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  • Cercle des Amis de Léon Degrelle

     

     

    40e Correspondance privée – février 2024

     

    Pour marquer la quarantième parution de sa Correspondance privée, le Cercle des Amis de Léon Degrelle a réalisé un judicieux montage dynamique de trois photographies emblématiques de la vie de Léon Degrelle, illustrant son combat permanent et indispensable à la révolution des âmes.

    Rassemblés sous le ciel de feu des Âmes qui brûlent, les trois clichés, en même temps qu’ils célèbrent trois moments importants de la vie militante de Léon Degrelle, mettent en lumière trois piliers de l’idéal solaire de ce vrai chef de peuple, tribun visionnaire et champion de l’élévation spirituelle de sa communauté, de la défense de celle-ci, de sa force et de sa liberté.

     

     

    1936 : Révolution des âmes dans les élections

     

    LD Palais sports 1936.05.17.png« Les partis prétendent maintenir leurs privilèges ; ils sont l’exaspération des intérêts de clans. C’est pourquoi ils accusent Rex de vouloir la dictature. Les rexistes ne veulent à aucun prix de la dictature. [Ovation] Les partis agitent cet épouvantail, alors qu’aujourd’hui, ils nous imposent la dictature des banksters que Rex est le seul à combattre. Les rexistes ne prendront le pouvoir que le jour où le peuple le leur aura donné. [Applaudissements]. »

    (Extrait du discours de Léon Degrelle, citation du compte rendu du meeting rexiste dans Le Soir, 19 mai 1936).

     

    Le premier instantané, à l'arrière-plan de gauche, a été pris lors du discours enflammé de Léon Degrelle au Palais des Sports de Bruxelles, le 17 mai 1936 (à propos de cette photo, voir ce blog au 9 avril 2019). Ce meeting rassemblant plus de 17.000 personnes fut la manifestation la plus spectaculaire de la vigoureuse et déterminante campagne électorale de Rex contre les « banksters ». Malgré l’hostilité générale de tous les milieux politiques, médiatiques, intellectuels et même religieux, elle devait amener, le 24 mai suivant, l’élection triomphale de 21 députés et de 8 sénateurs rexistes.

     

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    Le Pays réel –quotidien nouvellement créé le 1er mai 1936– est le journal de combat de Rex (le titre en a même été dessiné par l'ami fidèle Hergé : ce blog au 20 octobre 2020). Il cloue au pilori les banksters de tous bords : catholiques, le 6 mai ; socialistes, le 8 mai ; libéraux, le 13 mai…

     

    Le soir même des élections, ce dimanche 24 mai qui marquait le triomphe de Rex sur la particratie affairiste, dans un sobre communiqué de victoire, Léon Degrelle rappelait le sens spirituel du combat rexiste : « Tous les partis ont subi une dure défaite parce qu’ils avaient méprisé tout un peuple. […] À tous, nous disons : Venez, Rex est un mouvement fraternel ouvert à tous les Belges. […] Rex n’a jamais voulu appuyer son influence sur la force, mais sur un immense courant des cœurs. Nous sommes forts parce que nous nous aimons. […] Pour nous, il n’existe plus qu’un seul parti, celui du pays et du peuple. Nous sommes la jeunesse. Notre passion, c’est la pureté du pays. » (Le Soir, 24 mai 1936).

     

     

    1938 : Révolution des âmes par la communion populaire

     

    LD Lombeek 1938.jpg« Nous voulons rendre à notre peuple sa pureté et sa noblesse. Nous voulons lui rendre la passion du foyer, lui rendre la foi dans les grandes valeurs morales. Nous sauverons la Patrie en rendant au peuple le sens de la grandeur et en renouant avec nos traditions de fierté et d'héroïsme. [...] Il y a des intérêts moraux et spirituels à sauvegarder au-delà de la politique et nous les plaçons au-dessus d'elle. » (Discours de Léon Degrelle à Lombeek, le 10 juillet 1938, in 60.000, Congrès national Lombeek 10-7-38).

     

    La deuxième photographie du montage, à l'arrière-plan de droite, est sans doute la photo la plus connue de Léon Degrelle-orateur. Elle a été prise lors du discours de clôture aux grandioses Journées rexistes de Lombeek, organisées en 1938 dans cette petite bourgade du Brabant flamand, située à une petite vingtaine de kilomètres à l'ouest de Bruxelles et dirigée par le député-bourgmestre rexiste Robert Motteux (qui fut révoqué de son mandat communal quatre jours plus tard pour avoir accueilli le congrès en « uniforme rexiste » ceint de l'écharpe mayorale).

    Lombeek LD+Motteux.pngLe Bourgmestre Robert Motteux, à la gauche de Léon Degrelle, porte la chemise et la cravate des gardes rexistes ainsi qu'à la taille, l'emblème de sa fonction : l'écharpe tricolore aux glands d'or. Pour révoquer Robert Motteux le 14 juillet 1938, le ministre de l'Intérieur invoquera son « inconduite grave », notamment le port d'un uniforme contrevenant à la loi de 1934 sur les milices privées. Mais le bourgmestre sera aussi reconnu coupable « d'avoir fait arborer l'étendard d'un parti politique (le drapeau rexiste) à la façade de la maison communale », « d'avoir permis à M. Degrelle de prononcer du haut du perron de la maison communale de Lombeek un discours politique » et d'avoir effectué « à plusieurs reprises le salut hitlérien » ! Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage... À noter que, dès le surlendemain, le nouveau bourgmestre, en compagnie de Léon Degrelle à l'hôtel de ville, rendra un solennel hommage à son prédécesseur, en portant chemise bleue et cravate rouge ainsi que l'écharpe mayorale. Et en effectuant le salut rexiste ! En toute impunité, cette fois.

     

    Réunis en congrès national du 8 au 10 juillet, plus de 60.000 rexistes exprimèrent, en une manifestation triomphale, l'intensité de leur foi dans le renouveau politique et social promis par l'idéal rexiste de révolution des âmes.

     

    Il appartiendra à Jean Denis (voir ce blog aux 15 juin 2017 et 15 juin 2022), docteur en philosophie et lettres et auteur de Principes rexistes et Bases doctrinales de Rex, de tirer la leçon de ce congrès historique, plaçant résolument le message degrellien dans la perspective de José Antonio Primo de Rivera, le fondateur de la Phalange espagnole fusillé par les Républicains dans la cour de la prison d'Alicante le 20 novembre 1936.

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    Médaille commémorative (tirée à 50.000 exemplaires) du Congrès national de Rex à Lombeek-Notre-Dame, dont l'apothéose fut le rassemblement général de quelque 60.000 adhérents, sympathisants et leur famille, le 10 juillet 1938. Ci-après, cliché à la « une » du Pays réel, le 11 juillet 1938.

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    Fasciné par la figure de José Antonio qu'il rapproche de celle de Léon Degrelle, Jean Denis l'était tout autant par la doctrine sociale de la Phalange lui paraissant répondre aux mêmes principes spirituels à la base du combat rexiste. Il publiera d'ailleurs une présentation des Vingt-sept points de la Phalange dans un petit ouvrage publié la même année que le Congrès de Lombeek, Une révolution dans la guerre. Préface à l'étude de la tragédie hispanique (Renaix, Centre d'Etudes hispaniques, 1938). Il accompagnera aussi plus tard le chef de Rex dans son voyage à travers l'Espagne nationaliste du 2 au 14 février 1939.

     

    Jean Denis écrit donc en conclusion du Congrès de Rex :

    « Le vieillard et l'adolescent, l'homme et la femme, le travailleur calleux et l'intellectuel raffiné : il apparaissait qu'à tous, le masque de la vie quotidienne était tombé ; et chaque visage n'était plus que la lumière d'un regard, la même lumière toujours, faite d'allégresse et de gravité qui, dans la pénombre de l'arc de triomphe, faisait de chacun d'eux tous un archange levant la main en signe de foi, d'espérance et d'amour. Des milliers d'âmes transformées pour toujours.

    Lombeek Arc triomphe.jpeg

     

    L'on songeait à la parole de Léon Degrelle, au message ineffable qu'il a porté partout et qu'il portera jusqu'à son dernier souffle. Lui aussi poète et prophète.

    Sa parole dont il ne faut rien extraire et citer parce qu'elle se trouve vivante en chacun de nos cœurs et que nous savons bien, nous tous, ce que c'est que sa Révolution des Âmes, puisqu'il l'a faite en chacun de nous jusqu'au plus secret de nous-mêmes. Lui qui, seul parmi tous, nous a rendu notre unité de destin dans l'univers. Et qui, brisant les barrières des enclos maudits, nous conduit –et conduit dès à présent notre peuple– vers d'autres horizons, vers d'autres pâturages où traçant des voies d'empire –qu'importe la souffrance quand on sait la pérennité de son œuvre–, il nous rend notre place, à l'air libre, sous les étoiles
    . »

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    Lombeek Tribune.jpg

     

     

    1942 : Révolution des âmes dans la Croisade européenne

    La photo de premier plan dans le montage du Cercle, montre le soldat Léon Degrelle, chef spirituel de la Légion mais pas encore son Commandeur, arborant cependant les pattes de col de lieutenant, grade dont il refusa le privilège (ce blog au 31 juillet 2017), mais qu'il gagna dans les combats de Gromowaja-Balka en février 1942 (à propos de cette photo, voir ce blog au 23 août 2021). Sa casquette s'orne aussi de l'Edelweiss dont s'enorgueilliront toujours les Wallons qui servirent sous les ordres du Général Ernst Rupp, commandant la 97e Division de Chasseurs de montagne à laquelle fut rattachée la Légion à la veille des combats du Donetz, en février 1942, et ce, jusqu'après la Vormarsch (plus de 1200 kilomètres à pied pour contourner la mer d'Azov, de Slaviansk à Maïkop), et les combats du Caucase, d'août à novembre 1942.

    LD Leutnant Pieske.jpgC'est donc dans cet uniforme que Léon Degrelle négocia directement avec Heinrich Himmler dans son train spécial stationné au Grand Quartier général de Hitler, le passage de la Légion Wallonie à la Waffen SS (ce blog au 20 octobre 2023).

     

    Et que, dans la foulée, il l'accompagna, le 24 mai 1943, au camp d'entraînement de Pieske, après avoir convaincu le Reichsführer SS de faire la connaissance de ses « Bourguignons ».

     

     

     

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    Léon Degrelle et Lucien Lippert accompagnent Heinrich Himmler –ici, de dos, saluant– dans sa BMW 335 lors de sa visite des Légionnaires wallons à Pieske, le 24 mai 1943 (une autre photo est à voir sur ce blog au 30 avril 2020). C'est une visite en toute décontraction qu'effectue le « terrible » Reichsführer SS, saluant à tout-va, heureux de découvrir en ces Bourguignons des soldats alertes, espiègles, consciencieux, intelligents, fidèles, efficaces (ce blog au 24 janvier 2020 ; Saint-Loup, Les SS de la Toison d'Or, pp. 339-340).

    LD Discours Berlin 1943 01 07.jpgPhoto de presse de l'agence SIPHO (Service International Photographique) datée du 10 février 1943 et légendée : « Léon Degrelle pendant son discours à Berlin le 7 janvier [erreur pour « février »] 1943. Dans la salle coupole du Reichsportfeld à Berlin, Léon Degrelle a parlé aux ouvriers wallons et aux volontaires wallons contre le Bolchevisme. »

    C'est dans cette tenue aussi que, pour la dernière fois avant de revêtir l'uniforme SS du soldat politique, Léon Degrelle parla à Berlin, le 7 février 1943, devant plus de deux mille soldats et ouvriers wallons, pour rappeler le sens de cette guerre de civilisation. Nous avons déjà publié l'essentiel de ce discours (ce blog au 16 janvier 2016) : un an plus tard, après avoir été appelé en son Grand Quartier général du Front de l'Est par le Führer Adolf Hitler qui le fit Chevalier de la Croix de Fer, Léon Degrelle redisait à nouveau aux milliers de Français venus l'écouter, le 7 mars 1944 au Palais de Chaillot, la nécessité de la révolution sociale et spirituelle :

    « Ce qui nous intéresse le plus dans la guerre, c'est la révolution qui suivra, c 'est de rendre à des millions de familles la joie de vivre, c'est que les travailleurs européens se sentent des hommes libres, fiers, respectés, c'est que dans toute l'Europe, le capital cesse d'être un instrument de domination des peuples et soit mis au service du bonheur des peuples. La guerre ne peut s'achever sans cette révolution socialiste qui sauvera le travailleur des usines et le travailleur des champs. Nous ne sommes pas des anarchistes. Nous voulons rétablir la justice sociale alors que pendant l'avant-guerre et même pendant la guerre, chez les pays capitalistes, c'est le peuple qui paie, c'est le peuple qui souffre, c'est le peuple qui est écrasé. »

     

    LD Chaillot 1944.03.05.jpg

    « Organisée par la Waffen SS française, la Légion des Volontaires français contre le bolchevisme et la milice française, la manifestation qui s'est déroulée dans le cadre grandiose du Palais de Chaillot, réunissait plusieurs milliers de Parisiens qui ne ménagèrent pas leurs applaudissements enthousiastes au Chef. Jamais peut-être il n'a été donné à un public français d'entendre de plus rudes vérités que celles que le Chef a dites sur le ton amical et franc que nous lui connaissons. » (Le Pays réel, 7 mars 1944).

     

     

    « Nous qui sommes Peuple »

     

    Illustrant parfaitement le montage photographique de la première page, le texte de Léon Degrelle choisi par le Cercle des Amis (extrait de l'éditorial de l'hebdomadaire Rex du 21 juin 1935) explique la raison d'être du mouvement populaire représenté par Rex en même temps qu'il éclaire le sens de son action.

     

    Rex 1935.06.21.png

     

    «  Ce que nous voulons, c'est rassembler les grandes masses populaires, les organiser, les stimuler, rendre agissante leur vertu. [...] Rex est essentiellement un mouvement populaire. Nous somme peuple, nous ne somme pas avec le peuple, nous ne venons pas au peuple : nous sommes le peuple lui-même qui se réveille et qui regarde avec audace et confiance l'avenir, parce qu'il veut vivre. [...] Entre le politicien et le peuple, il n'y a que de froides relations juridiques, un contrat dont chacune des parties redoute toujours que l'autre ne le viole. Nous voulons, nous, entre l'homme d’État et son peuple : courant de confiance, d'abandon et, disons le mot, d'amour. La vraie souveraineté populaire, c'est celle-là : des chefs qui commandent avec autorité, mais qui, par le contact direct et fréquent avec leur peuple se sentent en constante communion d'idées et de volonté avec tout ce qu'il y a de sain dans le pays. »

     

     

    Degrelliana

    Comme toujours, la Correspondance du Cercle donne accès à une véritable bibliothèque d'ouvrages indispensables au bagage intellectuel de tout nationaliste identitaire, qu'ils relèvent de l'histoire (par exemple, le premier volume de biographies de recrues de La Légion des Volontaires français contre le bolchevisme, d'Eric Le Clanche), de la culture (comme Germanica, d'Alain de Benoist), de la littérature (Les Chiens de paille, de Pierre Drieu la Rochelle ou Lettres à une provinciale, de Robert Brasillach), tous ouvrages disponibles à la Boutique nationaliste.

     

    Mais ce sont surtout les informations concernant Léon Degrelle qui nous intéresseront, tant elles relèvent de la quasi-exhaustivité.

     

     

    Miège

     

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    Ce qui nous a fait un tout particulier plaisir est sans conteste le charmant dessin, poétiquement évocateur, de Miège, qui est désormais, aux côtés de Chard, le dessinateur attitré de Rivarol.

    Miège a choisi de représenter Léon Degrelle « à l'air libre, dans la nuit claire, sous les étoiles », comme le préconisait José Antonio (discours du 29 décembre 1933 ; voir aussi Jean Denis, cité ci-avant). Il porte la houppette de Tintin –personnage qu'il a inspiré comme en témoigne son opus ultimum Tintin mon copain coincé sous le bras–, mais avec les cheveux que le Chef de Rex avait naturellement foncés, ce qui lui donne aussi une ressemblance avec Quick, le ketje de Bruxelles. D'autant plus appropriée qu'il est justement en arrêt devant l'enseigne du restaurant Chez Léon de Bruxelles, spécialiste du « moules-frites » national : ayant développé une chaîne de restaurants populaires couvrant toute la France, Chez Léon de Bruxelles, raccourci aujourd'hui en Léon, est ainsi devenu le point de rendez-vous idéal (un stamcafé comme on désigne à Bruxelles son bistrot préféré) de tous les degrelliens français !

    En une silhouette suggestive, Miège a réussi à rassembler toutes les étapes de la vie intrépide et généreuse de Léon Degrelle, amalgamant les valeurs altruistes du scoutisme tintinesque à la révolution des âmes de Rex (dont il porte la boutonnière) et l'héroïsme du Légionnaire de la Croisade pour l'Europe Nouvelle libérée de l'exploitation capitaliste et de la menace bolchevique : le poète-soldat, la tête dans les étoiles, porte sa Croix de Chevalier et ses énormes godillots sont bien ceux que le Führer a fourrés de Völkischer Beobachter (voir J.-M. Charlier, Léon Degrelle : persiste et signe, p. 332) !

    R&A Miège.jpeg
    Pour mieux connaître Miège, nous vous conseillons vivement de lire le dernier numéro de Réfléchir&Agir (et de vous abonner à cet excellent trimestriel: 35 ou 40 € numéro hors-série compris–, selon que vous habitiez la France ou non): une réjouissante interview, fort instructive, du dessinateur vous y attend.

     

    Le dernier recueil de ses dessins –En traits libres, Editions Dualpha, préfacé par Francis Bergeron– est également disponible sur le site de la Boutique nationaliste.

     

     

     

     

     

    Editions degrelliennes

     

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    Le Cercle signale une nouvelle édition de Mes aventures au Mexique en espagnol par une maison d'édition mexicaine appelée Lina Delir. Ce nom était utilisé par les Cristeros pour signer leurs communiqués et tracts clandestins pendant la Cristiada, nom du soulèvement des catholiques mexicains contre l'intolérance religieuse du gouvernement franc-maçon entre 1926 et 1930 : il est l'acronyme de « Ligue nationale de fense de la liberté religieuse » (ce blog, entre autres, aux 2 avril et 25 décembre 2017).

    Il s'agit en réalité de la traduction espagnole des récits et documents sur la persécution des catholiques au Mexique, rassemblés et présentés par Mgr Louis Picard, aumônier-général de l'Action Catholique de la Jeunesse Belge (ACJB) et Giovanni Hoyois, son président, sous le titre La Tragédie Mexicaine. Jusqu'au Sang... (Editions de la Jeunesse Catholique, Louvain, 1928). Rappelons que Mgr Picard fut le mentor de Léon Degrelle (ce blog, entre autres, au 5 avril 2017 et 20 février 2019) qui occupait d'ailleurs un « kot » (logement étudiant) chez lui, à Louvain, et à qui il confia les Editions Rex, appelées à devenir le vecteur essentiel de la Révolution des Âmes (tous les détails sont à retrouver dans Léon Degrelle, Cristeros, Editions de l'Homme libre). Il était donc naturel de compléter cet ouvrage par Mes aventures au Mexique qu'écrivit Léon Degrelle dans la foulée de ses reportages sur la persécution des Cristeros pour le vingtième siècle (octobre 1928-janvier 1929, ce blog au 7 février 2019). Regrettons seulement que cette édition mexicaine rassemblant les deux livres n'associe le nom de Léon Degrelle qu'à celui de G. Hoyois, –qui, en 1945, éreinta lamentablement le proscrit condamné à mort dans son L'Ardenne dans la tourmente–, faisant l'impasse sur Mgr Picard qui fut pourtant l'âme de la défense des Cristeros en Belgique et qui associa étroitement Léon Degrelle à son action (voir Léon Degrelle, Cristeros, pp. 19-34).

     

    Mexico Riesco.jpgIl semble que, pour obtenir cet ouvrage (400 pages, 45 euros, frais d'envoi compris), il faille s'adresser à luzdealbania@gmail.com. La version espagnole de Mes Aventures au Mexique a cependant déjà connu une édition indépendante dès 2006, avec une introduction de José Luis Jerez Riesco (à qui l'on doit l'indispensable Léon Degrelle en Exil: ce blog au 19 avril 2019). Publiée par l'éditeur espagnol Nueva Republica, elle est toujours disponible au prix d'à peine 12 euros, sur le site de Fides Ediciones Mundial.

     

    Une autre publication mexicaine a retenu l'attention du compilateur d'informations degrelliennes du Cercle : Elbruz Altus Vexilum. Un nom singulier associant le nom de la plus haute montagne du Caucase, aux confins de l'Europe, l'Elbrouz, aux deux pics jumeaux où fut enchaîné Prométhée, et la traduction latine –Altus Vexilum– du titre de l'hymne national-socialiste, Die Fahne hoch ! (« Drapeau levé ! »).

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    Le Cercle se réfère au site français VoxNR qui, le 5 août 2023, a mis sur son site la traduction du récit donné par l'écrivain Juan Guerrero Zorrilla de sa rencontre avec Léon Degrelle à Madrid, le 20 avril 1989, à l'occasion du centenaire d'Adolf Hitler. Cet article provient de la revue mexicaine Elbruz Altus Vexilum qui l'aurait publié dans son numéro 6 de septembre 2013.

     

    Elbruz 8 p. 1.pngUne collection de la plupart des premiers numéros de la revue Elbruz Altus Vexilum est disponible sur Internet (du n° 0 au n° 16, mais sans les numéros 2, 8 et 12), mais ces souvenirs de Juan Guerrero Zorrilla ne se trouvent en tout cas pas dans la sixième publication (l'erreur vient peut-être de ce que ce texte fut d'abord publié avec cette référence par l'association culturelle mexicaine Robert Brasillach, le 28 juillet 2023). Plus probablement cet article a-t-il été publié dans le numéro 8 (printemps 2014) dont nous ne connaissons que la couverture justement consacrée à Léon Degrelle (« Le dernier gentilhomme »).

