuscule néo-nazi] qui ont sciemment menti pour nous causer le plus grand tort possible.

     

    Ils ne l’emporteront pas en paradis. Déjà P.P.D.A. a pu mesurer ce qui était une campagne orchestrée. Villeneuve [Charles Villeneuve, journaliste de TF1, concepteur avec Gérard Carreyrou de l’émission Le Droit de Savoir] est impliqué dans l’affaire Noir [Michel Noir, député-maire RPR de Lyon et ancien ministre, sera condamné pour recel d’abus de biens sociaux] et Carreyrou le socialo doit trembler pour sa place [Gérard Carreyrou, journaliste de TF1, connu pour ses sympathies de gauche]. Quant au petit salopard d’extrême droite qui t’a piégé, il vient de se faire pincer dans une affaire de fausse interview. »

     

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    Cette lettre fut la dernière que Jean-Marie Le Pen put envoyer à son ami de Malaga, mais elle permit de dissiper tout malentendu dans la belle entente qui les unissait : Léon Degrelle devait décéder moins d'un an après.

     

    Dans les Mémoires qu'il publiera vingt-cinq ans plus tard, Jean-Marie Le Pen n'a évidemment pas un seul mot pour le flop de cet incident fielleux. Il y évoque cependant Léon Degrelle. De manière positive mais réservée, et réduisant leurs rapports à une phrase de sept mots : une rencontre (accidentelle ? autre chose eût été, plutôt que l'anecdotique « J'ai rencontré », d'écrire le plus personnel « J'ai connu ») et des conversations téléphoniques (notons la différence entre son « on s'est téléphoné » relevant de l'occasionnel, voire de l'unique autre chose eût été la forme itérative « on se téléphonait », et l'amical et logiquement régulier « On se parle très souvent au téléphone » de Léon Degrelle).

     

    Sans oser donc se prévaloir de son amitié ni même l'évoquer. Amitié peut-être quand même encore, pour lui, compromettante...

     

    « J'ai rencontré Léon Degrelle, on s'est téléphoné. Il fut le chef des rexistes, il admirait Hitler, mais je ne lui ai rien trouvé de déshonorant, il était même sympathique, chaleureux, il avait le don de l'anecdote et du portrait à l'emporte-pièce. » (Jean-Marie Le Pen, Mémoires, T. II, Tribun du peuple, p. 31 ; nous soulignons).

     

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    Aussi son ami Léon Degrelle ne le compromettait-il aucunement en soulignant incidemment, en 1992, leur différence fondamentale : «  Il ne donne pas sa vie totalement comme nous le faisions. »

     

  • Prosit 2025 !

  • Le cousin rexiste de l'ambassadeur

     

     

    Sous le manteau du Caudillo [4]

     

     Une « anecdote délicieuse » :

    avec Léon Degrelle au bassin de natation...

     

     

     

    Bajo el manto.pngN'éreintons pas le pauvre Rodríguez à tout bout de champ ! Il est quand même possible de trouver des choses divertissantes dans son pensum !

     

    Nous connaissons le goût de José Luis Rodríguez Jiménez pour les ragots de toutes sortes. Il en a tout de même ramassé un dans les archives du Ministère des Affaires étrangères de Madrid qui est une véritable petite pépite pour qui s'intéresse aux détails inédits de la biographie de Léon Degrelle. Pour les autres, l'histoire, assurément marginale, ne relèverait sans doute que de la péripétie anecdotique si elle n'était également révélatrice de l'absurdité obstinée que constituent souvent les tensions diplomatiques.

     

    « Rien de tel que les conversations informelles pour connaître la réalité des intérêts diplomatiques des gouvernements. Au cours d'une visite de l'ambassadeur belge, M. Vermer, au Palais de Santa Cruz [Ministère des Affaires étrangères espagnol] aux fins d'obtenir des informations sur les négociations entre l'Espagne et le Marché Commun ainsi que sur l'état de la question de Gibraltar, la personne qui le reçut a recueilli ce qu'il considéra comme une anecdote délicieuse qu'il transmit par écrit à Castiella [Fernando María Castiella y Maiz, ancien Volontaire de la División Azul, alors ministre des Affaires étrangères].

