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léopold iii

  • Sculpteur de la famille royale et de Léon Degrelle

    Eugène De Bremaecker signe le médaillon des 31 ans de Léon Degrelle

     

    Dans notre article sur le premier buste de Léon Degrelle par Ferruccio Vecchi, cofondateur des premiers Faisceaux italiens de combat (ce blog au 3 mai 2024), nous regrettions de n'avoir pas inclus le sculpteur Eugène De Bremaecker parmi les médailleurs du Chef de Rex (ce blog au 11 novembre 2023), faute d'avoir trouvé quelque représentation de son œuvre.

     

    Eugène De Bremaecker.png

    Eugène De Bremaecker (1879-1963)

     

     

    Un lecteur fidèle et critique de nos explorations degrelliennes, par ailleurs collectionneur averti de belles pièces de cette époque passionnante et chercheur expérimenté de son histoire, nous a fait le plaisir de nous envoyer un cliché de son exemplaire de la médaille réalisée par Eugène De Bremaecker.

     

    La mauvaise photographie que nous avions reprise du Pays réel du 14 juin 1937 ne lui rendait pas justice, ne permettant pas de reconnaître vraiment les traits de Léon Degrelle et, à peine, sa silhouette !

     

    LD Bremaecker 1.JPG     LD Bremaecker 2.JPG

     

     

    Nous pouvons maintenant constater que l'artiste a parfaitement rendu la physionomie de son modèle, saisie dans sa juvénile mais ferme confiance. Il se dégage de son expression à la fois de l'innocence, du sang-froid et de la force d'âme.

     

    Nous remercions donc avec beaucoup de gratitude notre correspondant attentif de nous avoir fourni ce précieux document. Il nous illustre en effet qu'Eugène De Bremaecker est un portraitiste des plus fins, ce que confirment ses nombreux bustes et médaillons ciselés à l'image des plus hautes personnalités du pays: Léopold III et Astrid, les souverains belges, le Prince Charles-Théodor (qui donna son nom à la troupe scoute de Léon Degrelle –ce blog au 15 juin 2021– et qui deviendra régent du Royaume en 1944), le cardinal Mercier (premier guide spirituel de Léon Degrelle : ce blog au 26 mars 2017), les tribuns socialistes Emile Vandervelde et Camille Huysmans,... en plus de nombreuses compositions inspirées par la musique ou la danse.

     

    Max+Brem. Patriote ill. 1936.10.04.png

    Le Patriote illustré, 4 octobre 1936.

     

    Cette activité de portraitiste quasi officiel lui valut une interview en première page du quotidien Le Soir recueillant quelques anecdotes sur les Rois et Princes devant le chevalet ou l'ébauchoir, le 19 avril 1930 (Eugène de Bremaecker avait déjà eu les honneurs de la « Une » de La Dernière Heure, le 2 août 1927, dont l'essentiel se retrouve dans la notice Wikipedia de l'artiste).

     

    Méd. Centenaire 1930 aa.png

    C'est Eugène De Bremaecker qui fut choisi pour la réalisation de la médaille commémorative du centenaire de l'indépendance de la Belgique (ainsi d'ailleurs que pour la médaille du Volontaire-Combattant 1914-1918 : voir ci-après). L'encyclopédie du savoir universel Wikipedia présente bien la médaille mais sans indiquer le nom de son créateur.

     

    « ...Qu'a donc à nous dire maintenant le statuaire Eugène De Bremaecker des deux princes Léopold et Charles-Théodor, dont il fit les bustes pour l'iconographie familiale du Palais royal ?

    La toute première des séances consacrées au jeune duc de Brabant faillit tourner au tragique. La chose se passait dans l'appartement dit Fontainebleau du Palais de Belle-Vue. L'éclairage de la salle étant défectueux, l'artiste proposa à son jeune modèle d'aller s'installer dans la serre toute proche. Et il allait sonner des domestiques pour le déménagement de son lourd matériel, lorsque le prince Léopold l'arrêta :

    Nous nous en tirerons bien à nous deux, monsieur l'artiste. On n'est jamais plus vite servi que par soi-même.

    Et d'empoigner à l'instant la plus lourde pièce de l'attirail, lequel, en deux ou trois étapes, se trouva commodément à sa nouvelle place. Tout un système séducteur se révélait là. Mais alors quelque chose survint qui fit pâlir d'effroi Eug. De Bremaecker. Une violente rafale soufflait au dehors. Elle arracha de la charpente d'un toit voisin une grosse poutre qui, projetée au travers du vitrage de la serre, effleura le visage du prince héritier, tout en faisant pleuvoir des éclats de verre tout autour de lui. Une déviation d'un centimètre ou deux et la poutre eût tué ou grièvement blessé le futur titulaire de la Couronne. Celui-ci, souriant, ne broncha point. L'artiste, lui, frissonna à la pensée de la terrible responsabilité qu'eût été la sienne, si le malheur s'était produit.

     

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    Bremaecker Prince Charles DH 1935.05.26.png

    La Dernière Heure, 26 mai 1935.

    Un autre se manifesta chez le jeune comte de Flandre, Charles-Théodor, beaucoup moins expansif, celui-ci, que son frère. Il ne parlait guère pendant la pose ; mais quand il sortait de son mutisme, c'était pour s'exprimer en véritable marin de vocation, profondément épris de navigation lointaine. Avec cela franc, sincère et décidé au possible. Il confia un jour au statuaire qu'il ne pourrait jamais se résoudre à dire blanc quand il pensait noir ou vice versa. Si, par exemple, on me met devant une œuvre d'art, en sollicitant pour elle une admiration qu'elle ne m'inspire pas, vous m'arracheriez la langue plutôt qu'un éloge. Devant une chose dont je ne sens pas la qualité, le maximum qu'on puisse obtenir de moi, c'est que je me taise, par politesse.

    Voilà... Heureux, les artistes à qui leurs modèles livrent ainsi un peu de leur visage intérieur ! Admis à scruter le dedans comme les dehors, de quelle vie véritable ils peuvent animer la toile, ou le bronze, ou le marbre !

    Gérard Harry »

    (Le Soir, 19 avril 1930)

     

    Mais quels furent les liens entre Eugène De Bremaecker et Léon Degrelle ? Le sculpteur fut-il un rexiste convaincu ? A l'instar, par exemple, du médailleur Marc Colmant qui se porta candidat du mouvement Rex aux élections municipales de sa commune bruxelloise, Ganshoren, en 1938, l'année qui suivit la remise du médaillon de De Bremaecker au Chef ?

     

    En fait, nous n'en savons rien et nous ne pouvons que risquer quelques hypothèses à partir des rares traces de l'artiste dans le sillage rexiste.

     

    Eugène De Bremaecker est le seul médailleur dont l'oeuvre a été illustrée dans le quotidien rexiste : ni Victor Demanet, ni Marc Colmant n'ont eu cette opportunité. Jamais il ne sera d'ailleurs fait mention de leur médaillon degrellien dans Le Pays réel. Les productions de Marc Colmant n'y bénéficieront même jamais d'aucun commentaire ou présentation (son nom ne sera ainsi mentionné que dans la seule liste des candidats rexistes aux élections de Ganshoren !). Et si ce n'est pas le cas du plus célèbre Victor Demanet (dont le quotidien ne manque pas de signaler les bustes, médaillons et bas-reliefs consacrés, en 1936, 1937 et 1938, au roi Albert à Arlon, Crainhem et Léopoldville), ce sera toujours sans illustration.

     

     

    PR 1936.12.07 Puccini.png

    Le buste de Giacomo Puccini offert au Théâtre Royal de la Monnaie, le 17 décembre 1936, à l'occasion de représentations de La Bohème, par Eugène de Bremaecker et le fils du compositeur, Antonio Puccini. Nous ignorons où cette sculpture se trouve actuellement. Photo publiée par Le Pays réel, le 7 décembre 1936.

     

    Par contre, quand Le Pays réel présente le buste de Puccini sculpté par De Bremaecker pour le Théâtre de La Monnaie (la scène lyrique bruxelloise), en décembre 1936, une grande photographie ouvre sa rubrique culturelle. De même, lorsque le médaillon de Léon Degrelle est évoqué dans Le Pays Réel du 14 juin de l'année suivante, une photo illustre naturellement l'article. Mais ce traitement, apparemment de faveur, traduit-il une plus grande proximité politique ? Pourrait-on le penser alors qu'à partir de ce moment, le nom de l'éminent médailleur ne sera plus jamais mis en avant (à part sa participation parmi tant d'autres à une exposition bruxelloise en 1938) ?

     

    Couple Puccini+Brem Hebdo 1936.12.25.png

    Antonio, le fils de Giacomo Puccini, et son épouse, accompagnés du sculpteur Eugène De Bremaecker lors de la remise du buste dans le foyer de l'opéra de Bruxelles (photographie publiée dans le magazine Hebdo, le 25 décembre 1936.)

     

    Ne peut-on cependant penser que le fait même d'offrir à Léon Degrelle son portrait exprimé dans le bronze suppose au moins quelque sympathie pour le modèle ?

     

    Notre correspondant suggère deux éléments pour, éventuellement, l'expliquer :

     

    « 1. De Bremaecker était un volontaire de la guerre 1914-1918. Or, au moins pour la période 1936-1937, REX put compter sur le soutien de nombreux vétérans de la Grande Guerre (Degrelle mettant régulièrement en avant les anciens combattants dans ses discours et écrits).

     

    2. De Bremaecker semble avoir été un artiste particulièrement attaché à la famille royale comme en témoignent les ''bustes royaux'' qu'il réalisa d'Albert Ier, du prince Charles ou encore de la Reine Astrid. Or, REX était un mouvement monarchiste très attaché à la personne du Roi dont il voulait d'ailleurs renforcer les prérogatives.

     

    Tout cela reste malgré tout fort léger pour sérieusement envisager une communauté d'idéal entre l'artiste et le politicien et, à moins de trouver quelques nouveaux éléments probants, il me semble plus prudent de ne pas considérer De Bremaecker comme ayant été un (sympathisant) rexiste. »

     

    Que De Bremaecker fût particulièrement attaché à la famille royale, nous venons de le vérifier, constatant même qu'une relation de confiance avait pu s'établir entre le sculpteur et les membres de la Cour prenant la pose et s'ouvrant aux confidences.

     

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    de Pierre Daye (ce blog aux 4 mai 2016 et 24 mars 2021), célèbre chroniqueur, soldat-milicien ayant participé aux combats de Namur, d'Anvers, de l'Yser et dans les colonies allemandes d'Afrique ; du dramaturge Paul De Mont (ce blog au 10 juin 2016), officier volontaire-combattant, Croix de l'Yser, Croix du Feu, grand invalide, amputé des deux jambes,... Tous les sénateurs rexistes (huit sénateurs élus directs, trois provinciaux et un coopté) sont d'ailleurs d'anciens combattants de la Première Guerre mondiale.

     

    A la question de savoir si De Bremaecker fut militant ou même simple membre de Rex, il faut très certainement répondre par la négative. Mais pareille hypothèse est sans doute parfaitement oiseuse car si nous considérons que les médailles qui furent éditées avec le profil de Léon Degrelle datent toutes de la même période 1937-1938, on pourrait se demander si ces oeuvres ne répondaient pas à une commande ou à une espèce de concours (une suggestion pour un cadeau ?) avec un cahier des charges tel que : présenter le profil du chef de Rex ainsi qu'afficher le slogan du mouvement « Rex vaincra ».

     

    Médaille Bremaecker R.JPG  Médaille Demanet R.png  Médaille Colmant.png

    De gauche à droite et par ordre chronologique, le slogan « Rex vaincra » selon Eugène De Bremaecker, Victor Demanet et Marc Colmant.

     

    Ce sont en effet les impératifs auxquels répondent précisément les trois médaillons que nous avons examinés (ce blog au 11 novembre 2023). Nous n'avons bien sûr trouvé aucune trace de pareille demande dans les organes rexistes : une telle publicité n'eût pu qu'alimenter les railleries de la presse prompte à accuser le tribun rexiste de mégalomanie !...

     

    Aussi ne pouvons-nous, compte tenu de tous ces éléments, exclure non plus quelque sympathie pour Léon Degrelle et de l'intérêt pour son combat contre les « banksters » avec le balai pour emblème et « Propreté ! » comme slogan.

     

    Rex Balais 1936.jpg   Rex 1936.01.03 Propreté.png

     

    Et ce, malgré que les parents d'Eugène De Bremaecker fussent d'actifs militants libéraux : le père, Alexis De Bremaecker, fut conseiller libéral à Bruxelles et la mère, Céline, s'occupait de la section féminine de l'Association libérale de Bruxelles. Que la vigoureuse campagne anti-banksters de Léon Degrelle en 1936 n'épargnât pas de grandes figures du Parti libéral (outre le ministre des Transports Marcel-Henri Jaspar –ce blog au 3 mai 2024–, figurèrent ainsi dans le collimateur rexiste le ministre d’État Louis Franck, gouverneur de la Banque nationale ; le ministre des Finances Max-Léo Gérard ; le ministre de la Justice Victor de Laveleye, etc.) ne heurta manifestement pas le sculpteur, avide lui aussi sans doute d'un assainissement des mœurs politiques...

     

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    Ne manquons pas non plus de relever que si la médaille sculptée par Eugène De Bremaecker honorait les trente et un ans de Léon Degrelle, sa remise au cours du banquet d'anniversaire se passa aussi dans le contexte électrique de la défaite électorale du 11 avril 1937. Deux mois plus tard, le 11 juin, le rédacteur en chef du Pays réel et membre du conseil politique de Rex, Hubert d'Ydewalle, démissionnait avec fracas de ses fonctions, provoquant un véritable séisme politique dans le mouvement.

     

    L'anniversaire de Léon Degrelle devait être l'occasion d'afficher l'union des rexistes et la confiance en l'avenir : Eugène De Bremaecker semble avoir participé ostensiblement et activement à cette manifestation de refondation puisque le quotidien rexiste ne manqua pas de souligner que « La fête se termina par un bal fort animé et l'on retrouvait dans la foule animée des danseurs, MM. René Lust, chef de Rex-Bruxelles-arrondissement, [...] De Bremaecker et quantité de dirigeants rexistes ».

     

    C'est dans cette perspective que, dès le lendemain, les membres du Conseil politique de Rex mettaient leur mandat à la disposition du chef de Rex « pour toute réorganisation éventuelle ». Plusieurs des membres de ce Conseil allaient d'ailleurs en profiter pour prendre rapidement leurs distances : Pierre Daye démissionna immédiatement de ses fonctions de président du groupe parlementaire rexiste à la Chambre. Xavier de Grünne attendra, quant à lui, la fin de l'année pour quitter le navire.

     

    Mais d'autres ne retarderont pas plus longtemps leur départ, provoquant ce qu'on ne peut qu'appeler une hémorragie dans les rangs du mouvement. Ainsi de René Lust, chef du Front populaire de Rex, région de Bruxelles, président du conseil d'administration de Radio-Rex et membre du Conseil politique de Rex, qui s'enfuit dès le 19 juin ; Jacques Crokaert, membre du Conseil politique, le 20 juin ; quant au colonel Georges Vigneron, s'il quittera la direction des Gardes rexistes le 23 juin, il conservera son siège de sénateur provincial. Ce mouvement délétère se poursuivra jusqu'aux élections législatives anticipées du 2 avril 1939.

     

    PR 14.06.1937 a.png

     

    Alarmé par cette avalanche de défections et déçu par ces abandons, Léon Degrelle veut néanmoins y voir, au-delà de l'ingratitude et de l'opportunisme des dissidents, l'occasion d'une salutaire purification du mouvement. Dans son discours de réception du médaillon d'Eugène De Bremaecker, il affirme : « Qui serait devenu député, sénateur ou dirigeant à Rex ou dans ses journaux sans y être porté par la seule et unique force de Rex ? Que ceux qui ne sont pas contents fichent le camp. [...] Ceux qui voudraient se faire de Rex un escabeau seront balayés. [...] Les douleurs et les trahisons ne nous abattront pas. Ce sont ces épreuves qui feront la victoire et qui nous feront rester semblables à ce que nous étions au premier jour. » (Le Pays réel, 14 juin 1937, p. 3).

     

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    PR 1937.06.14 Banquet 2.png   PR 1937.06.14 Banquet 3.png

     

    Nous étonnerons-nous de ne plus entendre parler d'Eugène De Bremaecker dans l'entourage rexiste après cette fête d'anniversaire où il remit à Léon Degrelle le médaillon qu'il lui avait sculpté ?

     

    L'artiste n'avait en effet pas à se montrer plus catholique que le Pape ni plus rexiste que le chef de Rex-Bruxelles, René Lust, dont le nom lui avait été associé, par Le Pays réel, parmi les danseurs assidus du bal clôturant cette mémorable soirée du 12 juin 1937 !...

     

    Eugène De Bremaecker n'eût de toute façon jamais suivi Léon Degrelle dans sa croisade antibolchevique destinée à rendre à la Belgique, grâce à l'héroïsme de ses faits d'armes au Front de l'Est, une place respectée dans l'Europe d'Ordre nouveau : son patriotisme était trop ancré dans la haine de l'Allemand issue de la Grande Guerre. Il ne parlera d'ailleurs jamais de cet « ennemi héréditaire » qu'en utilisant les expressions patronymiques argotiques classiquement péjoratives. Ainsi de deux anecdotes confiées à l'hebdomadaire Pourquoi Pas ? le 7 janvier 1949 : « C'était pendant la guerre... Une auto boche, fonçant dans le décor et derrière un tramway, manque de me tuer net. Je venais de frôler la mort de tellement près, et dans un éclair si rapide, que c'est après seulement que le choc se fit sentir. » (p. 28) ; « Je me vante d'y avoir écrit [dans la Gazette], en 1934, un article sur ce que nous préparait la Bochie, et dans lequel j'avais tout prévu jusqu'aux parachutages. » (p. 29)...

     

    Après la guerre, De Bremaecker eut bien encore l'occasion d'exprimer son art du portrait dans des médaillons exaltant des figures sportives, musicales ou patriotiques. Nous remarquerons également que, tout comme pour la médaille de Léon Degrelle, le sculpteur opte toujours pour le profil gauche, une caractéristique qui semble lui appartenir en propre !

     

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    DH 1949.05.01.png   LLB 1949.09.05.png

    Photographies extraites, de gauche à droite et de haut en bas, de La Libre Belgique du 6 juin 1945 (maréchal Montgomery), de La Dernière Heure des 11 novembre 1947 (Jef Scherens, septuple champion du monde de cyclisme sur piste), 9 juillet 1948 (le musicologue Gaston Knosp), 18 octobre 1948 (lieutenant-général Van Strydonck de Burkel) et 1er mai 1948 (le compositeur Marcel Poot) et de La Libre Belgique du 5 septembre 1949 (le roi Albert et la reine Elisabeth au cours de la Première Guerre mondiale).

  • L’ami de Mussolini, sculpteur de Léon Degrelle

     

     

    Ferruccio Vecchi, cofondateur du mouvement

    fasciste, réalise le premier buste de Léon Degrelle

     

     

    Expo Légion 18.06.43 Buste LD 1.jpegEn commentant l’Exposition photographique de la Légion Wallonie, dont le Cercle des Amis de Léon Degrelle avait fait la « une » de sa XXXIXe Correspondance (ce blog au 20 octobre 2023), nous regrettions que l’auteur du buste du chef spirituel et militaire des Volontaires wallons qui était présenté à cette exposition de juin 1943 n’ait pas été identifié. En effet, disions-nous, « on ne connaît guère de portraits sculptés de Léon Degrelle ».