     

     

    Elbruz 13 p. 40.png

    Reproduisons pour l'anecdote la publication pour le moins inattendue, dans le 13e numéro d'Elbruz Altus Vexilum (p, 40), d'une photo de la famille royale belge en illustration d'un article sur la nécessité en Europe de faire de nombreux enfants pour contrer « la décadence de l'Occident due à la défaite de l'Axe à l'issue de la Deuxième Guerre mondiale » !...

     

    L'écrivain mexicain Juan Guerrero Zorrilla est né en 1942 à Tampico, principal port industriel de l’État mexicain de Tamaulipas, située à l'embouchure du Rio Pánuco sur le Golfe du Mexique. Coïncidence extraordinaire, le paquebot qui emmena Léon Degrelle de Hambourg à Veracruz s'appelait justement Rio Panuco ! Construit par les chantiers navals de Kiel en 1924, il assurait la traversée de l'Atlantique pour la compagnie allemande Ozean Linie. Revendu en 1934 à un armateur australien, il fut coulé par l'aviation japonaise en 1942 dans le port de Darwin (voir ce blog au 1er mai 2016 et Léon Degrelle, Cristeros, pp. 245-248).

     

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    Léon Degrelle à bord du Rio Panuco l'emmenant au Mexique. Il écrit à ses parents une lettre qui, destinée à les rassurer, donne aussi de précieux renseignements sur la vie à bord du navire :

    À bord du Rio Panuco, le 8 décembre 1929.

    Mes bien chers tous,
    Nous sommes entrés hier dans les mers américaines. À midi, nous avons aperçu, éclatante sous le soleil, la première des îles Bahamas, celles que découvrit d'abord Christophe Colomb. Je dois dire que nous étions moins émus que lui, puisque nous prenions joyeusement un bain de mer ! À l'avant du bateau, un bassin est aménagé où pénètre et s'écoule sans cesse la bonne eau tiède. Et c'est très amusant, en plein Décembre, alors que vous vous calfeutrez dans les maisons, de prendre ici, en face de la Floride, des bains de mer deux et trois fois par jour ! J'ai décrit à Cécile [van den Bossche, d'Ostende, avec qui Léon Degrelle s'était fiancé en novembre 1928], qui vous communiquera ma lettre, les tempêtes effrayantes qui nous en ont fait voir de toutes les couleurs pendant la 1ère semaine dans l'Atlantique. Cela nous a valu, en plus d'impressions poétiques, lyriques et... parfois plus prosaïques, trois jours de retard, si bien que nous ne débarquerons que le 11 ou le 12 à Vera Cruz.

    Depuis les îles Açores, d'où je vous ai envoyé une lettre-télégramme, nous avons eu un temps magnifique. Soleil éblouissant, torride depuis quelques jours. Dans les flots, de gros dauphins qui dansent. Au fil de l'eau, des troupes argentées de poissons-volants. Des soirées chaudes, placardées d'étoiles, avec des clairs de lune qui blanchissent la mer.

    Et avec cela une santé splendide. On est d'ailleurs très bien nourri, quoique la cuisine allemande diffère parfois très fort de la nôtre. J'ai d'épatants compagnons de route avec lesquels le temps passe comme un éclair. Puis, il y a des concerts à bord, des visites de St Nicolas, des bals, une grande fête de travestis. Bref, impossible de s'ennuyer. Au contraire !

    Et puis une grande fraternité internationale. On est en rapport ici avec des représentants de tous les peuples d'Europe et je vous avoue que c'est bien formateur de vivre dans cette tour de Babel.

    LD Rio Panuco Passagers.jpgDemain, nous faisons escale à La Havane où j'irai passer quelques heures. Puis, trois jours après, le pied gaillard, je foulerai le sol mexicain, prêt à de nouvelles et magnifiques aventures.

    Ah ! Vraiment, je suis heureux d'avoir entrepris une pareille randonnée. Et mille fois encore, je vous remercie de m'y avoir aidé avec tant d'affection et de générosité. Ce sera dans ma jeunesse, le plus beau, le plus impérissable des souvenirs.

    Il fait à présent une chaleur formidable qui nous aplatit tous comme des omelettes ! Ce que cela ferait du bien à notre chère maman ! C'est ici, tout le long du pont, grands bains de soleil !

    J'ai une collection splendide de photos de bord qui vous amusera bien à mon retour. Cela fait un album très vivant.
    Je crois qu'il est prudent que, déjà, je vous souhaite... la nouvelle année ! En effet, c'est à peu près alors que ma lettre vous parviendra. Pour vous, mes bien chers papa et maman, je renouvelle tous les vœux que chaque jour et très tendrement je forme pour vous et confie au Bon Dieu. Vous êtes les plus chers exemples de dévouement, d'abnégation et d'amour. Il n'est point de souhaits assez ardents et assez complets que je puisse former pour mon cher papa et ma chère maman.

    Bonne année aussi à tous mes chers frère et sœurs ainsi qu'à leur descendance ! D'ailleurs, je rentrerai en janvier et serai à temps au pays encore pour dire à chacun à cette occasion tout ce que je lui souhaite particulièrement.

    Bien des choses de ma part aussi à tous les oncles, tantes, cousins, cousines et amis les meilleurs.

    Mais pour vous, mes bien chers tous, par delà les 8000 km qui déjà nous séparent, j'envoie les plus affectueux, les plus ardents, les plus... tropicaux baisers de votre grand explorateur.

    L.

     

     

    Juan Guerrero Zorrilla.png

    Juan Guerrero Zorrilla est surtout connu pour ses contes fantastiques et récits de science-fiction pour lesquels il reçut plusieurs récompenses littéraires de même que, tout récemment le 10 août 2023, l'hommage officiel de l'université de l'Etat mexicain de Tamaulipas.

     

     

    Cedade 1989.pngLe récit de sa rencontre avec Léon Degrelle que l'écrivain a confié à la revue Elbruz Altus Vexilum témoigne de ses profondes convictions nationales-socialistes puisque c'est pour participer à l'hommage rendu par le CEDADE (Cercle Espagnol Des Amis De l'Europe, ce blog, notamment, au 4 février 2017) à Adolf Hitler pour le centième anniversaire de sa naissance qu'il traversa l'Atlantique pour Madrid. Son témoignage est cependant fort restreint, essentiellement à cause de la vive émotion qui l'étreignit pendant cette soirée, mais aussi parce qu'il ne parlait ni le français, ni l'allemand qui furent surtout pratiqués à cette occasion. Extrayons-en ces précisions (nous retraduisons d'après l'original publié par l'Asociación Cultural Robert Brasillach : notons, au passage, qu'elles établissent à nouveau la capacité de Léon Degrelle de s'exprimer en allemand : ce blog, entre autres, au 26 mai 2022) :

    « Le restaurant, pas très grand, était plein : c'est là que se produisit la rencontre avec le Général Degrelle, l'homme le plus important que j'aie connu dans ma vie. [...] Puis la causerie a commencé. En fait, je n'ai pratiquement rien compris : il parla d'abord en français, puis en allemand ; mais j'étais en compagnie de bons camarades [...] et je m'assis à côté du seul Espagnol qui se trouvait là. »

     

    LD Madrid Christophersen+Tonningen 1989 04 20.jpgC'est dans un petit restaurant populaire de Madrid qu'en toute discrétion Léon Degrelle célébra, le 20 avril 1989, le centenaire d'Adolf Hitler en compagnie d'une petite trentaine d'amis européens qui eurent l'exceptionnelle bonne fortune de fêter cet événement en compagnie de celui que le Führer se fût choisi pour fils.

    À la droite de Léon Degrelle, on reconnaît l'Allemand Thies Christophersen (1918-1997), auteur en 1970 du fameux rapport Le mensonge d'Auschwitz, et Florentine Heubel (1914-2007) qui, épousant, le 21 décembre 1940, Meinoud Rost van Tonningen, le chef du Mouvement National-Socialiste de son pays (qui deviendra, peu de temps après, le président de la banque des Pays-Bas), fut la première Néerlandaise à se marier selon le cérémonial SS : sa bague runique de mariage qu'elle eut l'occasion de présenter au baise-main du Führer devint sa plus précieuse relique.

    À la gauche du Commandeur de la Sturmbrigade Wallonien, se trouve, en fin de banquette, l'Allemand Ewald Althans (né en 1966) promu alors par le Generalmajor Otto Ernst Remer à la direction des jeunes de son Deutsche Freiheitsbewegung (Mouvement allemand pour la Liberté). La 40e Correspondance du Cercle propose justement la première partie d'un entretien-témoignage du plus haut intérêt du Général Remer à propos des mensonges répandus sur la réalité du Front de l'Est : de quoi largement démonétiser les récentes tentatives injustifiées de criminalisation des Légionnaires wallons par le CEGESOMA (ce blog, entre autres, au 30 novembre 2019 et 11 mars 2022).

    Assis à gauche de Léon Degrelle, le Phalangiste Alberto Torresano (1934-2023) est probablement le « seul Espagnol qui se trouvait là » dont parle Juan Guerrero Zorrilla.

    C'est à lui, parfait francophone, que Léon Degrelle dédicaça cette photo historique, datée symboliquement du 20 avril 1989. Proche de Léon Degrelle, Alberto Torresano compta parmi les dernières personnes à pouvoir lui rendre visite à l'hôpital de Malaga où il devait décéder (ce blog au 5 août 2023).

     

    Paloma+Alberto Drève Lorraine.jpeg

    Alberto Torresano, en visite à Bruxelles en 1990 avec son épouse Paloma, tenait à voir la maison de Léon Degrelle, Drève de Lorraine, en lisière du Bois de la Cambre. La photo a été prise à l'arrière de la villa, devant la grille ouvrant sur l'étroite Drève du Caporal.


    Dans l'attachant ouvrage
    Léon Degrelle. Documents et Témoignages, publié en 2014 dans la collection des Cahiers d'Histoire du Nationalisme de Synthèse nationale sous la direction de Christophe Georgy, il signa un familier et sincère Léon mon Ami ! (ce blog au 22 janvier 2016).

    Alberto Torresano était connu dans tous les milieux nationalistes européens pour sa fidélité absolue au message politique et social de la Phalange historique et à la figure de José Antonio, son chef charismatique. Il était surtout apprécié par tous ceux qui l'ont connu et qui sont immanquablement devenus ses amis pour sa gentillesse envahissante, son humour bon enfant et son entregent tenace. Aussi est-ce avec émotion que nous avons appris, par l'In memoriam reconnaissant du Cercle des Amis de Léon Degrelle, son décès survenu le 14 septembre dernier, dans sa nonantième année. Un important dossier d'hommage a été publié par la Lettre des Amitiés Franco-Espagnoles n° 115, Automne 2023, du Cercle Franco-Hispanique (adhésion : 25 €. Ecrire à cfh.grimaldi@free.fr).

     

    Tout serait à présenter et commenter dans cette XXXXe Correspondance privée du Cercle des Amis de Léon Degrelle. Reprenons seulement pour conclure le communiqué du Dernier Carré expliquant comment la cessation de ses activités ne signifie nullement la disparition de l'idéal solaire qui inspira nos héroïques Anciens et justifia son existence.

     

    Cercle Dernier Carré.jpeg

     

    Cercle des Amis de Léon Degrelle, adhésion (30 ou 37 euros, selon que vous résidiez en France ou non) et renseignements sur les livres présentés : www.boutique-nationaliste.com.

     

    Adresse : Cercle des Amis de LD, BP 92733, 21027 Dijon Cedex, France.

    lesamisdeleon.degrelle@gmail.com

     

     

  • La canaille Assouline : les preuves définitives !

    Pierre Assouline, fieffé menteur antidegrellien (3)

     

     

    Foin des fumisteries : Assouline n’est qu’une vilaine canaille !

    Pour établir son mensonge d’appointé, Assouline a même osé utiliser l’argument –qu’il croyait sans aucun doute massue– d’un témoignage du familier des deux amis, Paul Jamin, alias Jam et Alidor : « Degrelle est un vantard. Il n’a jamais été Tintin, ni inspiré Hergé en quoi que ce soit. C’est tellement évident quand on songe qu’en plus, Tintin, lui, est le contraire d’un fanfaron… » (Hergé, p. 79).

    Tonnerre de Brest ! Serions-nous refaits ? Mais quelle est la référence de pareille affirmation ? La note 101 du bouquin nous la fournit : « Témoignage de Paul Jamin à l’auteur. » C’est-à-dire des propos absolument invérifiables, qu'Assouline met dans la bouche du caricaturiste décédé depuis un an (le 19 février 1995) : nous sommes donc condamnés à devoir croire la canaille sur parole !…

    Alors, Paul Jamin a-t-il vraiment raconté à Assouline ce que celui-ci voulait tellement entendre ? Nous nous permettons d’en douter, ne fût-ce que par la seule phrase « Degrelle n’a jamais inspiré Hergé en quoi que ce soit », contredite, comme nous venons de le voir, par Hergé lui-même (ce blog au 27 décembre 2021), ce que ne pouvait ignorer le fidèle Paul Jamin.

     

    Déménagement Jamin.jpeg

    Tintin mon copain, contrairement aux verba volatils prétendument rapportés par le laquais politiquement correct, a produit des scripta tangibles les contredisant de manière bien plus crédible. Le dessin bien élucidé par sa légende que nous reprenons ci-avant de la page 227 associe Tintin et Léon Degrelle, comme dans tant d'autres d'Alidor publiés dans l'hebdomadaire Pan. Pourquoi donc le dessinateur aurait-il associé régulièrement les deux personnages s'ils n'avaient rien à voir l'un avec l'autre ?

     

    Jam Hergé Wallez Ticket Parade.jpegCe dessin corrobore d’ailleurs celui des « trois pères de Tintin » que nous avons reproduit en début d’article (ce blog au 27 décembre 2021). L'explication du thème de sa vignette fournie par Paul Jamin aux éditeurs du livre dont il devait illustrer la couverture (Eric Fournet, Quand Hergé découvrait l’Amérique, Didier Hatier, 1992) contredit d’ailleurs clairement la pseudo-confidence à Assouline et confirme son caractère apocryphe : Jam n’a pas dessiné un vrai Tintin (ce qui ne lui aurait bien évidemment posé aucun problème), mais, comme il y insiste, « un jeune homme qui pourrait fort bien appartenir à la famille de celui que Hergé envoya en reportage en la Russie des Soviets » (p. 9), c’est-à-dire son frère d’âme, son modèle Léon Degrelle. Rappelons aussi que Paul Jamin, non seulement a relu, en 1989-90, le livre ultime de Léon Degrelle documentant son rapport à Tintin, mais qu’il conseilla judicieusement à son auteur de le faire relire aussi par le spécialiste par excellence de l’œuvre de Hergé, Stéphane Steeman, qui se rendit à Malaga, une première fois, en octobre 1991 (ce blog au 21 mai 2016)…

    Pour autant, Assouline ignorait-il l’identité Degrelle-Tintin ? Non, bien évidemment !

    Nous avons montré comment la chronologie d’Assouline et ses supputations relèvent de la fumisterie et de ses basses besognes au service de la politique commerciale de l’usurpateur Rodwell. Mais veut-on une preuve supplémentaire de sa duplicité ?

     

     

    Profiter de Tintin ? Non ! Attaquer les banksters !

    La thèse d’Assouline est que ce n’est qu’« au soir de sa vie » que Léon Degrelle, incorrigible « prétentieux et mythomane », se serait inventé le rôle de modèle de Tintin : pour les besoins de son Tintin mon copain, toujours en achèvement à l’hôpital où il décéda le 31 mars 1994 (ce blog au 21 septembre 2020 ; notons qu’en 1996, Assouline publia sa biographie censée ruiner le crédit de Tintin mon copain sans avoir même pu lire le dernier livre de Léon Degrelle : il ne sortit des presses syldaves du Pélican d’Or qu’à la « Noël 2000 », comme indiqué à la page 2, –voir ce blog au 10 mai 2017).

    En prétendant cela, Assouline sait que ce n’est pas vrai et qu’il ment : la confidence a effectivement échappé en 1976 (près de vingt auparavant et du vivant de Hergé donc) à Léon Degrelle interviewé par Jean-Michel Charlier pour les deux formidables « Dossiers Noirs » qu’il lui consacra (Autoportrait d’un fasciste : ce blog au 1er juillet 2017). Il est donc primordial de disqualifier ses propos. Voyons ensemble de quelle perverse façon.

    Dans son interview à Jean-Michel Charlier, Léon Degrelle raconte comment, engagé dans l’action catholique (ce blog aux 5 et 8 avril 2017), –le mouvement Rex n’existait pas encore–, il en était rapidement venu aux prises avec la hiérarchie catholique dans les prémisses de ce qui deviendra son combat contre les banksters : « Je m’étais mis, entre autres, à dénoncer le “Boerenbond”. […] C’était la plus grosse organisation religioso-financière des Flandres, une organisation théoriquement parfaite, qui avait pour mission officielle et tout à fait louable de venir en aide aux paysans mais qui, en réalité, avait branché sur ce plan pieux une organisation bancaire géante qui drainait les économies des campagnards chrétiens. Elle avait fait disparaître dans des spéculations des centaines de millions de francs : c’était une affaire honteuse. Mais l’Eglise d’alors touchait sa part sur tout. […] Dès l’instant où j’ai sauté avec mon gourdin sur tous ces salauds, j’ai vu se dresser contre moi le cardinal Van Roey, brandissant sa crosse. La situation était presque comique parce que, précisément, peu avant, il venait de préfacer un bouquin à moi, une Histoire de la guerre scolaire, ouvrage aux parrains originaux puisque la couverture portait, en dehors de mon nom, “Préface du cardinal Van Roey”, archevêque de Malines, et ensuite, “Illustrations de Hergé”, le brave Hergé, Remy Georges, grand copain, le père de Tintin l’universel affublé de mes pantalons de golf. Dès que ma campagne de Vlan eut été déclenchée, le cardinal, avec encore au début une certaine discrétion, me voua aux feux dévorants de l’Enfer où grillent –et c’est juste– les anti-ploutocrates. » (Léon Degrelle: Persiste et signe, Interviews recueillies pour la télévision française par Jean-Michel Charlier, Jean Picollec Editeur, 1985, p. 71).

     

    Histoire Guerre scolaire-horz.jpg

    Ce n’est pas à proprement parler une « préface » que signa le cardinal Van Roey à l’Histoire de la Guerre scolaire de Léon Degrelle, mais une élogieuse lettre de félicitations, reproduite à la fin de l’ouvrage.

     

    On aura bien compris que la référence à Tintin est purement anecdotique dans le récit degrellien de ses premiers démêlés avec le cardinal-primat de Belgique : il ne s’agissait aucunement de parler de son rôle dans les aventures de Tintin, mais de mettre en évidence l’incongruité de la réaction du cardinal qui venait de lui signer une épître flatteuse pour son livre illustré par Hergé. Rien de plus, sinon de rappeler au passage que le héros de Hergé –autre détail cocasse–  avait été affublé de ses pantalons de golf…

    Mais comment Assouline rapporte-t-il le témoignage de Léon Degrelle ? Bien évidemment sans préciser le moindre contexte ! Comme s’il l’avait surpris en flagrant délit de mensonge ! « L’identification de Léon Degrelle à Tintin est d’ailleurs bien trop tardive pour n’être pas a priori suspecte. En 1976 encore, enregistrant douze heures de film et vingt heures de bande-son pour y raconter sa vie en long et en large, il ne citera Hergé qu’une seule fois. Pour affirmer que son “grand copain” avait affublé son petit personnage “de mes pantalons de golf”. Comme s’il avait été le seul à en porter alors qu’entre les deux guerres, c’était l’uniforme des grands voyageurs soucieux de leur mise ! » (Hergé, p. 79).

    Remarquons à nouveau que si les pantalons de golf constituaient prétendument, à l'époque, « l’uniforme des grands voyageurs soucieux de leur mise », Assouline se garde bien d’en donner le moindre exemple, et certainement pas Robert Sexé ou Albert Londres !

     

     

    La confidence fortuite

    Quant à l’argument de la date « tardive », il suinte également la mauvaise foi la plus crasse : « En 1976 encore »… Comme s’il s’agissait d’un nouvel exemple de la récupération qu’il dénonce.

    Non ! C’est en 1976 que cette confidence échappe incidemment à Léon Degrelle, pour la seule et unique fois du vivant de Hergé (nous verrons plus loin pourquoi). Cette allusion tout à fait accessoire au Tintin de Hergé est même très convaincante en ce qu’elle est spontanée et naturelle : Léon Degrelle se souvient simplement que le dessinateur qui s’inspira de lui pour son nouveau héros était involontairement mêlé à ses déboires avec le cardinal Van Roey, ce qui rendait la situation « presque comique ».

    La meilleure preuve qu’Assouline a bien compris ce que Léon Degrelle voulait dire, c’est qu’il cache la raison de l'évocation de Tintin et fait semblant de déplorer que Léon Degrelle, prétendument tout à son autoglorification au long de « douze heures de film », n’aura cité Hergé que cette seule et unique fois. Et ce, pour l'unique raison de s'accaparer indument la paternité de Tintin !

     

    Hergé Voilà.jpegTémoignage manifeste de la proximité indéniable de Hergé avec les idéaux d’Ordre nouveau défendus non seulement par Léon Degrelle et Rex mais également par la rédaction de son journal Le Soir : Hergé fait la « une » de l’hebdomadaire rexiste Voilà en pleine guerre, le 10 juillet 1942. Il surclasse, tel le bienveillant Créateur, un Tintin interloqué (dessin du caricaturiste maison R.V. Roy). Cette « gazette hebdomadaire de la bonne humeur » créée par Léon Degrelle et fort populaire (tirage : 30.000 exemplaires) était dirigée par Victor Meulenijzer, ami d’enfance de Hergé, qui avait été directeur du Pays réel après le départ de Léon Degrelle pour le Front de l’Est. Il paiera de sa vie sa fidélité à l’idéal bourguignon de son chef : il fut fusillé le 30 août 1945, après une parodie de procès qui désespéra son ami Hergé.