     

     

    Départ Azul.jpeg

    Il ne fait pas de doute que l' « anecdote délicieuse » de l'attaché d'ambassade Jacques Vermer concernant Léon Degrelle aura bien diverti le ministre des Affaires Étrangères Fernando Castiella, car son parcours n'est pas sans évoquer celui de l'exilé belge : né un an après lui, il entreprit comme lui ses études de droit dans une université des Pères jésuites et s'engagea dans les mouvements d'action sociale catholique dont il anima la presse avec énergie. Il termina sa spécialisation en droit international pour enseigner –à 26 ans !– à l'université de Madrid. Membre actif de la Phalange, il fut parmi les premiers à s'engager à la División Azul comme simple soldat, refusant, tout comme Léon Degrelle, de bénéficier d'un grade d'officier (photo du départ, le 13 juillet 1941 à la Gare du Nord de Madrid –aujourd'hui Principe Pio– du premier contingent de Volontaires espagnols salués par une foule innombrable).

     

    Fernando Castiella participa aux combats féroces sur le front de la Volkhov au sein du fameux Regimiento Pimentel établissant une tête de pont au-delà de la rivière, s'emparant de plusieurs localités et d'importants dépôts d'armes et s'attirant une citation à l'ordre du jour de l'armée.

     

    Rappelé en Espagne en 1942, il dirigea le Service extérieur de la Phalange. Après la guerre, le Royaume-Uni refusa de le recevoir en tant qu'ambassadeur, irrité par la publication de ses études juridiques concernant les droits de l'Espagne sur Gibraltar. Il occupa le Ministère des Affaires étrangères jusqu'en 1969. Il mourut en 1976, à l'âge de 68 ans.

     

    Castiella Arriba 1959.09.05.pngCi-contre, le 5 septembre 1959, le ministre Fernando Castiella (à gauche) fait la une du quotidien franquiste El Alcazar (fondé pendant le siège meurtrier et dévastateur de l'académie militaire de Tolède, de juin à septembre 1936 ; ce blog au 25 octobre 2019) : le ministre français des Finances, Antoine Pinay, reçoit de ses mains les insignes de Chevalier Grand-Croix de l'Ordre d'Isabelle la Catholique, à l'ambassade d'Espagne à Paris.

     

     

     

     

    Avant de se retirer, Vermer avait soulevé la question de Degrelle, insistant sur le fait qu'il le faisait à titre personnel. Il lui demanda si on lui avait conseillé de rester discret et réservé sur ce sujet. Il finit par dire qu'il l'avait rencontré le 1er octobre 1963. Ce jour-là, il s'était rendu à la piscine municipale de Casa de Campo accompagné de son épouse qui voulait savoir si elle pouvait se baigner avec son maillot de bain deux-pièces. Entendant une femme parler en français dans la piscine, elle s'approcha et lui posa la question. Elle –il s'agissait de Jeanne Brevet– transmit cet embarras à l'homme qui était avec elle et qui obtint du responsable qu'il “ferme les yeux sur le deux-pièces. Mais quand ils entamèrent la conversation, ils se rendirent compte que l'un était l'ambassadeur belge et l'autre Léon Degrelle.

    Ce fut un échange d'une demi-heure. Degrelle expliqua à l'ambassadeur qu'il vivait à Madrid sous le pseudonyme de Ramírez ; il lui donna l'adresse de son appartement qui, dit-il, lui avait été procuré par le comte de Mayalde et, après avoir discuté de la politique du gouvernement belge à son sujet, il conclut en l'invitant à visiter sa finca d'Andalousie.