     

    Et pourtant la presse rexiste ne manquait pas de faire connaître les nombreuses représentations artistiques de Léon Degrelle, notamment les bas-reliefs des meilleurs médailleurs du pays (ce blog au 11 novembre 2023).

     

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    Une photographie en a quand même été publiée dans Le Pays réel, le 14 juin 1937, mais sa qualité ne rend guère justice à l'art du médailleur. Il s'agit d'un profil gauche (sur les médailles de Victor Demanet et de Marc Colmant, il s'agit toujours du profil droit), mais il est difficile d'en dire davantage. Nous n'en avons malheureusement trouvé la trace dans aucun répertoire ou collection. C'est d'autant plus regrettable qu'Eugène De Bremaecker n'est pas n'importe quel sculpteur. Jouissant d'une flatteuse réputation internationale, il s'est notamment spécialisé dans les portraits de la famille royale : le portrait officiel d'Albert Ier se trouve actuellement au Palais Bellevue, fermant l'aile gauche du Palais royal de Bruxelles ; celui de la reine Astrid est à l'Hôtel-Dieu, à Paris.

    Eugène de Bremaecker ne craignait certes pas de s'afficher dans le milieu rexiste : en témoignent sa belle médaille réalisée pour le trente et unième anniversaire de Léon Degrelle, tout comme sa participation, remarquée par la presse, au bal clôturant le grand meeting donné à cette occasion, le 13 juin 1937.

     

    C'est le 25 mars 1938 que l’hebdomadaire Rex consacra une page entière au tout premier buste de Léon Degrelle.

     

    « Le regard brillant, le front haut recouvert d'une toison broussailleuse et noire comme le geai ; sur la bouche un soupçon d'amertume, un menton volontaire et bien marqué. L'ensemble donne une singulière impression de force et de densité. Mais si un sourire effleure ce visage, tout s'irradie et vous embrase, la bouche prend un ton bonhomme. Ça, c'est Vechi.

    À une époque où la sculpture s'épuise dans des recherches de facture et où nous assistons au gauche effort d'une foule d'artistes pour enfanter des billets mal épannelés en des modelages mafflus, la personnalité austère et rude d'un Vechi s'affirme et triomphe. Aujourd'hui la plupart des sculpteurs travaillent n'importe quelle substance de n'importe quelle manière, l'appliquant à n'importe quoi sans tenir compte des lois de la plastique et des propriétés vitales de l'art. Un homme comme M. Vechi est d'une humeur trop fine pour choir dans un tel travers, sa façon est indépendante, et la liberté de son art qui s'affirmait déjà dans un grand nombre de pièces d'une belle qualité, vient de s'illustrer d'une œuvre magnifique : le buste de Léon Degrelle.


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    Oui, il m'a fort préoccupé ce buste. Le commun croit généralement que pour faire un buste, il suffit d'avoir un modèle. C'est une grave erreur, pour faire un bon buste il faut connaître parfaitement celui qu'il veut représenter, son caractère, son passé, les circonstances de sa vie, tout ce qui fait l'âme d'un homme.

    Et regardant le profil énergique de Léon Degrelle, nous nous taisons pour réduire en réflexion les surprises de notre bonheur. Tandis que Vechi raconte :

    Vous avez raison, c'était très difficile à faire. J'ai essayé une première fois et je n'ai pas réussi à traduire le tempérament de Léon Degrelle, car tout se reflète sur son visage, la puissance de ses sentiments, la pureté de sa foi, l'ardeur de ses pensées...

    En effet, l’œuvre d'art, disait Léonard de Vinci, est une véritable complicité. Cette complicité bien entendu a été soutenue par un métier solide et une inflexion propre. Un artiste ne doit pas se livrer impunément à la débauche des muscles. Les muscles du Discobole sont loin d'être aussi bosselés et tourmentés que ceux du Balzac de Rodin. Ignorance ? Non, au contraire maîtrise, simplification volontaire et discrétion. L'art de Vechi est un art complet, intelligent, dans lequel nous saluons l'équilibre des volontés et des moyens : ce qui compte pour lui c'est la composition animique du style et la fidélité à l'objet. Il faut apprécier le lyrisme d'une œuvre comme ce buste de Léon Degrelle où il déploie ses richesses et tourne ses attentions vers les recherches de facture, les courbes subtiles, les compositions destinées à produire avec exactitude les nuances de la vie. Comme nous l'en félicitons, il nous répond.

    C'est surtout grâce à M. Léon Degrelle. Je n'ai jamais eu l'occasion de peindre un homme aussi étonnant. Dès qu'une séance de pose était terminée, il venait voir mon travail et me disait : ça, c'est exact, ça n'est [pas] bon, ça est de telle manière... etc. Je connais son visage d'une manière parfaite...

    Disons-le, après l'avoir prouvé l’œuvre de Vechi s'augmente avec ce buste de Léon Degrelle d'une pièce qui suffirait à elle seule à établir une réputation. Tous les dons rares du sculpteur s'y conjoignent pour aboutir à une évocation brillante et facile : exécution, fermeté à expression, souci de plastique et d'exactitude, élégance robuste.

    R. F. »

    (Rex, 25 mars 1938)

     

    LD Vecchi 2.jpg

     

    Une présentation toute positive du buste de Léon Degrelle –il s'agit effectivement d'une « première »–, mais qui ne dit rien de concret sur l’œuvre et encore moins sur son auteur, dont le nom même est incorrectement cité, sans prénom et mal orthographié : « Vechi » au lieu de « Vecchi »...

     

    Pour en savoir plus, il fallait ne pas avoir raté Le Pays réel du 4 mars précédent où le buste était présenté en première page par une seule photo légendée : « C'est l'artiste italien Ferruccio Vecchi qui a réalisé l'excellent buste de Léon Degrelle dont nous donnons ci-dessus une photographie. Les sections qui désireraient en obtenir une réplique peuvent s'adresser à l'artiste (66, rue de la Source, Bruxelles). »

     

    Quelques jours plus tard, le 18 septembre, une nouvelle photo sera encore publiée par le quotidien rexiste, sans légende cette fois, en illustration, sur un quart de page, de l'éditorial de Charles de Fraipont, professeur à l'Université de Liège et sénateur de Rex (ce blog au 15 août 2016), intitulé Rexistes et Degrelliens.

          

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    La légende du Pays réel du 4 mars est précieuse en ce qu'elle nous donne le nom précis de l'artiste, Ferruccio Vecchi, et même l'adresse de son domicile dans la commune bruxelloise de Saint-Gilles (nous reviendrons sur les raisons de ce détail ; aujourd'hui, cette maison d'angle a été démolie et remplacée par un immeuble moderne d'une dizaine d'appartements).

     

    Mais qui est ce Ferruccio Vecchi ? La consultation éclair de Wikipédia, l'encyclopédie en ligne du savoir correct d'aujourd'hui, nous apprendra qu'il s'agit d'un sculpteur et d'un ancien combattant des troupes d'assaut italiennes (Arditi) lors de la Première Guerre mondiale. Et surtout qu'il fut l'un des fondateurs, avec Benito Mussolini, le 23 mars 1919 à Milan, des Fasci italiani di combattimento qui donneront naissance, deux ans plus tard, au Parti national fasciste. D'après l'encyclopédie collective, c'est à ce moment que Vecchi fut exclu des Fasci parce qu' « impliqué dans des délits mineurs et des fraudes ». 

     

    Il faut cependant consulter la version italienne de Wikipedia pour apprendre que l'accusé fut acquitté des préventions d'escroquerie et de faux et usage de faux alors que son dénonciateur écopait de deux années de prison. Pour apprendre aussi qu'avec son ami l'écrivain Marinetti, fondateur du mouvement futuriste, il fut des premiers à rejoindre d'Annunzio dans l'Entreprise de Fiume destinée à consacrer l'italianité de la ville.

     

    Vecchi+Marinetti Fiume.jpegFerruccio Vecchi et Filippo Tommaso Marinetti à Fiume, sur la côte croate de la Méditerranée, où ils rejoignirent dès septembre 1919 Gabriele d'Annunzio dans son équipée qui s'achèvera en décembre 1920 (la ville sera néanmoins annexée à l'Italie à la suite du traité de Rome du 27 janvier 1924 ; elle deviendra yougoslave après la Deuxième Guerre mondiale, forçant la majorité italienne de la population à s'exiler).

     

     

    Voilà qui est bigrement intéressant, mais qu'est-ce qui a pu faire se rencontrer Ferruccio Vecchi et Léon Degrelle ? Et comment ce dernier a-t-il fini par être le modèle de l'illlustre Italien pour un buste tombé dans l'oubli le plus total ?

     

    L'Ardito.jpegNous trouverons les principaux éléments de la réponse dans ce qui est la source privilégiée du Wikipédia italien, la seule biographie à ce jour consacrée à ce co-fondateur du Parti fasciste italien : L'Ardito, La vie de provocateur de Ferruccio Vecchi, Ravennois, fondateur du fascisme, par Giulia Belletti et Saturno Carnoli (Edizioni Moderna, 2013).

     

    Dès la préface, le caractère marginal de Ferruccio Vecchi est souligné par l'historien Mimmo Franzinelli, qui le voit évoluer d'égocentrique à arriviste : « Indocile et individualiste, asocial et solitaire, Vecchi ne parvient pas à s’insérer dans l’Italie fasciste dont il avait été –même confusément– le précurseur et le porte-drapeau. L'exil volontaire constitue la prise de conscience d'un mal-être existentiel dont ressortira –lors de son rapatriement– un Ferruccio Vecchi bien différent en tant qu'artiste, décidé à se frayer un chemin dans un monde où le fondateur du futurisme –son vieil ami Marinetti– est devenu membre de l'Académie d'Italie et où tant d'autres ex-révolutionnaires se sont transformés en dignitaires bedonnants. » (p. 8).

     

    Nous verrons, en fait, qu'à la suite de ses déboires judiciaires, littéraires et économiques, l'ancien capitaine des Arditi s'exila aux États-Unis en août 1927. Aux abois financièrement malgré l'aide du consulat italien, il quitta New-York quatre ans plus tard (« peut-être expulsé ») et atterrit à Paris où sans davantage de moyens de subsistance, il fut considéré comme un agent provocateur par les groupes antifascistes qu'il tentait d'approcher et finit par être expulsé par les autorités françaises en avril 1932. Vecchi trouva alors refuge à Genève d'où il adressa une requête au Duce pour l'obtention d'un subside mensuel : « Mussolini, qui suivait personnellement cette affaire, essayait de le tenir en haleine, cédant de temps en temps et avec modération à ses demandes, à seule fin de le savoir toujours loin d'Italie » ! (p. 71). Mais le 1er juillet 1933, par un décret rendu par les autorités cantonales de Genève, Vecchi se vit à nouveau expulsé « pour avoir publié des écrits au contenu immoral ». (p. 71).

     

    Et c'est ainsi qu'il aboutit à Bruxelles où l'ambassadeur d'Italie lui avait réservé la fonction de bibliothécaire de l'Institut italien de culture, toujours actif aujourd'hui au 38, rue de Livourne, à Saint-Gilles. Il décora cette Casa d'Italia de grands panneaux figuratifs en métal (« un art nouveau que j'inventai moi-même », p, 71), aujourd'hui disparus : ils furent en effet emmenés par Vecchi lors de son retour en Italie et certains se retrouveront exposés à la Biennale de Venise en 1940. Mais surtout, « en 1937, il s'adonna définitivement à la sculpture avec la réalisation d'un premier portrait » (p. 71). Ce premier portrait, les biographes ne l'identifient pas formellement (ils n'en possèdent d'ailleurs aucune illustration), mais il ne peut s'agir que de celui qui nous occupe, le buste de Léon Degrelle présenté en mars 1938 dans la presse rexiste.

     

     

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    Quelques exemples de panneaux métalliques (d'une hauteur de 2,5 mètres !) créés par Vecchi pour la décoration de la Casa d'Italia, à Bruxelles : ci-dessus, Amazzone ; ci-dessous, Eva et L'ultima danza di Salomè.

     

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    D'autant que le buste fit rapidement l'objet d'une dispute qui aurait abouti à une action en justice, selon un rapport de la police politique italienne au Ministère de l'Intérieur : « Le sculpteur italien Ferruccio Vecchi fut présenté à Degrelle par le comte Rinaldini [attaché de presse de l'ambassade d'Italie à Bruxelles, auteur d'articles favorables à Rex, notamment sur le Congrès de Lombeek, ce blog au 15 mars 2024], correspondant du Giornale d'Italia et, à ce qu'il me semble, de [l'Agence de presse contrôlée par l'Etat] Stefani, et Degrelle, cédant aux pressions amicales de Rinaldini, commanda à Vecchi un buste qui fut payé 18.000 francs. Vecchi eut alors l'idée de réaliser 2000 reproductions miniatures du buste et voulut que Degrelle les emporte ou, à tout le moins, encourage personnellement leur placement dans les sections du parti rexiste.

    Ne parvenant pas à ses fins, il passa aux menaces aussi bien contre Degrelle que contre Rinaldini, se gagnant le soutien dans cette action d'un certain Dal Prà, squadriste italien. Une intervention amicale du major Bottacci de notre ambassade n'eut pas de succès.

    Vecchi s'adressa alors à l'avocat Jaspar pour attraire Degrelle devant un tribunal et lui réclamer 80.000 francs. Ennemi juré du fascisme, Jaspar a accepté l'affaire avec plaisir afin de la faire mousser en scandale. Le conflit entre Degrelle (actuellement malade et immobilisé pour quelques mois à cause d'une lésion à un poumon [d'après Le Pays réel des 15 et 16 octobre 1938, Léon Degrelle souffrait d'une congestion pulmonaire provoquée par une amygdalite streptococcique ayant affecté le poumon droit]) et un célèbre fasciste italien s'y prêtait à merveille. Vecchi se trouve actuellement à Saint-Raphaël, en France, chez son beau-père.

     

    Vecchi Ferruccio.jpegFerruccio Vecchi, à l'époque de son séjour en Belgique. D'après ses biographes, il emporta quand même un bon souvenir de Bruxelles : « En mars 1939, Vecchi s'installe définitivement à Rome, via Aquileia 22, où, séparé depuis longtemps de son épouse Farina, il vit avec la jeune Belge Simone Alavoine. » (p. 75).

     

    Il paraît que, voici quelque temps, une somme d'argent (5000 francs) a été envoyée de Rome à Vecchi via l'ambassade, somme à lui verser progressivement. Mais il est parvenu à en disposer tout de suite et à la liquider méthodiquement dans des fêtes nocturnes entre Bruxelles et Londres.

    La presse belge, qui est complètement aux mains des Français, attend la tenue du procès pour lancer le cancan qui pourrait être évité en rappelant en Italie Vecchi et son lieutenant Dal Prà. La colonie italienne se sentirait soulagée. » (pp. 72-73).

     

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    Et c'est, finalement, ce qui se passa : le turbulent, présomptueux et, pour tout dire, encombrant Ferruccio Vecchi fut rappelé incontinent à Rome, grâce à la coïncidence de la préparation du 20e anniversaire de la constitution des Fasci à Milan. Une rencontre avec Galeazzo Ciano, ministre des Affaires étrangères, fut alors organisée pour liquider tout le contentieux Vecchi qui traînait depuis quelque douze ans : « Vecchi est immédiatement reparti à Bruxelles pour rentrer avec armes et bagages à Rome. L'ambassade royale a été chargée de liquider les dettes laissées par Vecchi, dettes semblant s'élever à quelques dizaines de milliers de francs. [...] Mais il ne faut pas oublier que Vecchi est atteint d'une espèce de mysticisme frôlant l'exaltation et qu'il vit dans des conditions de santé fort précaires à cause d'une tuberculose avancée » (rapport cité p. 74).

     

    Malgré ce que laissent entendre les biographes (« [Vecchi] ne retrouva les honneurs des gros titres des journaux qu'en 1938, à l'occasion d'un litige judiciaire contre Léon Degrelle », p. 71), le procès annoncé n'eut pas lieu. Non seulement il n'eut pas lieu, mais la presse belge n'évoqua même jamais le différend opposant les deux hommes, n'accordant en rien l'honneur de ses gros titres au sculpteur et rejetant donc son nom dans l'anonymat le plus complet.

     

     

    Ardito p.73.jpeg

    Comme toujours, il ne faut pas prendre pour argent comptant tout ce que racontent les « historiens » ayant pignon sur rue. On peut en effet se poser des questions sur la rigueur de travail des biographes de Vecchi quand ils légendent, par exemple, la célébrissime photo de la réception du SS-Hauptsturmführer Léon Degrelle par Adolf Hitler en son quartier général de Rastenburg (nord-est de la Pologne actuelle), après le succès de la percée de Tcherkassy, le 20 février 1944 : « Léon Degrelle [...] pendant sa rencontre à Berlin avec Hitler en 1936 » !

    Il n'existe bien sûr aucune photographie de cette première rencontre, imprévue et inespérée de la part de Léon Degrelle, marquant surtout la curiosité et l'intérêt de la part d'Adolf Hitler. Remarquons au passage qu'il n'existe pas non plus de photo de la rencontre entre le roi Léopold III et Adolf Hitler au Berghof. Mais pas pour les mêmes raisons : la visite du souverain belge était imposée et importune (ce blog au 28 juin 2017). L'extrême différence d'impression laissée sur le Führer par ces deux personnalités belges rencontrées pour la première fois est également hautement significative.

    Léopold III en 1940 : « Hitler l'accueillit avec une amabilité assez glacée. [...] Hitler eût vraisemblablement préféré mettre immédiatement fin à la visite [...] qui n'avait apporté que [...] déception à Hitler. » (Paul Schmidt [interprète officiel d'Adolf Hitler], Sur la scène internationale, p. 277-279).

    Léon Degrelle en 1936 : « [Hitler] fut fort impressionné par le dynamisme et en même temps par la maturité d'esprit de ce jeune chef. Lorsque Degrelle eut quitté le grand salon, le Führer déclara à Ribbentrop [...] : Jamais je n'ai vu de tels dons chez un homme de cet âge. » (Degrelle m'a dit, p. 238-240).

     

     

    PR 28.10.1936 Jaspar à la porte.pngCe n'est évidemment pas pour rien que Vecchi aurait choisi Marcel-Henri Jaspar comme avocat car celui-ci, éreinté par les campagnes « anti-banksters » menées par Rex contre lui tout au long de 1936 et 1937, avait déjà porté plainte contre Léon Degrelle (dont il était certes devenu un « ennemi juré »). L'affaire avait fait grand bruit dans les journaux et si le ministre avait gagné son procès, sa réputation en avait été gravement altérée. Par ailleurs, depuis janvier 1938, l'ex-ministre des Transports était violemment accusé d'avoir participé, en pleine guerre civile espagnole, à un trafic illégal d'avions en faveur du camp républicain. L'affaire provoqua un tel scandale que Jaspar agressa physiquement le député rexiste Raphaël Sindic lors de la séance parlementaire du 27 janvier 1938. Inculpé pour coups et blessures, Jaspar fut renvoyé en correctionnelle en octobre 1938 (il sera condamné à 3500 francs d'amende le 1er mars suivant).