     

    Rappelons que Hergé était toujours vivant lorsque Léon Degrelle confia à Jean-Michel Charlier ce détail presque superfétatoire s’il n’avait été amusant. Une telle publicité eût néanmoins pu lui porter préjudice. Léon Degrelle en était d’ailleurs conscient, qui témoignera, après le décès de son ami, dans son Tintin mon copain : « D’un Hergé rexiste, on avait assez peu parlé après 1945. Dans mon refuge, je n’allais pas compromettre un vieux frère comme Georges, qui avait déjà fort à faire pour désherber dans ses albums les quelques nez crochus que la Résistance avait dénichés à la loupe ! » (p. 195).

    Amis Mabire.jpgEn fait, Tintin mon copain, entrepris après la disparition du dessinateur en 1983, n’est en rien une tentative de récupération : c’est un hommage à l’ami fraternel. Nous avons montré comment un article de Jean Mabire, Léon Degrelle fut-il Tintin ?, datant de plus ou moins 1985 et resté inédit, amena la décision de Léon Degrelle de révéler tous les tenants et aboutissants de sa précoce amitié avec Hergé (Léon Degrelle était bien Tintin ! L’intuition première de Jean Mabire, in Magazine des Amis de Jean Mabire, n° 45, Solstice d’été 2015, pp. 18-29).

    Et, comme nous l’avons déjà dit, ces liens d’amitié ne se démentirent jamais après-guerre, par les visites de Germaine Kieckens et Paul Jamin en Espagne, par l’envoi de ses albums par Hergé à Léon Degrelle, par les courriers d’invitation, de remerciements, de recommandations envoyés par Léon Degrelle à Hergé (ce blog au 10 mai 2017).

    Voici quelques exemples éloquents de lettres –adressées pour toute sécurité au fidèle ami commun, Paul Jamin– contenant des messages personnels pour Hergé :

    « Merci aussi au cher Georges de ses quatre bouquins, merveilleux (comme toute la série). Dis-lui que je serais très heureux de le voir se détendre ici. Si ça leur plaît, qu’ils viennent faire un séjour ici, s’inspirer dans une atmosphère très naturelle. Sa femme serait dans un très beau site, nous l’aiderions à se retaper à force d’air pur, de bons plats, et d’affection ! » (21 juillet 1959).

    « Vois un peu si Monsieur Tintin n’a pas besoin d’un beau palais andalou. Il serait à lui à bon compte, et sur-le-champ. » (28 janvier 1961 ; Léon Degrelle évoque ici sa belle propriété de la Carlina –ce blog au 17 octobre 2018– où se rendit effectivement, mais seule, Germaine Kieckens, à au moins deux reprises : ce blog au 10 mai 2017).

    « Je t’envoie, en insistant beaucoup là-dessus, une preuve du talent de l’artiste de Lyon dont je t’avais parlé et que je te demande de recommander vraiment à notre bon vieil Hergé (un fuerte abrazo !). […] Décide Hergé à lui faire une offre intéressante. Il me ferait grand plaisir. » (3 janvier 1967).

     

    LD Picaros.jpg

    Hergé n’a jamais manqué de faire parvenir ses albums de Tintin à celui qui avait inspiré son héros. Jusqu’à Tintin et les Picaros, en 1976. Seul Tintin et l’Alph-art, posthume (1986), a toujours manqué à sa collection.

     

    Voulez-vous une ultime preuve qu’Assouline ne croit absolument pas à la thèse politiquement correcte selon laquelle Léon Degrelle serait définitivement étranger à Tintin ? Et que donc Assouline a menti pour satisfaire ses commanditaires, les héritiers abusifs de la Fondation Hergé qui veulent à tout prix imposer leur menterie ?

     

     

    L'éclairante dédicace

    Nous la trouverons dans la dédicace de son ouvrage Hergé publié à l’instigation de ladite Fondation deux ans seulement après la disparition de Léon Degrelle, tant elle appréhendait la publication annoncée de Tintin mon copain et voulait à tout prix la désamorcer (voir Armand Gérard, Léon Degrelle était bien Tintin ! L’intuition première de Jean Mabire, op. cit., p. 18).

    Cette dédicace était destinée à la propre veuve de Léon Degrelle, à qui l'auteur envoya son ouvrage en priorité, dès sa sortie de presse (l'achevé d'imprimé et le dépôt légal renseignent, à la page 467, « février 1996 » !). Il écrivit, à la suite du titre Hergé :

    « pour Jeanne Degrelle
    et tintin pour les autres !
    Elle y trouvera la trace et
    l’ombre de qui vous savez…

                                                                 Pierre
                                                                         Assouline

                                                                    Mars 96 »

     

    Dédicace Assoulline Jeanne.jpeg

    Par le jeu de mots qu’il effectue sur le nom de Tintin en le privant de sa majuscule, Assouline détruit explicitement, –en s’en amusant !–, la thèse officielle qu’il a été obligé de défendre dans sa biographie de commande : « tintin, rien, bernique pour les autres ! » Le point d’exclamation est d’Assouline, transformant bien le nom du héros des jeunes de 7 à 77 ans en interjection envoyant au diable tous ceux qui se refusent obstinément à comprendre Hergé, à reconnaître le vrai Tintin et seront donc sans doute satisfaits de lire cette biographie bienséante du pourtant « rexisant » ami de Léon Degrelle.

    Examinons d’ailleurs la forme de la dédicace d’Assouline. Il n’utilise pas la préposition « à » que l’on attendrait pour l’hommage du livre à une personne chère ou simplement intéressée, mais la préposition « pour », juste après le titre Hergé, et sur la même ligne, indiquant manifestement qui est la véritable destinataire de l’œuvre. L’auteur confesse donc à Jeanne Degrelle que ce livre a en fait été écrit « pour » elle et pas pour ceux qui l’ont officiellement commandé : « tintin pour les autres ! », précise-t-il explicitement.

    Notons aussi le passage, dans la même phrase, de l’emploi du pronom personnel de la troisième personne du singulier « Elle », logique en ce qu’il évoque la dédicataire « Jeanne Degrelle », à la forme de politesse du pronom de la seconde personne du singulier « vous » : Pierre Assouline exprime donc son implication personnelle dans la dédicace.

    Jeanne Degrelle peut et doit lui faire confiance : ce qu’il lui dit là est la stricte vérité. Nous ne sommes plus dans la dédicace académique où l’on eût attendu « l’ombre de qui elle sait », mais dans une relation personnelle, « l’ombre de qui vous savez » : ce n’est plus un Assouline qui parle à une Madame Degrelle, c’est maintenant moi, Pierre, qui vous parle, à vous, Jeanne. Et c’est d’ailleurs signé familièrement du prénom « Pierre », le nom étant reporté significativement à la ligne suivante…

    Certes, Jeanne Degrelle ne pourra trouver dans cette biographie que « la trace et l’ombre » de Léon Degrelle qui était pourtant si proche de Hergé, puisqu’il s’agit d’une œuvre de commande. Mais la confidence qu’Assouline lui fait dans sa dédicace doit suffire à rétablir la vérité : c’est « tintin » pour les autres, les commanditaires, car « Tintin », c’est et ce sera toujours Léon Degrelle !

     

    Jeanne+LD Malaga.jpg

    Jeanne Degrelle et son tellement plus que Tintin d’époux, à Malaga, au début des années 1990…

     

    Cette analyse serait tirée par les cheveux ? Mais ce serait faire injure au fin connaisseur de la langue française qu’est Assouline que de prétendre le contraire : comme nous l’avons constaté, il n’utilise aucun mot ou tournure au hasard, même et surtout si c’est pour se garantir le confort et la sécurité de ses mensonges. C’est ainsi qu’en 2014, au moment même de la disparition d’une Jeanne Degrelle qu’il estimait ne plus devoir ménager (Jeanne Degrelle-Brevet décéda le 15 décembre 2014 : ce blog au 17 janvier 2016), il commettra un roman, Sigmaringen (Gallimard), où il se permettra à nouveau d’outrager Léon Degrelle, en reprenant les calomnies qu’il dut crédibiliser dans sa biographie aux ordres : nous ne manquerons pas d’y revenir bientôt.

    En vérité, cette dédicace –toute personnelle et que son auteur ne destinait évidemment pas à quelque publicité (sans doute ne fut-elle d'ailleurs envoyée dans l'urgence à Jeanne Degrelle que dans le but de « désamorcer » sa légitime réaction à la lecture de l'histoire biaisée des relations Hergé-Degrelle)– désigne la dédicataire comme seule habilitée à trouver dans son livre fallacieux « la trace et l’ombre » de qui elle sait pertinemment être le vrai Tintin, c’est-à-dire, à l’évidence, son immortel époux Léon Degrelle.

     

     

    Tintin LD Aramis 20.07.1991.jpgA l’occasion de sa visite chez Léon Degrelle à Malaga en 1991, le dessinateur Aramis (Minute, Présent, Le Crapouillot, Valeurs Actuelles,…) a dédicacé à ses hôtes ce dessin original et explicite dans la plus pure tradition de la « ligne claire » hergéenne. Le créateur de Tintin avait déjà revêtu son héros de tous les uniformes militaires du IIIe Reich (Hergé, L’Aviation. Guerre 1939-1945, collection « Voir et Savoir », 1953 : ce blog au 29 septembre 2020), Aramis lui donne, avec encore plus de pertinence, l’uniforme degrellien de SS-Sturmbannführer (commandant) muni de toutes ses décorations, y compris la croix de Chevalier de la Croix de Fer reçue des mains mêmes d’Adolf Hitler.

  • Assouline : « Tintin ? N’importe qui plutôt que Degrelle ! »

    Pierre Assouline, fieffé menteur antidegrellien (2)

     

    La chronologie d’Assouline ? Fumisterie !

    La preuve chronologique décisive avancée par Assouline pour établir l’impossibilité d’une quelconque influence de Léon Degrelle sur Tintin est également toute spécieuse : prétendant convaincre son lecteur, elle n’a d’autre but que de le circonvenir et le tromper. Lorsqu’il dessina les premières cases de Tintin au pays des Soviets en janvier 1929, Hergé n’a en effet pas eu besoin d’attendre les articles de Léon Degrelle de février 1930 pour connaître ses réactions aux persécutions des Cristeros puisqu’elles avaient été publiées… dès le mois d’octobre 1928 ! (ce blog au 7 février 2019).

    Bien plus, Hergé connaissait Léon Degrelle, sa rectitude morale comme sa joie de vivre depuis leur participation commune à la presse scoute catholique (1922-1925), au journal estudiantin L’Avant-Garde (1927) et au quotidien catholique Le XXe Siècle (1928). C’est d’ailleurs le 12 janvier 1928 que Léon Degrelle organisa le saccage de l’exposition soviétique dont l’abbé Norbert Wallez avait dénoncé l’organisation à Bruxelles dans son journal : cette action d’éclat provoqua un véritable séisme secouant le monde médiatique et politique belge. L’abbé Wallez fut le seul à l’appuyer sans réserve : il engagea illico le jeune étudiant dans son équipe rédactionnelle du XXe Siècle et enjoignit Hergé d’envoyer son nouveau héros  combattre les Soviets, à l’image de Léon Degrelle, à partir du 10 janvier 1929 (retrouvez tous ces détails appartenant à la genèse de Tintin dans l’introduction à Cristeros, Aux origines de Tintin) !

    XX S. 1928 01 13 Sac expo Soviets Bxl.JPGEn « Une » du 13 janvier 1928, Le XXe Siècle, le quotidien de l’abbé Wallez, salue « Les justes ravages faits dans l’exposition des bolchevistes russes à Bruxelles par les “Jeunesses Nationales” et les étudiants universitaires ».

     On peut donc affirmer –en respectant la chronologie et les faits– que l’engagement anticommuniste de Tintin puisa –comme chacun sait– les anecdotes de ses aventures dans les mémoires de l’ancien consul belge en Russie, Joseph Douillet, Moscou sans voiles (neuf ans de travail au pays des Soviets) que l’abbé Wallez confia à Hergé en décembre 1928 pour documenter les aventures de Tintin. Mais pour étoffer la personnalité de son nouveau personnage, il s’inspira du courage, de la détermination, du sens de l’initiative et de l’humour de Léon Degrelle, héros du saccage en janvier 1928 de l’exposition bolchevique de Bruxelles.


    C’est ainsi et pas autrement que naîtront Les aventures de Tintin reporter au « Petit Vingtième » au pays des Soviets.

    Un dernier mot pour documenter le peu de sérieux de l’argumentation chronologique d’Assouline prétendant impossible la filiation Degrelle-Tintin puisque le directeur du XXe Siècle n’aurait envoyé Léon Degrelle au Mexique qu’après le début des premières aventures de Tintin… au Congo ! « Ainsi l’abbé Wallez a-t-il expédié Degrelle au Mexique après avoir décidé d’envoyer Tintin au Congo et non le contraire. »

    A nouveau, double erreur : si Léon Degrelle ne se rendit effectivement au Mexique qu’en janvier 1930, ce ne fut qu’avec, pour seule aide de l’abbé Wallez, un pécule de cinq mille francs. Ce voyage ne fut en rien décidé par l’abbé qui ne fit que céder aux sollicitations de son journaliste se muant en reporter de terrain (voir Cristeros, Aux origines de Tintin, p. 73). Mais c’est l’engagement antisoviétique de Léon Degrelle qui donna à l’abbé l’idée d’envoyer Tintin, non pas au Congo, mais chez les Soviets. Comme Léon Degrelle, Tintin y dénoncera les « ignominies » des « révolutionnaires moscovites » (Norbert Wallez, in Le XXe Siècle, 13 janvier 1928).

    Ce n’est que pour ses aventures suivantes que Tintin se rendra au Congo, y exaltant l’œuvre des Pères Blancs.

    Qu’Assouline confonde les deux albums ne plaide guère pour le sérieux de sa réflexion. Une confusion qui fait plutôt désordre dans un passage où l’auteur prétend accuser de mensonge celui qu’il sait dire la vérité…

    LD Avt-Garde 1928 11 22 Leb.jpg

    Portrait de Léon Degrelle, secrétaire de rédaction de L’Avant-Garde depuis un an, par l’étudiant et dessinateur « Leb » (Pierre Lebon), publié dans l’hebdomadaire louvaniste, le 22 novembre 1928. Plus tard, Leb dessinera aussi pour Le XXe Siècle (on trouvera, par exemple, son portrait de Pierre Nothomb dans Le « XXe » littéraire et artistique du 10 août 1930).

    Voilà les faits et la véritable chronologie : tout est expliqué en détail dans Cristeros, Aux origines de Tintin, même si Assouline fait semblant que ce livre et cette mise au point n’existent pas !

     

     

    Le modèle de Tintin serait Robert Sexé ? Fumisterie !

    Enfin, parachevant son boulot antidegrellien pour lequel il fut engagé par l’ex-madame Hergé, épouse Rodwell, l’omnipotent patron de la despotique société Moulinsart, Assouline ose affirmer –ce qui ne se trouvait aucunement dans son bouquin de 1996 !– qu’en aucun cas Léon Degrelle n’aurait pu inspirer Hergé pour son héros Tintin : « Je crois bien davantage à des modèles comme Robert Sexé ou Albert Londres, bien sûr ! » (Cahiers, p. 9).

    Outre que, vu ses mensonges à répétition, on se moque bien de savoir ce qu’Assouline croit, on pourrait quand même se demander de quel chapeau sortent Robert Sexé et Albert Londres qui n’ont jamais approché Hergé. Hergé qui ne connaissait absolument pas Sexé (ce blog au 1er février 2016). Hergé qui ne connaissait pas davantage Albert Londres, sauf pour en avoir peut-être lu l’une ou l’autre œuvre et dont il aurait illustré, en 1930, un texte concernant non les Soviets, mais les Juifs (voir plus loin).

    Remarquons qu’à la fin de sa remarque, Assouline assène la locution adverbiale « bien sûr », renforcée d’un point d’exclamation, pour transformer son affirmation gratuitement péremptoire en évidence que le lecteur n’oserait mettre en doute sous peine de passer pour un imbécile !

    Or rarissimes sont ceux à avoir jamais entendu parler de Robert Sexé, valeureux globe-trotter à moto du début des années 1920, jusqu’à ce qu’un certain Janpol Schulz n’en propose, en 1996, une biographie intitulée Sexé au pays des Soviets, opportunément préfacée par… le secrétaire général de la Fondation Hergé, Philippe Goddin, saluant un « reporter dynamique, entreprenant et courageux dont, peut-être, les articles et les photos étaient tombés sous les yeux du jeune dessinateur Hergé. » Mais ce tintinologue officiel s’est toujours bien gardé d’évoquer jusqu’au nom même de Sexé dans ses multiples ouvrages, y compris dans sa monumentale Chronologie d’une œuvre (7 volumes, éditions Moulinsart, de 2000 à 2011).

    Dans sa contribution bienveillante, Goddin s’est contenté de conclure : « Qui sait si un jour, on ne découvrira pas la photo de Robert Sexé dans les archives conservées à la Fondation Hergé ? ». C’était à la fin du siècle dernier et il semble bien que, depuis, rien n’ait jamais été découvert permettant de relier concrètement à Hergé cet aventurier d’exception qui réalisa le premier tour du monde en moto. Même si, collaborateur de La Gerbe, l’hebdomadaire ouvertement national-socialiste d’Alphonse de Châteaubriant, Robert Sexé partageait à l’évidence les idées de Hergé quant au nouvel ordre européen.

    Soir Sexé 1926 12 05.jpg

    Quoi qu’en aient dit Janpol Schulz ou Francis Bergeron, Le XXe Siècle ne reçut jamais Robert Sexé dans ses locaux pour quelque interview ni ne publia jamais de photo de lui. Contrairement au Soir qui, le 5 décembre 1926, illustra d’un cliché son reportage sur la réception à Bruxelles du motocycliste et de son compagnon Henri Andrieu après leur tour du monde.

    C’est le directeur du quotidien Présent, Francis Bergeron, maladivement antidegrellien, qui a répandu dans les milieux nationalistes la fable de Robert Sexé, modèle de Tintin, dans une interview à Rivarol, en octobre 2015. Il entendait en effet poursuivre sa dénonciation de « ceux qui ont voulu du mal à Hergé (ainsi que Degrelle lui-même) », mais sans fournir le moindre élément permettant d’étayer pareille accusation, invraisemblable sinon diffamatoire (Georges Remi, dit Hergé, Pardès, 2011, p. 35).

    Nous avons suffisamment démonté l’argumentaire fantaisiste de Bergeron pour ne plus y revenir (ce blog aux 1er février et 4 mai 2016) : ce sympathique motocycliste de Robert Sexé, quadragénaire et myope, n’a, à l’évidence, jamais pu servir de modèle pour Tintin.

    S’il fallait encore s’en convaincre, il suffit d’ouvrir le livre de Janpol Schulz, Robert Sexé au pays des Soviets –usurpant le titre de Hergé pour mieux accréditer la supercherie– où est notamment repris le reportage de Sexé sur son séjour à Moscou en 1925 pour le bimensuel Moto Revue. On verra que le contenu, tout d’enthousiasme et de bienveillance pour le pays des Soviets, n’a rien à voir avec les aventures de Tintin mettant à nu la terrible réalité du pays des Soviets, telle que la perçut et l’illustra Hergé.

    A cet égard, Robert Sexé se conduirait plutôt comme ces « communistes anglais à qui l’on montre les beautés du bolchevisme » (Tintin au pays des Soviets, p. 29, case 3) en exaltant, par exemple, la riche diversité de la production industrielle soviétique, n’oubliant pas les cierges dont le clergé orthodoxe ferait encore grande consommation : « Et nous réalisons l’immensité de ce “pays des Soviets” : le continent russe. Le laboratoire thermodynamique est en plein quartier d’usines. Tout près, des ateliers d’état fabriquent des avions complets, des automobiles, marque AMO et une fabrique soviétique produit des bougies et de magnifiques cierges d’église… » (Robert Sexé au pays des Soviets, p. 123).

    Le hasard (ou la malchance) veut que l’on peut également mettre en parallèle avec le reportage de Sexé le fameux épisode de la « distribution de pain gratuite aux pauvres de Moscou […], ces bandes d’enfants abandonnés, vagabondant dans les villes et les campagnes vivant de vol et de mendicité » où un petit mendiant se fait traiter de « chien » et chasser d’un violent coup de pied pour n’être pas communiste (Tintin au pays des Soviets, p. 78, case 3, et p. 79, case 1). Robert Sexé choisirait plutôt, quant à lui, le camp du policier soviétique : « Heureusement, pour le pittoresque de la rue, ces caractères classiques de la vie russe, le mendiant et le pope, existent toujours […]. Le petit tzigane s’accroche à vous en pleurnichant, la jeune romanichelle vous mendie des kopeks, les “militionnaires” (agents de police) ferment l’œil sur toute cette mendicité, mais ils sont prompts à intervenir au besoin. Les occasions ne leur manquent pas et ils ont fort à faire contre les terribles jeunes “arabes”, enfance abandonnée et criminelle réfugiée à Moscou depuis la grande famine. » (Robert Sexé au pays des Soviets, p. 124).

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    Sympathique portrait d’un agent de police soviétique (un « militionnaire ») réalisé par Robert Sexé lors de son séjour à Moscou. A comparer avec les mines patibulaires dont Hergé afflige tous les protagonistes bolcheviques dans Tintin au pays des Soviets. 



    Le modèle de Tintin serait Albert Londres ? Fumisterie !