    La conversation avait été facilitée par la circonstance qu'un cousin de Vermer avait été un grand ami de Degrelle et même député rexiste de Namur, encore qu'il avait quitté le mouvement rexiste quand celui-ci prit une attitude pro-allemande. A la fin de l'entrevue, le diplomate espagnol demanda sur le ton de la plaisanterie à M. Vermer si le gouvernement belge souhaitait la livraison de Degrelle. Ce à quoi Vermer aurait répondu : Mon Dieu, mon Dieu ! Je ne vous demande rien. Je n'effectue même pas une démarche. Il s'agit juste d'une curiosité personnelle”. » (pp. 303-304).

     

     

     

    Carlina 1963.jpg

    La somptueuse finca de Léon Degrelle dans la campagne sévillane au début des années soixante, telle qu'elle aurait pu apparaître au diplomate Jacques Vermer s'il avait accepté l'invitation de son propriétaire. Mais l'intérieur n'était dès alors plus complet car Don Juan de la Carlina avait déjà évacué ses collections de livres (une grande partie a été confiée à la bibliothèque municipale de Constantina) ; des souvenirs parmi les plus précieux et quelques œuvres d'art se sont ainsi retrouvés dans son appartement de Madrid (que Vermer ne visita pas non plus).

     

    Impuissant à honorer ses dettes et rembourser ses emprunts, Léon Degrelle avait en effet été acculé à la faillite et La Carlina saisie au profit de son principal créancier, la Caisse d’Épargne San Fernando de Séville. Cette confiscation se révélera pourtant une mauvaise affaire pour l'institution financière et après plus de douze ans d'inoccupation et de pillages, elle essaiera de se débarrasser de ce bien prestigieux, y compris en Belgique (ci-dessous l'annonce publiée par le journal boursier flamand De Financieel-Economische Tijd du 5 mars 1977). Finalement, ce sont les moniales Hiéronymes (de l'ordre de Saint Jérôme) de Constantina qui, plus de trente-cinq ans après la saisie, rachetèrent la propriété abandonnée et presque en ruines. La restauration et la réaffectation des bâtiments, jardins et piscines ont nécessité plusieurs années de travaux avant qu'en 2008, les religieuses puissent intégrer leur nouveau monastère où elles prient toujours pour le repos de l'âme de Léon Degrelle (Monastère Nuestra Señora de los Ángeles)

     

    Carlina Fin.Econ.Tijd 1977.03.05.jpg« Pour seulement 20 millions de francs belges : CHÂTEAU PRÈS DE SÉVILLE. Une occasion vraiment unique : près de Cordoue, de la côte atlantique et de la Costa del Sol. Domaine de 200.000 m² (valeur minimum : 120 francs/m²) entièrement clôturé. Rendement de 104.000 pieds de vigne - 4000 oliviers, belle conciergerie - 12 villas de rapport. Résidence 850 m² construits, tours, 3 appartements, 7 salles de bains, 2 salons, bibliothèque, etc. 6500 m² de terrasses - 20 fontaines - amphithéâtre, 2 piscines - 3 garages, etc. Précieux mobilier antique, revêtements, monuments, statues, etc., le tout en parfait état. Valeur totale/rendement prouvable : min. 55 millions de francs belges - dossier et renseignements via boîte postale 15, 2610 Wilrijk. Tél. 031/28.79.46. » (documentation © Jacques de Schutter).

     

    Il n'arrive décidément jamais rien de banal dans la vie de Léon Degrelle. Alors qu'il prend un peu de détente dans les belles installations de la piscine du parc Casa Campo à Madrid en compagnie de celle qui deviendra son épouse, voilà qu'un autre couple, les entendant parler en français, engage la conversation. Il s'agit d'un responsable de l'ambassade de Belgique en Espagne et de sa femme désireuse de se baigner en bikini ! Le sieur Jacques Vermer est, plus précisément, ministre-conseiller de l'ambassadeur belge d'alors, le vicomte Joseph Berryer.