     

    Il est plus que probable que si l'affaire lui avait été proposée, Jaspar l'eût fermement refusée : les imputations incertaines de Vecchi concernant la responsabilité de Léon Degrelle dans la diffusion de son buste eussent encore davantage ridiculisé l'avocat-politicien libéral, devenu l'une des têtes de turc préférées du Pays réel.

     

           

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    Deux des nombreuses caricatures de Marcel-Henri Jaspar publiées par Jam dans le quotidien rexiste Le Pays réel : ci-dessus (13 novembre 1936), le ministre corrompu pris en flagrant délit ; ci-dessous (30 janvier 1938), la fameuse séance parlementaire où le député rexiste Raphaël Sindic se fit agresser physiquement par les partisans du Frente popular et, ajoute malicieusement le caricaturiste, par la mauvaise foi du président de la Chambre, le socialiste Camille Huysmans (devront comparaître devant le tribunal correctionnel, le libéral Jaspar, le communiste Julien Lahaut et le socialiste René Delbrouck, mais pas Frans Van Cauwelaert, le député à longue barbe du dessin, « bankster » catholique férocement étrillé par Léon Degrelle).

     

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    C'est sans doute une trace du souhait de Vecchi de commercialiser son œuvre que l'on retrouve dans la légende de la photo parue, le 4 mars 1938, en première page du Pays réel fournissant l'adresse du sculpteur du buste de Léon Degrelle, à l'intention des « sections qui désireraient en obtenir une réplique ». Mais il n'est nullement précisé qu'il s'agirait d'une copie de taille réduite, ni qu'un total de deux mille exemplaires en seraient disponibles ! Si un tel nombre en avait été réalisé, on en connaîtrait probablement aujourd'hui encore nombre de répliques. Il est même douteux qu'il y ait eu ne fût-ce qu'un seul autre exemplaire fondu, si on considère le prix d'achat (de revient ?) payé par le modèle, 18.000 francs belges de l'époque (l'équivalent de plus de 1600 euros) : y aurait-il eu beaucoup de sections rexistes capables, financièrement, de consentir pareil investissement somptuaire ?

     

    On dispose néanmoins de quelques photographies de l'agence de presse SADO (Service Auxiliaire de Documentation, ce blog au 20 juillet 2016) d'une cérémonie de la J.N.S. (Jeunesse nationale-socialiste) organisée par John Hagemans, dont certaines sont reproduites dans l'album d'hommage John Hagemans, Prévôt de la Jeunesse, 1914-1942. Elles y sont identifiées comme « le vieux rite germanique du lien tranché », cérémonie qui s'est tenue en 1941 dans les locaux réquisitionnés du Grand-Orient de Belgique, devenu le quartier général de la Jeunesse du mouvement Rex.

     

          

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    Dans la salle de l'ancien grand temple du Grand-Orient de Belgique, au 79 de la rue de Laeken devenu son siège, la Jeunesse de Rex organise ses festivités. Ici, « le vieux rite germanique du lien tranché » (on distingue une hache sur le billot devant John Hagemans raidi dans le salut rexiste). Au centre des acteurs de la cérémonie, sur un haut pilier, le fameux buste de Léon Degrelle réalisé par Ferruccio Vecchi.

     

     

    Il s'agit là de l’œuvre originale, offerte peut-être par Léon Degrelle à la Jeunesse rexiste pour orner ses locaux, car aucune autre photo ne documente ce buste ni au domicile du Chef de Rex, ni dans aucune autre manifestation politique ou culturelle rexiste ou légionnaire...

     

    Cet éloignement du buste de son modèle traduirait-il un désamour de Léon Degrelle pour son portrait réalisé par Vecchi ? Il faut dire que jamais Léon Degrelle n'en parla alors qu'il était particulièrement fier de ses médaillons dont il possédait d'ailleurs certains originaux.

     

     

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    Sculpture originale de Victor Demanet, d'un diamètre de 50 cm, effectuée pour la réalisation du médaillon célébrant Léon Degrelle (ce blog au 11 novembre 2023), dans le parterre fleuri de la terrasse madrilène du dédicataire.

     

     

    Ce n'est que lors des séances de pose pour le buste réalisé pour son quatre-vingtième anniversaire qu'il raconta les éprouvantes tortures infligées par Vecchi pour essayer d'obtenir la meilleure ressemblance. Encore n'a-t-il jamais prononcé le nom de l'auteur (dont il ne se souvenait manifestement plus) ni évoqué son éminente qualité « fasciste » (qu'il ignora probablement : aucune allusion n'y est faite non plus dans les articles de l'époque) : « Ce n'était pas à proprement parler une sculpture, mais plutôt un masque comme on en fait pour les morts. Sauf que j'étais bien vivant et qu'on m'appliquait le plâtre sur la figure avec deux pailles dans les trous de nez pour me permettre de respirer. Et encore ! A peine ! J'ai bien failli périr asphyxié au cours de ces séances interminables ! » (substance de l'enregistrement original en possession de la RTBF pour le film La Führer de vivre, de Philippe Dutilleul).

     

    Et sans doute ce buste, sculpture princeps de Ferrucio Vecchi qui se consacrera désormais à la statuaire, ne plut-elle pas davantage à son auteur. Peut-être parce qu'elle ressortissait davantage au moulage qu'à la sculpture ? Peut-être aussi à cause des souvenirs désagréables qui y étaient liés ?

       

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    Ce qui nous intéressera davantage, c'est la photographie d'un buste de femme, présenté comme « Mein erstes Werk – La mia prima scultura ».

     

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    Par la suite, Ferruccio Vecchi abandonna le recours au moulage (heureusement d'ailleurs pour son principal modèle, Benito Mussolini !) et parfit sa technique, devenant un authentique et talentueux sculpteur. C'est donc à raison qu'il désigne comme sa première œuvre ce buste féminin dans une attitude similaire, mais autrement réussie, à celle de Léon Degrelle deux ans auparavant. Le buste du Chef de Rex aurait alors servi en quelque sorte de « brouillon » à ce nouveau bronze, qui en est quasiment un reflet de miroir.

     

    Busto di Donna Il Ponte.png      Buste Vecchi 1938 d.jpg

    A gauche, le Busto di Donna, dans la photographie proposée sur le site de la grande salle de ventes milanaise Il Ponte – Casa d'Aste.

    Le catalogue de l'exposition allemande de 1941 précisait que l’œuvre appartenait à la collection du riche industriel fasciste Francesco Marinotti (1891-1966), à l'époque vice-podestat de Milan. Elle avait probablement été acquise à la XXII Biennale de Venise où elle fut présentée de mai à octobre 1940. Elle a récemment été mise en vente, estimée entre 800 et 1200 euros, et adjugée le 11 décembre 2019 à 10.000 euros.

     

    Il existe une courte séquence (1 min. 24'') filmée dans l'atelier romain de Ferruccio Vecchi, disponible sur youtube, présentant l'artiste en action et sélectionnant trois réalisations originales : L'Aviateur (un homme prêt à prendre son envol, tenant d'une main une gigantesque aile d'avion), Invocation (un jeune homme, genou en terre, déclarant sa flamme à une jeune fille extatique) et « un groupe exaltant la famille et le travail agricole ».

     

     

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    Des œuvres qui se veulent empreintes de grandeur, d'héroïsme et de modernité, mais qui n'évitent pas souvent un kitsch assez désarmant quoique résolument assumé. Ainsi des portraits de Mussolini qui furent présentés à un Duce assez interloqué à l'exposition de Rome, en mars 1940 : les photos de la visite furent, paraît-il, censurées mais le modèle écrivit tout de même dans le livre d'or de l'exposition, non sans quelque malice : « Enfin, une nouvelle expression artistique ! »

     

      

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    A gauche, « L'Empire jaillit de l'esprit du Duce. » ; à droite, « Mein Kampf. Du sommet de la pensée de Hitler, jaillit la jeune Germania qui a brisé les chaînes de l'esclavage. »

     

     

     

    Le buste en bronze de Léon Degrelle réalisé par Ferruccio Vecchi en 1938, –sa toute première œuvre en tant que statuaire–, est disponible, ainsi que de nombreux et rares articles de qualité muséale concernant Léon Degrelle, sur le site Le Cercle du Collectionneur.

     

    LD Vecchi 6.jpg

     

     

     

  • La première interview de Léon Degrelle d’après-guerre (3)

    Copie de l’aide-mémoire destiné à la rencontre avec Robert Francotte (1)

     

    1.

     Notes rédigées par Léon Degrelle à Saint-Sébastien (Espagne),

    le neuf mai 1946.

     

    San Sébastian (1).jpg

     

    I. Avant la guerre

    Politique strictement nationale. Lutte pour un Etat fort et propre. Aucune dépendance de l’étranger.

    Quelques amis italiens de Mussolini –qui avaient pour moi une grande affection– ont aidé REX (Automne 1936, Hiver 1936-37). Mais cette aide était d’inspiration purement sentimentale. L’Italie n’avait rien à faire chez nous. Xavier de Grunne [1] reçut ainsi environ quatre millions, à l’automne de 1936, à son château de Wesembeeck-Opem (?).

    Dès le printemps de 1937, cette aide passagère avait pris fin. Quant avec l’Allemagne, rien.

    J’ai vu Hitler, accidentellement, en 1936 (durant les vacances de l’été). Il me proposa le plébiscite de la réconciliation à Eupen-Malmedy. J’en fis part au Roi. La proposition n’eut pas de suite [2].

    Depuis lors, je ne vis (ni moi, ni qui que ce fût de mon entourage) aucun Allemand et ne gardai absolument aucun contact. Je ne savais même pas où se trouvait l’Ambassade d’Allemagne en Belgique. Durant la « drôle de guerre », je fus, avec sincérité totale, un partisan farouche de la neutralité. J’avais

    2.

    vu le Roi à ce sujet, au début de septembre. Entrevue secrète. Le capitaine Jacques de Dixmude m’introduisit le soir au Palais de Laeken [3]. Le Roi approuva totalement ma lutte pour la Paix. Nous n’eûmes jusqu’au 10 mai absolument aucun contact avec la propagande allemande.

    – Oui ou non, la guerre fut-elle, pour tous les Européens indistinctement, une imbécillité et une catastrophe monumentale ?

    II. Mon arrestation, le 10 mai 1940 fut monstrueuse [voir ce blog aux 30 avril et 6 mai 2017]. J’eusse servi mon pays au front avec foi et passion. Le parlement laissa s’effectuer mon arrestation et ma livraison au Conseil de guerre français de Lille. Ce fut une infamie.

    La preuve que nous n’avions rien à voir avec les Allemands, c’est que ceux-ci ne firent même rien pour moi après la guerre de 40 et me laissèrent moisir en prison pendant de longues semaines à Tarbes, Toulouse, Puy-en-Velay et Vernet !

    Je ne fus délivré qu’à la suite de l’intervention de Vichy, de Pierre Daye et de vieux camarades d’Université, tous Belges [4].



    [1] Sur Xavier De Grunne (1894-1944), voir Lionel Baland, Xavier de Grunne, De Rex à la Résistance, éd. Godefroy de Bouillon, 2017.

    Baland De Grunne.jpg

    La couverture de cette biographie s’orne du chromo publié par le chocolat Jacques pour célébrer le Comte Xavier de Grunne, président du club alpin de Belgique, qui, en 1932, dirigea une mission scientifique au Congo belge : il s’agissait d’explorer le versant occidental du mont Ruwenzori au sommet duquel (5094 m) le comte planta le drapeau national. Xavier de Grunne publiera en 1937 le rapport de cette expédition : Vers les glaciers de l’Equateur, Le Ruwenzori, Mission scientifique belge 1932.

     

    Léon Degrelle, qui lui a gardé indéfectiblement son amitié, en dresse le portrait suivant :

    « Pour certains de nos dirigeants, tels que le comte Xavier de Grünne, la guerre avec l’Allemagne était certaine. Ami inséparable du roi Albert, compagnon de ses excursions montagnardes, Xavier de Grünne était animé par un brûlant besoin de se dévouer et par une générosité à la fois sublime et enfantine. Il avait fait au Congo l’ascension du Mont-de-la-Lune, puis était redescendu de la Lune vers la Belgique juste au moment où je frappais à grands coups de balai dans le houraillis de banquistes, de grugeurs, de coupeurs de bourse et de pots-de-viniers des vieux partis de politico-finance. Il était devenu sénateur de Rex, un sénateur impétueux, fantasque, toujours prêt à grimper aux lustres, se retournant, de son fauteuil, pour administrer des paires de claques sonores dans les abajoues de ses adversaires ébaubis. Mais il était droit comme une épée, pur comme les lumières du matin.

    Xavier de Grunne.jpg

    Au début de 1939, il était venu me trouver afin de me proposer un plan nouveau de politique étrangère : “Attaqués par Hitler, nous le serons tôt ou tard, m’expliqua-t-il. Inutile de se leurrer. Plutôt que d’attendre d’être rejetés dans le camp anglo-français, parmi la bousculade d’un premier jour d’invasion, mieux vaut passer immédiatement dans la coalition où nous serons refoulés tout de même un jour, bon gré mal gré, panzers allemands dans les reins.”

    Par conséquent, Xavier de Grünne me demandait de lancer à fond le Mouvement rexiste dans une grande campagne d’intervention pro-alliée. […]

    Nos thèses, à chacun de nous, étaient honnêtes et également défendables. Mais, en conscience, j’étais certain que les miennes étaient les plus conformes à l’intérêt de l’Europe et de mon pays. Je fis appeler mes amis les plus chers et les amis les plus chers de Xavier. Tous me donnèrent raison. […] Nous nous déclarâmes d’accord sur la formule et nous nous quittâmes fraternellement.

    Le plus cocasse fut la suite. […] Il avait vu le résultat de cette guerre qu’il avait voulu, en toute bonne foi, précipiter. Fidèle à son pays, il tentait de relever les ruines.

    Il alla aussitôt plus loin que quiconque dans les visions d’avenir. Il comprit tout le parti que les Soviets tireraient de la tragédie où sombrait l’Europe. Redoutant l’ampleur de la poussée communiste de l’après-guerre, n’hésitant pas devant le danger, il imagina un plan personnel de défense de la Belgique aussi secret que radical. Il était devenu presque invisible. Nous ne savions ce qu’il faisait en dehors de ses articles. Audacieux comme toujours, il courait mystérieusement les routes, s’employait à rassembler le matériel de combat d’une milice de son invention qui, au jour de la décomposition générale, ferait face, à Bruxelles, aux bandes de Moscou triomphantes.

    Les Allemands tombèrent sur le pot-aux-roses, découvrirent un arsenal prodigieux. Xavier, qui allait à fond en tout, avait retourné toute la Flandre pour y déterrer les dépôts d’armes enfouis par diverses divisions de l’armée belge, la veille de la capitulation du 28 mai 1940. Il avait ramené, fourbi, caché dans les caves de son château et ailleurs, de quoi armer plusieurs dizaines de milliers d’hommes ! Cher, très cher Xavier, noble et pur paladin de la Lune ! Les lois de la guerre étaient contre lui. Les Allemands le condamnèrent à mort, mais ils ne l’exécutèrent point. On n’entendit plus parler de lui. Seulement après la guerre, l’on apprit qu’il avait succombé, à force de privations, mais fier et indomptable, au camp de concentration de Buchenwald [en fait, le camp de Gross-Strehlitz, aujourd’hui en Pologne]. »

    (Léon Degrelle, La Cohue de 1940, pp. 14-18).

    [2] Sur la réalité du « financement » de Rex par l’Italie et l’Allemagne, voir ce blog au 14 avril 2016.

    Sur les impressions de Léon Degrelle à propos de sa première rencontre avec Adolf Hitler, le 26 septembre 1936, voir ce blog, notamment, au 4 juin 2016.

    [3] Le capitaine Lucien Jacques de Dixmude (surnommé «Dixy »), officier d’ordonnance du roi Albert Ier, découvreur, avec Xavier de Grunne, de la dépouille du roi, mort le 17 février 1934 lors d’une escalade des rochers de Marche-les-Dames, était un cousin de la mère de Léon Degrelle, Marie-Catherine Boever. En février 1945, le commandant Lucien Jacques de Dixmude devait participer à un commando constitué pour libérer Léopold III et sa famille, alors retenus prisonniers en Autriche, projet qui sera abandonné lorsque les Américains les auront libérés le 7 mai 1945.

    Marche les Dames 18 février 1934.jpg

    Au lendemain de la mort du roi Albert Ier, les journalistes accèdent au lieu de l’accident, accueillis par des gendarmes et un officier du Palais (Lucien Jacques de Dixmude ?) : la voiture du roi, à l’avant-plan, est encore sur place.


    L
    éon Degrelle a raconté comment son arrière-cousin pouvait faciliter ses rencontres avec le roi Léopold III dont il était resté officier d’ordonnance : « Quand la guerre de Pologne a éclaté, j’ai vu le roi. Je me rendais discrètement le soir au palais de Laeken où m’attendait un cousin de ma mère, le capitaine Jacques de Dixmude, devenu général depuis lors [plus précisément, en 1956, lieutenant-général au Grand Quartier général des puissances alliées en Europe (Shape)]. Le roi m’attendait dans son salon, encore vêtu de sa tenue d’équitation, chaussé de hautes bottes, détendu par sa chevauchée. Nous avons ainsi monté ensemble toute la série d’articles que j’ai publiés dans Le Pays réel pour défendre la neutralité au lendemain de l’invasion de la Pologne. » (Léon Degrelle : persiste et signe, p. 187).

    Sur Léon Degrelle et la neutralité belge, voir ce blog au 20 mai 2018.

    Pour l’anecdote, signalons qu’au nom de l’anticolonialisme, l’imbécile cancel culture d’aujourd’hui n’a pas manqué de vandaliser la statue du père de Lucien, le général Alphonse Jacques, héros du combat contre les esclavagistes arabes au Congo. C’était sur la Grand-Place de Dixmude, le 18 janvier 2022 !

    Le général Alphonse Jacques fut créé baron et autorisé à joindre le nom de la ville de Dixmude à son patronyme par une particule nobiliaire, le 15 novembre 1919 : ce fut la récompense de son action héroïque à la tête du légendaire 12e régiment de Ligne qui stoppa définitivement l’offensive allemande devant Dixmude pendant la Première Guerre mondiale.

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    Quelques-uns des éditoriaux de Léon Degrelle concernant la neutralité publié en « une » du Pays réel au lendemain de l’invasion de la Pologne.

     

    [4] Pierre Daye,1892-1960, écrivain, chef du groupe parlementaire rexiste en 1936, parvint à retrouver Léon Degrelle déporté dans un camp du sud de la France et à le ramener à Bruxelles (ce blog au 30 avril 2017).

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    Bien qu’ayant quitté Rex en 1939 pour rejoindre le Parti catholique, Pierre Daye ne mesura jamais son amitié pour Léon Degrelle, allant jusqu’à harceler Vichy pour hâter sa libération. Après la guerre, réfugié en Argentine, il s’efforça de ménager à son ami un accueil sécurisé dans son pays d’adoption (ce blog au 4 mai 2016).