    En serait-il autrement d’Albert Londres dont le nom n’est sans doute cité par Assouline que pour évoquer un journaliste-explorateur plus célèbre que Robert Sexé ?

    Selon les « hergéologues » appointés, un lien existerait bien avec Hergé censé avoir illustré, comme nous l’avons dit, des passages d’un livre d’Albert Londres venant d’être publié, Le Juif errant est arrivé. C’était le 16 février 1930, dans le supplément dominical du XXe Siècle, Le “XXe” littéraire et artistique. Hergé venait de publier les cent quatorzième et cent quinzième planches de Tintin au pays des Soviets (sur cent trente-huit au final) dans le petit “XXe” du 13 février 1930. Mais ce n’est pas le reportage d’Albert Londres Dans la Russie des Soviets que Hergé aurait illustré, mais son enquête sur les Juifs, des ghettos d’Europe vers la Palestine.

    De quoi établir un lien entre Albert Londres et Tintin ? Sûrement pas ! Au même moment, Léon Degrelle, lui, était aux prises avec les soviets mexicains. Et envoyait à Hergé ce clin d’œil complice reprenant la fameuse anecdote des visiteurs anglais de l’usine soviétique que son ami avait publiée dans le petit “XXe”, le 11 avril 1929 : « Il y a entre la Révolution Russe et la Révolution Mexicaine des similitudes nombreuses qui ne manquent point de saveur. La plus pittoresque est leur commun désir d’épater les visiteurs étrangers. On n’oubliera jamais le voyage à Moscou de la délégation anglaise : sur son passage les Soviets n’hésitèrent point à brûler, sous les cheminées des usines à l’abandon, les dernières charretées de foin des paysans russes, afin que les voyageurs d’Outre-Manche fussent émerveillés par l’épanouissement industriel de l’U.R.S.S. ! » (Le Vingtième Siècle, 11 février 1930).

    Huibrecht Van Opstal avait signalé en 1998 dans son Tracé RG, Le phénomène Hergé que le dessinateur avait illustré le texte sur les Juifs d’Albert Londres (p. 58), mais sans rien reproduire. Philippe Goddin rapportera également l’information en 2000 dans le premier volume de son Hergé, Chronologie d’une œuvre (p. 298), sans en donner non plus d’exemple.

    Serait-ce que les dessins de Hergé exhalassent quelque relent raciste ? On pourrait le supposer à lire le difficultueux ouvrage de Van Opstal (abréviations quasi incompréhensibles, organisation compliquée de l’index, bibliographie hermétique,…). La référence à Albert Londres se trouve en effet dans une recension de dessins chargeant le trait sémite : « [Hergé] illustra Angelroth (sur le juif errant, dans LBQL, 1925), Londres (sur le sionisme, Le Juif Errant est arrivé, dans LVLEA, 1930) et de Vroylande (sur des Juifs avides, en 1941. […] » (Tracé RG, Le Phénomène Hergé, p. 58).

    Nous pensons plutôt qui si les spécialistes officiels de Hergé ont choisi de ne pas publier ce dessin « londrien », c’est que son attribution n’est vraiment pas avérée car, contrairement aux autres illustrations du « XXe » littéraire et artistique (complaisamment reproduites par Goddin dans sa Chronologie), il n’est pas signé « HERGE ». Et l’original ne semble pas non plus appartenir aux archives quasi exhaustives de la Fondation Hergé (ce qui aurait permis d’en authentifier l’auteur).

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    C’est le 16 février 1930 que Le « XXe » littéraire et artistique publie des extraits du Juif errant est arrivé ! d’Albert Londres. Van Opstal et Goddin attribuent le dessin à Hergé, mais rien n’est moins sûr puisque, contrairement à son habitude constante, le dessinateur n’aurait pas signé son œuvre. Et comme tant d’autres dessinateurs –tel Leb, voir ci-avant– ont travaillé pour le supplément littéraire du XXe Siècle… La seule certitude « hergéenne », c’est que Le « XXe » littéraire et artistique faisait régulièrement de la publicité pour Tintin au pays des Soviets !

     

    Si Assouline préfère donc ne pas évoquer l’illustration du Juif errant est arrivé dans son interview aux Cahiers de la BD, peut-être ne cite-t-il alors Albert Londres comme modèle de Tintin que parce qu’en 2014, il est devenu à son tour le héros d’une bande dessinée surfant sur le succès de Tintin et reprenant le même procédé que Schulz dans son titre, Albert Londres au pays des Soviets (Luc Révillon, scénario, et Gérard Berthelot, dessin, Editions Joe). L’éditeur ne manquera d’ailleurs pas du culot de prétendre –tout à fait gratuitement–, en quatrième page de couverture, que «  lorsque Hergé enverra son petit reporter en Russie des Soviets, il se souviendra d’Albert Londres, illustre prédécesseur auquel il vouait une grande admiration » (rappelons que le dessin attribué à Hergé pour Londres est postérieur d’un an aux premières planches des aventures de Tintin).

    Albert Londres BD.jpgDans la biographie qu’il a consacrée au célèbre journaliste (Albert Londres, vie et mort d’un grand reporter, Balland, 505 pages, 1989), Pierre Assouline n’évoque en tout cas jamais les premières aventures de Tintin, ce qui d’ailleurs, à l’époque, n’eût probablement pas été perçu comme particulièrement valorisant, alors qu’aujourd’hui, la préface des Editions de Londres qui diffusent Dans la Russie des Soviets (2012), n’hésite plus à établir ce parallèle : « il est facile et abusif de comparer l’ouvrage avec Tintin au pays des Soviets de 1929. Mais si nous parlons bien de la même époque, les conditions qui conduisent à la naissance des deux œuvres sont presque antinomiques. Si Tintin au pays des Soviets est avant tout une BD anti-soviétique, Dans la Russie des Soviets est un reportage. Et puis, n’oublions pas, si la relation d’Hergé est loin d’être objective, les faits qu’il raconte, notamment l’épisode de la visite de communistes anglais dans les usines soviétiques, ne sont pas totalement idiots à la lumière de ce que l’on sait maintenant de l’époque stalinienne. » (p. 4).

    Cette argumentation est bien alambiquée (en quoi « la relation d’Hergé » est-elle « loin d’être objective » ?) car ce n’est pas « à la lumière de ce que l’on sait maintenant » que les aventures de Tintin chez les Soviets ont été imaginées, ni –cela eût été possible– à celle de ce qu’écrivit Albert Londres en 1920, mais –comme nous venons de le rappeler–, ce reportage en BD (Tintin rédige son article-fleuve aux pages 38-39 de Tintin au pays des Soviets) s’est écrit à la lumière du Moscou sans voiles de Joseph Douillet (l'anecdote de la visite des communistes anglais se trouve aux pages 18-19). La seule chose qu’on pourrait trouver « antinomique » avec l’œuvre de Londres, c’est que Tintin ne se contente pas d’écrire et de dénoncer, il agit, combat activement, avec son intelligence et ses poings, l’injustice et la tyrannie du bolchevisme.

    Car il est vrai qu’à l’inverse des impressions de voyage publiées par Sexé, le reportage d’Albert Londres est, lui, sans complaisance pour le régime soviétique et ses réalisations : « ce sont des étables pour hommes », écrira-t-il, en dénonçant l’implacable système bolchevique organisant, au nom de la dictature du prolétariat, la misère et la famine du peuple russe. Mais il s’en tient à cela, qui est déjà fort bien et fort courageux : il décrit ce qu’il voit et alerte ainsi le monde extérieur, victime de la propagande du régime et de la complaisance de ceux qui se sont contentés de voyages « encadrés »…

    Albert-Londres-1923.jpgCélèbre photographie d’Albert Londres, prise en 1923. Dans sa présentation des Œuvres complètes du reporter (Arléa, 2007), Assouline décrit Albert Londres de la manière suivante (p. VIII) : « Au physique : un bourgeois français, moyen en tout. Signes particuliers : néant. » Rien là qui puisse rappeler Tintin. « Au moral : sentimental, raffiné, dédaigneux, douillet, soucieux de sa ligne, taquin, gourmand, capricieux, courageux, inconscient, impatient, ironique, entêté, potache, fantaisiste, cinglant, ambitieux, insaisissable, taiseux, orgueilleux et fier. Il préfère écouter que parler, regarder plutôt que décrire. » Parmi ces qualificatifs, les seuls pouvant concerner Tintin seraient sans doute sentimental, courageux, entêté. Et peut-être aussi fantaisiste… L’identification avec Léon Degrelle –au physique et au moral !– est, ô combien, plus réussie et convaincante (voir l’introduction de Cristeros, Aux origines de Tintin).

    Pour suivre Tintin et agir concrètement contre le bolchevisme, avec son intelligence et ses poings, il faudra attendre juin 1941 et un certain Léon Degrelle dont l’action antibolchevique de 1928 avait justement été à l’origine des premières aventures de Tintin !

    Ni le quadragénaire à lunettes Sexé, ni le quadragénaire barbichu Londres ne peuvent décidément prétendre avoir servi de modèle à Tintin…

     

    (À suivre)

  • Pierre Assouline, fieffé menteur antidegrellien (1)

    L’obligé de la Fondation Hergé connaît pourtant
    la vérité :
    Léon Degrelle est bien Tintin !

     

    L’enfumage de la « biographie officielle »

     

    Ce n’est qu’aujourd’hui que nous est tombé entre les mains le numéro hors-série des Cahiers de la BD consacré à Hergé, l’ami de Léon Degrelle, sous le titre Hergé, Le père de Tintin se raconte (mars 2020).

    Cahiers BD Hergé.jpegLe titre de cet énième opuscule surfant sur l’image rémunératrice du maître de la ligne claire ne peut qu’induire en erreur son acheteur car, au lieu du scoop d’un récit autobiographique original, il n’aura droit qu’à des commentaires politiquement corrects, rédigés ou inspirés par des appointés et/ou obligés de la toute-puissante Fondation Hergé.

    Et le premier à se substituer à Hergé pour prétendre qu’il « se raconte » n’est autre que cette canaille de Pierre Assouline, auteur, en 1996 chez Plon, d’un Hergé, soi-disant « premier grand portrait d’Hergé [révélant] les coulisses de son œuvre » (Cahiers, p. 11).

    C’est dès ce bouquin qu’il lance la légende apologétique de sa parfaite indépendance d’esprit, gage de l’implacable objectivité de son travail de biographe de Hergé : « Philippe Goddin me proposa au nom de la Fondation Hergé de mettre ses archives à ma disposition pour écrire une biographie […]. Je les prévins aussitôt de l’esprit qui m’animait : la fascination critique pour un homme et une œuvre… la volonté de tout savoir… la liberté de tout écrire… le rejet de tout contrôle… […] Par la volonté de Fanny Rodwell, l’aide de la Fondation Hergé me fut acquise sans réserve ni contrepartie. […] Tout au long de mes recherches, ils ne me ménagèrent jamais leur soutien. Ils s’étaient convaincus que l’exposé rigoureux et la révélation la plus neutre de ces fameuses vérités-qui-ne-sont-pas-bonnes-à-dire valaient décidément mieux que l’insinuation, l’allusion et le soupçon permanent. » (Hergé, p. 12).

    Il nous ressort à nouveau cette fable pour carillonner que tout ce que contient son opus magnum ressortit à la Vérité gravée dans le marbre : « Fanny [Rodwell, la seconde épouse d’Hergé, qui gère les droits (NDLR)] nous a rejoints. Elle serait ravie, m’a-t-elle dit, si je me lançais dans une biographie d’Hergé. Soit, lui ai-je répondu, mais si je découvre un cadavre dans le placard, je le montrerai ! Elle a eu cette phrase décisive : “Vous aurez carte blanche pour tout raconter sans droit de regard de ma part car il y a pire que les accusations, ce sont les insinuations et je sais que, dur ou pas, un livre de vous les fera taire.” » (Cahiers, p. 7).

    Et les Cahiers, s’appuyant sur cette séduisante forfanterie, d’affirmer : « Aujourd’hui, Assouline reste l’une des autorités les plus fiables et les plus objectives sur les rapports ambigus entre Hergé et l’extrême droite. » (p. 7).

     
    Assouline, un chercheur indépendant ? Fumisterie !

    Cahiers BD Assouline.jpegSauf que le récit édifiant d’Assouline relève de l’enfumage : cette légende de la liberté totale d’investigation et d’expression a constitué le plus sûr paravent du mythe à garantir : Hergé n’aurait en fait rien à voir avec l’Ordre nouveau se proposant à l’Europe. Au mieux (ou au pire, c’est selon), il ne serait qu’une victime : victime de son temps, victime des circonstances, victime de ses fréquentations. « Hergé n’a aucun sens politique. […] Hergé, heureusement pour lui, n’est pas un intellectuel, il n’a rien écrit » ! (Cahiers, p. 11).

    Voilà qui est proprement insultant pour l’information du lecteur, mais surtout pour Hergé lui-même ! Hergé n’aurait aucun sens politique ? Il n’a rien écrit ? Mais cet idéaliste de la révolution des âmes, cet artiste « d’imprégnation rexiste » (Hergé, p. 105) a superlativement illustré ses idées, les rendant accessibles à tous, par ses dessins et ses scénarios : nous l’avons établi en abondance, notamment dans notre série « Degrelle-Hergé, même combat ! » (ce blog aux 21, 29 septembre ; 15, 20, 27 octobre ; 20, 27 novembre et 1er décembre 2020).

    Et pour démonter l’imposture du prétendu biographe s’enfonçant dans le mensonge, nous ne reprendrons que ses affirmations méprisables sur Léon Degrelle : « Je ne crois pas [que Léon Degrelle] ait eu beaucoup d’importance. Dès le début, Hergé prend ses distances avec ce confrère journaliste prétentieux et mythomane. À l’époque, ce qui gêne Hergé, c’est l’homme, pas le facho –qu’il n’est pas encore, d’ailleurs. Sur le plan artistique, il ne lui apporte rien non plus : des reporters courant le monde en culottes de golf, ce n’est pas ce qui manque… Je crois bien davantage à des modèles comme Robert Sexé ou Albert Londres, bien sûr ! » (Cahiers, p. 9).

    Passons sur les termes « prétentieux et mythomane », épithètes « balaciens » dont il semble désormais indispensable de marteler le portrait de Léon Degrelle (ils ne manquaient déjà pas dans sa biographie de Hergé, voir plus loin ; à propos de l’indigne prof de l’université de Liège Francis Balace, voir ce blog aux 30 juin 2016, 6 juillet et 8 novembre 2019).

    Cristeros.jpegSur l’importance insigne de Léon Degrelle dans la vie de Hergé, outre les articles de ce blog que nous venons de renseigner, nous ne pouvons que renvoyer à l’introduction Aux origines de Tintin de l’indispensable reprise de tous les textes de Léon Degrelle concernant les Cristeros (éditions de l’Homme libre; à compléter par le téléchargement du premier chapitre Cristeros Chapitre I.pdf, ce blog au 7 février 2019).

    Mais nous nous attaquerons quand même à ce postulat qu’Assouline avance tranquillement, comme s’il s’agissait d’une simple évidence : Léon Degrelle n’a pas eu beaucoup d’importance pour Hergé, surtout pas en tant qu'homme, même pas les culottes de golf : ce n’est qu’un mythomane !


    Hergé n’en avait rien à f… de Léon Degrelle ? Fumisterie !

    Nous avons analysé en détail la symbolique des culottes de golf ainsi que la signification révélatrice de leur abandon dans le dernier album complet, datant de 1976, Tintin et les Picaros dans Cristeros, Aux origines de Tintin (pp. 76-82) : nous y renvoyons nos lecteurs.

    Remarquons néanmoins –à propos de l’apparence toute singulière de Tintin– que si Léon Degrelle put émerveiller Hergé avec ses culottes de golf, ni Robert Sexé, ni Albert Londres (préférés par Assouline comme modèles de Tintin) n’en portèrent jamais en « courant le monde » !

     

    LD Golf Constantina1-horz.jpg

    Au cours de son exil, Léon Degrelle retrouva le goût des culottes de golf qui inspirèrent Hergé pour son Tintin (ce blog au 29 septembre 2020) : ici dans sa propriété de la Carlina, dans les années soixante.

    Mais nous ne pouvons laisser passer sans réagir la réaffirmation de ce mensonge selon lequel Léon Degrelle n’aurait guère eu d’importance pour Hergé. Si aujourd’hui, Assouline lance son assertion comme s’il s’agissait d’une vérité biblique partagée universellement, dans sa biographie d’il y a plus de vingt ans, il se prévalait d’arguments chronologiques qu’il croyait irréfutables mais que Cristeros, Aux origines de Tintin démonta en un tournemain, établissant le mensonge grossier.

    En 1996, en effet, Assouline canardait déjà ses verdicts pseudo-psychiatriques insultants et proférait : « Degrelle est fort en gueule, hâbleur et culotté. Il le restera jusqu’à sa mort à 87 ans. Mais avec l’âge, sa mythomanie et sa mégalomanie iront crescendo. Au soir de sa vie, il s’inventera un rôle de plus dans l’Histoire en assurant qu’à son retour d’un reportage en Amérique, il avait inspiré sinon imaginé le personnage de Tintin. Double mensonge, d‘abord sur les origines, puis chronologique. Tintin est né le 10 janvier 1929, le voyage de Degrelle outre-Atlantique date de décembre 1929-janvier 1930 et le premier article de son enquête sur les catholiques persécutés au Mexique est paru le 1er février 1930 dans le Vingtième Siècle… Ainsi l’abbé Wallez a-t-il expédié Degrelle au Mexique après avoir décidé d’envoyer Tintin au Congo et non le contraire. » (Hergé, pp. 78-79).

    A nouveau, comme dans l’expression enfantine « c’est celui qui dit qui l’est », le menteur n’était pas l’accusé, mais l’accusateur.

    Et même double et triple menteur, car, dans son Tintin mon copain, Léon Degrelle n’a jamais affirmé avoir inspiré le personnage de Tintin « à son retour d’un reportage en Amérique » puisque, comme nous l’allons voir, c’est bien avant son départ en Amérique, lors du sac de l’expo bolchevique de Bruxelles de janvier 1928, que Léon Degrelle s’imposa comme modèle de Tintin. En l’occurrence, l’épopée mexicaine de Léon Degrelle et ses envois de journaux américains à Hergé lui ont carrément permis d’affirmer : « La B.D. européenne naît à Mexico » (p. 13).


    Il n’a jamais prétendu non plus avoir « imaginé le personnage de Tintin ». Il précise au contraire le rôle de chacun des ses « pères » : « C’est bien un prêtre catholique qui a extrait du néant ce petit bonhomme futé. Ce prêtre s’appelait Norbert Wallez. Tintin a eu d’ailleurs plusieurs pères. C’est le fruit dudit abbé, bien sûr ; ce l’est, en second lieu, du grand artiste Hergé lui-même, brandissant ses crayons. Et, indirectement, c’est de moi. » (p. 5). Léon Degrelle est donc bien clair : il n’a ni « inspiré [ni] imaginé le personnage de Tintin ». Ce rôle extrayant du néant le futur héros des jeunes de 7 à 77 ans revient à l’abbé Wallez. Comme revient au « grand artiste Hergé » le rôle de lui avoir donné forme et vie par « ses crayons ». Le rôle que se reconnaît Léon Degrelle, pour indirect qu’il soit, n’en est pourtant pas moins essentiel puisqu’il ressortit aux valeurs morales et spirituelles remarquées et partagées par Hergé qui les insuffla à Tintin.

    Tintin copain p. 227.jpeg

    Les trois « pères » de Tintin réunis par Alidor (alias Paul Jamin, au volant de la limousine décapotée), dans un dessin de 1992 signé Jam, décrypté dans Tintin mon copain (p. 227).

    Cette histoire commune a évidemment créé des liens étroits entre les deux hommes, même s’ils purent connaître des hauts et des bas (sur l’affaire ressassée jusqu’à plus soif de l’ « affiche volée à Hergé », voir ce blog au 20 octobre 2020). Assouline est d’ailleurs bien contraint d’en convenir, même si c’est du bout des lèvres, faisant semblant que c’est toujours à son corps défendant que Hergé a fréquenté Léon Degrelle, partagé ses idées, suivi son parcours.

    Ainsi, après sa démonstration ratée sur la non-relation Degrelle-Tintin, élucubre-t-il : « si Léon Degrelle n’a tenu aucun rôle dans l’imaginaire d’Hergé, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’ait exercé aucune influence sur Georges Remi » (Hergé, p. 79). La quadrature du cercle, donc ! Léon Degrelle  n’a tenu aucun rôle dans l’imaginaire de Hergé, tout en exerçant quand même une influence sur lui. Pourquoi Assouline ne nous explique-t-il pas que Hergé aurait été une espèce de Docteur Jekill tout à fait étranger au Mister Hyde-Georges Remi ?

    Assouline doit donc multiplier les contre-vérités et les paradoxes : « Pour n’avoir pas su dire non à Léon Degrelle, [Hergé] va sans le savoir ajouter une pièce supplémentaire au procès à charge qui sera en permanence instruit contre lui longtemps après. » (p. 78). « A défaut d’être en connivence avec [Léon Degrelle], [Hergé] ne lui est pas hostile. » (p. 80). « Georges Remi […] s’est toujours voulu une éponge […]. Aussi n’est-il pas étonnant qu’il collabore plus avant avec Léon Degrelle, fût-ce discrètement. » (p. 81). « Cela étant, par sa formation, par ses amis, par ses idées, par le milieu dans lequel il baigne depuis dix ans, il est d’imprégnation rexiste. Malgré ses sentiments mêlés pour la personne de Léon Degrelle. » (p. 105)…

    Rappelons tout de même les propos explicites de Hergé sur Léon Degrelle : ils vont tous dans le même sens et sont tous positifs. Assouline lui-même en convient involontairement lorsqu’il prétend n’illustrer que l’intérêt du dessinateur pour « l’histoire contemporaine ». Il cite alors un tout bref extrait d’une lettre privée à Robert Crausaz, l’éditeur suisse de La Cohue de 1940 de Léon Degrelle (premier « livre de souvenirs » de Léon Degrelle publié après-guerre et non « nouveau » !) : « [Hergé] est plus sincère dans d’autres de ses élans. Dans son intérêt pour l’histoire contemporaine, par exemple, lorsque dès l’annonce de la parution du nouveau livre de souvenirs de Léon Degrelle La Cohue de 40, il se dépêche de le commander à son éditeur lausannois. Ou quand, en privé, il juge La Campagne de Russie du même Degrelle très émouvant et très bien écrit. » (Hergé, p. 367).