     

    Pareille rencontre, vu le contexte politique de l'époque où Léon Degrelle est censé empoisonner les relations entre l'Espagne et la Belgique, relève déjà du surréalisme. Il est par ailleurs intéressant de noter la réaction quasi paniquée du diplomate belge à la broma (plaisanterie) de l'Espagnol, qu'il semble prendre au pied de la lettre : Vermer s'empresse de prétendre n'avoir voulu que satisfaire une curiosité personnelle. Comme s'il ne voulait pas enfreindre des instructions officieuses du gouvernement belge au personnel de son ambassade de ne plus faire la moindre vague autour de l'embarrassante question de l'extradition de Léon Degrelle. Sa curiosité personnelle aurait donc consisté à vérifier s'il en était de même du côté espagnol...

     

    Un tel échange « diplomatique » donne cependant raison à l'analyse proposée par Léon Degrelle au mensuel Le Dossier du Mois qui lui était consacré à la même époque (juin-juillet 1963). Le texte manuscrit publié en page 4 exprime le sentiment –constamment éprouvé– du condamné à mort qui devait surtout rester proscrit et ne jamais pouvoir revenir en Belgique : « À plusieurs reprises, je fus sur le point d'être livré. Chaque fois, in extremis, Spaak littéralement, me sauva, se livrant à des diatribes violentes qui exaspérèrent ceux qui, précisément, s'attendaient à être remerciés pour avoir fait savoir qu'ils étaient prêts à me laisser tomber ! [...] Alors, pourquoi des manœuvres si étranges de sabotage qui me sauvèrent chaque fois que mon extradition (à la Laval !) fut virtuellement assurée ?  »

     

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    Mais plus surréaliste encore, ce Vermer se révèle cousin d' « un grand ami de Degrelle, député rexiste de Namur » !

     

     

     

    Vermer La Cité Nouvelle 1940.05.10 .pngC'est le jour même de l'invasion allemande de la Belgique, le 10 mai 1940 (et de l'arrestation de Léon Degrelle au mépris de son immunité parlementaire !) que La Cité Nouvelle relaie l'essentiel de la lettre qu'Adelin Vermer avait envoyée au journal antirexiste Vers l’Avenir pour expliquer son départ de Rex.

     

     

    Il s'agit d'Adelin Vermer (1905-1977), fils de Nestor Vermer, notaire à Bouillon.

     

    Ami d'enfance de Léon Degrelle, il fut son condisciple à l'Institut Saint-Pierre (ce blog au 15 juin 2021) et l'accompagna lors de son tout premier voyage hors de la cité ardennaise pendant les vacances de Pâques 1921 : ils avaient quinze ans et partirent à vélo visiter les ruines de l'abbaye d'Orval dévastée par les révolutionnaires français (sa reconstruction ne commença qu'en 1927). Ils pédalèrent encore jusqu'à Virton (à quelque soixante kilomètres de Bouillon !) où le frère de sa Maman, le notaire Jules Boever, les recueillit et les hébergea, non sans avoir téléphoné aux parents morts d'inquiétude... (voir Léon Degrelle, Mon combat, p. 64).

     

    Adelin suivra également son ami Léon à l'Université Catholique de Louvain : il obtiendra son diplôme d'avocat et deviendra assesseur juridique au Conseil de Prud'hommes de Dinant (aujourd'hui Tribunal du travail). Aux élections triomphales du 24 mai 1936, il sera élu député rexiste de l'arrondissement de Dinant-Philippeville, prenant la place du député libéral, son ancien maître de stage. Il quittera ses fonctions politiques en 1940 et, parallèlement à son métier d'avocat, écrira quelques chroniques pour le quotidien catholique namurois antirexiste Vers l'Avenir. En 1941, il deviendra substitut du procureur du Roi au tribunal de première instance de Neufchâteau, poste qu'il conservera en 1945, avant d'être nommé procureur du Roi en 1949. Ainsi connut-il également les honneurs des ordres nationaux (chevalier, puis officier de l'Ordre de Léopold ; officier de l'Ordre de la Couronne).