    Dainah Blu-ray.jpg

     

    Écrivain apprécié, Pierre Daye, qui se battit en Tanzanie et au Congo pendant la Première Guerre mondiale, est l’auteur de nombreuses chroniques africaines, dont, en 1929, la nouvelle Daïnah la métisse, republiée en 1932 dans l’hebdomadaire littéraire Les Feuillets bleus pour bénéficier de sa fortune cinématographique. Elle fut en effet immédiatement adaptée au cinéma par le scénariste Charles Spaak et Jean Grémillon à la réalisation (avec, en vedette, Charles Vanel). Malheureusement, l’œuvre mettant en scène un Noir raffiné se faisant justice en tuant un Blanc, lâche assassin de sa femme, fut véritablement saccagée par la société de production Gaumont. Réduit à un format de moyen métrage (48 minutes) dont le propos non conventionnel était devenu inintelligible (le réalisateur refusa d’ailleurs que son nom apparaisse encore au générique), le film mutilé ne connut aucun succès (néanmoins aujourd’hui disponible en DVD/Blu-ray).

    Daye dédicace Crokaert.jpeg

    En 1932, espérant profiter de la sortie du film, Pierre Daye réunit en volume quelques nouvelles exotiques qu’il publia sous le titre Daïnah la métisse (précisant, en page de garde, « et autres contes des Tropiques »). La nouvelle qui eut les honneurs du grand écran est ainsi dédicacée « Pour Charles Spaak et pour Jean Grémillon, à qui cette petite histoire ne parut pas indigne de l’éclatante vie du cinéma ».

    Ce qui nous intéressera, c’est que, d’une part, un des contes, à la sensualité trouble, Le conquérant de Kateko est justement dédié à son ami Jacques Crokaert. D’autre part, nous disposons de l’exemplaire numéro 5, des trente, sur papier Vergé d’Arches de la nouvelle édition de Daïnah, dédicacé de manière sibylline au couple Jacques Crokaert, exprimant l’inaltérable et vive affection de Pierre Daye pour son ami, et ainsi sa capacité à surmonter certaine déception.

    Les « vieux camarades » de l’Université Catholique de Louvain qui partirent délivrer Léon Degrelle (ce blog au 30 avril 2017) sont les avocats Carl Doutreligne, 1906-1973, agent d’assurances, puis administrateur de sociétés, et Jacques Crokaert, 1901-1949, conseiller communal rexiste d’Ixelles, conseiller provincial rexiste du Brabant, fils du ministre catholique Paul Crokaert qui, soutenu par Léon Degrelle, lança les premières attaques contre les politiciens corrompus de son parti : voir ce blog aux 5 avril 2017 (Paul Crokaert) et 7 mai 2019 (Carl Doutreligne). Jacques Crokaert participa, en septembre 1940, au Bureau politique de Pierre Daye dont le but était de réorganiser « les bases structurelles de la Belgique » dans le cadre d’une Europe dominée par le IIIe Reich.

     

    Jacques Crokaert-horz.jpg

    À gauche, Jacques Crokaert, auteur après la guerre des ouvrages non conformistes La Guerre oubliée, 18 jours qui ont permis Dunkerque et Les Routes de l’Exode, 1940 ; à droite, annonce de l’extravagante condamnation de Carl Doutreligne (La Dernière Heure, 19 mars 1948 ; à noter que le ministère public n’avait requis « que » quinze ans et près de trois fois moins de « dommages et intérêts » !).

     

     

    À suivre

     

  • The Axis Forces in World War Two

    Belles illustrations pour une documentation

    souvent lacunaire

     

    The Axis Forces est une revue d’histoire militaire consacrée, comme l’indique son titre, aux troupes de l’Axe Rome-Berlin-Tokyo et à ses alliés. Elle existe depuis janvier 2017 et en est à son dix-huitième numéro, dont la couverture s’illustre du portrait de Léon Degrelle.

    Il s’agit d’une célèbre photographie officielle (ici colorisée, tout comme, notamment, sur le boîtier du film de Jean-Michel Charlier Léon Degrelle, Autoportrait d’un fasciste, exemplaire d'objectivité : ce blog au 1er juillet 2017) qui a été prise en mai 1943 au Regenwurmlager de Pieske (Meseritz), soit peu avant le passage à la Waffen-SS.

    Le jeune soldat de la Légion Wallonie, parti, à trente-cinq ans, au Front de l’Est avec le premier contingent, le 8 août 1941, a déjà pris du galon : il est en uniforme de Leutnant (sous-lieutenant) de la Wehrmacht, porteur des Croix de Fer de Seconde Classe (3 mars 1942) et de Première Classe (21 mai 1942), de l’Ostmedaille (Médaille du Front de l’Est) obtenue le 15 août 1942, au moment de sa création, ainsi que de l’Infanterie Sturmabzeichen (Insigne d’assaut d’Infanterie), décerné le 25 août 1942. Le cartouche du magazine cache le Verwundetenabzeichen (Insigne en bronze des blessés) conquis dès le 23 mars 1942 : il se trouve en effet juste sous la Croix de Fer de Première Classe (elle se distingue bien sur la photo en noir et blanc de la page suivante du magazine où Léon Degrelle est casqué et porte la barrette de l’Ostmedaille au-dessus de la poche de poitrine et non plus son ruban au second bouton de la vareuse sous celui de la Croix de Fer de Seconde Classe). L'examen de cette photo qui nous permet de détailler les décorations militaires que le courage de Léon Degrelle sur le Front de l'Est lui a gagnées en un an à peine met aussi en évidence l'absence totale de leur simple énumération dans les sept colonnes que le malhonnête De Bruyne consacre au fondateur de la Légion Wallonie dans sa prétendue Encyclopédie.

    Axis Forces LD NB 1942.JPGLa casquette du sous-officier s’orne également de l’Edelweiss des Chasseurs de montagne que le Général Ernst Rupp a permis aux Wallons de porter après qu’ils eurent héroïquement servi au sein de sa 97. Jäger-Division (« Partout où marchera et combattra le bataillon wallon, ses héros morts marcheront et combattront en esprit avec lui. […] Que mes meilleurs vœux et ceux de toute la division accompagnent le bataillon et chacun de ses membres. » Generalleutnant Ernst Rupp, Ordre du jour de la Division du 18 novembre 1942 ; ce blog au 30 décembre 2019).

     

     La couverture de ce numéro 18 d’Axis Forces met en lumière l’article-phare, signé par le rédacteur en chef, Massimiliano Afiero, Walloon volunteers in the German armed forces (« Les volontaires wallons dans les forces armées allemandes »). Il est également richement illustré (notamment par quelques photos qui avaient été demandées au « Dernier Carré »), mais comporte aussi quelques erreurs qu’il eût été facile d’éviter avec un minimum de recherche ou en proposant l’article à une simple relecture (pour notre part, nous sommes toujours heureux de pouvoir compter sur l’expertise bienveillante d’un amateur éclairé !).

    Il faut dire que la bibliographie de l’auteur est plutôt sommaire : à part trois de ses propres ouvrages consacrés à la Légion (que nous ne connaissons pas : un en anglais et deux en italien), elle ne renseigne qu’un méchant De Bruyne (For Rex and for Belgium, 2004) ainsi que, –heureusement !–, Léon Degrelle (La Campagne de Russie, dans la traduction italienne de 1981) et Jean Mabire (Légion Wallonie au front de l’est, 1987). Mais aujourd’hui, est-il encore possible d’ignorer Théo Verlaine, La Légion Wallonie en photos et documents (2005), André Lienard, Légion Wallonie (Heimdal, 2 vol., 2015 et 2019, pour les nombreux documents originaux publiés : ce blog au 3 mai 2021), ni surtout, précisément sur le même sujet que veut traiter Massimiliano Afiero, Thibault Daoût, Un Corps Franc de volontaires belges contre le Bolchevisme (deux importants articles in La Belgique en guerre, Editions De Krijger, n° 1, 2014 et n° 2, 2018).

    Axis Forces 15.JPGContrairement à ce que dit la légende de la photo du haut, nous n’assistons pas à un engagement dans les combats de Gromowaja-Balka, mais à un exercice de tir à Blagodatch où la Légion a établi ses quartiers après la sanglante bataille de « Gromo ». L’Adjudant Léon Degrelle porte fièrement les pattes d’épaule d’Oberfeldwebel qu’il y a gagnées (bord argenté avec deux étoiles). Le Commandeur Pierre Pauly est l’officier portant lunettes, un genou en terre, près du Légionnaire participant à l’exercice, en arrière-plan de Léon Degrelle.

    Car The Axis Forces commence fort, en voulant brosser un rapide aperçu de la situation politique de la Belgique : l’auteur prétend décrire l’irréductible opposition entre des Flamands protestants et des Wallons catholiques : « Dans la Belgique occupée par les forces armées allemandes en mai 1940, cohabitaient toujours deux peuples différents par la religion et la langue : les Wallons au sud, catholiques et francophones, et les Flamands au nord, protestants et germanophones. »

    C’est télescoper un siècle d’histoire : l’actuelle Belgique –unie par la religion, mais divisée par la langue– n’est que le résultat de la désolante partition du prospère Royaume Uni des Pays-Bas –qui avait quelque peu ressuscité les florissantes XVII Provinces bourguignonnes (le fabuleux Leo Belgicus : voir ce blog aux 8 août 2017 et 17 octobre 2018)– initiée par la révolte insurrectionnelle bruxelloise de 1830. Ces émeutes qui aboutirent à la scission des Pays-Bas se déclenchèrent, notamment, pour des raisons religieuses (les provinces du Nord et le roi Guillaume d’Orange étant protestants, contrairement à la Flandre et à la Wallonie catholiques) et linguistiques (les Wallons francophones refusant le néerlandais officiel tout comme la bourgeoisie flamande essentiellement francophone, alors que le peuple utilisait les différents parlers régionaux, ne pratiquant pas le néerlandais « standard » qu’il ne comprenait guère).

    C’est aussi ignorer la volonté politique des authentiques nationalistes que furent Léon Degrelle et Joris Van Severen, soucieux du destin de nos régions : en rétablissant l’unité des XVII Provinces sous le nom de « Bourgogne » ou de « Dietschland » (Pays thiois) sans distinction linguistique, ils eussent permis de retrouver l’âge d’or qui irradia les règnes de Philippe le Hardi à Charles-Quint, où tous les citoyens partageant cette même aire historique et culturelle profitèrent de la même prospérité économique et de la même opulence artistique (ce blog au 7 mai 2019).

    Mais revenons à l’article d’Axis Forces, tout en précisant bien qu’il n’est pas question dans cette présentation d’établir un « corrigé » du texte (qui fourmille d’approximations factuelles et d’erreurs, de dates notamment) : notre seul but est d’en redresser les principales inexactitudes et de replacer les événements dans leur contexte politique.

    « Pour des raisons évidemment raciales, les Allemands acceptèrent immédiatement les volontaires flamands dans les rangs de leurs formations de Waffen-SS […]. En ce qui concerne les Wallons par contre, la collaboration ne vint que plus tard, grâce surtout à l’action de Léon Degrelle. »

    Plutôt que de « raisons évidemment raciales », nous parlerions surtout de reprise aveugle de la Flamenpolitik (politique favorisant la Flandre au détriment de la partie francophone du pays) déjà pratiquée pendant la Première Guerre mondiale. Conjuguée à la réputation de sélection et d’excellence physiques de la SS, cette stratégie fut menée avec succès par l’administration militaire allemande, dirigée par le hobereau prussien Alexander von Falkenhausen, pour ruiner les rêves d’indépendance des Flamands et précipiter leur assimilation dans le Reich.

    Capture2.JPGEn Chine communiste, Alexander von Falkenhausen est considéré comme un héros pour avoir aidé la résistance chinoise contre l’invasion japonaise de 1930 à 1938, même si c’était en tant que conseiller militaire du nationaliste Tchang-Kaï-chek. Son buste a récemment été inauguré (2016) sur la Place des Volontaires étrangers défenseurs de la Chine, du Jianchuan Museum Cluster de Sichuan, musée privé consacré, entre autres, à la guerre sino-japonaise. On l’aperçoit ici entre les bustes de Minnie Vautrin (missionnaire américaine à Nankin) et Bernhard Arp Sindberg (avec la toque : ce jeune Danois travaillant dans une importante cimenterie à Nankin organisa l’inviolabilité du site accueillant des milliers de réfugiés chinois en hissant… le drapeau allemand à croix gammée).

    C’est pour lutter efficacement contre cette politique délétère pour le pays que Léon Degrelle, sciemment ignoré par les autorités allemandes, saisira l’opportunité de la guerre à l’Est et saura, par son courage et ses hauts-faits militaires, contourner l’obstacle de la Militärverwaltung, parvenant à traiter directement avec Adolf Hitler en personne. Seule façon à son point de vue de ruiner les manœuvres des réactionnaires allemands de Bruxelles et de lui permettre de parvenir à ses fins politiques, c’est-à-dire assurer à son pays une place honorable au sein de l’Europe nouvelle (ce blog au 28 juin 2017).

    Léon Degrelle ne manquera pas de déplorer amèrement les mauvais choix des nationalistes flamands, mettant en évidence leur précipitation, mauvaise conseillère : « Non seulement les Flamands avaient décidé tout de suite de s’engager mais ils l’avaient malheureusement fait d’une façon assez maladroite. La maladresse de leur politique m’a désespéré pendant toute la guerre. Ils s’étaient, en juin 1940, jetés trop vite dans les bras des Allemands. Ils avaient reçu des embrassades, mais pas de garanties. Ils se sont lancés de la même façon dans l’aventure du front de l’Est, s’alignant dans les rangs de la Waffen S.S. sans avoir obtenu la moindre promesse politique, sans que même leur soit reconnu le droit à être commandés dans leur langue et par des hommes de leur peuple. Jusqu’au dernier jour de la guerre, leur commandeur serait un Allemand. Eux qui avaient répété pendant des années leur slogan “In Vlaanderen Vlaamsch” admettraient –on ne leur avait même pas demandé leur avis– de laisser tomber en Russie leur vieille langue chargée de civilisation et de n’utiliser que l’allemand pour leur commandement ! […]

    Ces impérialistes [annexionnistes allemands] s’employaient à nous manœuvrer pour nous séparer. Ils jetèrent les Flamands en août 1941 dans les bras de la Waffen S.S., où les risques étaient gros d’être malaxés. La Waffen S.S. était une puissance, mais une puissance dangereuse : il ne fallait entrer là qu’en force. Nous, les Wallons, par contre, on nous avait catapultés tactiquement parmi les unités de la Wehrmacht, l’armée ancienne, opposée en de nombreux points à la Waffen S.S. Alors que nous partions précisément pour constituer une unité politique supérieure, l’Europe, certains Allemands nous coupaient dès avant le départ en deux tronçons, Wallons d’un côté, Flamands de l’autre ! […]

    Nous sentions que la situation de notre pays était désespérée, qu’il était menacé de séparation et d’absorption, que seulement en atteignant une situation d’égaux, nous pourrions, peut-être, un jour, acquérir la position de force qui nous permettrait de traiter avec les Allemands en hommes respectés. […] Que nous servait en effet d’imaginer une Europe s’étendant jusqu’à Vladivostok si notre petit pays, au lieu de pouvoir s’exalter à la pensée de refleurir au sein d’une grande unité européenne, ne parvenait même pas à conserver sa minuscule personnalité ! » (Léon Degrelle : Persiste et signe, pp. 265-267).

     

    Plus loin, Massimiliano Afiero écrit : « Le 2 novembre 1935, Degrelle fonda le Parti Populaire de Rex, qui, en 1936, obtint 34 sièges au Sénat. »

    Meulenijzer Coup de Courtrai.jpgLe 2 novembre 1935, c’est la date de ce qui fut appelé le « Coup de Courtrai », la remise en cause par Léon Degrelle et trois cents jeunes rexistes (c’est-à-dire des militants organisant la propagande du journal Rex) de la direction du Parti Catholique qu’ils veulent régénérer, à l’occasion du Congrès des Cercles et Associations catholiques. Cette action de rupture fut ainsi saluée par Robert Brasillach : « C’est le 2 novembre 1935 que Rex vint véritablement au monde » (Léon Degrelle et l’avenir de Rex, p. 36). Sans doute est-ce là l’origine du renseignement de M. Afiero, car c’est en réalité le 23 février 1936, lorsque le Parti Catholique proclama sa rupture définitive avec Rex en interdisant à ses membres d’encore y collaborer que Léon Degrelle annonça l’intention du « Front populaire de Rex » de se présenter seul aux élections (ce blog au 8 avril 2017).

    En aucun cas, Léon Degrelle, allergique au mot même, n’établit quelque parti politique sur le mode traditionnel : il fonda le Mouvement populaire de Rex, comme il l’explique très précisément : « Je n’avais rien à voir avec les vieillards pourris du Parti catholique [qui me condamnèrent]. […] Ce geste, au lieu de me blesser, me libérait. C’est grâce à lui qu’en quelques mois, avant les grandes élections de 1936, je pus créer un Rex national, en dehors et au-dessus des ukases de l’Eglise politique et des vieux partis. Rex serait ouvert à tous les Belges [aux non-catholiques comme aux catholiques]. Nous somme devenus de la sorte le Mouvement Rexiste. Pas le parti rexiste. Je n’ai jamais admis le mot parti. Parti signifie quelque chose de séparé. C’est se couper d’une partie des gens. Mouvement, c’est ce qui avance. » (Léon Degrelle : Persiste et signe, p. 109).

     

    Autre précision nécessaire à la vérité historique, le résultat des élections législatives du 24 mai 1936 n’est pas de 34 sénateurs rexistes, mais de 21 députés et 8 sénateurs.


    Axis Forces : « Dans les années précédant immédiatement le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, le parti de Degrelle observa une attitude pacifiste, exprimant la volonté de maintenir la Belgique hors de la guerre et à distance de l’alliance franco-anglaise. Cette ligne politique a été mal interprétée, comme une sorte de soutien, quoique indirect, à la politique expansionniste allemande ».

    Même si la presse fit semblant de croire que le neutralisme de Rex manifestait son soutien à la politique allemande, il est important de souligner que cette politique avait été définie par le Roi Léopold III lui-même dès le 14 octobre 1936 et appliquée et défendue officiellement par le gouvernement belge. Il est tout aussi important d’observer que si Léon Degrelle et Rex défendirent avec une ferme honnêteté la neutralité absolue de la Belgique, ce ne fut pas le cas du Roi et de son gouvernement qui favorisèrent outrageusement les anciens alliés de 14-18, allant jusqu’à accepter la présence permanente auprès de Léopold III du Général Edouard Laurent, représentant du Général Gamelin, chef d’Etat-Major de la Défense nationale française ! (ce blog aux 28 juin 2017 et 22 juin 2021).