    Mais il n’y a pas que dans sa correspondance privée que Hergé est « sincère » ! Le dessinateur n’a pas craint non plus de s’exprimer publiquement sur Léon Degrelle en ne lui ménageant pas son admiration, même au sujet de son engagement au Front de l’Est et de l’acharnement du gouvernement belge à son encontre. Ainsi, dans une interview à la presse flamande, n’hésite-t-il pas à saluer le dernier Commandeur de la Légion Wallonie : « Degrelle était d’ailleurs bien un homme respectable : il a été lui-même au front de l’Est ; il n’y pas seulement envoyé quelques pauvres diables. Et militairement parlant, il s’est comporté là-bas comme un héros. » (Humo, 11 janvier 1973). Voilà un « intérêt pour l’histoire contemporaine » parfaitement et singulièrement circonscrit !

    De même –et cette déclaration, à elle seule, anéantit le raisonnement pseudo-chronologique d’Assouline pour disqualifier le lien Tintin-Léon Degrelle– concernant son art de la bande dessinée, reconnut-il sa dette vis-à-vis de Léon Degrelle, même s’il confond (exprès ?) les dates : « J’ai découvert la bande dessinée grâce à... Léon Degrelle ! Celui-ci, en effet, était parti comme journaliste au Mexique et il envoyait au Vingtième Siècle, non seulement des chroniques personnelles, mais aussi des journaux locaux (pour situer l’atmosphère) dans lesquels paraissaient des bandes dessinées américaines. J’ai découvert ainsi mes premiers comics. » (La Libre Belgique, 30 décembre 1975).

    Mes Aventures au Mexique.jpg
    Serons-nous étonnés que ces déclarations de Hergé soient absentes du bouquin à charge d’Assouline ? Mais alors ? Était-ce pour ne pas avoir à dire que Hergé se trompait ou même mentait ? Et qu’elles rendaient impossible la thèse selon laquelle Léon Degrelle n’aurait compté que pour des prunes pour Hergé ?

    Cela est d’autant plus grotesque que dans son chapitre La providence des inciviques (reprenant l’expression de Robert Poulet : ce blog au 1er décembre 2020), Assouline souligne la fidélité absolue de Hergé à ses amis : « Hergé reste aussi fidèle à ses amis qu’envers Léopold III. Nul ne pourra le prendre en défaut sur ce plan-là. Il les défend bec et ongles, surtout s’ils sont dans l’adversité. Quelle que soit la réalité des faits, il arrive toujours à trouver des circonstances atténuantes aux vaincus de la Libération. » (p. 205). Sauf paradoxalement à Léon Degrelle, absent de la liste qu’il dresse : Paul Herten, Victor Meulenijzer, Jean Vermeire, Félicien Marceau, Julien De Proft, Norbert Wallez, Paul Jamin, Robert Poulet…

    Et comment l’expliquer alors que sa sollicitude ne concernait pas seulement ses vrais amis, mais s’étendait aux amis politiques au sens le plus large du mot puisqu’il s’agissait même d’ « inciviques » parfaitement inconnus : « Hergé providence des inciviques… La formule est encore plus juste qu’on ne le croit. Car non seulement il aide ses amis, les amis de ses amis et d’autres Belges en difficulté, mais aussi des épurés français qu’il ne connaît même pas. Sa réputation de samaritain des collaborateurs en détresse a passé la frontière. Son adresse est de celles qui circulent. Avec eux, comme avec les autres, il ne se fait pas prier. » (p. 207).

    Alors, Hergé n’aurait-il vraiment eu « aucun sens politique » ???

    Soupault Petit Parisien 19.12.41.jpg

    Ralph Soupault était le caricaturiste de Je suis Partout, dont les dessins antisémites étaient pour le moins aussi incisifs que ceux de son ami Jam dans la Brüsseler Zeitung. Mais l’étalon répressif français était sans doute moins brutal que le belge : Soupault écopa de quinze ans de travaux forcés alors que Jam fut condamné à mort. Les peines furent néanmoins commuées, mais toujours à l’avantage du condamné français : Soupault sortit de prison en 1950, Jam en 1952. Hergé ne l’avait jamais vu, mais connaître les raisons de sa condamnation et le savoir ami de Paul Jamin suffirent à Hergé pour aider Ralph Soupault. Ici, un de ses dessins publié dans Le Petit Parisien, le 19 décembre 1941.

    N’est-il donc pas inconcevable de vouloir exclure Léon Degrelle du cercle hergéen ? D’autant plus que les deux hommes avaient noué de véritables liens d’amitié qui ne se démentirent jamais : comme nous avons eu l’occasion de l’établir irréfutablement, les contacts entre Léon Degrelle et Hergé ne se sont jamais rompus, qu’ils se soient poursuivis par l’intermédiaire de Germaine Kieckens, sa première épouse, ou via Paul Jamin (alias « Jam » et « Alidor »), le fidèle ami commun (ce blog au 20 octobre 2020).

    En réalité – et nous l’établirons plus loin encore– Assouline savait fort bien que Léon Degrelle est tellement consubstantiel à Tintin que Hergé ne pouvait pas imaginer, cinquante ans plus tard, de les dissocier, même au prix d’un anachronisme (voir aussi ce blog au 15 octobre 2020)…

     

    (À suivre)

  • « Hitler est un fou », mais c’est celui qui dit qui est !

    Le « journalisme » rigolo du SoirMag

     

    Monsieur Bellum.jpgCertains connaissent peut-être l’excellente bande dessinée de Hergé parue dans l’hebdomadaire neutraliste belge L’Ouest en 1939. Voulant illustrer la détermination de Hergé, –sentant « que la catastrophe approchait » d’une nouvelle guerre endeuillant l’Europe–, à « combattre en Belgique la folie belliciste des littératuriers de presse », Léon Degrelle a repris, dans son Tintin mon copain, cette brève mais éloquente séquence de Monsieur Bellum, ce belliciste à la conscience formatée par les médias officiels, tel Le Soir (« Bellum » veut dire « Guerre » en latin, et non, comme le suggère mon neveu branché, « Bel homme » en volapuk SMS !). Description précise de la BD :

    « Dans les deux premiers “strips”, Monsieur Bellum écoute distraitement la radio. Il est en bras de chemise, mais porte néanmoins un faux-col, raide comme la Tour Eiffel. Il lit “Le Soir”, ainsi que le veut la bienséance. Soudain une voix surgit dans l’appareil de radio : “Et dans le conflit actuel, la Belgique se doit de garder la plus stricte neutralité”. Le sang de Monsieur Bellum passe aussitôt du violet à l’écarlate. Il se dresse, virulent. Des flèches, des étoiles, des vapeurs jaillissent de ses bras, de son nez rond, de son crâne luisant sur lequel se hérisse une mèche de cheveux, droite comme un vieux blaireau de coiffeur :

    “–Neutralité ! Neutralité ! mais la neutralité des consciences, ça jamais !”

    Au cinquième dessin, M. Bellum arrive dans une rue lépreuse, aux briques fatiguées, près d’une inscription lyriquement évocatrice, “Jules est avec Mariette”. Il s’arrête, tend l’oreille, les mains en alerte. Personne à l’horizon. Alors, en hâte, M. Bellum inscrit, vengeur, sur le mur rongé : “Hitler est un fou !”... Ni vu, ni connu. Il a pu faire du patriotisme sans être pris ! Faisant marche arrière, frottant la craie de ses paumes afin d’effacer toute trace accusatrice de son exploit, il se remet en route, le cigare vainqueur. Il a sauvé la conscience de la Belgique !

    Tous les dessins donnés par Hergé à “L’Ouest” sont de la même veine, sarcastiques, incisifs, démasquant à travers la pleutrerie trépidante de M. Bellum la fausse neutralité des trois quarts des Belges d’alors. » (p. 61)

    Aujourd’hui, à l’occasion d’une édition de Mein Kampf « officialisée », le SoirMag reprend le rôle de M. Bellum lisant Le Soir, de manière presque aussi rigolote.

    Dans son édition du 12 au 18 juin (cette fois, c’est notre voisine qui nous a donné son exemplaire périmé), l’hebdomadaire TV bruxellois présentait la réédition du « livre du pire, retitré Historiciser le mal » : « Une couverture blanche, neutre. Pas de photo du Führer. Un autre titre, savant, qui annonce un traitement critique. Pas de large diffusion en librairie ; disponible uniquement sur commande au prix de 100 euros. »…

    Guère de quoi appâter le chaland amateur de sensations fortes, donc !... Aussi, l’illustration de l’article ne reprendra pas la « neutralité » décourageante de la nouvelle publication en français, mais bien la bonne vieille édition allemande du parti national-socialiste avec photo officielle et grande signature de l’auteur : ça au moins, ça attire l’attention et ça fait lire !...

    Soir Mag Mein Kampf.jpeg

    Mais soyons sérieux : on nous affirme qu’il était nécessaire de rééditer « le brûlot de Hitler » car il était « tombé dans le domaine public en 2016 ». On ne voit pas trop ce que ça changeait, sinon de fournir une occasion de l’assortir d’un « appareil critique puissant, sans concession », de quelque « 2800 notes en face à face des passages décortiqués » pour analyser « ce concentré d’antisémitisme, de racisme et de bellicisme ».

    Pour ce faire, on n’a pas lésiné : on « a mobilisé une cinquantaine de chercheurs », travaillant avec l’aide de « l’Institut d’histoire contemporaine de Munich (IFZ) ». On nous l’affirme : il fallait absolument éviter que ces « 896 pages » pesant « 3,6 kilos » puissent encore « galvaniser les nostalgiques et les néo-nazis », car c’est un livre dangereux qui s’était « répandu comme un poison en Allemagne »…

    En fait, le SoirMag concède que ce n’est même pas vrai : « En réalité, peu de monde l’a lu. » Ah bon ? Et pourquoi ça ? Tout simplement parce qu’il « démontre la faiblesse de son auteur » et sa « pensée pauvre et confuse » : « dans sa forme inaboutie, incohérente et haineuse, avec les obsessions de Hitler, son style [est] consternant, sa prose minable ». Bref, « l’affaire d’un homme hystérique devenu monstrueux »…

    Bien différent du nazisme qui est, lui, « plus réfléchi, plus abominable ». D’ailleurs, en haut lieu, on préférait le nazisme, cet « écosystème en vigueur en Allemagne dans les années 30 » [?] et on mettait donc la théorie de cet « écosystème » en pratique, plutôt que de se préoccuper du « contenu idéologique » de Mein Kampf

    Voilà qui nous rassure et ne nous poussera certes pas à débourser une centaine d’euros pour pareil pensum !... Mais du coup, on se demande pourquoi il fallait tant d’efforts pour réaliser un tel ouvrage –qui, nous dit la directrice des éditions Fayard, n’est finalement pas vraiment une réédition, « mais un livre contre “Mein Kampf” »–, puisque quasiment personne (même en haut lieu) ne le lisait et que pratiquement tout le monde se foutait bien de son contenu ?

    Eh bien, il paraît que des « éditions pirates, brutes et sans recul, circulent toujours en Turquie, dans les pays arabes et en Inde » ! Ça alors ! Et ces gens-là parviennent malgré tout à lire ce bouquin ? Potentiel danger supplémentaire : sont-ce les mêmes qui viennent ensuite migrer chez nous, risquant de propager le poison ?

    Sans doute qu’ils parviennent à le lire et d’autres aussi d'ailleurs et dans toutes les langues, car même si sa « lecture semble ardue et fastidieuse […], les tares qu’il traîne dans ses pages prolifèrent sur le Net… et dans les têtes » !!!...

    Bon ! À force de voir le SoirMag écrire tout et son contraire, on n’y comprend plus rien ! Hitler est un fou ? ou c’est celui qui dit qui est ?... Décidément, le SoirMag est un fou !

    Hitler Linz.jpeg« Hitler, c’était le sens interdit ! Le plan de démontage de l’Allemagne de Hitler était, dès 1935, visible à l’œil nu. […] Les barrières fanatiquement dressées entre Européens nous coupaient de toute possibilité de rechercher des arrangements qui eussent pu sauver la vie aux cinquante millions de personnes qui périrent entre 1939 et 1945. » (Léon Degrelle, Tintin mon copain, pp. 49-52).

     

    Photo extraite de Hitler dans sa patrie (Heinrich Hoffmann, 1938) : Adolf Hitler entre dans son pays natal, suite à l’Anschluss du 13 mars 1938 (les Autrichiens l’avaliseront à 99,75 % par le plébiscite du 10 avril 1938).

     

    Post-scriptum : si ce bouquin illisible est tombé dans le domaine public en 2016, les Nouvelles Editions Latines en assurent la diffusion en français, sans discontinuer, depuis… 1934 ! Mein Kampf – Mon Combat est donc toujours disponible au prix de 36 euros et ne pèse que 1,4 kg pour 686 pages ! Et les NEL n’ont pas attendu l’armée de chercheurs français de l’Histoire correcte pour prendre du recul et assortir le livre d’une mise en garde initiale de huit pages : Nouvelles Editions Latines.

     

  • Léon Degrelle : un talent littéraire des plus précoces

     

    15 juin 1906 – 15 juin 2021

     

    Jeunesse 22 12 28 Martinet titre.jpgÀ l’occasion du cent-quinzième anniversaire de la naissance de Léon Degrelle, nous vous avons retrouvé un des tout premiers textes publiés par le jeune et talentueux conteur.

    C’était dans le dernier numéro de décembre 1922 de la « revue hebdomadaire illustrée » La Jeunesse. Léon Degrelle avait tout juste seize ans et il publiait, sous le pseudonyme de Noël (Léon à l’envers) L’épopée d’un martinet, un récit autobiographique quelque peu romancé, dans la rubrique « Les beaux contes de tous les pays » (pp. 901-903).

    Dès son plus jeune âge, Léon Degrelle témoigna d’exceptionnels talents d’écriture, reconnus d’emblée par son professeur du cycle inférieur des études secondaires à l’Institut Saint-Pierre, Paul Rosman : « Vous serez un grand écrivain ! ». Ce témoignage est d’autant plus intéressant qu’il émane d’un instituteur gaumais n’ayant exercé qu’à titre intérimaire à Bouillon au cours de l’année 1919 (la Gaume, appelée aussi Lorraine belge, est la région wallonne la plus au sud de Belgique ; Florenville, principale cité avec Virton, est à trente kilomètres de Bouillon) : étranger à la petite communauté citadine, il ne pouvait être influencé par aucun a priori local, familial ou social.

    Quatre ans plus tard, son professeur de poésie et de rhétorique (ainsi qu’on appelle les deux dernières années des Humanités classiques en Belgique), le père jésuite Paul Colmant, du Collège Notre-Dame de Namur, confirmera l’intuition de l’instituteur de Bouillon : « Depuis que j’enseigne, c’est la plus belle plume que j’ai rencontrée. »

    Son premier biographe, Usmard Legros, l’avait d’ailleurs aussi déduit de l’examen de ses premiers résultats d’école primaire : Léon Degrelle « fait son école primaire au collège diocésain de Bouillon que dirigent des prêtres séculiers. Bon élève, moyennement appliqué mais fort intuitif et compréhensif, il fait d’excellentes études et ses premières compositions révèlent déjà le futur styliste puisqu’elles lui valent, d’après les petits bulletins orgueilleusement conservés par ses sœurs, des récompenses flatteuses. » (Un homme… un chef. Léon Degrelle, 1938, p. 33).

    Institut Saint-Pierre 6.jpg

    C’est à l’Institut Saint-Pierre, situé en face de sa maison sur l’autre rive de la Semois, sous le château de Godefroid de Bouillon (et non à l’Athénée royal qui était pourtant juste à côté du domicile familial), qu’Edouard Degrelle choisit d’envoyer ses fils Léon et Edouard effectuer le cycle inférieur de leurs Humanités.

    L’Institut disparut dans les bombardements français aux premiers jours de la Seconde Guerre mondiale.

    Entrée en Belgique à l’aube du 10 mai, l’armée française occupa Bouillon qu’elle évacua vingt-quatre heures plus tard après avoir fait sauter tous les ponts enjambant la Semois. Pour retarder vainement l’avance allemande autant que pour venger cette fuite peu glorieuse, l’artillerie française bombarda aveuglément la ville au soir du 11 mai : les quartiers du quai du Rempart (où se trouvait l’Institut Saint-Pierre, sur la rive gauche de la Semois) et du quai de la Maladrerie, plus en aval, sur la rive droite, furent anéantis. La rive droite, en amont, où se trouvaient la propriété des Degrelle, l’Athénée et l’ancien couvent des Sépulcrines (transformé en habitations sociales pour les ouvriers de l’importante ferronnerie voisine), demeurera miraculeusement épargnée.

    Ci-dessous, une photo du quai de la Maladrerie ravagé par les bombardements français : elle fut publiée dans l’annuaire Die Wehrmacht Das Buch des Krieges 1939-40, avec la légende : « Si la ville de Bouillon a souffert des tirs d’artillerie, ce fut de la part des Français. C’est en vain que l’artillerie française a tenté d’arrêter les Allemands. Elle a échoué : le pont détruit a été remplacé dans les plus brefs délais par nos pionniers. » (p. 230). Ce pont provisoire, situé quelque peu en aval du Pont de Liège (visible du jardin des Degrelle) a été construit en une demi-journée par les troupes du génie allemand. N’attendant pas sa réalisation, les Panzers et les véhicules blindés de transport de troupes de la 1ère Division du 19e Corps d’Armée traversèrent néanmoins facilement la Semois, peu profonde et multipliant les gués à cette époque de l’année, pour foncer sur Sedan.

    Bouillon Die Werhmacht.jpeg

    Et Léon Degrelle se le rappelle dans ses premières confidences à son amie Louise Narvaez, à qui il confie ses souvenirs en 1945 dans sa prison-hôpital de San Sébastian :

    « Dès l’âge de treize ans, il écrivit. Il s’était mis à créer des récits et des contes pour les revues bruxelloises, Le Boy-Scout belge et La Jeunesse. […] Quand on regarde des gamins de treize ans, on doit faire un effort pour imaginer qu’un garçonnet de cet âge-là, en courtes culottes, les cheveux en bataille, perché au haut d’un arbre au-dessus de l’eau de la Semois, pouvait déjà être dévoré à ce point par un incendie intérieur. » (Louise, duchesse de Valence, Degrelle m’a dit, p. 35).

    Le Boy-scout avril 1924-horz.jpg

    En réalité, ce n’est pas dans Le Boy-Scout belge que le jeune Léon vit ses premiers textes publiés, mais dans le mensuel Le Boy-Scout où il fit paraître dès novembre 1920 (il a quatorze ans), par exemple, ses impressions sur le congrès de la jeunesse catholique luxembourgeoise ou le compte rendu de camps où sa troupe « Charles Théodore » accueille dans les forêts de Bouillon d’autres troupes scoutes, notamment de Bruxelles. Le Boy-Scout belge, quant à lui, est né quelques années plus tard, en 1927, de la fusion, associant leurs noms, des deux organes du scoutisme catholique belge Le Boy-Scout (né en 1919) et Le Scout belge (né en 1925).

    La troupe scoute de Léon Degrelle, « Charles Théodore » (dont les quatre-vingt membres sont divisés en trois pelotons, Léon Degrelle appartenant au premier), tirait son nom de l’hommage qu’elle voulait rendre au second fils du roi Albert –le « Roi-Chevalier » de la Grande Guerre–, frère du futur Léopold III, Charles, comte de Flandre. Ce dernier, après la capitulation du Reich en 1945 et l’empêchement du retour de son frère en Belgique, fut nommé régent du Royaume. On l’avait surnommé, par opposition à Léopold III, supposé collaborateur, le « Prince du maquis » ! S’il en est besoin, nous rappellerons que, contrairement à tous les autres pays européens, la Belgique, ni sous la régence de Charles, ni par la suite, n’adopta jamais la moindre loi d’amnistie ou de « réconciliation nationale » (voir ce blog au 27 novembre 2020).

    Tombeau du Géant L'Orient années 20 couleur.jpgPhoto colorisée du Tombeau du Géant situé sur la commune de Botassart, hameau de la ville de Bouillon, dans le Luxembourg belge. La graphie « L’Orient » figurant sur les cartes postales éditées par la maison Nels, de Bruxelles, est née d’une mauvaise compréhension du lieu-dit Lorihan, qui est le nom originel du massif constituant le Tombeau du Géant. Les rives de la Semois fourmillent de localités ou de lieux-dits présentant la désinence –han (probablement le germanique –heim, qui signale un domaine puissant) constituant autant de places fortes, de villages ou de positions stratégiques aisément défendables, établis par les Francs à la fin de l’Empire (IVe siècle). On peut ainsi relever dans la seule région de Bouillon : Poupehan, Frahan, Dohan, Libéhan, Briahan, Mohan, Merleu-Han,…

    Notons surtout que la troupe « Charles Théodore » organisa, début août 1922, le « Camp de la Joie » sur le site même du Tombeau du Géant (à Botassart, petit hameau de Bouillon, abritant aujourd’hui une partie des cendres de Léon Degrelle, voir ce blog au 31 mars 2019) auquel participa la troupe scoute de l’Institut Saint-Boniface d’Ixelles, à laquelle appartenait Georges Remi, alias Hergé. Peut-être est-ce là que se produisit la toute première rencontre entre le créateur de Tintin et son modèle (voir Léon Degrelle, Cristeros, Aux origines de Tintin, Introduction, p. 36 ; voir ce blog au 7 février 2019). Par la suite, les deux jeunes gens collaboreront tous deux au Boy Scout, comme aux revues de l’Association Catholique de la Jeunesse Belge, Le Blé qui lève et L’Effort, de même qu’à partir de 1928, au quotidien catholique Le XXe Siècle.