     

     

     

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    La troupe des scouts catholiques « Charles Théodore » en 1919, sous la responsabilité de son fondateur, l'Abbé Jean-Marie Poncelet, directeur de l'Institut Saint-Pierre de Bouillon (ce blog au 15 juin 2021) : Léon Degrelle se trouve debout au milieu du dernier rang, gardien du fanion. Le petit Vermer se trouve au premier rang des scouts debout, le majeur de la main gauche sous le menton (documentation © Jacques de Schutter).

     

    Ci-dessous, Léon Degrelle et ses condisciples de l'Institut Saint-Pierre sont en pique-nique dans les bois de Bouillon vers 1917-1918 (il s'agit d'une activité antérieure à la création de la troupe scoute en 1919 ; certains enfants –dont probablement Léon Degrelle– portent un  calot, mais pas encore d'uniforme) : l'Abbé Poncelet remplirait les gamelles ; Léon Degrelle serait le premier garçon à gauche, surmonté d'une croix, tandis que le petit Adelin Vermer serait l'écolier marqué d'une croix au milieu du groupe.

     

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    C'est évidemment cette coïncidence extraordinaire qui a suscité la confiance de Léon Degrelle qui s'est laissé aller aux confidences les plus potentiellement préjudiciables, révélant non seulement sa nouvelle identité, mais celle de son bienfaiteur, l'alcalde (maire) de Madrid, José Finat y Escrivá de Romani, Comte de Mayalde.

     

     

    Mayalde-Munos 2.jpeg

    Ambassadeur d'Espagne à Berlin, le Comte de Mayalde rendait de fréquentes visites aux Volontaires de la División Azul sur le Front de l'Est. On le voit ici auprès du Commandeur, le Général Agustín Muñoz Grandes (ce blog au 1er septembre 2024), à l'occasion de sa réception de la Croix de Fer de Seconde Classe, le 8 septembre 1941.

     

     

    Celui-ci avait été ambassadeur d'Espagne en Allemagne en 1941-1942 et s'efforça toujours de protéger les Volontaires de la División Azul. En août 1946, il fut de ceux qui permirent à Léon Degrelle de quitter sans encombre l'Hôpital de San Sebastián. En 1963, suite à la faillite des entreprises de Léon Degrelle et de la saisie de La Carlina, sa magnifique propriété de Constantina, le Comte de Mayalde fournit encore à son ami un appartement de cinq petites pièces au troisième étage d'un immeuble social, au numéro 1 du Paseo de los Jesuitas, un quartier populaire de la capitale.

     

     

     

    C'est au troisième étage de cet immeuble situé à l'entrée du Paseo de los Jesuitas qu'emménagea Léon Degrelle après avoir perdu La Carlina. Il emporta néanmoins un peu de la décoration intérieure de sa finca pour embellir cet appartement social.

     

    Paseo de los Jesuitas 1.png

     

    « La lourde porte, bardée d'une impressionnante collection de verrous, tourna sur ses gonds et il m'apparut : Comment allez-vous ? Vous avez fait bon voyage ? Comme si nous nous étions quittés huit jours plus tôt... [...]