     

    Axis Forces : « Le Conseil général du mouvement rexiste a lancé la constitution d’une nouvelle unité paramilitaire sur le modèle de la SS allemande, les Formations de Combat. Cette unité était chargée de protéger les chefs et les réunions du mouvement et de collaborer avec la police locale et les autorités allemandes afin de maintenir l’ordre dans le pays. »

    SS Hugo Boss.jpgC’est le couturier national-socialiste Hugo Boss, spécialisé dans les uniformes militaires, qui, à la demande d’Adolf Hitler en 1932, dessina les uniformes de la SS. Dès que le Washington Post leva le lièvre en 1997, les « ayants droit » n’ont pas manqué de réclamer des compensations sonnantes et trébuchantes au désormais « leader » (Führer, en anglais et en franglais) du prêt-à-porter masculin…

     

    En créant, le 9 juillet 1940, les Formations de combat, d’inspiration évidemment paramilitaire, Léon Degrelle entendait reconstituer le « Service d’ordre et de sécurité » de Rex, dissous par la loi « anti-milices privées » du 4 mai 1936. Et si leur uniforme était noir, sa coupe n’avait rien à voir avec l’élégance de celui de la SS allemande : aucune référence n’a jamais été faite avec l’ « Ordre noir », même si la troupe d’élite rexiste entendait bien représenter l’ « avant-garde des bâtisseurs de l’ordre nouveau » (Pays réel, 11 octobre 1940). Constituant un des principaux viviers de recrutement pour la Légion Wallonie, les Formations de combat ne furent d’aucune utilité pour « collaborer […] avec les autorités allemandes afin de maintenir l’ordre dans le pays. » Probablement l’auteur confond-il ces unités avec les Gardes wallonnes, créées en juillet 1941 par Léon Degrelle reprenant le nom des légendaires troupes de Charles-Quint (ce blog au 30 décembre 2019), qui seront placées sous l’autorité de la Wehrmacht et seront chargées de la surveillance et de la protection d’installations militaires, de lignes de chemin de fer, de ponts, etc. (ce blog au 9 juillet 2017).

    LD Formation de combat.jpgLéon Degrelle en uniforme des Formations de combat.

    Le 8 août 1941, Léon Degrelle et ses amis se rendront au Palais des Beaux-Arts pour la cérémonie de départ du premier contingent de Volontaires de la Légion Wallonie en uniforme des Formations de combat, affichant les bâtons noueux rouges de la croix de Bourgogne sur la poche de poitrine droite –signe évident de la volonté politique qui les animaient de rendre la Belgique aux XVII Provinces bourguignonnes– et non pas avec celui des Gardes wallonnes, troupes auxiliaires de police, coiffées d’ailleurs du casque de la gendarmerie.

    Garde Wal..jpeg

    Les Gardes wallonnes portent le casque des forces de l’ordre, modèle Adrian, du nom de l’ingénieur français qui les imagina au début de la Première Guerre mondiale : au constat de l’efficacité de la protection qu’il assurait, le ministre de la Guerre, Charles de Broqueville, le fit adopter par l’armée belge en octobre 1915.

    Quel dommage, une fois encore, que Massimiliano Afiero n’ait pas confié son texte à une relecture. Il aurait sûrement évité la mauvaise retranscription du nom du chef de la Première Croisade, Godefroid de Bouillon, roi de Jérusalem –ou plus précisément, « Avoué du Saint-Sépulcre » : « Le 8 août 1941, 860 volontaires wallons quittèrent la gare de Bruxelles. Mais avant le départ, une grande manifestation fut organisée, tout d’abord au Palais des Beaux-Arts, puis sur la Place Royale, face à la statue de Geoffrey du Boulogne [sic], l’inspirateur de la première croisade contre les infidèles » !

    Il n’y eut pas de manifestation sur la Place Royale, le 8 août 1941, seulement le défilé des Légionnaires qui, en quittant le Palais des Beaux-Arts, remontèrent vers la Place Royale pour traverser la Place des Palais, face au Palais royal, emprunter le boulevard Botanique et arriver à la place Rogier et à la gare du Nord. La petite histoire veut qu’en défilant devant la statue de Godefroid de Bouillon, érigée au centre de la Place Royale, un Volontaire s’écria « Godefroid ! Voici les nouveaux croisés ! » Le symbole était d’autant plus frappant que le Chef, Léon Degrelle, originaire de Bouillon, avait vécu toute son enfance à l’ombre du château de Godefroid, enflammé par les récits de la Première Croisade.

    Précisons aussi que ce n’est qu’en septembre 1941 qu’arrivèrent les écussons aux trois couleurs belges, sommés du nom « Wallonie » : il s’agissait de calmer les remous parmi certains Volontaires choqués de devoir revêtir l’uniforme feldgrau (ce blog au 2 février 2021).

     

     

    Axis Forces : « Le Hauptmann René Dupré, commandant de la quatrième compagnie, fut tué en marchant sur une mine. Ce fut le premier mort de la Légion. »

    Gustave Adam Pays réel.jpeg
    Il n’est pas possible de passer sous silence le destin du Légionnaire Gustave Adam, qui fut malheureusement la première et toute jeune victime de la Légion : il n’avait que dix-neuf ans lorsque, le 13 novembre 1941, il trouva la mort en participant, sous les ordres du capitaine René Duprés, aux combats contre un camp de partisans dans une forêt le long de la rivière Samara. Le Pays réel a célébré son sacrifice en ces termes : « Gustave Adam fut le premier mort de la Légion Wallonie.  Né le 14 février 1922, il était bien jeune quand il participa, dès le début de Rex, à l’action de notre Mouvement. […] Son désintéressement, sa sincérité, sa loyauté lui attiraient le respect même de la part de nos adversaires politiques qui reconnaissaient en lui : un pur ! […] Gustave Adam repose aujourd’hui dans les terres de l’Est, il laisse le souvenir d’un cœur généreux, d’une âme dévouée, assoiffée d’idéal. »

    Si le capitaine (Hauptmann) René Duprés ne fut pas le premier Bourguignon à laisser la vie au Front de l’Est, il fut néanmoins le premier officier à succomber au cours du terrible hiver 1941 en s’aventurant à cheval, aveuglé par le blizzard, dans un champ de mines. C’était dans les neiges de Grichino, à l’ouest du Donetz, le 1er décembre 1941 (l’encyclopédiste De Bruyne renseigne inexplicablement dans son opus magnum à prendre avec des pincettes –ce blog au 23 mars 2017– le… 3 novembre 1942 ! C'est néanmoins lui aussi qui affirme que le Capitaine René Duprés « est le premier mort d'une très longue liste de légionnaires », d'où sans doute l'erreur de Massimiliano Afiero).

    Dans sa Campagne de Russie, Léon Degrelle a retracé avec émotion les derniers moments de l’héroïque officier de trente-deux ans : « Egarée parmi ces rafales qui tourbillonnaient jusqu’à trois mètres de hauteur, une de nos compagnies s’engagea dans une des zones minées. Le commandant avançait en tête, à cheval. C’était un jeune capitaine de l’armée belge. Il portait le beau nom campagnard de Dupré. Sa bête cogna sur un de ces engins terribles. Le cheval monta tout droit à deux mètres de hauteur, retomba, les intestins épars, tandis que le cavalier gisait dans la neige rouge, les jambes déchiquetées. La steppe criait, sifflait, miaulait sa victoire. Nos soldats durent, avec deux morceaux de bois, fixer les membres tailladés et transporter ainsi sur des branches de sapin leur infortuné capitaine. Après quelques kilomètres, ils atteignirent une isba déserte.

    Il fallut vingt-six heures avant qu’une ambulance tout terrain pût arriver au secours du mourant. Il avait onze fractures. Il fumait par petits coups secs. Il fit ses adieux à ses garçons. De grosses gouttes de sueur descendaient le long de son visage, tellement la souffrance le torturait. Il succomba, sans un mot de regret, en tirant une dernière fois sur sa cigarette… » (pp. 44-45).

    On le voit, les détails anecdotiques ou les précisions politiques ne sont pas la priorité de l’auteur qui se concentre essentiellement sur l’organisation du Bataillon wallon d’Infanterie 373 (constitué « conformément à l'ordre n° 3680/41 du commandement allemand ») et ses engagements militaires. Ce qui est évidemment important pour savoir qui fait quoi et à quel moment, mais prive le lecteur des nécessaires informations expliquant certaines réactions humaines ou certains aménagements de l’organigramme.

    1941, 22 août. Prestation de Serment 2 (Soir).jpgLe 22 août 1941, en tant que Commandeur de la Légion Wallonie, le Major Georges Jacobs prête solennellement serment d’ « obéissance au haut commandement de l’armée allemande et à son chef suprême Adolf Hitler » sur le sabre du General der Kavallerie (général de corps d’armée) Franz Freiherr von Dalwigk zu Lichtenfels, répétant la formule dictée en français par l’officier de liaison, le Lieutenant Leppin, qui en précise la portée : « Dans le combat contre le bolchevisme ». Léon Degrelle y insistera dans son discours : « [Notre serment au Chef des Armées antisoviétiques] sera limité dans le temps : sa portée sera exactement circonscrite par la durée de la guerre contre le Bolchevisme. »

    C’est ainsi, par exemple, que tous les bouleversements survenus dans les premiers mois de l’histoire de la Légion sont énumérés sans la moindre explication : « Le Hauptmann Jacobs, jugé inapte à commander une unité militaire sur le champ de bataille, fut remplacé par l’ancien officier de l’armée belge, le Hauptmann Pierre Pauly. L’officier de liaison allemand, le lieutenant Leppin, fut également renvoyé à la demande expresse de Degrelle. Pour le remplacer, arriva un officier de réserve, le Hauptmann Erich von Lehe. […] En raison des pertes sévères et du manque de personnel, le commandeur Pauly décida de dissoudre la deuxième compagnie, en en répartissant les survivants parmi les autres compagnies. […] Le Hauptmann Pauly fut rapatrié, officiellement pour raisons de santé. »

    Il eût été plus exact de dire que le Major Georges Jacobs, âgé de près de 50 ans, vétéran de la Guerre de 14-18, fut victime –comme soixante-six autres Légionnaires, dont six officiers– des effroyables conditions climatiques de ce premier hiver de guerre. Il fut démobilisé le 20 décembre 1941 (demeurant en poste jusqu’à l’arrivée de son successeur), ce qui ne l’empêcha pas de revenir courageusement au Front à la fin de la guerre : après avoir dirigé le Service Légionnaire (entraide et protection des familles de Légionnaires, des Gardes Wallonnes, etc.), puis le Département de la Discipline intérieure de Rex, l’ex-Commandeur Georges Jacobs reprit du service en septembre 1944 à la Division Wallonie avec le grade de SS-Sturmbannführer. Le Major Jacobs aurait également été victime de la raillerie de Légionnaires qui l’auraient surnommé « PPM », c’est-à-dire « Pauvre Petit Major ». Un sobriquet que ne manquent jamais de reprendre les chroniqueurs d’après-guerre (dont le mange-ragots De Bruyne), mais que Léon Degrelle a dénoncé comme provenant de Jean Vermeire. Ce détail est d’autant plus piquant que ce dernier avait quant à lui usurpé son grade de lieutenant en mentant sur sa situation dans l’armée belge lors de son engagement dans la Légion : il n’était donc lui-même qu’un PPM, « Pauvre Petit Menteur » !

    Saint-Loup annoté LD Jacobs-Vermeire.jpegEn lisant Les SS de la Toison d’Or de Saint-Loup (1975), Léon Degrelle découvre l’anecdote sur le prétendu surnom donné par les Légionnaires au Commandeur Jacobs : il manifeste son scepticisme et identifie spontanément la « source » de Saint-Loup, qu’il discrédite par une annotation manuscrite réprobatrice.

     

    Léon Degrelle tenait Georges Jacobs en grande estime. C’est à lui qu’il confia son testament et les archives de la Wallonie, mais dans la débâcle des derniers jours de la guerre, le Major Jacobs ne put garder ces dernières (qui devraient donc probablement toujours se trouver aujourd’hui chez les Russes). Fait prisonnier le 27 mai 1945 à Bohmstedt (au nord de l’Allemagne, en bordure de la mer du Nord) par les Britanniques, il est rapidement remis aux autorités belges, rapatrié, jugé et condamné à la peine de mort. C’est Saint-Loup qui donne le détail ignoble de la répression haineuse de son pays : « En 1946, prisonnier en Belgique, ce grand bourgeois riche et cultivé fut frappé d’une amende de trois millions qu’il ne put solder intégralement malgré la vente de tous ses biens. Malade, presque mourant à l’infirmerie de la prison de Saint-Gilles, il vit arriver un huissier qui, dans l’espoir de parfaire la somme due à l’Etat, pratiqua la saisie des biens encore disponibles, c’est-à-dire une paire de chaussettes de rechange et s’en fut avec. » (Les SS de la Toison d’Or, p. 100). Réfugié en Espagne après la commutation de sa peine et sa libération anticipée, Georges Jacobs décédera le 14 février 1964 à Constantina, le village andalou où Léon Degrelle s’était installé (ce blog au 15 décembre 2020).

    Cimetière Constantina.jpgC’est dans le petit village  de Constantina, dans la province de Séville, que le Major Georges Jacobs trouva refuge, non loin de La Carlina, le somptueux domaine édifié par son chef Léon Degrelle (ce blog au 28 mai 2016) : il repose auprès de Léon-Marie Degrelle dans le cimetière municipal (ce blog au 26 février 2016).

    Si Léon Degrelle –appuyé par le nouveau Commandeur Pierre Pauly qui arrive à la Légion le 30 décembre 1941– demanda expressément le renvoi du Lieutenant Leppin, l’officier de liaison allemand entre la Légion et les autorités militaires allemandes, avocat prussien, protestant et particulièrement arrogant, c’est qu’il sut se rendre tellement odieux aux Wallons –allant jusqu’à les traiter d’Untermenschen– que son maintien auprès de la Légion était devenu impossible. Léon Degrelle exigea donc son départ et son remplacement par un officier connaissant bien le français. Ce remplacement fut effectué au début de l’année 1942 et est mentionné dans une note datée du 15 février 1942 du Major Baumann (Kommandostab Z, section de l’administration militaire allemande chargée des liaisons avec les formations militaires et paramilitaires belges). Le nouvel officier de liaison sera le Hauptmann Erich von Lehe, 47 ans, un aristocrate de Hambourg parlant parfaitement la langue des Bourguignons et qui saura nouer des relations amicales avec Léon Degrelle et ses hommes. Docteur en philosophie et lettres, spécialiste en paléographie et histoire régionale, il appliquera sa science de la critique historique à la constitution de ses convictions politiques et raciales. Il restera en poste jusqu’en juin 1942. Après avoir été renvoyé en Allemagne pour cause de maladie, il sera transféré à l'Etat-Major du Général von Falkenhausen à Bruxelles où il s'occupera des affaires des Légionnaires wallons jusqu'à l'évacuation du pays par les Allemands. Selon son petit-fils, Klaus Vogel (cofondateur de SOS-Méditerranée), il conservera intacte jusqu'à sa mort, le 23 avril 1983, son amitié pour Léon Degrelle (Tous sont vivants, Les Arènes, 2017).

    LD+Von Lehe.jpeg

    Le 15 juin 1942, trente-sixième anniversaire de Léon Degrelle, John Hagemans organisa une cérémonie pour l’accueil des jeunes du contingent du 10 mars qui renouvelèrent leur serment de fidélité au Chef. Dans son discours exaltant la jeunesse nationale-socialiste de Rex, Léon Degrelle rappela clairement le but de leur engagement : « refaire les XVII Provinces au sein de la Germanité ». A cette occasion, l'officier de liaison Erich von Lehe qui, l'avant-veille, avait fêté ses 48 ans reçut l’insigne de Rex des mains de Léon Degrelle.

    Quant au capitaine Breveté d’Etat-Major Pierre Pauly, trente-sept ans, qui succéda au quinquagénaire Georges Jacobs, si son action de reprise en mains des troupes wallonnes porta incontestablement ses fruits, ses sautes d’humeur et ses accès de colère donnèrent bien du fil à retordre à Léon Degrelle : c’est ainsi qu’il dut sauver deux Légionnaires, soupçonnés de vol dans le magasin de ravitaillement, du conseil de guerre ou l’aumônier Joseph Sales du peloton d’exécution pour abandon de poste face à l’ennemi… Le Commandeur ne resta en fonction qu’à peu près quatre mois, du 15 décembre 1941 au 8 avril 1942.

    Pauly Croix Fer 2e classe.jpegAprès les durs combats de Gromowaja-Balka, le Generalmajor Werner Sanne, Commandeur de la 100. leichte Infanterie-Division, récompensa l’héroïsme des Wallons de trente-sept Croix de Fer de Seconde Classe, –fait exceptionnel pour un seul bataillon !–,  lors d’une prise d’armes, le 13 mars 1942. Le Commandeur Pierre Pauly fut le premier à la recevoir.

     

    Ordre jour Wehrmacht.pngAfiero donne précisément le bilan des héroïques combats de Gromowaja-Balka (28 février-1er mars 1942) se soldant par soixante-cinq morts et cent dix blessés et récompensant la Légion de trente-sept Croix de Fer de Seconde Classe et d’une citation à l’ordre du jour de la 100e Division d’Infanterie légère du général Werner Sanne (en réalité à l’ordre du jour de la Wehrmacht, dans le communiqué du Haut Commandement des Forces armées, rédigé au Quartier Général du Führer, le 5 mars 1942), Léon Degrelle, étant, quant à lui, promu directement au grade d’Oberfeldwebel, adjudant, pour bravoure au feu (sans passer donc par le grade de Feldwebel, sergent, contrairement à ce qu'affirme De Bruyne dans sa soi-disant Encyclopédie qui donne le grade de Feldwebel au 22 mars 1942, alors que le Soldbuch de Léon Degrelle renseigne directement Oberfeldwebel au 28 février 1942 –voir ce blog aux 28 novembre 2017 et 21 mai 2016).

    A la suite de ces événements, les traits caractériels du capitaine Pauly ne firent que s’aggraver : il accusera publiquement nombre de ses hommes de lâcheté face à l’ennemi et giflera une quinzaine de Légionnaires, dont certains venaient d’être décorés par le général Sanne. Et ce, non seulement en présence de Léon Degrelle, mais aussi de l’officier de liaison von Lehe qui rédigea une plainte auprès de la justice militaire ! Pierre Pauly passa donc devant le conseil de guerre où il fut considéré comme irresponsable de ses actes grâce à un certificat médical du médecin de la Légion, le Dr Silvère Miesse.

    LD Pauly Sanne.jpeg

    C’est un Commandeur Pauly souriant de satisfaction qui regarde le Général Sanne féliciter Léon Degrelle qui vient de recevoir la Croix de Fer de Seconde Classe et de se voir promu adjudant et proposé pour le grade d’officier. En effet, si Léon Degrelle était incontestablement le chef spirituel de la Légion, lui insufflant en permanence la foi en l’idéal, il n’en était pas moins pénétré de réelles valeurs militaires : courage et esprit de sacrifice, intelligence de la situation sur le terrain et sens de l’initiative, exemplarité de la conduite entraînant la confiance des hommes et stimulant leur ardeur au combat.