    St Boniface Fresque Hergé camps.jpg

    L’Institut Saint-Boniface d’Ixelles s’installe dans ses nouveaux et vastes locaux, en avril 1920. Ils comprennent une vaste chapelle néo-gothique à laquelle est accolée une maisonnette à deux étages qui deviendra le local de la troupe scoute de l’Institut. La décoration en sera bien sûr confiée à Hergé : les fresques et frises qu’il a imaginées (scouts et indiens rampant, chevaliers à cheval joutant à la lance, jeu du tir à la corde, emblèmes scouts à la fleur de lys,…) ont miraculeusement traversé les ans quoique fort endommagées. Cette œuvre –comme le local qui l’abrite et n'a plus servi que de débarras a sombré dans l’oubli pendant presque un siècle avant de réapparaître en 2007, année du centenaire du scoutisme : à peine le temps de permettre d’y consacrer une monographie (Philippe Goddin & Thierry Scaillet, Hergé et le décor des locaux scouts de l’Institut Saint-Boniface, Cahiers d’histoire belge du scoutisme, 2007, 2e édition 2013) : depuis lors, aucune mesure de conservation de cet exceptionnel témoignage de l’art de Hergé au service du scoutisme naissant en Belgique n’a jamais été prise… Jusqu’à ce que, tout récemment (mai 2021), le secrétaire d’état socialiste flamand en charge du patrimoine de la région bruxelloise annonce le lancement d’une procédure de classement, tout en précisant qu’il ne s’agissait pour le moment que « d’analyser le pour et le contre », vu –supposons-nous !– les amitiés douteuses de Hergé, en particulier celle le liant à Léon Degrelle (voir ce blog, notamment, le 24 octobre 2016 et les huit chapitres de Degrelle-Hergé, même combat, du 21 septembre au 1er décembre 2020).

    Ces fresques nous intéressent en ce qu’elles authentifient le passage de la troupe scoute de Hergé à Bouillon et sa participation au Camp de la Joie organisé par la troupe scoute de Léon Degrelle à Botassart, sur le site du Tombeau du Géant, en août 1922 : une vaste carte de Belgique indique par des tentes d’indiens rouges les différents camps de la troupe ; sur le côté droit, une liste en récapitule les endroits par ordre chronologique entre 1919 et 1922 : le camp de Botassart est l’avant-dernier, avant celui des Dolomites. Est-ce alors et au Tombeau du Géant que Hergé et Léon Degrelle firent connaissance ?...

     

    L’épopée d’un martinet.

     

    Jamais je ne l’oublierai, ce fameux martinet...

     

    Son souvenir est trop bien gravé dans ma mémoire et aussi, je crois, dans... !

     

    ᛃᛚᛞᛃ

     

    La guerre touchait à sa fin… Les Boches, dans une déroute sans pareille, regagnaient leurs centres d’outre-Rhin. Aussi était-il temps de s’y prendre pour pouvoir garder quelques souvenirs. C’est ce que, dans notre philosophie, nous nous communiquions, mon frère Edouard et moi…

     

    Les occasions pleuvaient… ; notre chambre se vit bientôt transformée en un véritable arsenal où nous nous chargions pour nous exercer à la prochaine guerre, de tout démantibuler !

     

    Un midi, nous allions nous mettre à table quand voilà tout à coup Edouard qui arrive, fier comme Artaban, brandissant un martinet monumental… croyant, le malheureux gosse, à un engin militaire !

    LD Larousse Martinet 2.jpegLe Nouveau Petit Larousse illustré (1924) de Léon Degrelle était toujours à portée de main et le mémorialiste ne s’est jamais privé de l’annoter et de l’illustrer (voir ce blog au 13 mai 2018). Ici, alors qu’il fut bien marqué par l’épisode du martinet de son frère Edouard, c’est plutôt l’oiseau qui retient son attention dans son dictionnaire !

     

    Il était à peine entré que ma grande sœur Marie, vrai gendarme en jupons à qui incombait la police de la garnison bondit sur le martinet :

    « Ah ! je vous tiens maintenant ! Qu’il y en ait encore un qui bouge ! »

     

    Le coup avait été si brusque, si rapide, que devant cette apparition vengeresse, nous croyant arrivés au jugement dernier, atterrés et anéantis par le malheur, nous ne pûmes que baisser la tête dans un désespoir navrant…

     

    Le dîner fut épouvantablement lugubre…

     

    Nous n’osions lever le nez, en proie à de noirs pressentiments !

     

    ᛃᛚᛞᛃ

     

    Les voies de fait allaient bientôt suivre !...

     

    Deux jours après… au cours d’un combat mémorable où les deux frères, avec l’énergique intention de se démantibuler mutuellement le tempérament, se roulaient sur le plancher rivalisant de force, d’adresse et de courage ! La musique adoucit les mœurs, dit-on… Ici, je crois bien que c’était le contraire car les notes éclatantes que nous lancions ne faisaient que nous exciter davantage !

     

    « Le lutte était ardente et noire »… Quand soudain, armée du martinet, Marie apparaît dans l’embrasure de la porte ! Pif ! Paf ! Pouf ! et avant d’avoir pu nous esquiver, nous recevions tous deux une correction de main de maître !

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    « La lutte était ardente et noire » : célèbre vers du poème L’expiation de Victor Hugo : le combat épique entre les deux frères atteint, pour Léon, les sommets hugoliens des Châtiments qui vont bientôt s’abattre sur lui !...

    Image du Panorama, dans la rotonde jouxtant la butte du Lion de Waterloo : cette peinture monumentale (110 mètres de long sur 12 mètres de haut), réalisée sous la direction du peintre français Louis Dumoulin (1860-1924), exalte la charge héroïque de la cavalerie du maréchal Ney contre les troupes anglaises. A noter que cet endroit censé commémorer la victoire des alliés anglo-néerlando-allemands sur Napoléon –le lion qui domine la butte est le Leo Belgicus symbolisant le Royaume uni des Pays-Bas (voir ce blog au 17 octobre 2018)– est devenu, pour tous les touristes, un mémorial napoléonien…

     

    Un commun malheur nous avait réconciliés !

     

    « Tu peux toujours te vanter, sais-tu toi, d’avoir apporté ce martinet, dis-je à Edouard en me frottant les côtes ! En tout cas, j’en ai assez. Il faut en finir. Tu y es ?

    – Oui.

    – Et bien, il nous faut prendre le martinet !

    – Je veux bien, reprit Edouard, qu’enflammait le désir de la vengeance. »

     

    Nous nous concertâmes. On s’emparerait du maudit “knout” et on le jetterait à la rivière, tout comme un chat crevé, pas plus d’honneur que cela !

     

    Nous eûmes bientôt repéré l’endroit où il était caché…

     

    Le lendemain, dimanche, Edouard –oh, le fripon !– se glisse à la cuisine, attrape mon martinet et s’en va le cacher sous le lit de maman…

     

    « Allez ! Il faut se dépêcher ! Va vite le chercher ! » Nous voilà bientôt au jardin…

     

    Edouard sort de son pantalon le fameux martinet !

    « C’est moi qui le jette, me dit-il.

    – Oh, j’aime autant, toutefois que je n’en attrape sur la caisse ! »

     

    Au bord de la rivière… Edouard qui commence à devenir blanc : « Bah ! j’aime mieux que tu le lances !...

    – Eh bien, donne, froussard !... » Et, héroïquement, j’envoie le martinet à la Semois.

     

    Les eaux étaient fortes. Bientôt, il coula et disparut… Tout était consommé… Déjà en nous montait le pressentiment d’un orage futur…

     

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    A la grand’messe, ma petite sœur fut, on ne peut plus méchante. Il n’en fallait pas plus pour s’attirer les foudres de notre pandore ! Rentrée à la maison, Marie court à la cuisine. « Pas de martinet ! »

    Eglise Bouillon.jpgL’église des Saints Pierre et Paul, de style néo-classique, est l’œuvre de l’architecte Joseph Dumont (1811-1859) qui est également à l’origine de l’église néo-gothique Saint-Boniface, d’Ixelles, à quelques rues de l’Institut Saint-Boniface où le jeune Georges Remi –le futur Hergé–, fut élève et membre de la troupe scoute. L’église de Bouillon fut inaugurée le 11 avril 1851. Léon Degrelle y fut baptisé le 20 juin 1906 par son oncle et parrain, l’abbé Joseph Boever (1874-1950), le frère de sa Maman (ce blog au 15 juin 2016).

    Sur cette rare carte postale, on aperçoit encore les statues de saints dressées aux angles des frontons : au nombre d’une dizaine, elles furent enlevées vers 1925, face au danger que représentait leur rapide dégradation.

     

    Au bruit de l’émeute, je me précipite dans l’escalier, juste à temps pour entendre Edouard piailler. « C’est pas moi, c’est pas moi, c’est “le” Léon ! »

     

    J’étais cuit… Toute la famille grimpait maintenant l’escalier… J’allais être massacré !

     

    Vite, je suis dans ma chambre… Allez ! je me verrouille et puis houp ! la table, l’armoire, le lit, le lavabo, tout derrière la porte… Il était temps, ma grande sœur bondit sur la porte… fermée !

     

    « Ouvre !

    – Non !

    – Ouvre ou j’enfonce la porte !

    – J’aime autant : alors, je saute par la fenêtre ! »

     

    Et boum… boum… Je résistais héroïquement quand voilà le verrou qui saute… Je pousse la table… Avec l’énergie du désespoir, je résiste… L’armoire tombe… Hélas… je faiblis… et dans un effort final, le pandore entr’ouvre la porte… J’étais perdu !

     

    Alors, j’escalade chaise, lit, table de nuit et je saute juste à côté de Marie pour attraper une « ratournée » oh laquelle ! Je m’échappe, je dégringole dans les escaliers ! Papa m’attrape et pif et paf… Aïe, aïe, aïe… Sapristi, ce que j’ai crié !!!

     

    Heureusement que j’étais dur… De guerre lasse, on abandonna ma dépouille pantelante (quand les autres regardaient) ! Ce qui ne m’empêcha pas, en allant me débarbouiller à la cuisine de chiper encore une belle pomme que je croquai avec la satisfaction du devoir héroïquement accompli !

     

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    Cette épopée eut tout de même un résultat heureux : jamais plus, on ne revit un martinet à la maison.

     

    Noël

     

     

    Une version moins romancée…

     

    LD Scout.jpgDès la création de la troupe de l’Institut Saint-Pierre en 1919, Léon Degrelle se voudra scout. Il a tout juste treize ans.

     

    L’histoire du martinet a suffisamment marqué l’imaginaire de Léon Degrelle pour qu’il la raconte à nouveau dans un ouvrage qui n’était pas destiné à la publication, car il s’agissait d’un long mémoire destiné à se présenter à ses cinq enfants dont il était séparé depuis 1945 : l’aînée, Chantal, avait juste onze ans et le benjamin, Léon-Marie, six. C’est dire qu’ils le connaissaient à peine et que leurs souvenirs devaient aller en s'estompant (voir ce blog au 15 décembre 2020 pour des exemples de correspondance adressée à Anne et Chantal en 1944 et confisquée par la « justice »). Au début des années soixante, Léon Degrelle veut donner à ses enfants, désormais de jeunes adultes, sa version de l’histoire de sa vie, de ses engagements, de son idéal. Retrouvées dans ses papiers après sa disparition, ces pages ont été publiées, sans nom d’éditeur, ni précisions de date ou de lieu, sous le titre Mon Combat, illustré par des aquarelles du Légionnaire René Henrotay.

     

    Mais venons-en à l’histoire du martinet. Dans son conte, le jeune Léon précise que cet objet mystérieux était issu de leur chasse commune aux souvenirs militaires de la Grande Guerre qui venait de s’achever. Il le confirme dans son récit autobiographique : « On maraude dans les bois, à la recherche de cartouches, de grenades, d’armes, d’explosifs perdus ou oubliés. Puis, quand l’école ouvrira, le grand plaisir sera de mettre quelques grains de poudre sur le couvercle du poêle. Ce n’est pas tout à fait un feu d’artifice, mais l’effet est irrésistible. » (p. 57)

     

    Ce qu’il ne raconte pas, c’est que c’est son petit frère Edouard qui est sans doute le plus débrouillard dans cette collectionnite : s’il a découvert le fameux martinet, il a aussi découvert, avec un autre compagnon de jeux, la veille de Noël 1918, un engin explosif abandonné par les Allemand aux effets bien plus terribles. D’après Jean-Marie Frérotte (Léon Degrelle, le dernier fasciste, 1987), il s’agirait d’un détonateur de grenade : « il en traîne partout » (p. 24) ! Mais Léon choisit de ne pas rappeler cette tragédie. Car l’engin explosa en mutilant la main droite de son jeune frère –petite chance dans son malheur– gaucher, qui perd son pouce et les premières phalanges de trois doigts. Emmené d’urgence à l’hôpital militaire de Sedan, il sera opéré par deux chirurgiens qui parviendront à lui éviter l’amputation de la main. Le 2 décembre 1920, le tribunal des dommages de guerre de Neufchâteau lui reconnaîtra une invalidité permanente de 34 %.

    Maman Degrelle+Edouard.jpgLe petit Edouard, neuf ans, peu après l’accident de la Noël 1918 : sa Maman protège sa main meurtrie.

     

    Un gamin de l’époque, François Twisselmann, a raconté ce souvenir dans ses mémoires publiés en 1992 (Ma petite jeunesse à Bouillon), tout en se trompant de main. Remarquons aussi la coutume locale d'accompagner le nom des personnes de l'article défini: le petit Edouard, comme nous venons de le voir, raccuse son frère en le désignant: « c’est “le” Léon ! » (voir aussi ce blog au 25 décembre 2016).

     

    « À 11 heures, à la sortie de l’Institut, deux gamins ont eu un accident en essayant de dégoupiller une grenade. La grenade était cachée dans la jonchaie au bord de la rivière, juste devant l’Institut. Monsieur Genglère [instituteur en chef de l’Institut Saint-Pierre] ne sait pas si c’est l’Edouard Degrelle, un des deux valets du brasseur de la rue du Collège, qui a trouvé la grenade, ou bien si c’est l’Alphonse Louis, le valet du menuisier qui travaille chez Genotte à côté de l’Institut. L’Alphonse demeure dans la deuxième maison en dessous de notre école, après celle de la Pauline Collignon-Florin. C’est l’Edouard Degrelle qui a voulu dégoupiller l’engin qui a éclaté en lui enlevant le pouce et la moitié de l’index gauches ; un éclat de la grenade, et cela c’est encore pire, s’est logé dans l’œil gauche de l’Alphonse Louis.

    Au bruit de l’explosion, l’Eugène Genotte et son ouvrier, le père de l’Alphonse, sont sortis sur le rempart pour voir ce qui s’y passait. Le père de l’Alphonse a couru près de son garçon qui criait et ne voyait plus clair. Le Jules Dachy, le brasseur de la rue du Moulin, et ses ouvriers sont accourus aussi. Et Monsieur Genglère est arrivé au même instant. Mais que faire ? L’Albert Genotte a couru prévenir le docteur Louis Corbiau. Encore bien bon que le docteur n’était pas parti dans les villages. Il est venu en auto tout de suite. Il a fait un pansement à l’Edouard Degrelle pour arrêter le sang. Il a regardé l’œil de l’Alphonse. Il a fait monter les deux gamins dans son auto pour les mener à l’hôpital militaire que l’armée française a installé à Sedan.

    Monsieur Chevy [Lucien Chevy, instituteur en chef de l’école communale des garçons] nous a fait promettre de ne pas toucher aux engins de guerre. Ce n’est pas la première fois qu’il nous le dit. Monsieur Genglère l’avait aussi fait promettre à ses gamins. Cela n’a servi à rien. À cette heure, on n’a plus qu’à se fier aux chirurgiens de Sedan qui ont dû soigner bien des blessés de guerre. […]

    À l’école, Monsieur Chevy nous dit qu’il avait passé la soirée avec le père, la mère et la sœur de l’Alphonse Louis. Le docteur Louis Corbiau l’avait ramené de Sedan avec l’Edouard Degrelle. Il allait être 11 heures. Le pouce et l’index de l’Edouard ont été recousus. Le docteur Corbiau avait dit aux parents de l’Alphonse qu’il perdrait une partie de la vue de l’œil gauche. L’œil droit n’a rien eu. Pour le moment, l’Alphonse doit rentrer à la maison. On lui a donné des lunettes avec un verre gauche tout brouillé. Dans une bonne dizaine de jours, il pourra rentrer à l’Institut Saint-Pierre. » (pp.127-130)

     

    Mais voici le récit du martinet, en version « historique »…

     

    « La grande sœur Marie, la marraine de Léon, est beaucoup plus sévère que Maman. Elle a vingt ans, elle est belle et douce, elle rêve de perfection, de don complet. Elle entrera au Monastère des Abys, chez les Religieuses Visitandines. En attendant, elle a pris dans ses mains fermes la direction du bataillon des petits, qu’elle appelle parfois en riant les “insoumis”. Au reste, on se demande ce qu’aurait donné la nature ardente de son filleul s’il n’avait été maintenu, enfant, dans les brancards d’une piété solide, d’une discipline de vie exacte.

    Famille Degrelle fond jardin.jpg

    Probablement une des dernières photos de la famille Degrelle au grand complet dans son jardin en bord de Semois, avant le départ de l’aînée, Marie, le 31 mai 1921, pour le couvent des Sœurs de la Visitation au Monastère des Abys (près de Paliseul, à une quinzaine de kilomètres de Bouillon). On reconnaît, de gauche à droite, autour de la Maman et du Papa assis, Léon (15 juin 1906), Marie (30 juillet 1896), Suzanne (7 octobre 1911) et, devant elle, Edouard (30 avril 1909), Madeleine (29 juin 1904, voir ce blog au 20 mars 2020), Jeanne (14 juillet 1902) et Louise-Marie (20 juillet 1907).

     

    Edouard, qui était beaucoup plus calme, rentra un jour à la maison, triomphant : il avait trouvé sur la route, perdu par un cavalier, sans doute, un magnifique martinet, qu’il faisait claquer joyeusement.

    “– Bravo ! s’écria Marie en l’annexant, voilà justement ce qu’il me faut ! Et maintenant, marchez droit !”… Le triomphe du pauvre Edouard avait été de courte durée, car ses frère et sœurs ne lui ménagèrent pas les compliments de sa trouvaille… Et désormais, si on n’obéissait pas à une injonction, bzzz… les lanières du martinet cinglaient les mollets nus. C’était fort désagréable. Et Léon trouvait que c’était très humiliant. Aussi résolut-il de se libérer du martinet. Il dit aux “petits” : “Dimanche, soyons tous prêts bien à l’heure pour la grand-messe. Vous partirez tous. Je reviendrai chercher un mouchoir. Et j’irai prendre le martinet dans la chambre de Marie et le jetterai dans la Semois !”

    Ainsi dit fut fait. Les enfants, triomphants, revinrent de l’église comme un troupeau de chevaux échappés, en révolte ouvertes contre tous les ordres donnés par Marie. Celle-ci voulut aller prendre son acolyte en cuir. Disparu !

    “– Qui l’a pris ?”

    “– Moi”, dit Léon qui a toujours eu le courage des responsabilités. Puis lestement, il alla se barricader dans sa chambre. Finalement, il dut bien en sortir et reçut une paire de claques de sa sœur, ce qui le mortifia profondément. Il alla digérer sa rancune dans son arbre, au fond du jardin. Il allait souvent se réfugier là, soit pour lire et étudier quand les petits menaient trop grand tapage, soit pour avaler un affront. » (pp.63-64)

    Marie Degrelle 1920-horz.jpg

    « La grande sœur Marie, la marraine de Léon, […] est belle et douce, elle rêve de perfection, de don complet. Elle entrera au Monastère des Abys, chez les Religieuses Visitandines. »

    Marie prononcera ses vœux définitifs le 28 décembre 1925 et prendra le nom de Sœur Anne-Marie. Dans une lettre de 1975, Léon Degrelle rappela à sa sœur et marraine avec qui il garda toujours le contact –comme avec toutes ses sœurs– cet événement si absolu et bouleversant.

    « Tu partais… Ce que nous avons pleuré ! Huit jours entiers à pleurer ! Les huit derniers jours où tu vivais près de nous… J’ai pleuré alors pour toute ma vie. Et toi, tu restais calme. Je te vois encore comme si c’était maintenant, là, devant moi, t’agenouillant pendant quelques minutes devant le grand Sacré-Cœur de la salle à manger, puis te relevant, simple, souriante, allant toute droite vers la petite voiture et le cheval qui allaient t’emmener pour toujours.

    Tu coupais tout ! Tu te séparais de tout ! Tout notre monde s’écroulait, mourait pour toi… Et fraîche et belle, sans une larme, tu sacrifiais, impassible, cet univers humain pour ton véritable univers.