    Une chose digne d'être décrite est le cadre dans lequel je l'ai rencontré. Ce petit appartement de cinq pièces n'est, somme toute, je l'ai dit, que l'un de ses refuges d'exil. L'intérieur cependant est caractéristique et fortement marqué par la personnalité de son propriétaire. Rien là-dedans de banal et la rustique beauté des vieux meubles d'époque fait penser d'abord à un vieil intérieur flamand. A côté de son vaste bureau –où, soit dit en passant, trônent les sept Littré [édition Gallimard/Hachette, 1957]– un grand coffre gothique sur lequel on a disposé des poteries romaines et d'antiques pièces de monnaie comme en trouvent encore les lavandières dans le sable des rivières du Sud de l'Europe. Remarquable aussi, un petit coffre roman en cèdre. Au mur, un bois peint, une Pietà flamande du XVe siècle que Degrelle ramena d'un pèlerinage qu'il fit à pied à Saint-Jacques-de-Compostelle. Devant lui, la seule chose qu'il put sauver de la destruction et de la dispersion de ses biens en Belgique, un tabard de Philippe II (le tabard est un vêtement de soie peinte que l'on portait par-dessus la cuirasse), pièce rarissime au demeurant. [...] Derrière lui, au mur, sont accrochés deux étendards aux couleurs passées : sauvés du désastre, ce sont les drapeaux de la Brigade Wallonie dont les plis gardent encore la marque des boues de Tcherkassy et de la poussière du Caucase.

    Et c'est dans ce décor sommairement planté, dans la chaleur accablante de cet après-midi de juillet, toutes fenêtres ouvertes sur la rue silencieuse à cette heure, que commence cette interview. »

    (Philippe Dastier, Le dossier Léon Degrelle, juin-juillet 1963, p. 3).

     

    Wim Dannau (Face à face avec le rexisme, 1971) décrit aussi le Paseo de los Jesuitas, mais d'une manière dramatisée difficilement crédible puisque le locataire l'a quitté depuis plusieurs semaines ! « En montant le petit escalier en colimaçon de pierre froide, au numéro 1 du Paseo de los Jesuidas [sic] à Madrid, au troisième étage à gauche, une porte blindée de barres de fer et de multiples serrures porte une étiquette décolorée : M. Juan Sanchez. Sous ce pseudonyme a vécu ici jusqu'à la mi janvier Léon Degrelle [...]. Devant la porte close, aucune garde particulière, mais quatre 'Guardia Civile' [sic] font les cent pas deux par deux discrètement dans la rue. Le concierge de la rue, moyennant espèces, m'a averti que deux équipes de la Sûreté se relaient dans un bar du coin. Une grosse Seat noire y est d'ailleurs parquée. Il n'est pas question de rester là. Degrelle, ce mois de février 70, est bel et bien parti. Le constat est établi. Terminé. » (p. 11).

     

    Dannau Drapeaux.jpeg

     

    Les seules photographies que nous connaissions de l'intérieur du Paseo de los Jesuitas sont celles publiées par Wim Dannau où il se met lui-même en scène. Ci-avant, les drapeaux du mouvement rexiste accrochés au mur derrière le bureau de Léon Degrelle (Dannau y photographie des documents, mais ne signale pas le visage de Léon Degrelle en sculpture murale) ; ci-après, dans la bibliothèque : le prétendu « ouvrage nazi » que bouquine Dannau est le livre de la Duchesse de Valence, Degrelle m'a dit, publié en 1961.

     

    Dannau Livres.jpeg

     

    La « Pietà flamande du XVe siècle » que Léon Degrelle ramena de son pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle (ce blog au 18 octobre 2024) dont parle Philippe Dastier put accompagner l'auteur de Mon Chemin de Saint-Jacques jusqu'à la fin de sa vie (ici à Malaga, en 1990), toujours à la place d'honneur de son séjour pour magnifier la ferveur de sa foi en la résurrection du Christ, mais aussi, à son image, en la résurrection des Âmes : « La maladie du siècle n'est pas dans le corps. Le corps est malade parce que l'âme est malade. C'est elle qu'il fallait, qu'il faudra coûte que coûte guérir et revivifier. La vraie, la grande révolution à faire est là. Révolution spirituelle. Ou faillite du siècle. Le salut du monde est dans la volonté des âmes qui croient. [...] Seigneur, faites fleurir en nos âmes vaincues l'étincelle de la résurrection ! » (Les Âmes qui brûlent, pp 38, 106).

     

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    À suivre