    Démobilisé, il passa un an et demi dans un centre médical allemand avant de rentrer en Belgique. Il restera néanmoins toujours fidèle à Rex. Léon Degrelle a d'ailleurs souligné, dans La Campagne de Russie, cette fidélité fanatique à Rex, en rapportant l'héroïque engagement de la dernière chance du Commandeur dans les combats acharnés de Gromowaja-Balka : « Le commandeur, capitaine Pauly, rassembla les débris de toutes les Compagnies et, une grenade à la main, se jeta le premier à la contre-attaque en poussant notre vieux cri : "Rex vaincra !" Tout ce qui restait de valide au Bataillon le suivit, y compris les armuriers, les cuisiniers, les estafettes, les charretiers. Ce fut une mêlée frénétique. » (p. 83)

     

    Pierre Pauly occupera donc diverses fonctions administratives et journalistiques (Radio Bruxelles, L’Avenir) avant d’intégrer la Formation B (chargée notamment de la protection des autorités rexistes). C’est ainsi qu’il participera aux représailles consécutives à l’assassinat du bourgmestre de Charleroi, Oswald Englebin (ce blog au 7 juin 2018), avant d’être évacué en Allemagne en septembre 1944. Il se rend alors aux troupes alliées avant d’être transféré aux autorités belges. Il devra alors vivre une véritable saga judiciaire, jugé tout d’abord par le Conseil de guerre de Tournai qui le condamne à mort pour trahison, le 6 juillet 1945. En appel, le 11 décembre, la Cour militaire confirme la sentence. Dans le cadre de la tuerie de Courcelles, le Conseil de guerre de Charleroi le condamne à nouveau à la peine de mort, le 3 août 1946. Les conclusions circonstanciées de son avocat pour établir son déséquilibre mental firent qu’en appel, son cas fut disjoint des autres accusés par la Cour militaire qui décida de le placer en observation médico-mentale. Dès lors, l’ancien commandeur de la Wallonie n’eut de cesse d’être fusillé à son tour, envoyant même une supplique en ce sens au Régent, le Prince Charles : il sera passé par les armes à Tournai, le 21 juin 1948, sept mois après ses vingt-sept co-inculpés, exécutés en représailles de Courcelles.

    1942. von Lehe+LD+Pauly (Sado).jpgCélèbre photographie de l’agence de presse SADO (Service Auxiliaire de DOcumentation) mettant en scène une réunion au PC de la Légion Wallonie sur le Front de l’Est : devant la carte militaire, le Capitaine Erich von Lehe et le Commandeur Pierre Pauly suivent attentivement les commentaires de l’Adjudant Léon Degrelle.

    La seconde partie de l’article de Massimiliano Afiero chroniquant l’action des Volontaires wallons dans les forces armées allemandes, paraîtra dans la prochaine livraison (n° 19 de novembre 2021) du magazine The Axis Forces. Certes, un tel article laissera sans doute quelque peu dubitatifs les amis et la famille des Anciens Légionnaires du Front de l’Est. Néanmoins, tel quel, certes imparfait, il pourra susciter l’attention et la curiosité chez ses lecteurs anglophones ignorant tout de l’épopée bourguignonne et les amèneront –pouvons-nous espérer– à continuer à se renseigner aux bonnes sources bibliographiques (sans oublier les blogs informatiques comme celui du Dernier Carré !).

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    Pour vous abonner à cette revue d’histoire militaire non conformiste au format pdf (ainsi qu’à la revue sœur Fronti di Guerra, paraissant, elle, en italien), il vous suffit de faire un don de (minimum !) 10 euros au compte de l’association culturelle Ritterkreuz : IBAN: IT70 K076 0103 4000 0009 3983 450.

     

    Ce versement (surtout s’il peut se montrer un peu plus généreux) est indispensable pour soutenir les auteurs dans leurs recherches (et nous savons combien elles sont indispensables !) afin de traquer le plus opiniâtrement possible la vérité historique dans un domaine livré chaque jour un peu plus aux fantasmes haineux des pseudo-historiens spécialisés en réécriture du passé et des médias devenus outils de rééducation sociétale.

  • Léon Degrelle : un talent littéraire des plus précoces

     

    15 juin 1906 – 15 juin 2021

     

    Jeunesse 22 12 28 Martinet titre.jpgÀ l’occasion du cent-quinzième anniversaire de la naissance de Léon Degrelle, nous vous avons retrouvé un des tout premiers textes publiés par le jeune et talentueux conteur.

    C’était dans le dernier numéro de décembre 1922 de la « revue hebdomadaire illustrée » La Jeunesse. Léon Degrelle avait tout juste seize ans et il publiait, sous le pseudonyme de Noël (Léon à l’envers) L’épopée d’un martinet, un récit autobiographique quelque peu romancé, dans la rubrique « Les beaux contes de tous les pays » (pp. 901-903).

    Dès son plus jeune âge, Léon Degrelle témoigna d’exceptionnels talents d’écriture, reconnus d’emblée par son professeur du cycle inférieur des études secondaires à l’Institut Saint-Pierre, Paul Rosman : « Vous serez un grand écrivain ! ». Ce témoignage est d’autant plus intéressant qu’il émane d’un instituteur gaumais n’ayant exercé qu’à titre intérimaire à Bouillon au cours de l’année 1919 (la Gaume, appelée aussi Lorraine belge, est la région wallonne la plus au sud de Belgique ; Florenville, principale cité avec Virton, est à trente kilomètres de Bouillon) : étranger à la petite communauté citadine, il ne pouvait être influencé par aucun a priori local, familial ou social.

    Quatre ans plus tard, son professeur de poésie et de rhétorique (ainsi qu’on appelle les deux dernières années des Humanités classiques en Belgique), le père jésuite Paul Colmant, du Collège Notre-Dame de Namur, confirmera l’intuition de l’instituteur de Bouillon : « Depuis que j’enseigne, c’est la plus belle plume que j’ai rencontrée. »

    Son premier biographe, Usmard Legros, l’avait d’ailleurs aussi déduit de l’examen de ses premiers résultats d’école primaire : Léon Degrelle « fait son école primaire au collège diocésain de Bouillon que dirigent des prêtres séculiers. Bon élève, moyennement appliqué mais fort intuitif et compréhensif, il fait d’excellentes études et ses premières compositions révèlent déjà le futur styliste puisqu’elles lui valent, d’après les petits bulletins orgueilleusement conservés par ses sœurs, des récompenses flatteuses. » (Un homme… un chef. Léon Degrelle, 1938, p. 33).

    Institut Saint-Pierre 6.jpg

    C’est à l’Institut Saint-Pierre, situé en face de sa maison sur l’autre rive de la Semois, sous le château de Godefroid de Bouillon (et non à l’Athénée royal qui était pourtant juste à côté du domicile familial), qu’Edouard Degrelle choisit d’envoyer ses fils Léon et Edouard effectuer le cycle inférieur de leurs Humanités.

    L’Institut disparut dans les bombardements français aux premiers jours de la Seconde Guerre mondiale.

    Entrée en Belgique à l’aube du 10 mai, l’armée française occupa Bouillon qu’elle évacua vingt-quatre heures plus tard après avoir fait sauter tous les ponts enjambant la Semois. Pour retarder vainement l’avance allemande autant que pour venger cette fuite peu glorieuse, l’artillerie française bombarda aveuglément la ville au soir du 11 mai : les quartiers du quai du Rempart (où se trouvait l’Institut Saint-Pierre, sur la rive gauche de la Semois) et du quai de la Maladrerie, plus en aval, sur la rive droite, furent anéantis. La rive droite, en amont, où se trouvaient la propriété des Degrelle, l’Athénée et l’ancien couvent des Sépulcrines (transformé en habitations sociales pour les ouvriers de l’importante ferronnerie voisine), demeurera miraculeusement épargnée.

    Ci-dessous, une photo du quai de la Maladrerie ravagé par les bombardements français : elle fut publiée dans l’annuaire Die Wehrmacht Das Buch des Krieges 1939-40, avec la légende : « Si la ville de Bouillon a souffert des tirs d’artillerie, ce fut de la part des Français. C’est en vain que l’artillerie française a tenté d’arrêter les Allemands. Elle a échoué : le pont détruit a été remplacé dans les plus brefs délais par nos pionniers. » (p. 230). Ce pont provisoire, situé quelque peu en aval du Pont de Liège (visible du jardin des Degrelle) a été construit en une demi-journée par les troupes du génie allemand. N’attendant pas sa réalisation, les Panzers et les véhicules blindés de transport de troupes de la 1ère Division du 19e Corps d’Armée traversèrent néanmoins facilement la Semois, peu profonde et multipliant les gués à cette époque de l’année, pour foncer sur Sedan.

    Bouillon Die Werhmacht.jpeg

    Et Léon Degrelle se le rappelle dans ses premières confidences à son amie Louise Narvaez, à qui il confie ses souvenirs en 1945 dans sa prison-hôpital de San Sébastian :

    « Dès l’âge de treize ans, il écrivit. Il s’était mis à créer des récits et des contes pour les revues bruxelloises, Le Boy-Scout belge et La Jeunesse. […] Quand on regarde des gamins de treize ans, on doit faire un effort pour imaginer qu’un garçonnet de cet âge-là, en courtes culottes, les cheveux en bataille, perché au haut d’un arbre au-dessus de l’eau de la Semois, pouvait déjà être dévoré à ce point par un incendie intérieur. » (Louise, duchesse de Valence, Degrelle m’a dit, p. 35).

    Le Boy-scout avril 1924-horz.jpg

    En réalité, ce n’est pas dans Le Boy-Scout belge que le jeune Léon vit ses premiers textes publiés, mais dans le mensuel Le Boy-Scout où il fit paraître dès novembre 1920 (il a quatorze ans), par exemple, ses impressions sur le congrès de la jeunesse catholique luxembourgeoise ou le compte rendu de camps où sa troupe « Charles Théodore » accueille dans les forêts de Bouillon d’autres troupes scoutes, notamment de Bruxelles. Le Boy-Scout belge, quant à lui, est né quelques années plus tard, en 1927, de la fusion, associant leurs noms, des deux organes du scoutisme catholique belge Le Boy-Scout (né en 1919) et Le Scout belge (né en 1925).

    La troupe scoute de Léon Degrelle, « Charles Théodore » (dont les quatre-vingt membres sont divisés en trois pelotons, Léon Degrelle appartenant au premier), tirait son nom de l’hommage qu’elle voulait rendre au second fils du roi Albert –le « Roi-Chevalier » de la Grande Guerre–, frère du futur Léopold III, Charles, comte de Flandre. Ce dernier, après la capitulation du Reich en 1945 et l’empêchement du retour de son frère en Belgique, fut nommé régent du Royaume. On l’avait surnommé, par opposition à Léopold III, supposé collaborateur, le « Prince du maquis » ! S’il en est besoin, nous rappellerons que, contrairement à tous les autres pays européens, la Belgique, ni sous la régence de Charles, ni par la suite, n’adopta jamais la moindre loi d’amnistie ou de « réconciliation nationale » (voir ce blog au 27 novembre 2020).

    Tombeau du Géant L'Orient années 20 couleur.jpgPhoto colorisée du Tombeau du Géant situé sur la commune de Botassart, hameau de la ville de Bouillon, dans le Luxembourg belge. La graphie « L’Orient » figurant sur les cartes postales éditées par la maison Nels, de Bruxelles, est née d’une mauvaise compréhension du lieu-dit Lorihan, qui est le nom originel du massif constituant le Tombeau du Géant. Les rives de la Semois fourmillent de localités ou de lieux-dits présentant la désinence –han (probablement le germanique –heim, qui signale un domaine puissant) constituant autant de places fortes, de villages ou de positions stratégiques aisément défendables, établis par les Francs à la fin de l’Empire (IVe siècle). On peut ainsi relever dans la seule région de Bouillon : Poupehan, Frahan, Dohan, Libéhan, Briahan, Mohan, Merleu-Han,…

    Notons surtout que la troupe « Charles Théodore » organisa, début août 1922, le « Camp de la Joie » sur le site même du Tombeau du Géant (à Botassart, petit hameau de Bouillon, abritant aujourd’hui une partie des cendres de Léon Degrelle, voir ce blog au 31 mars 2019) auquel participa la troupe scoute de l’Institut Saint-Boniface d’Ixelles, à laquelle appartenait Georges Remi, alias Hergé. Peut-être est-ce là que se produisit la toute première rencontre entre le créateur de Tintin et son modèle (voir Léon Degrelle, Cristeros, Aux origines de Tintin, Introduction, p. 36 ; voir ce blog au 7 février 2019). Par la suite, les deux jeunes gens collaboreront tous deux au Boy Scout, comme aux revues de l’Association Catholique de la Jeunesse Belge, Le Blé qui lève et L’Effort, de même qu’à partir de 1928, au quotidien catholique Le XXe Siècle.

    St Boniface Fresque Hergé camps.jpg

    L’Institut Saint-Boniface d’Ixelles s’installe dans ses nouveaux et vastes locaux, en avril 1920. Ils comprennent une vaste chapelle néo-gothique à laquelle est accolée une maisonnette à deux étages qui deviendra le local de la troupe scoute de l’Institut. La décoration en sera bien sûr confiée à Hergé : les fresques et frises qu’il a imaginées (scouts et indiens rampant, chevaliers à cheval joutant à la lance, jeu du tir à la corde, emblèmes scouts à la fleur de lys,…) ont miraculeusement traversé les ans quoique fort endommagées. Cette œuvre –comme le local qui l’abrite et n'a plus servi que de débarras a sombré dans l’oubli pendant presque un siècle avant de réapparaître en 2007, année du centenaire du scoutisme : à peine le temps de permettre d’y consacrer une monographie (Philippe Goddin & Thierry Scaillet, Hergé et le décor des locaux scouts de l’Institut Saint-Boniface, Cahiers d’histoire belge du scoutisme, 2007, 2e édition 2013) : depuis lors, aucune mesure de conservation de cet exceptionnel témoignage de l’art de Hergé au service du scoutisme naissant en Belgique n’a jamais été prise… Jusqu’à ce que, tout récemment (mai 2021), le secrétaire d’état socialiste flamand en charge du patrimoine de la région bruxelloise annonce le lancement d’une procédure de classement, tout en précisant qu’il ne s’agissait pour le moment que « d’analyser le pour et le contre », vu –supposons-nous !– les amitiés douteuses de Hergé, en particulier celle le liant à Léon Degrelle (voir ce blog, notamment, le 24 octobre 2016 et les huit chapitres de Degrelle-Hergé, même combat, du 21 septembre au 1er décembre 2020).

    Ces fresques nous intéressent en ce qu’elles authentifient le passage de la troupe scoute de Hergé à Bouillon et sa participation au Camp de la Joie organisé par la troupe scoute de Léon Degrelle à Botassart, sur le site du Tombeau du Géant, en août 1922 : une vaste carte de Belgique indique par des tentes d’indiens rouges les différents camps de la troupe ; sur le côté droit, une liste en récapitule les endroits par ordre chronologique entre 1919 et 1922 : le camp de Botassart est l’avant-dernier, avant celui des Dolomites. Est-ce alors et au Tombeau du Géant que Hergé et Léon Degrelle firent connaissance ?...

     

    L’épopée d’un martinet.

     

    Jamais je ne l’oublierai, ce fameux martinet...

     

    Son souvenir est trop bien gravé dans ma mémoire et aussi, je crois, dans... !

     

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    La guerre touchait à sa fin… Les Boches, dans une déroute sans pareille, regagnaient leurs centres d’outre-Rhin. Aussi était-il temps de s’y prendre pour pouvoir garder quelques souvenirs. C’est ce que, dans notre philosophie, nous nous communiquions, mon frère Edouard et moi…

     

    Les occasions pleuvaient… ; notre chambre se vit bientôt transformée en un véritable arsenal où nous nous chargions pour nous exercer à la prochaine guerre, de tout démantibuler !

     

    Un midi, nous allions nous mettre à table quand voilà tout à coup Edouard qui arrive, fier comme Artaban, brandissant un martinet monumental… croyant, le malheureux gosse, à un engin militaire !

    LD Larousse Martinet 2.jpegLe Nouveau Petit Larousse illustré (1924) de Léon Degrelle était toujours à portée de main et le mémorialiste ne s’est jamais privé de l’annoter et de l’illustrer (voir ce blog au 13 mai 2018). Ici, alors qu’il fut bien marqué par l’épisode du martinet de son frère Edouard, c’est plutôt l’oiseau qui retient son attention dans son dictionnaire !

     

    Il était à peine entré que ma grande sœur Marie, vrai gendarme en jupons à qui incombait la police de la garnison bondit sur le martinet :

    « Ah ! je vous tiens maintenant ! Qu’il y en ait encore un qui bouge ! »

     

    Le coup avait été si brusque, si rapide, que devant cette apparition vengeresse, nous croyant arrivés au jugement dernier, atterrés et anéantis par le malheur, nous ne pûmes que baisser la tête dans un désespoir navrant…

     

    Le dîner fut épouvantablement lugubre…

     

    Nous n’osions lever le nez, en proie à de noirs pressentiments !

     

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    Les voies de fait allaient bientôt suivre !...

     

    Deux jours après… au cours d’un combat mémorable où les deux frères, avec l’énergique intention de se démantibuler mutuellement le tempérament, se roulaient sur le plancher rivalisant de force, d’adresse et de courage ! La musique adoucit les mœurs, dit-on… Ici, je crois bien que c’était le contraire car les notes éclatantes que nous lancions ne faisaient que nous exciter davantage !

     

    « Le lutte était ardente et noire »… Quand soudain, armée du martinet, Marie apparaît dans l’embrasure de la porte ! Pif ! Paf ! Pouf ! et avant d’avoir pu nous esquiver, nous recevions tous deux une correction de main de maître !

    img_7372.jpg

    « La lutte était ardente et noire » : célèbre vers du poème L’expiation de Victor Hugo : le combat épique entre les deux frères atteint, pour Léon, les sommets hugoliens des Châtiments qui vont bientôt s’abattre sur lui !...

    Image du Panorama, dans la rotonde jouxtant la butte du Lion de Waterloo : cette peinture monumentale (110 mètres de long sur 12 mètres de haut), réalisée sous la direction du peintre français Louis Dumoulin (1860-1924), exalte la charge héroïque de la cavalerie du maréchal Ney contre les troupes anglaises. A noter que cet endroit censé commémorer la victoire des alliés anglo-néerlando-allemands sur Napoléon –le lion qui domine la butte est le Leo Belgicus symbolisant le Royaume uni des Pays-Bas (voir ce blog au 17 octobre 2018)– est devenu, pour tous les touristes, un mémorial napoléonien…

     

    Un commun malheur nous avait réconciliés !

     

    « Tu peux toujours te vanter, sais-tu toi, d’avoir apporté ce martinet, dis-je à Edouard en me frottant les côtes ! En tout cas, j’en ai assez. Il faut en finir. Tu y es ?

    – Oui.

    – Et bien, il nous faut prendre le martinet !

    – Je veux bien, reprit Edouard, qu’enflammait le désir de la vengeance. »

     

    Nous nous concertâmes. On s’emparerait du maudit “knout” et on le jetterait à la rivière, tout comme un chat crevé, pas plus d’honneur que cela !

     

    Nous eûmes bientôt repéré l’endroit où il était caché…

     

    Le lendemain, dimanche, Edouard –oh, le fripon !– se glisse à la cuisine, attrape mon martinet et s’en va le cacher sous le lit de maman…

     

    « Allez ! Il faut se dépêcher ! Va vite le chercher ! » Nous voilà bientôt au jardin…

     

    Edouard sort de son pantalon le fameux martinet !

    « C’est moi qui le jette, me dit-il.

    – Oh, j’aime autant, toutefois que je n’en attrape sur la caisse ! »

     

    Au bord de la rivière… Edouard qui commence à devenir blanc : « Bah ! j’aime mieux que tu le lances !...