    Alors, quoi ? Comment aurais-tu voulu que nos âmes ne fussent pas, elles aussi, prises à la gorge par ce drame mystique ! Nous avions vu où était le vrai, le grand. »

  • Degrelle – Hergé, même combat! (8)

    Mon Honneur s’appelle Fidélité

     

    Hergé échappera aux tribunaux de l’épuration qui semblent avoir éprouvé, selon le dessinateur, la peur du ridicule : « Je n'ai cependant pas figuré au procès des collaborateurs du Soir, j'y étais en spectateur… Un des avocats de la défense a d'ailleurs demandé : “Pourquoi n'a-t-on pas aussi arrêté Hergé ?”, ce à quoi l'Auditeur militaire a répondu : “Mais je me serais couvert de ridicule !” » (Pol Vandromme, Le Monde de Tintin, p. 52)

    Mais sa prise de conscience de la mauvaise foi criminelle des vainqueurs (« Grotesque et ignoble ! », écrit-il à son épouse en lui annonçant le verdict du procès du Soir) n’hésitant pas à condamner à mort (et même à exécuter) les plus purs patriotes de ses amis l’amènera à s’engager à fond dans une aide concrète, matérielle et ô combien opportune à tous les persécutés de son entourage.

    En témoignera avec émotion l’écrivain Robert Poulet à l’occasion du décès du dessinateur (« Adieu, Georges », Rivarol, 18 mars 1983, cité dans Tintin, mon copain, p. 130) :« On peut bien le dire à présent : entre 1950 et 1960, il fut la providence des “inciviques”, le grand recours des honnis et des bannis, dont il connaissait la parfaite honnêteté. Il me rendit, à moi parmi beaucoup d’autres, de grands services aux heures difficiles. Je reste et resterai moralement son débiteur. »

    C’est ainsi que son ami très proche, l’artiste Jacques Van Melkebeke, condamné à dix ans de prison pour « incivisme »est engagé comme rédacteur en chef du nouvel hebdomadaire Tintin avec l’appui de Hergé qui ne souffle mot de sa condamnation. Quand la police vient l’arrêter, Van Melkebeke a pu fuir, mais est démissionné d’autorité par Raymond Leblanc, le propriétaire du magazine. Désormais, c’est clandestinement qu’il travaillera à Tintin, pour Hergé, mais aussi pour Edgar P. Jacobs.

    C’est ainsi que Robert Poulet, condamné à mort et, finalement, après six ans de prison, expulsé de Belgique, fut hébergé par Hergé qui, instruit par le précédent de Van Melkebeke, l’engagea également clandestinement dans l’équipe de Tintin pour y écrire des contes pour enfants : son salaire était payé par chèques libellés au nom de jeune fille de son épouse !

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    Extrait des esquisses de prison de « Jam » : caricature de Robert Poulet se promenant, boulet au pied, à la prison de Saint-Gilles en 1946.

     

    C’est ainsi qu’il soutint constamment l’abbé Norbert Wallez à la santé ruinée par ses quatre années de prison épouvantables ; le caricaturiste Jam dont il aida matériellement l’épouse durant les six ans de sa réclusion et qu’il soutiendra encore jusqu’à ce qu’il retrouve un travail ; le dessinateur de Je Suis Partout, Ralph Soupault, qu’il ne connaissait pas personnellement, mais que, recommandé par Paul Jamin, il aida et recommanda à Casterman ; ainsi que son ami le SS-Hauptsturmführer Jean Vermeire –qu’il connut au Petit Vingtième où il signait ses dessin « Jiv »–, officier de liaison de Léon Degrelle à Berlin, avec qui il allait au restaurant lors de ses permissions (en uniforme SS, toujours de fantaisie : voir Huibrecht van Opstal, Tracé RG, Le Phénomène Hergé, p. 89 et Saint-Loup, Les SS de la Toison d’Or,  p. 81) et pour lequel, lorsqu’il apprit sa condamnation à mort, il signa sans hésitation une pétition réclamant sa grâce au prince Charles, régent du Royaume, puisqu’ « il n’a cessé d’agir par idéalisme » (Pierre Assouline, Hergé, p. 205)…

    Alors, s’il faut encore remettre les pendules à l’heure, citons à nouveau Hergé dont l’honneur s’appelle fidélité et qui refusa toujours de participer à la condamnation universelle de Léon Degrelle :« Degrelle était d’ailleurs un homme respectable, il a été lui-même au Front de l’Est, il n’y a pas seulement envoyé quelques pauvres diables. Et militairement parlant, il s’est comporté là-bas comme un héros. » (interview de Hergé dans l’hebdomadaire flamand Humo, 11 janvier 1973, citée dans Tintin mon copain, p. 144).

     

    Comment rester Tintin sans Léon Degrelle ?

     

    La tragédie de la « libération » a provoqué une lente évolution du personnage de Tintin qui est certes toujours resté fidèle à ses idéaux de justice et de solidarité, mais a peu à peu abandonné son rôle de redresseur de tort universel et de justicier des sociétés et des nations (ce qu’illustrent d’ailleurs également les « réécritures » des anciens albums dans un sens «politiquement correct»).

    Tintin a ainsi progressivement changé de modèle en passant petit à petit du Léon Degrelle héroïque au Hergé débonnaire. Très éclairant à ce point de vue est le tout dernier album Tintin et les Picaros : filant au San Theodoros pour sauver Bianca Castafiore et les Dupondt du dictateur capitalisto-stalinien Tapioca, Tintin, pour parvenir à ses fins, se lie aux Picaros du général Alcazar (d’allure castriste mais vivant sous la coupe d’une mégère de l’American Way of Life : c’est dire s’il s’agit de dictateurs interchangeables !).

    Et si Tintin s’emploie à aider les Picaros dans leur pseudo-révolution, ce n’est que dans une seule intention, comme le reconnaît Tintin lui-même à la page 46 :« Non, on ne s’en fiche pas, capitaine [de la révolution du général Alcazar]… car nos amis les Dupondt, la Castafiore, Irma et Wagner sont en danger !... Et ils ne seront sauvés que si Alcazar triomphe de Tapioca et prend le pouvoir. » Une fois ce but atteint, c’est alors sans état d’âme qu’il quitte un pays qui a simplement changé de dictateur et son peuple toujours misérable pour rentrer chez lui et vivre tranquille avec ses amis.
    Le dernier dialogue clôturant l’album est très éclairant sur ce repli de l’héroïque Degrelle vers le pragmatique Hergé, affichant sans détour ni vergogne un esprit plutôt petit-bourgeois. Haddock :
    « Eh bien, je ne serai pas fâché de me retrouver chez nous, à Moulinsart… » ; Tintin : « Moi aussi, capitaine… »

    hergé,pol vandromme,robert poulet,jam,léon degrelle,humo,tintin,association pétain-verdun,restaurant botínLe véritable message de Tintin et les Picaros est celui d’un constat d’impuissance face aux mirifiques promesses des uns et des autres qui ne sont que bonnets blancs et blancs bonnets du profitariat politicien. Le souci de justice sociale s’est ici réduit au seul groupe de familiers, comme l’exprime d’ailleurs avec une effusion expansive Bianca Castafiore à la page précédente :« Ah !quelle joie d’être de nouveau tous réunis ! Il faut absolument que je chante ! » Plus rien d’autre ne compte que de se retrouver entre soi…

    C’est donc bien ici que s’exprime pour la première fois avec évidence le resserrement d’ « idéologie » de Tintin : du combat pour la justice sociale de son modèle Léon Degrelle vers la défense du cercle familier de son père Hergé.

    Et désormais, comme Tintin dans les Picaros, il nous faut bien constater avec désenchantement que depuis que l’idéal solaire qui enflamma Hergé et Léon Degrelle a été fracassé par la coalition universelle des matérialismes ploutocratico-marxistes craignant la contagion, nos sociétés sont en totale perdition, prisonnières d’une pensée unique qui les font se résigner à leur sort et à leur sujétion, la justice sociale étant reléguée au rayon des utopies.

    Face à notre impuissance, ne nous resterait-il plus –comme semble le penser Hergé– qu’à nous replier sur notre cercle familier où, jusqu’à présent du moins, nous pouvons encore entretenir et pérenniser la petite flamme de la vérité, de la beauté, de la justice et de la solidarité ?...

    Entretenir cette petite flamme de l’honneur et de la fidélité et nous efforcer de la propager : c’est bien le moins que nous devions à Léon Degrelle ainsi qu’à tous ceux qui ont été jusqu’à offrir le sacrifice de leur vie pour que l’Europe ne soit pas engloutie dans la nuit mortelle du stalinisme et, –hélas, mille fois hélas, en vain !–, pour que vive ce monde d’épanouissement personnel et de justice sociale que Léon Degrelle a voulu forger et que Hergé a pu approcher, mais que nous ne pourrons sans doute plus connaître.

     

    Armand Gérard

     

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    Si le souci de son couple et de ses amis proches a toujours été essentiel pour Léon Degrelle (ci-dessus avec son épouse Jeanne, sur la plage de Malaga ; et avec quelques intimes dont Raymond Van Leeuw, héros du Front de l’Est, son épouse Mia, et le photographe Jacques de Schutter, au restaurant Botín de Madrid : le propriétaire décorait toujours la table de Léon Degrelle d’œillets rouges et blancs, couleurs du drapeau bourguignon) ; à l’inverse de Hergé, sa mission de « passeur d’idéal » et de héraut de la révolution des âmes véhiculée par le national-socialisme a animé jusqu’à son dernier souffle le tribun politique et le chef de peuple que Léon Degrelle fut toujours (ci-dessous, discours à ses camarades Légionnaires du Front de l’Est à Palma de Majorque en 1989, haie d’honneur de jeunes Européens pour un meeting à Madrid et rencontre avec l’Association Pétain-Verdun).

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    Bibliographie

     

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    Friedrich Jörg, L’incendie. L’Allemagne sous les bombes 1940-1945, Editions de Fallois, 2006.

    Gérard Armand, Léon Degrelle était bien Tintin, L’intuition première de Jean Mabire, Magazine des Amis de Jean Mabire n° 45, Solstice d’été 2015.

    , Introduction à : Léon Degrelle Cristeros, Aux origines de Tintin, L’Homme Libre, 2019.

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    Hergé, « Les Aventures de Tintin » sont citées d’après les rééditions dans les « Archives Tintin », Editions Moulinsart (2010-2013).

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    , Humo sprak met Hergé [Humo a parlé avec Hergé], Interview in Humo, 11 janvier 1973.

    , « L’Invité du mois : Hergé », Interview in La Libre Belgique, 30 décembre 1975.

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    Hitler Adolf, Libres propos sur la guerre et la paix, Flammarion, 1952.

    Delannoy Jean et Piryns Piet, Humo sprak met Hergé [Humo s’entretient avec Hergé], Humo, 11 janvier 1973.

    Benoît-Jannin Maxime, Les guerres d’Hergé, Aden, Bruxelles, 2007.

    Mathieu Olivier, De Léon Degrelle à Tintin, Retranscription du texte de la conférence prononcée le vendredi 26 octobre 1990, à 20 heures, à l’occasion de la première manifestation du CER (cercle d’étudiants révisionnistes), au 104, boulevard Bockstael, Auditorium Bockstael, 1020 Bruxelles, édition à compte d’auteur, 1990.

    Mathot René, Au ravin du loup, Hitler en Belgique et en France, mai-juin 1940, Racine, 2000.

    Van Opstal Huibrecht, Tracé RG, Le Phénomène Hergé, Claude Lefrancq, Bruxelles, 1998.

    Peeters Benoît, Hergé, fils de Tintin, Grandes biographies, Flammarion, Paris, 2002.

    Poulet Robert, Adieu Georges, in Rivarol, 18 mars 1983.

    Riesco José Luis Jerez, Degrelle en el exilio. 1945-1994, EdicionesWandervögel, Buenos Aires, 2000. Cette date doit être apocryphe puisque, entre autres exemples, l’auteur évoque la date du décès de Marie-Christine, une des filles de Léon Degrelle, en 2006 (p. 287).

    Rothuizen William et Schröder Peter, Kuifje & Hergé [Tintin & Hergé], Haagse Post, 31 mars 1973.

    Sadoul Numa, Tintin et moi, Entretiens avec Hergé, Champs-Flammarion, 4e édition, Paris, 2000.

    Saint-Loup, Les SS de la Toison d’Or, Presses de la Cité, 1975.

    Springael Hervé, Avant Tintin, Dialogue sur Hergé, chez l’auteur, 1987.

    Valla Jean-Claude, La France sous les bombes américaines, 1942-1945, Librairie nationale, 2001.

    Vandromme Pol, Le Monde de Tintin, Gallimard, Paris, 1959.

    Wagner Friedlind, Héritage de feu, Souvenirs de Bayreuth, Plon, 1947.

     

    Capture.JPG

    C’est en 1989 que Korbo réalisa l’un des plus beaux portraits de Léon Degrelle, tellement reproduit que plus personne ne se soucie de son auteur, croyant l'œuvre libre de droits et appartenant au domaine public !

     

  • Degrelle – Hergé, même combat! (7)

    La Tragédie de la « Libération »

    Comme on peut le constater grâce au Tintin mon copain de Léon Degrelle, Hergé se caractérise par une fidélité à toute épreuve à ses idées et à ses amis. Surtout quand l’adversité s’en mêle et que son monde personnel s’écroule avec fracas.

    Hergé fera la très amère expérience de l’adversité à l’issue de la Deuxième Guerre Mondiale. Certes, dès 1940, il avait connu la vexation de la démobilisation pour raisons de santé ainsi que, comme tous les Belges, la stupeur de l’écrasement militaire et l’affolement de l’exode. Mais cet écroulement du monde vermoulu combattu par Léon Degrelle signifiait aussi pour lui la possible naissance d’un monde nouveau en même temps que l’accession au plus prestigieux quotidien belge, Le Soir, désormais dirigé et rédigé par une talentueuse équipe de ses amis, tout acquis aux thèses de l’Europe nouvelle : le journaliste Raymond De Becker, l’académicien Horace van Offel, le poète Jean Libert, le caricaturiste Paul Jamin, l’ami proche Jacques Van Melkebeke, peintre et chroniqueur d’art qui s’occupera du Soir Jeunesse, Paul Kinnet, auteur de romans policiers et chroniqueur de jazz, etc. Cette époque représente pour Hergé l’âge d’or qui lui a permis de créer et diffuser des chefs-d’œuvre tels que Le Crabe aux Pinces d’or, L’Etoile mystérieuse, Le Secret de la Licorne, Le Trésor de Rackham le Rouge, Les Sept Boules de cristal


    41 Horace van Offel Crommelinck 1935.jpgPortrait d’Horace Van Offel par Albert Crommelynck (eau-forte pour l’édition des Contes, 1935). Né en 1876, Horace Van Offel –le « Dumas » belge – compte parmi les meilleurs auteurs de romans historiques, mais aussi de fiction politique, tel La Terreur fauve, dénonçant une société bolchévisée. Horace Van Offel confiera plusieurs de ses titres à la « Collection Nationale » des éditions Rex (Le Jongleur d’épée, La Flûte corsaire). Elu à l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique en 1936, Horace Van Offel sera appelé à prendre pendant quelques semaines de juin 1940 le poste de rédacteur en chef du quotidien Le Soir. Menacé par la résistance communiste, lors de l’avance alliée en 1944, il se réfugie en Allemagne où, malade et à bout de force, il meurt, à 68 ans, à Fulda, le 6 octobre 1944. Quinze jours plus tard, le 21 octobre, l’Académie belge le radie et installe un an plus tard à son fauteuil numéro 21 le politicien socialiste enfui à Londres Paul-Henri Spaak !...

     
    C’est néanmoins en ce temps-là que Hergé subira les foudres de la répression nazie, d’ailleurs aussi absurde qu’incohérente : « Pendant la guerre, les Allemands ont fait interdire deux de mes albums : Tintin en Amérique, probablement parce qu’ils s’imaginaient que c’était une apologie des Américains, et L’Île noire, parce qu’il y avait un écossais sur la couverture !... » (Numa Sadoul, Tintin et moi, p. 154). Cette censure abusive apparaîtra dans toute sa stupidité lorsque Hergé précisera à des journalistes néerlandais : « Par contre les livres stigmatisant Mussolini [Le Sceptre d’Ottokar] et dénigrant violemment les Japonais [Le Lotus bleu] ont pu rester dans le commerce pour d’obscures raisons. Paresse ou simple erreur du censeur allemand ? » (Jan Heinemans et Marc Van Impe, Entretien à cœur ouvert avec Hergé, in ElsevierMagazine [en néerlandais], 22 décembre 1973, p. 155).

    Hergé a néanmoins aussi raconté à Numa Sadoul comment le « Sicherheitsdienst – le service de sécurité en pays occupés », se souvenant soudain de certains dessins du Sceptre d’Ottokar (sans sourciller cependant face à l’évocation critique de l’Anschluss !) n’aurait pas manqué de le menacer des pires sévices : « un Allemand appartenant au Sicherheitsdienst […] est venu au Soir me dire : “L’avion, là, dans Le Sceptre d’Ottokar, c’est un Heinkel, n’est-ce pas ? Il ne faudrait pas recommencer trop souvent ce genre de plaisanterie !” C’était tout, mais il m’avait mis sérieusement en garde… » (p. 129)

    Numa Sadoul –qui a publié, en 1975, un livre intitulé Tintin et moi basé sur ses conversations avec Hergé– est ce nombriliste qui se permet, dans une note de bas de page, d’asséner du haut de son ignorance crasse : « il est important de préciser que celui-là [Hergé] ne partagea jamais les idées de celui-ci [Degrelle] » !!! (p.63)

    On imagine la jouissance intérieure de Hergé lorsqu’il raconta à ce journaliste français, assoiffé de scoops mais imperméable à son humour sybillin, cette gentille anecdote sous forme de haut fait d’armes !

    Deux ans auparavant, Hergé avait raconté bien simplement à William Rothuizen et Peter Schröder, journalistes néerlandais du Haagse Post que pendant l’Occupation, « je n’avais pas d’amis allemands et mon travail n’a jamais été censuré » (Tintin & Hergé, in Haagse Post [en néerlandais], p. 44). Et pourquoi l’eût-il été puisque, pour lui, comme pour tous les Belges (même les plus éminents comme le roi Léopold III ou le président du Parti socialiste et conseiller du roi, Henri de Man : voir ce blog aux 18 mai et 28 juin 2017), le système parlementaire démocratique, à l’origine de tous les malheurs, s’était effondré : « Je reconnais que moi aussi, j’ai cru que l’avenir de l’Occident pouvait dépendre de l’Ordre nouveau. Pour beaucoup, la démocratie s’était montrée décevante et l’Ordre nouveau apportait un nouvel espoir. C’est surtout dans les cercles catholiques que ces opinions étaient le plus largement exprimées » ? (Haagse Post, p.44)…

    Après le récit de cette prétendue remarque de l’occupant, –seule et unique, même pas une admonestation !–manifestant plutôt son empathie, Hergé devra raconter d’une bien moins agréable manière à son jeune biographe l’épisode autrement tragique de la répression qui s’abattra sur les « inciviques » belges dès 1944 !

    Car la « libération » de la Belgique s’apparentera bien à une tragédie.

    Comment appeler autrement en effet la situation provoquée par la prétendue « épuration » qui l’accompagna ? Il n’est que d’observer le caractère absolu que cette intolérance a eu en Belgique, en comparant le cas belge avec, par exemple, la situation française qu’on a pourtant coutume de présenter comme particulièrement terrible.

    Si l’on veut bien tenir compte de l’énorme différence de population (une population française, en 1945, près de 4,75 fois supérieure à la belge ; Belgique : 8,5 millions d’habitants ; France : 40,3 millions), on verra, dans le tableau ci-après (ne concernant pas l’épuration sauvage dont les innombrables récits sont épouvantables, mais les chiffres aléatoires, mais la seule répression judiciaire dont les chiffres sont officiels), que si, en chiffres absolus, le nombre d’exécutions a été trois fois supérieur en France par rapport à la Belgique, la répression, toujours en chiffres absolus, a concerné davantage de personnes et a brisé davantage de vies en Belgique qu’en France.

     

    Maurice Baudoux, 29 ans,
    Héros de Tcherkassy, Martyr de la « résistance »

    42 Lynchage Marcel Baudoux.jpeg

    Engagé, avec Léon Degrelle, dans le premier contingent de Volontaires de la Légion Wallonie –en même temps que son jeune frère Louis qui tombera à Gromowaja Balka, âgé de 19 ans seulement–, Maurice Baudoux était né en 1916 à Montignies-le-Tilleul et était camionneur de profession. Profitant de la permission récompensant la percée victorieuse de Tcherkassy, il participa aux glorieux défilés de Charleroi et Bruxelles avant de rentrer chez lui, dans le petit village de Gozée. « Mais, reconnu par un résistant particulièrement haineux, il sera battu à mort le 27 juin 1945 par la populace locale. Le garde-champêtre de Gozée l’extraira courageusement de la foule et le traînera dans sa maison ; mais en vain puisque le malheureux expirera sous ses yeux. » (Théo Verlaine, La Légion Wallonie, De Krijger, 2005, p. 303). Ce lynchage odieux d’un jeune soldat valeureux et trop confiant (confiance provoquée par l'enthousiasme euphorique de la population célébrant les Légionnaires à Bruxelles ?) n’est qu’un exemple parmi les innombrables assassinats dont furent victimes les Légionnaires et les membres de leur famille, payant de leur vie la guerre civile organisée par les terroristes communistes en Belgique dès que l’URSS fut envahie par la Wehrmacht, le 22 juin 1941 (voir ce blog au 7 juin 2018 : Victor Matthys y rappelle qu’officiellement, dans les seuls trois premiers mois de 1944, près de 800 personnes furent tuées par la « Résistance » chargée d’établir un climat de terreur parmi les partisans de l’Ordre Nouveau, en massacrant d’ailleurs souvent des mères ou des épouses de Légionnaires absents de leur domicile).

    Cette photo accablante fait de l’infortuné Maurice Baudoux le martyr emblématique des Légionnaires victimes de la sauvagerie aveugle de la prétendue Résistance ensanglantant le pays.