    – Eh bien, donne, froussard !... » Et, héroïquement, j’envoie le martinet à la Semois.

     

    Les eaux étaient fortes. Bientôt, il coula et disparut… Tout était consommé… Déjà en nous montait le pressentiment d’un orage futur…

     

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    A la grand’messe, ma petite sœur fut, on ne peut plus méchante. Il n’en fallait pas plus pour s’attirer les foudres de notre pandore ! Rentrée à la maison, Marie court à la cuisine. « Pas de martinet ! »

    Eglise Bouillon.jpgL’église des Saints Pierre et Paul, de style néo-classique, est l’œuvre de l’architecte Joseph Dumont (1811-1859) qui est également à l’origine de l’église néo-gothique Saint-Boniface, d’Ixelles, à quelques rues de l’Institut Saint-Boniface où le jeune Georges Remi –le futur Hergé–, fut élève et membre de la troupe scoute. L’église de Bouillon fut inaugurée le 11 avril 1851. Léon Degrelle y fut baptisé le 20 juin 1906 par son oncle et parrain, l’abbé Joseph Boever (1874-1950), le frère de sa Maman (ce blog au 15 juin 2016).

    Sur cette rare carte postale, on aperçoit encore les statues de saints dressées aux angles des frontons : au nombre d’une dizaine, elles furent enlevées vers 1925, face au danger que représentait leur rapide dégradation.

     

    Au bruit de l’émeute, je me précipite dans l’escalier, juste à temps pour entendre Edouard piailler. « C’est pas moi, c’est pas moi, c’est “le” Léon ! »

     

    J’étais cuit… Toute la famille grimpait maintenant l’escalier… J’allais être massacré !

     

    Vite, je suis dans ma chambre… Allez ! je me verrouille et puis houp ! la table, l’armoire, le lit, le lavabo, tout derrière la porte… Il était temps, ma grande sœur bondit sur la porte… fermée !

     

    « Ouvre !

    – Non !

    – Ouvre ou j’enfonce la porte !

    – J’aime autant : alors, je saute par la fenêtre ! »

     

    Et boum… boum… Je résistais héroïquement quand voilà le verrou qui saute… Je pousse la table… Avec l’énergie du désespoir, je résiste… L’armoire tombe… Hélas… je faiblis… et dans un effort final, le pandore entr’ouvre la porte… J’étais perdu !

     

    Alors, j’escalade chaise, lit, table de nuit et je saute juste à côté de Marie pour attraper une « ratournée » oh laquelle ! Je m’échappe, je dégringole dans les escaliers ! Papa m’attrape et pif et paf… Aïe, aïe, aïe… Sapristi, ce que j’ai crié !!!

     

    Heureusement que j’étais dur… De guerre lasse, on abandonna ma dépouille pantelante (quand les autres regardaient) ! Ce qui ne m’empêcha pas, en allant me débarbouiller à la cuisine de chiper encore une belle pomme que je croquai avec la satisfaction du devoir héroïquement accompli !

     

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    Cette épopée eut tout de même un résultat heureux : jamais plus, on ne revit un martinet à la maison.

     

    Noël

     

     

    Une version moins romancée…

     

    LD Scout.jpgDès la création de la troupe de l’Institut Saint-Pierre en 1919, Léon Degrelle se voudra scout. Il a tout juste treize ans.

     

    L’histoire du martinet a suffisamment marqué l’imaginaire de Léon Degrelle pour qu’il la raconte à nouveau dans un ouvrage qui n’était pas destiné à la publication, car il s’agissait d’un long mémoire destiné à se présenter à ses cinq enfants dont il était séparé depuis 1945 : l’aînée, Chantal, avait juste onze ans et le benjamin, Léon-Marie, six. C’est dire qu’ils le connaissaient à peine et que leurs souvenirs devaient aller en s'estompant (voir ce blog au 15 décembre 2020 pour des exemples de correspondance adressée à Anne et Chantal en 1944 et confisquée par la « justice »). Au début des années soixante, Léon Degrelle veut donner à ses enfants, désormais de jeunes adultes, sa version de l’histoire de sa vie, de ses engagements, de son idéal. Retrouvées dans ses papiers après sa disparition, ces pages ont été publiées, sans nom d’éditeur, ni précisions de date ou de lieu, sous le titre Mon Combat, illustré par des aquarelles du Légionnaire René Henrotay.

     

    Mais venons-en à l’histoire du martinet. Dans son conte, le jeune Léon précise que cet objet mystérieux était issu de leur chasse commune aux souvenirs militaires de la Grande Guerre qui venait de s’achever. Il le confirme dans son récit autobiographique : « On maraude dans les bois, à la recherche de cartouches, de grenades, d’armes, d’explosifs perdus ou oubliés. Puis, quand l’école ouvrira, le grand plaisir sera de mettre quelques grains de poudre sur le couvercle du poêle. Ce n’est pas tout à fait un feu d’artifice, mais l’effet est irrésistible. » (p. 57)

     

    Ce qu’il ne raconte pas, c’est que c’est son petit frère Edouard qui est sans doute le plus débrouillard dans cette collectionnite : s’il a découvert le fameux martinet, il a aussi découvert, avec un autre compagnon de jeux, la veille de Noël 1918, un engin explosif abandonné par les Allemand aux effets bien plus terribles. D’après Jean-Marie Frérotte (Léon Degrelle, le dernier fasciste, 1987), il s’agirait d’un détonateur de grenade : « il en traîne partout » (p. 24) ! Mais Léon choisit de ne pas rappeler cette tragédie. Car l’engin explosa en mutilant la main droite de son jeune frère –petite chance dans son malheur– gaucher, qui perd son pouce et les premières phalanges de trois doigts. Emmené d’urgence à l’hôpital militaire de Sedan, il sera opéré par deux chirurgiens qui parviendront à lui éviter l’amputation de la main. Le 2 décembre 1920, le tribunal des dommages de guerre de Neufchâteau lui reconnaîtra une invalidité permanente de 34 %.

    Maman Degrelle+Edouard.jpgLe petit Edouard, neuf ans, peu après l’accident de la Noël 1918 : sa Maman protège sa main meurtrie.

     

    Un gamin de l’époque, François Twisselmann, a raconté ce souvenir dans ses mémoires publiés en 1992 (Ma petite jeunesse à Bouillon), tout en se trompant de main. Remarquons aussi la coutume locale d'accompagner le nom des personnes de l'article défini: le petit Edouard, comme nous venons de le voir, raccuse son frère en le désignant: « c’est “le” Léon ! » (voir aussi ce blog au 25 décembre 2016).

     

    « À 11 heures, à la sortie de l’Institut, deux gamins ont eu un accident en essayant de dégoupiller une grenade. La grenade était cachée dans la jonchaie au bord de la rivière, juste devant l’Institut. Monsieur Genglère [instituteur en chef de l’Institut Saint-Pierre] ne sait pas si c’est l’Edouard Degrelle, un des deux valets du brasseur de la rue du Collège, qui a trouvé la grenade, ou bien si c’est l’Alphonse Louis, le valet du menuisier qui travaille chez Genotte à côté de l’Institut. L’Alphonse demeure dans la deuxième maison en dessous de notre école, après celle de la Pauline Collignon-Florin. C’est l’Edouard Degrelle qui a voulu dégoupiller l’engin qui a éclaté en lui enlevant le pouce et la moitié de l’index gauches ; un éclat de la grenade, et cela c’est encore pire, s’est logé dans l’œil gauche de l’Alphonse Louis.

    Au bruit de l’explosion, l’Eugène Genotte et son ouvrier, le père de l’Alphonse, sont sortis sur le rempart pour voir ce qui s’y passait. Le père de l’Alphonse a couru près de son garçon qui criait et ne voyait plus clair. Le Jules Dachy, le brasseur de la rue du Moulin, et ses ouvriers sont accourus aussi. Et Monsieur Genglère est arrivé au même instant. Mais que faire ? L’Albert Genotte a couru prévenir le docteur Louis Corbiau. Encore bien bon que le docteur n’était pas parti dans les villages. Il est venu en auto tout de suite. Il a fait un pansement à l’Edouard Degrelle pour arrêter le sang. Il a regardé l’œil de l’Alphonse. Il a fait monter les deux gamins dans son auto pour les mener à l’hôpital militaire que l’armée française a installé à Sedan.

    Monsieur Chevy [Lucien Chevy, instituteur en chef de l’école communale des garçons] nous a fait promettre de ne pas toucher aux engins de guerre. Ce n’est pas la première fois qu’il nous le dit. Monsieur Genglère l’avait aussi fait promettre à ses gamins. Cela n’a servi à rien. À cette heure, on n’a plus qu’à se fier aux chirurgiens de Sedan qui ont dû soigner bien des blessés de guerre. […]

    À l’école, Monsieur Chevy nous dit qu’il avait passé la soirée avec le père, la mère et la sœur de l’Alphonse Louis. Le docteur Louis Corbiau l’avait ramené de Sedan avec l’Edouard Degrelle. Il allait être 11 heures. Le pouce et l’index de l’Edouard ont été recousus. Le docteur Corbiau avait dit aux parents de l’Alphonse qu’il perdrait une partie de la vue de l’œil gauche. L’œil droit n’a rien eu. Pour le moment, l’Alphonse doit rentrer à la maison. On lui a donné des lunettes avec un verre gauche tout brouillé. Dans une bonne dizaine de jours, il pourra rentrer à l’Institut Saint-Pierre. » (pp.127-130)

     

    Mais voici le récit du martinet, en version « historique »…

     

    « La grande sœur Marie, la marraine de Léon, est beaucoup plus sévère que Maman. Elle a vingt ans, elle est belle et douce, elle rêve de perfection, de don complet. Elle entrera au Monastère des Abys, chez les Religieuses Visitandines. En attendant, elle a pris dans ses mains fermes la direction du bataillon des petits, qu’elle appelle parfois en riant les “insoumis”. Au reste, on se demande ce qu’aurait donné la nature ardente de son filleul s’il n’avait été maintenu, enfant, dans les brancards d’une piété solide, d’une discipline de vie exacte.

    Famille Degrelle fond jardin.jpg

    Probablement une des dernières photos de la famille Degrelle au grand complet dans son jardin en bord de Semois, avant le départ de l’aînée, Marie, le 31 mai 1921, pour le couvent des Sœurs de la Visitation au Monastère des Abys (près de Paliseul, à une quinzaine de kilomètres de Bouillon). On reconnaît, de gauche à droite, autour de la Maman et du Papa assis, Léon (15 juin 1906), Marie (30 juillet 1896), Suzanne (7 octobre 1911) et, devant elle, Edouard (30 avril 1909), Madeleine (29 juin 1904, voir ce blog au 20 mars 2020), Jeanne (14 juillet 1902) et Louise-Marie (20 juillet 1907).

     

    Edouard, qui était beaucoup plus calme, rentra un jour à la maison, triomphant : il avait trouvé sur la route, perdu par un cavalier, sans doute, un magnifique martinet, qu’il faisait claquer joyeusement.

    “– Bravo ! s’écria Marie en l’annexant, voilà justement ce qu’il me faut ! Et maintenant, marchez droit !”… Le triomphe du pauvre Edouard avait été de courte durée, car ses frère et sœurs ne lui ménagèrent pas les compliments de sa trouvaille… Et désormais, si on n’obéissait pas à une injonction, bzzz… les lanières du martinet cinglaient les mollets nus. C’était fort désagréable. Et Léon trouvait que c’était très humiliant. Aussi résolut-il de se libérer du martinet. Il dit aux “petits” : “Dimanche, soyons tous prêts bien à l’heure pour la grand-messe. Vous partirez tous. Je reviendrai chercher un mouchoir. Et j’irai prendre le martinet dans la chambre de Marie et le jetterai dans la Semois !”

    Ainsi dit fut fait. Les enfants, triomphants, revinrent de l’église comme un troupeau de chevaux échappés, en révolte ouvertes contre tous les ordres donnés par Marie. Celle-ci voulut aller prendre son acolyte en cuir. Disparu !

    “– Qui l’a pris ?”

    “– Moi”, dit Léon qui a toujours eu le courage des responsabilités. Puis lestement, il alla se barricader dans sa chambre. Finalement, il dut bien en sortir et reçut une paire de claques de sa sœur, ce qui le mortifia profondément. Il alla digérer sa rancune dans son arbre, au fond du jardin. Il allait souvent se réfugier là, soit pour lire et étudier quand les petits menaient trop grand tapage, soit pour avaler un affront. » (pp.63-64)

    Marie Degrelle 1920-horz.jpg

    « La grande sœur Marie, la marraine de Léon, […] est belle et douce, elle rêve de perfection, de don complet. Elle entrera au Monastère des Abys, chez les Religieuses Visitandines. »

    Marie prononcera ses vœux définitifs le 28 décembre 1925 et prendra le nom de Sœur Anne-Marie. Dans une lettre de 1975, Léon Degrelle rappela à sa sœur et marraine avec qui il garda toujours le contact –comme avec toutes ses sœurs– cet événement si absolu et bouleversant.

    « Tu partais… Ce que nous avons pleuré ! Huit jours entiers à pleurer ! Les huit derniers jours où tu vivais près de nous… J’ai pleuré alors pour toute ma vie. Et toi, tu restais calme. Je te vois encore comme si c’était maintenant, là, devant moi, t’agenouillant pendant quelques minutes devant le grand Sacré-Cœur de la salle à manger, puis te relevant, simple, souriante, allant toute droite vers la petite voiture et le cheval qui allaient t’emmener pour toujours.

    Tu coupais tout ! Tu te séparais de tout ! Tout notre monde s’écroulait, mourait pour toi… Et fraîche et belle, sans une larme, tu sacrifiais, impassible, cet univers humain pour ton véritable univers.

    Alors, quoi ? Comment aurais-tu voulu que nos âmes ne fussent pas, elles aussi, prises à la gorge par ce drame mystique ! Nous avions vu où était le vrai, le grand. »

  • Joris van Severen et Léon Degrelle

    Léon Degrelle s’engagea au Front de l’Est.

    Joris van Severen aurait-il franchi ce pas ?

     

    Suite à un article paru dans le courrier trimestriel du Centre d’Etudes Joris van Severen (« Un camarade de tranchée de Joris van Severen sur le front de l’Yser, officier sur le Front de l’Est ? »), nous nous sommes intéressé à l’histoire du colonel Jules Frankignoul, officier de l’armée belge prisonnier à l’Oflag de Prenzlau, qui, en 1944, se porta volontaire pour rejoindre la Division Wallonie au Front de l’Est avant d’y renoncer sur pression de son entourage (voir ce blog au 23 janvier 2019).

     

    Nous avions écrit que nous ne pouvions « souscrire à la conclusion de Maurits Cailliau, sentant par trop son politiquement correct contemporain » car nous avions interprété qu’il se réjouissait que l’ami de Joris van Severen ne se soit pas compromis au Front de l’Est.

     

    Nous posant la question de savoir en quoi la qualité d’ami de Joris van Severen eût pu paraître incompatible avec un engagement au Front de l’Est, nous ajoutions : « Il n’est évidemment pas question pour nous d’imaginer ce que l’histoire du Verdinaso, du mouvement flamand et de la collaboration fût devenue si Joris van Severen n’avait pas été assassiné le 20 mai 1940. Mais peut-on exclure qu’il eût pu entrevoir de nouvelles possibilités pour le Dietschland après la victoire allemande ? qu’il eût d’ailleurs pu s’y voir encouragé par l’entourage royal ? qu’à l’instar de Léon Degrelle, il se fût engagé contre le communisme, aussi patriotiquement que tant d’autres Flamands ? qu’il eût pu se montrer fier de l’engagement de son ami Frankignoul dans les rangs de ceux qui voulaient bâtir une nouvelle Europe libérée des banksters, authentiquement nationale et sociale ? »

     

    Joris vitrail.jpegC’est à cela qu’entend répondre M. Maurits Cailliau dans le nouveau courrier (2e trimestre 2019, pp. 19-20) du Studiecentrum Joris van Severen.

     

    Entretemps, il nous est prêté, en tant que rédacteur de notre Courrier, un excès de « political correctness » –accusation que, par ailleurs, nous rejetons avec force. Elle se fonde sur le soupçon que nous aurions voulu innocenter celui qui fut l’ami de Joris van Severen au temps du Front de l’Yser d’un possible engagement au Front de l’Est. Nous savons tous en effet que nombre de disciples de Joris van Severen –et sûrement pas parmi les plus modestes d’entre eux – ont résolument franchi ce pas.

    En ce qui nous concerne, nous nous garderons bien d’écrire l’histoire avec des « et si… » à propos de ce que Joris van Severen aurait pu faire s’il n’avait pas été assassiné à Abbeville en mai 1940. Toutefois, et après avoir étudié de nombreux documents allemands ainsi que les notes du journal de Joris van Severen lui-même, nous avons bien peur de devoir penser qu’il aurait plutôt partagé le sort d’un Paul Hoornaert, le chef de la Légion Nationale, qui mourut dans un camp de concentration allemand [certains parlent de Sonnenburg, aujourd’hui en Pologne, sur l’Oder, réservé à des opposants politiques des pays occupés ; d’autres du Fort de Breendonk, près d’Anvers] (nous avons rassemblé nos conclusions dans un essai intitulé « Les soupçons légitimes des Allemands sur le Verdinaso » qui sera publié dans le 23e Annuaire Joris van Severen qui paraîtra en mai prochain).

     

    Nous regrettons d’avoir heurté M. Cailliau à propos de ce que nous avons compris à tort comme une tentation de « politiquement correct » et nous ne polémiquerons pas sur le fait de savoir qui écrit le plus d’histoire-fiction en évoquant la possibilité de réaliser le rêve thiois au sein du IIIe Reich ou celle d’aller mourir dans un de ses camps de concentration puisque, malheureusement, Joris van Severen n’a eu la possibilité d’effectuer aucun de ces choix après son assassinat à Abbeville, le 24 mai 1940.

     

    Lire la suite

  • Le colonel Jules Frankignoul, ami de Joris van Severen, conquis par Léon Degrelle, candidat-officier à la Légion Wallonie…

    Un camarade de tranchée de Joris van Severen sur le front de l’Yser, officier sur le front de l’Est ?

     

    Voilà le titre interrogatif d’un article de Maurits Cailliau, historien à qui rien de ce qui concerne le chef du Verdinaso n’est étranger, publié dans le dernier courrier trimestriel du Studiecentrum Joris van Severen (1er trimestre 2019, p. 17 sv.).

     

    Comme nous le verrons immédiatement, c’est par un soupir de soulagement que se termine l’article : non, ce camarade de Joris van Severen, devenu colonel BEM de l’armée belge, ne se sera pas compromis dans cette collaboration armée que fut la Légion Wallonie : « Peu importe, l’ami que se fit Joris van Severen dans les tranchées du Front au cours de la Première Guerre mondiale n’est donc jamais allé au Front de l’Est ! »

     

    Studiecentrum 1.jpgEn fait, cet article est censé donner une réponse claire à un article publié sous le même titre interrogatif en 2009, permettant d’enlever définitivement ce point d’interrogation laissant entendre qu’il se pouvait que se soit laissé compromettre « le capitaine francophone Frankignoul que Joris van Severen avait pu apprécier au plus haut point sur le front de l’Yser, comme le montrent quelques fragments extraits des journaux de guerre de Joris van Severen ». Et ce précieux complément d’information, Maurits Cailliau l’aurait enfin trouvé grâce aux renseignements pêchés dans la récente biographie de Léon Degrelle par Bruno Cheyns (De Führer van Bouillon, pp. 419-420 ; voir ce blog aux 10 décembre 2017 et 5 janvier 2018)…

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  • Une surprenante publication de Rivarol (2) : Pourquoi reprendre les poncifs de la diffamation anti-degrellienne ?

    Le neutralisme belge de Léon Degrelle aurait caché

    ses sympathies nazies !

     

    « Au début des hostilités (septembre 1939-mai 1940), Degrelle se rallie à la politique de neutralité belge de Léopold III et du gouvernement Pierlot. Ce qui ne l’empêche pas d’adopter une attitude hostile à la France et à la Grande-Bretagne, et favorable à l’Allemagne ».

     

    Que voilà une singulière inversion des faits ! Tout d’abord, la politique de neutralité avait été proclamée par le Roi Léopold III dès le 14 octobre 1936, dans son discours au Conseil des ministres, avant d’être réaffirmée par le Premier ministre Pierlot, le 3 septembre 1939, à l’occasion de la déclaration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France à l’Allemagne.

     

    Et s’il y eut un responsable politique à mener bec et ongles campagne pour une stricte et honnête neutralité belge vis-à-vis de tous ses voisins, ce fut bien Léon Degrelle (tout comme d’ailleurs son ami Hergé qui participa activement à l’hebdomadaire neutraliste L’Ouest, en ridiculisant les va-t-en-guerre franco-britanniques avec sa bande dessinée « Monsieur Bellum »).

     

    Par contre, le Roi, tout comme ses ministres, biaisaient on ne peut plus cyniquement cette politique officielle de neutralité, au nom de ce qu’on a appelé « l’impossible neutralité des consciences » (tout comme le Monsieur Bellum de Hergé s’exclamant, dans L’Ouest du 14 décembre 1939, face à son poste de radio : « Neutralité !... Neutralité !... Mais la neutralité des consciences, ça, jamais !... ») !

     

    Ignorant tout de ces agissements, Léon Degrelle saluera d’ailleurs avec enthousiasme, dans Le Pays réel du 28 octobre 1939, l’allocution radiodiffusée du Roi à l’intention des Etats-Unis. Il en proposera un résumé schématisant les points essentiels en autant de « points de repère » obligés ne souffrant aucune attitude hostile ou favorable envers quelque belligérant !

     

    Neutralité PR 28 X 39a.jpg« Le Roi a voulu la neutralité. Il l’a guidée, protégée. Si des milliers de mères ne pleurent pas, si nos villes ne sont pas éventrées, c’est au génie politique et à la ténacité du Roi que les Belges le doivent. […] Dans notre nuit symbolique, ces phrases s’élevaient comme des […] points de repère qui marqueront désormais notre route.

    1. Notre neutralité est dans la ligne de notre histoire. […]

    2. Notre neutralité épargne à notre pays les horreurs indicibles de la guerre. […]

    3. Notre neutralité sauve la vie même de la Belgique. […]

    4. Notre neutralité défend la civilisation. […]

    5. Notre neutralité n’admet pas d’asservissement économique. […]

    6. Notre neutralité n’est pas une attitude de lâches. »

    Et de conclure en se félicitant d’avoir gardé ce cap qui lui valut d’être accusé de favoriser l’Allemagne, puisque, dans son discours, le Roi lui-même le payait de ses avanies en officialisant tous les principes de la vraie neutralité : « A certains, ces nobles paroles apparaîtront comme des mises au point, parfois même comme des reproches. Mais à ceux qui ont lutté pour faire entrer dans l’esprit public chacun de ces mots d’ordre, à ceux qui ont subi les injures et les suspicions les plus pénibles pour les défendre, ces consignes royales ont apporté la récompense la plus émouvante et la plus haute… Quand on est du côté de la Patrie, il faut tenir bon, même si ça coûte et si on se sent seul. Ceux qui ont défendu la paix ont, à certaines heures, senti toute l’amertume qu’il y avait à dire le vrai et juste quand il était si simple de saisir à pleines brassées les succès en suivant les passions des foules. Mais la parole du Roi a payé de tout. Et le bonheur se mêle aujourd’hui à la joie du devoir ingrat, accompli pour lui-même. »

     

    M. Delorme eût donc été mieux inspiré d’écrire : Au début des hostilités (septembre 1939-mai 1940), Degrelle se rallie à la politique officielle de neutralité belge de Léopold III et du gouvernement Pierlot, ce qui lui valut d’être traité de valet de Hitler, alors que les autorités belges adoptaient secrètement des mesures favorables à la France et à la Grande-Bretagne, privilégiant ces derniers face à l’Allemagne » !

     

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    A propos des véritables agissements des responsables belges et des sentiments de Léon Degrelle, voir ce blog aux 4 juin 2016 et 28 juin 2017.

     

    Après avoir ainsi présenté Léon Degrelle comme une espèce d’agent de la « Cinquième colonne » allemande, il coulait dès lors de source pour M. Delorme de présenter comme normale l’arrestation scandaleuse, en violation flagrante de son immunité parlementaire, du député Léon Degrelle : « En mai 1940, Degrelle et de nombreux rexistes sont arrêtés préventivement» Sur l’arrestation de Léon Degrelle, son incroyable transfert à une justice française inexistante, les sévices et tortures qu’il dut subir au long de près de trois mois d’incarcération et de mise au secret dans plus d’une quinzaine de prisons, forteresses et camps de concentration, voir ce blog aux 30 avril et 6 mai 2017.

     

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    *

    * *

     

    La « Bourgogne » degrellienne asservie à l’Allemagne ?

     

    « [Léon Degrelle] nourrit alors un grand projet : celui de faire de la Wallonie l’élément dominant d’une nouvelle Bourgogne, d’une nouvelle Lotharingie […]. Ces deux entrevues [entre Hitler et Degrelle] donnent lieu à des discussions approfondies sur la politique allemande en Belgique. […] la vraisemblance suggère que les deux hommes se sont accordés sur la création de cette Grande Bourgogne chère à Degrelle, même s’ils l’envisageaient de manières différentes (une marche du Reich sous stricte tutelle, pour Hitler, un Etat largement autonome de la communauté germanique, pour le chef rexiste). […] Et il est certain que [Hitler] considérait la “grande Bourgogne” à venir comme un simple protectorat ».

     

    Nous avons déjà eu l’occasion de montrer en long et en large que le projet de « nouvelle Bourgogne » non seulement n’était en rien utopique mais que sa conception, et du point de vue d’Adolf Hitler et de celui de Léon Degrelle, n’était en rien non plus antinomique (voir ce blog aux 20 mai 2016 et 28 juin 2017).

     

    Croix Bourgogne 03 05 78.jpegIl suffit de lire ce qu’en dit Felix Kersten –kinésithérapeute de Heinrich Himmler et en rien concerné par cette affaire (c’était probablement la première fois qu’il entendait parler de Léon Degrelle !)– recueillant le rapport d’un entretien que le Reichsführer venait d’avoir avec Adolf Hitler : « La Bourgogne sera reconstituée sous une forme moderne ; ce sera un modèle et ses capacités en feront un des États les plus riches qui ait jamais existé. […] La Bourgogne sera un État indépendant au sein de l'Empire européen, disposant de ses lois propres, de son armée et de son gouvernement propres, de sa monnaie, de ses services postaux et de ses distinctions propres. […] Hitler a donné l'ordre exprès qu'aucune autorité du Parti national-socialiste allemand n'ait le droit d'interférer dans les affaires de la Bourgogne. Il y aura une ambassade bourguignonne à Berlin et une allemande en Bourgogne. [...] La Bourgogne sera inspirée par la philosophie SS afin que l’État modèle dont rêve le Führer devienne une réalité. » (cité d'après The Kersten Memoirs, with an Introduction by H.R. Trevor-Roper, Chap. XXVI « The Burgundian Free State », pp. 184-185.)

     

    On le voit, contrairement à ce qu’affirme péremptoirement P.-A. Delorme, il n’est nullement question d’ «  […] une marche du Reich, sous stricte tutelle, […] un simple protectorat », mais bien d’un Etat indépendant, devant d’ailleurs fonctionner comme un Etat modèle, servant d’ « exemple pour tous les Etats du monde » (Kersten, p. 185)…

     

    Autre affirmation gratuite de l’auteur qui n’a manifestement rien compris au destin bourguignon de la Belgique au sein de la nouvelle Europe que lui assuraient les deux chefs de peuple : « [Léon Degrelle] pense alors, en effet, que la Belgique, dont pourtant il prétendait incarner l’identité, est désormais condamnée, d’une part en raison de la défaite et de l’hostilité allemande, d’autre part de l’existence d’un mouvement indépendantiste flamand décidé à profiter de la situation pour parvenir à ses fins. »

     

     Leo Belgicus 21 02 79.jpegCela, c’est ce qu’écrivent les « historiens officiels » pour condamner la « trahison » de Léon Degrelle. Mais nous avons montré comment le chef de Rex avait surmonté ces obstacles dressés par la vieille administration militaire allemande pangermaniste et sa Flamenpolitik, en s’imposant directement auprès du Führer (voir ce blog, notamment, au 28 juin 2017). La certitude belgo-bourguignonne sort d’ailleurs renforcée de la rencontre inéluctable Hitler-Degrelle qui suivit le sauvetage de Tcherkassy, contredisant très précisément les allégations de M. Delorme :

    « Hitler m’avait remis la cravate de la Ritterkreuz. Je m’était battu en vrai soldat. Le Führer le reconnaissait. J’étais fier. Mais ce qui m’exaltait surtout dans cette nuit frémissante, c’était le prestige qu’aux yeux d’Hitler avaient acquis mes soldats. […] Nous étions partis pour le front anti-bolchevique afin qu’au-delà du malheur, le nom de notre patrie, jetée au sol en mai 1940, retentisse à nouveau, glorieux et honoré. Soldats de l’Europe, nous voulions que, dans l’Europe qui se créait si douloureusement, notre vieux pays reconquît une place aussi rayonnante que dans le passé. Nous étions les hommes du pays de Charlemagne, des ducs de Bourgogne et de Charles-Quint. Après vingt siècles de merveilleux rayonnement, ce pays ne pouvait pas sombrer dans la médiocrité ou dans l’oubli ! Nous nous étions jetés à la rencontre de la souffrance pour que, de notre sacrifice, jaillissent à nouveau de la grandeur et des droits à la vie ! Dans cette baraque, devant ce génie en pleine puissance, je me disais quel le lendemain, le monde entier saurait ce qu’avaient fait les Belges à Tcherkassy. Il connaîtrait l’hommage éclatant que le Reich, pays de soldats, leur avait rendu ! Je me sentais brisé, rongé par ces semaines terribles. Mais mon âme chantait ! La gloire était là, gloire pour notre Légion héroïque, gloire, au-delà d’elle, pour notre patrie en route vers la résurrection ! » (La Campagne de Russie, p. 330).

     

    *

    * *

     

    Degrelle et Hitler ne pouvaient pas se comprendre !

     

    « Ces deux entrevues [entre Hitler et Degrelle] donnent lieu à des discussions approfondies sur la politique allemande en Belgique (par le truchement d’un interprète, chacun des deux interlocuteurs ignorant la langue de son vis-à-vis). »

     

    C’est cette précision incongrue qui vaudra à P.-A. Delorme un courrier de M. Claude C. publié par Rivarol le 18 avril 2017, nous révélant par la même occasion cette publication : « sur la question de l’interprète : dans le blog le dernier carré.hautetfort.com, il y a une contribution très intéressante du 05/01/2018, “Adolf H. comprenait très bien le français”, car il avait été estafette en 14-18 et passait son temps libre dans des cafés français, et Degrelle, depuis 3 ans sur le Front de l’Est, en contact quotidien avec des officiers allemands, se débrouillait très bien en allemand. »

     

    C’est en effet la thèse que nous défendons : les deux interlocuteurs pouvaient très bien se comprendre, même si chacun s’exprimait dans sa langue maternelle.

     

    Nous nuancerons cependant notre démonstration sur la maîtrise de l’allemand par Léon Degrelle, qui s’appuyait, entre autres, sur l’épisode lui ayant valu les « Feuilles de Chêne », décrit comme suit par le général Anton Grasser : « Son engagement personnel est caractérisé parle fait qu’il donna ses ordres debout sur le bord du fossé, incitant ainsi à la résistance les Estoniens peu endurcis. » Nous en concluions : « Il faut bien supposer que les ordres qui se devaient d’être précis et parfaitement intelligibles furent effectivement donnés en allemand par un Léon Degrelle s’adressant à des soldats allemands et estoniens !... »

     

    C’est Léon Degrelle lui-même qui va tempérer nos propos en nous donnant sa propre version de cet épisode crucial : « Je ne voyais qu’une chose : c’est que Dorpat était rempli de centaines de camions en retraite […]. Je fis dégringoler tous les soldats du premier camion et de deux autres camions qui suivaient. Par bonheur, un sous-officier allemand comprenait le français à merveille. Je lui fis traduire mes ordres : “Nous allons contre-attaquer immédiatement. Il y aura des Croix de fer, ce soir même, pour ceux qui auront été les plus braves. Les Russes ne s’attendent pas à une réaction maintenant. C’est le bon moment pour leur sauter dessus. Vous allez voir ça ! Tout est une question d’audace. En avant, camarades !” Emmenant à contre-poil cette soixantaine de soldats, en déroute cinq minutes plus tôt, je courus aux Bolchevistes qui avançaient dans les talus du chemin. »

     

    Mais si le retournement des fuyard par des ordres précis et de vigoureuses paroles a pu se faire rapidement grâce à un interprète, cela ne fait pas de Léon Degrelle un béotien de l’allemand puisqu’à la page suivante, il confirme notre théorie d’une connaissance élémentaire de la langue : « Il fallait avertir sur-le-champ le général Wagner. […] J’obtins la Kommandantur, puis le général, absolument stupéfait d’apprendre ce qui se passait et que j’étais là. Je savais comme lui que le sort de Dorpat se jouait sur mon coteau. Il n’eut pas besoin de m’expliquer grand’chose. Je lui promis que, moi vivant, les Russes ne passeraient pas. […] J’avais vidé les camions en fuite, confisqué les mitrailleuses et les munitions qui s’y trouvaient. Mes soldats avaient repris confiance. J’allais de l’un à l’autre, les réconfortant dans un sabir mi-allemand, mi-français. La plupart avaient vu ma photo dans les journaux, et ils s’habituaient à l’idée que l’affaire prenait une tournure originale. »

      

    LD espagnol 27 09 78.jpegNous en conclurons que Léon Degrelle avait une connaissance plutôt passive de l’allemand, mais qu’il pouvait la manier suffisamment bien pour se faire comprendre. Relisons ce qu’il dit lui-même de ses capacités : « Officiellement, j’ignorais la langue allemande […] Avec le temps, certains Allemands s’aperçurent que j’avais parfaitement compris des réflexions qu’ils avaient échangées, à mon insu, croyaient-ils. Ils me firent la réputation d’un jouteur redoutable, connaissant l’allemand sur le bout des doigts, mais qui faisait semblant de l’ignorer. La vérité, c’est que je ne savais pas l’allemand. Je n’ai jamais eu de dispositions spéciales pour apprendre les langues germaniques. Je ne comprenais donc pas l’allemand, mais – ce qui est une toute autre chose – je devinais l’allemand, comme j’ai toujours deviné les autres langues. Connaissant les quelques centaines de mots de base, j’établissais des rapports, des intonations me frappaient. En tout cas, en allemand, j’ai toujours compris ce que je ne devais pas comprendre. Parfois, quand l’interprète avait escamoté une nuance dans sa traduction, je l’interrompais pour rectifier. Les autres s’exclamaient alors : “Vous voyez bien que vous connaissez l’allemand !” Et pourtant je ne le connaissais pas. Je le sentais, c’est tout. […] Pendant la guerre, quand même j’avais parfaitement compris, je faisais semblant de n’avoir rien compris du tout. Ainsi, pendant que l’interprète s’éternisait à bredouiller sa traduction, j’avais tout le temps de préparer et de peser mes réponses. C’était un petit truc extrêmement utile. » (De Rex à Hitler, Editions de l’Homme Libre, p. 328).

     

     

    A suivre.

     

  • Léopold III, Adolf Hitler et... Léon Degrelle. En marge de l'Encyclopédie perfide et mensongère de De Bruyne

    La restauration de la Bourgogne historique : le projet des chefs de peuple
    Adolf Hitler et Léon Degrelle

     

     

    Fiery_Grayscale_2 (3).jpgDans la première livraison de notre critique de l'Encyclopédie de l’Occupation, de la Collaboration et de l’Ordre Nouveau en Belgique francophone (1940-1945) d'Eddy De Bruyne (voir ce blog au 23 mars 2017), nous commencions par nous étonner de l'absence sinon de certains « Collaborateurs » éminents, du moins de quelques-uns des principaux acteurs de « l'Occupation, de la Collaboration et de l'Ordre Nouveau en Belgique », à commencer par le roi des Belges lui-même, Léopold III, qui compta parmi ceux qui firent le plus « des pieds et des mains pour rencontrer le Führer, lui serrer la pince et prendre le thé avec lui ».

    Un lecteur nous reproche cependant d'en faire un peu trop en laissant entendre que le roi était tout acquis à l'Ordre Nouveau : « Lorsque vous écrivez que dans l'immédiat après-guerre, Léopold III revint à Berchtesgaden "séduit par ce sanctuaire hitlérien aux étonnantes prouesses architecturales [...] pour compléter son premier séjour par la visite de l'impressionnant Kehlsteinhaus construit pour le 50e anniversaire du Führer : un pèlerinage éclairant sur les vrais sentiments du roi à l'égard du maître du IIIe Reich ?", êtes-vous certain de ne pas prendre vos désirs pour la réalité ? Car il faut bien constater que la visite du roi au Führer s'est soldée par un échec et que la suite a montré que Hitler ne traita pas très favorablement son prisonnier royal, lui refusant tout ce qu'il sollicita et l'emmenant en captivité en Allemagne après le débarquement des alliés. Dès lors, la visite, après-guerre, de Léopold III au Kehlsteinshaus (pour autant qu'elle ait vraiment eu lieu) ne s'apparenterait-elle pas plutôt à la revanche d'un vaincu humilié plutôt qu'au "pèlerinage" d'un disciple convaincu ? »

    Nous donnons bien volontiers raison à notre correspondant sur ce dernier point, tant il est vrai que le Führer ne s'en laissa jamais conter par quelque monarque brandissant son statut pour extorquer quelque privilège et qu'il dut trop souvent rappeler son encombrant prisonnier à la réalité de son statut et de ses responsabilités dans un conflit où chacun devait tenir sa place: l'histoire avait changé toutes les données géopolitiques et c'est l'Allemagne nationale-socialiste qui se retrouvait investie du destin européen auquel chaque pays devait prendre sa part de combat et de souffrance (comme s'y engagèrent d'ailleurs spontanément Léon Degrelle et la Légion Wallonie). Ce que le Führer ne manqua évidemment pas d'essayer –vainement– de faire comprendre à son royal interlocuteur.

     

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