     

    Tenons également et surtout compte du fait qu’en Belgique, jamais aucune amnistie n’a été accordée, contrairement à la France qui la vota dès 1951 ! Et que les condamnations belges ont donc le plus souvent revêtu un caractère définitif, en tout cas pour la déchéance des droits civils et politiques !

     

              Belgique                                                     France

     

        Inculpations                             405.067               311.263+108+69.797=
                                                                                          381.168

        Condamnations à mort          2.940                   6.763+18= 6.781

        Exécutions                                242                       767+3= 770

        Prison à perpétuité                 2.340                    2.702

        Dégradation nationale à vie 43.093                  3.578+15+14.701= 18.294

     

    (Chiffres belges: site antifasciste www.resistances.be; chiffres français : wikipedia.org: en noir, chiffres des Cours de justice; en rouge, chiffres de la Haute Cour de justice jugeant les membres du gouvernement; en vert, chiffres des Chambres civiques qui ne prononcèrent que des peines de dégradation nationale)

     

    Pour prendre conscience du traumatisme que provoqua la « libération » chez Hergé, il suffira de lire ce passage d’une lettre écrite le 21 juillet 1946 (jour de la « fête nationale » belge !) à son ami Paul Jamin (le caricaturiste Jam) condamné à mort et qui attend son sort à la prison de Saint-Gilles : « Mais jamais on n’avait imaginé une guerre comme celle-là, doublée d’une véritable guerre civile. Qui donc aurait cru que les Belges en seraient venus à se haïr avec une telle violence ? Ah ! La haine, la haine !... Notre pauvre pays en est encore empoisonné. Il en guérira, bien sûr. Mais en attendant, que de larmes, que de souffrances, que de deuils ! » (Philippe Goddin, Hergé, Lignes de vie, p. 361).

     

    Hergé avait naïvement cru pouvoir « rester en dehors de la mêlée » et, « en toute liberté d’esprit », « rester calme au milieu de cette espèce d’hystérie patriotarde » ! C’est ainsi qu’il écrit, en juillet 1941 déjà, à un ami « patriote écœuré » qui l’insulte de « traître, vendu, lécheur de bottes » : « Il s’agit uniquement de rester un “honnête homme” et, lorsqu’on nous dit, par exemple : “Ils nous prennent tout”, de répondre que c’est inexact. Non par germanophilie, non par “léchage de bottes”, mais par respect de la vérité qui, même en temps de guerre, conserve ses droits. » (Goddin, pp.277-278)

    Hergé fut arrêté à quatre reprises.

    Tout d’abord par la Sûreté de l’Etat. Il est « avec d’autres détenus, emmené à pied et hué, interrogé dans la prison de Saint-Gilles et enfermé » (Huibrecht van Opstal, Tracé RG, p. 91). Robert Poulet, le célèbre romancier et critique littéraire qui, lui aussi, fut la dupe des encouragements royaux à reprendre la plume et à fonder, avec Paul Colin, Le Nouveau Journal (voir Léon Degrelle, La Cohue de 1940, p. 279 sv.), nous livrera un précieux témoignage de ces événements : « En 1944, il y avait eu cette autre rencontre, dans l’escalier de Saint-Gilles, la prison bruxelloise où s’entassaient des “traîtres” épurés, dont l’ensemble s’identifiait à peu près avec l’élite du pays. Les “patriotes” londoniens avaient aussi arrêté Hergé, pour le seul motif qu’il avait publié ses dessins dans un journal censuré (et comment un journal aurait-il pu n’être pas censuré en temps de guerre ?). Nous échangeâmes, Georges et moi, le sourire vaillant de rigueur, avant de rentrer, chacun de notre côté, dans l’enfer ignoble des “cellules à huit”. » (Robert Poulet, Adieu Georges, in Rivarol n° 1667, 18 mars 1983). Dans sa cellule où il ne resta heureusement qu’une seule nuit, Hergé eut comme compagnon Paul Herten, qui fut le directeur du Nouveau Journal après l’assassinat de Paul Colin par la « résistance » : il était venu se constituer prisonnier par scrupule patriotique ; il sera fusillé.

    Libéré, Hergé fut cependant arrêté à nouveau par la Police Judiciaire qui l’interrogea et le relâcha. Puis s’en mêlèrent les « résistants » du Mouvement National Belge qui, mitraillette au poing, perquisitionnèrent sa maison, l’interrogèrent et le relâchèrent derechef. Enfin, les communistes du Front de l’Indépendance se manifestèrent…

    « Comme il y avait, à ce moment, une bonne douzaine d’organismes semblables, je croyais qu’ils allaient venir m’arrêter chacun à tour de rôle. Mais non, cela s’est arrêté comme cela, sans raison apparente », plaisante Hergé dans une lettre de janvier 1945 à l’abbé Norbert Wallez, alors détenu avec neuf autres « inciviques » dans une cellule de deux mètres sur cinq à la prison de Charleroi.

    43 Arrestation Collaborateur.jpegArrestation, à Anvers en septembre 1944, d’un présumé « collaborateur » par une foule armée de « résistants » dont les intentions criminelles ne font guère de doute. Certes (et heureusement), les arrestations de Hergé ne se passèrent pas dans une telle ambiance délétère qui pouvait à tout moment déboucher sur des scènes de justice expéditive, pour ne pas dire de lynchage : le jeune homme ici capturé a manifestement déjà été brutalisé et n’en mène pas large dans l’angoisse de son sort…

     

    On comprend que les résistants, ce n’était vraiment pas la tasse de thé de Hergé, comme il le déclara un jour sans ambages : « Je détestais le genre Résistant. On m'a proposé quelquefois d'en faire partie, mais je trouvais cela contraire aux lois de la guerre. Je savais que pour chaque acte de la résistance, on allait arrêter des otages et les fusiller. » (Maxime Benoît-Jannin, Les Guerres d’Hergé, p. 50).

    Tout comme il apprécie à sa juste valeur la façon dont les Anglo-Américains procèdent pour « libérer » le pays, c’est-à-dire en ne le bombardant pas autrement que le territoire du Reich. S’il n’existe pas encore d’ouvrage tel que L’incendie, de Jörg Friedrich, pour rappeler le sort des pays occupés sous les tapis de bombes alliés, Jean-Claude Valla a néanmoins publié un désormais indispensable La France sous les bombes américaines, 1942-1945 (Librairie nationale, 2001 ; dans la foulée, ont également paru Eddy Florentin, Quand les Alliés bombardaient la France, 1940-1945, Perrin, 2008 et Andrew Knapp, Les Français sous les bombes alliées, 1940-1945, Tallandier, 2014).

    C’est ainsi que Hergé écrit à son ami Charles Lesne, directeur des éditions Casterman situées à Tournai qui venait de subir un violent bombardement en juin 1944 : « Tu connais sans doute la formule : Seigneur, libérez-nous de nos Protecteurs et protégez-nous de nos Libérateurs ! […] Ici aussi, tout est calme, à part un avion allemand qui s’est abattu samedi dernier à deux kilomètres de chez nous. À part aussi un quadrimoteur américain qui, touché par la D.C.A. s’est abattu à un kilomètre d’ici, sur le boulevard du Souverain. À part encore un obus non éclaté qui est retombé à cent mètres de chez nous en faisant un joli tintamarre, et pas de victime. À part, enfin, un gros éclat d’obus qui est retombé à quelques pas de moi. En vérité, je te le répète, tout est calme… » (Philippe Goddin, Hergé, Lignes de vie, p. 323)

    Hergé restera marqué à vie par la tragédie de la libération et son « épuration » aveugle: « J’avais des amis journalistes et dont je persiste aujourd’hui encore à croire qu’ils étaient absolument purs et pas à la solde de l’ennemi. Et quand j’ai vu certains de ces gens condamnés à mort et certains même fusillés, je n’ai plus rien compris à rien. Ça a été une expérience de l’intolérance absolue. C’était affreux, affreux ! » (interview à Benoît Peeters, citée dans Tintin, mon copain, p. 129).

    44 Hergé Voilà.jpeg

    Témoignage manifeste de la proximité indéniable de Hergé avec les idéaux d’Ordre nouveau défendus non seulement par Léon Degrelle et Rex mais également par la rédaction de son journal Le Soir : Hergé fait la « une » de l’hebdomadaire rexiste Voilà en pleine guerre, le 10 juillet 1942. Il surclasse, tel le bienveillant Créateur, un Tintin interloqué (dessin du caricaturiste maison R.V. Roy). Cette « gazette hebdomadaire de la bonne humeur » créée par Léon Degrelle et fort populaire (tirage : 30.000 exemplaires) était dirigée par Victor Meulenijzer, ami d’enfance de Hergé, qui avait été directeur du Pays réel après le départ de Léon Degrelle pour le Front de l’Est. Il paiera de sa vie sa fidélité à l’idéal bourguignon de son chef : il fut fusillé le 30 août 1945, après une parodie de procès qui désespéra son ami Hergé.

     

    En évoquant, horrifié, les « fusillés », Hergé a certainement, entre autres, à l’esprit son ami Victor Meulenijzer, compagnon du collège Saint-Boniface et de sa troupe scoute, qu’il caricatura notamment, à ses côtés, dans un épisode de Quick et Flupke dans Le Petit Vingtième du 18 mai 1933, qui fut le rédacteur en chef de l’hebdomadaire rexiste Voilà –dont Hergé fit la couverture le 10 juillet 1942– et qui fut fusillé, après une parodie de procès, le 30 août 1945.

    Parmi les autres amis de Hergé condamnés à mort, citons Paul Herten (fusillé), José Streel (fusillé), Paul Jamin, Jean Vermeire, Raymond De Becker, Robert Poulet, Gaston Derijke, Paul Werrie,… sans parler de Léon Degrelle !

     

    A suivre

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    Paul Jamin (c’est-à-dire le dessinateur « Jam » du Pays réel, du Soir et de la Brüsseler Zeitung) fut condamné à mort et enfermé à la Prison de Saint-Gilles en attendant l’exécution de la sentence : « Ce sont les exécutions que l’on entend au petit matin dans la cour de la prison, le claquement des balles sur le mur, les longues journées à attendre que l’on vienne vous chercher… » Jam passe désormais son temps à croquer ses compagnons d’infortune, à réaliser des dessins d’ambiance ou caricaturer ses gardiens. A gauche, sa cellule ; à droite, un de ses pandores (à propos de la détention de Paul Jamin, voir ce blog aux 8 novembre 2019 et 20 mars 2020).

     

  • Degrelle - Hergé, même combat ! (6)

    La « solution finale »

     

    Nous ne ferons pas l’impasse sur ce sujet puisqu’on n’a pas hésité à l’envoyer dans la figure de Hergé pour lui extorquer une condamnation du national-socialisme (ou plutôt du « nazisme » tel que présenté par la vulgate d’après le procès de Nuremberg) !

    C’est Pierre Assouline qui rapporte cette réponse de Hergé à l’attaque du journaliste-cinéaste Henri Roanne, auteur –avec Gérard Valet– du documentaire Moi Tintin, réalisé en 1974-75. Pour qu’on en saisisse sans doute tout le sel, Assouline prend soin d’énumérer en note le patronyme complet du cinéaste :  «Témoignage d'Henri Roanne-Rosenblatt à l'auteur» (Pierre Assouline, Hergé, p. 428, note 43). « Interrogé dans le cadre d'un film sur sa vie, [Hergé] confiera hors micro, lors d'un tête à tête avec l'un des réalisateurs : C’est vrai que certains dessins, je n’en suis pas fier. Mais vous pouvez me croire : si j’avais su à l’époque la nature des persécutions et la solution finale, je ne les aurais pas faits. Je ne savais pas. Ou alors, comme tant d’autres, je me suis peut-être arrangé pour ne pas savoir…» (Assouline, p. 204)

    Il y a peut-être un fond de vérité dans cette résipiscence (faite, comme par hasard, « hors micro ») que Hergé aurait confiée à ce « Bohlwinkel » le pressant de reconnaître sa culpabilité concernant « certains dessins ». Mais dans la mesure où il s’agit d’un témoignage oral publié des années après l’entretien « hors micro », nous ne pouvons nous empêcher de penser qu’il est taillé sur mesure pour appuyer la dénonciation par Assouline d’un Hergé qui « ne renie rien de son attitude, ni du milieu dans lequel il a baigné depuis vingt ans » (Assouline, p. 203).

    Pour parfaire sa stigmatisation de l’entêtement coupable de Hergé, Assouline nous assène un second « témoignage à l’auteur » (p. 428, note 44), tout aussi invérifiable. Celui du créateur d’Alix l’intrépide, Jacques Martin, qu’il résume comme suit : « Hergé ne démord pas de cette attitude, même avec son proche collaborateur Jacques Martin, requis deux ans par le service du travail obligatoire comme ingénieur chez Messerschmidt [sic] à Augsbourg. Comme ce dernier lui racontait sa vision des camps de la mort entrevus lors de ce séjour forcé en Allemagne (« les cadavres qui marchaient, l’odeur insupportable… ») et la version des gardiens qu’il avait interrogés (« ce sont des prisonniers de droit commun ! »), Hergé réagit avec incrédulité : “Tu as mauvais mémoire, tu as été impressionné, tu as mal vu… Et d’abord, comment sais-tu que c’étaient des Juifs ? C’étaient sûrement des droits communs.” Jacques Martin y passe la soirée mais échoue à le convaincre de quoi que ce soit. Hergé récuse tout en bloc et en détail. Ce n’est pas que ça ne l’intéresse pas. Pis encore : il ne veut pas le savoir. Après cette vive discussion, les deux hommes éviteront toujours de reparler de la guerre. » (Assouline, p. 204)

    35 Massacre de Dachau 1945-04-29.jpgLes soldats américains fusillent sans autre forme de procès les gardiens du camp de concentration de Dachau, le 29 avril 1945.

     

     

     

     

    Quels commentaires ajouter, sinon qu’Assouline n’a l’air de trouver ces malheureux dignes de compassion que dans la mesure où ils seraient juifs… Jacques Martin a, quant à lui, raison en parlant de « cadavres qui marchaient » : les visions d’horreur du camp de Dachau (car c’est probablement d’un des « camps satellites » de Dachau dont parle Jacques Martin) –détenus amaigris par la famine et les épidémies de typhus– ont officiellement servi de détonateur à ce qu’on a appelé le « massacre de Dachau », c’est-à-dire l’exécution sommaire par des militaires américains des gardiens du camp. Et Hergé n’a pas tort non plus à propos du point précis qu’il ne s’agissait pas nécessairement de juifs : dans la région d’Augsbourg, fonctionnaient deux « camps satellites » de Dachau qui fournissaient en travailleurs forcés les usines Messerschmitt où travaillait l’ingénieur Jacques Martin.

    Pour le reste, nous n’avons aucune information sur la connaissance que Hergé pourrait avoir eue des écrits et mises au point du courant que l’on appellera « révisionniste » et, plus tard encore, « négationniste » (l’article fondateur du professeur Robert Faurisson, Le problème des chambres à gaz, ou la rumeur d’Auschwitz, a pourtant été publié, avec retentissement, le 29 décembre 1978, dans Le Monde, soit près de cinq ans avant le décès de Hergé). Nous ne pouvons donc, respectueux des lois spéciales qui gouvernent aujourd’hui la recherche historique, que conclure avec Léon Degrelle : « Lorsque l’immense tapage monté après la guerre sur ce problème aura fini par s’apaiser, on verra ce que concluront les historiens, redevenus sérieux. De grandes surprises seront alors, sans doute, réservées aux accusateurs hâtifs, aux attrape-nigauds et aux menteurs cyniques de nos temps passionnés. Entretemps, tout débat à ce sujet étant judiciairement interdit, chacun ne peut que se taire. Je le fais moi-même aujourd’hui, le bec cousu et la plume sèche, sans d’ailleurs en penser moins derrière les jupons omnipotents des magistrats brandissant leurs nouveaux codes. » (Tintin mon copain, p. 93)

     

    Des clins d’œil aux amis proscrits

     

    On le voit, après-guerre, malgré le carcan progressif du « politiquement correct », l’œuvre de Hergé abonde désormais –et paradoxalement– en références « politiquement incorrectes ». Mais même si elles sont discrètes, elles n’en constituent pas moins autant de savoureux clins d’œil complices à ceux qui savent les reconnaître.

    Ainsi sait-on, depuis 2004, grâce au célinien Emile Brami (Céline, Hergé et l’affaire Haddock), que les célèbres jurons du capitaine Haddock sont directement issus des pamphlets antisémites de Céline (Bagatelles pour un massacre, 1937, L’Ecole des cadavres, 1939). Dénoncé par les gardiens autoproclamés du « temple », Brami a vu sa perspicacité confirmée par la découverte et la publication, à l’automne 2011, par Les Amis d’Hergé (association fondée, entre autres, par Stéphane Steeman), d’un manuscrit de l'auteur des « Aventures de Tintin » énumérant une série impressionnante d’épithètes choisies, piochée dans l’œuvre de l’immortel Louis-Ferdinand.

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    Pareillement, même si le Professeur Tournesol puise sa ressemblance physique dans le portrait du physicien Auguste Piccard, ce n’est pas vers Charles Maurras qu’il faut se tourner pour découvrir ses centres d’intérêt idéologiques (Francis Bergeron, Georges Remi dit Hergé, p. 51), mais vers les savants hitlériens puisque ses plus remarquables inventions sont, comme par hasard, toujours la concrétisation de projets nazis ! Nous ne nous attarderons pas sur la fusée lunaire inspirée, comme chacun sait, du fameux missile V2 conçu par Wernher von Braun, la Vergeltungswaffe 2, l' « Arme de représailles n° 2 » aux bombardements de terreur frappant aveuglément toutes les populations civiles allemandes depuis 1940 (il faut absolument lire le terrible ouvrage de Jörg Friedrich, L’incendie. L’Allemagne sous les bombes 1940-1945, Ed. de Fallois, 2006).

    Le professeur Tournesol anticipera ainsi d’une petite vingtaine d’années le projet fou de l’ingénieur national-socialiste d’envoyer un homme sur la lune…

    Mais c’est dès sa première apparition dans les « Aventures de Tintin », c’est-à-dire dans Le Trésor de Rackham le Rouge, que Tryphon Tournesol se présente comme le concepteur d’inventions susceptibles d’améliorer les conditions de vie de ses contemporains soumis à toutes les restrictions du temps de guerre. C’est ainsi qu’il présente à ses nouveaux amis, Tintin et le capitaine Haddock, un lit-placard pour ceux qui disposent « de très peu de place » ainsi qu’un impressionnant « nouveau modèle de gazogène » (pp. 6-7). Conçu pendant la Première Guerre mondiale pour palier le manque d’essence et permettre aux voitures de continuer à rouler, le gazogène était un appareil produisant un gaz de propulsion par pyrolyse de bois, de charbon ou de charbon de bois. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le procédé va naturellement connaître de multiples perfectionnements. C’est ainsi que la marque Gazauto, qui avait été déposée en 1936 par le Français Louis Libault (1893-1966), ne cessera de développer son appareil en multipliant les dépôts de brevets en France et en Allemagne entre 1939 et 1942.

    Mais c’est d’une invention d’origine allemande –comme toutes celles d’ailleurs qui, dans le futur, auront une influence déterminante sur le cours des aventures de Tintin– que le Professeur Tournesol veut faire bénéficier le jeune reporter-aventurier. Il s’agit d’un opportun « appareil à explorer le fond des mers, une espèce de petit sous-marin équipé d’un moteur électrique et muni de réservoirs d’oxygène pour deux heures de plongée » (p. 8). C’est-à-dire de l’U-Boot-Zwerg (le « sous-marin nain ») ainsi que l’appelle l’article de journal allemand de 1942 ou 1943 découpé par Hergé et retrouvé dans sa documentation : les bribes de cet article que nous pouvons retrouver sur Internet (zpag.net) parlent d’un « minuscule sous-marin ayant la forme d’un poisson qu’un Américain souhaitait utiliser sous les eaux du lac Michigan ». Ce projet fut-il mené à bien ? Hergé lui-même l’a sans doute ignoré, mais sa documentation comportait aussi le mensuel La Science et la Vie de mars 1942 montrant qu’un projet similaire de sous-marin individuel avait bel et bien été développé par l’ingénierie de l’allié japonais du Pacte d’Acier, avec une vitre d’habitacle en tous points semblable au « Requin » du Professeur Tournesol. Ajoutons qu’un prototype, tout allemand celui-là, encore plus petit, appelé Delphin (« Dauphin »), avec le même cockpit de plexiglas, pouvant atteindre la vitesse de 17 nœuds sous l’eau, avait été développé à la même époque : une firme ukrainienne de modélisme en commercialise aujourd’hui encore la maquette…

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    Dans L’Affaire Tournesol, c’est également vers les savants allemands de la Deuxième Guerre Mondiale que l’intrigue nous oriente explicitement, puisque le Professeur Tournesol réalise à nouveau le prototype d’une arme secrète du Troisième Reich, comme Tintin le découvre en feuilletant l’ouvrage German Research in World War II: « Fig. 69. Sound used as a weapon by means of large parabolic projectors. Research conducted near Lofer, Germany, under the auspices of the Speer Ministry » [« Recherches allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale. Fig. 69 : Le son utilisé comme arme au moyen de grands projecteurs paraboliques. Recherches menées près de Lofer, Allemagne, sous les auspices du Ministère de Speer »] (p. 23).

    Ce livre (bien réel, dont Hergé reproduit la couverture) fut écrit par le Colonel Leslie Earl Simon (directeur, en 1947, des « Ballistic Research Laboratories » de la base d’essai de l’armée américaine d’Aberdeen, au Maryland). Si le dessin de Hergé est bien fidèle à l’original, il s’en dissocie aussi puisque la croix gammée qui devrait figurer sur le prototype d’avion en négatif, est sagement remplacée par les vitres blanches du cockpit (par contre, la fusée V2 qui lui sert de toile de fond, avec son damier rouge et blanc, est bien celle d’Objectif Lune
     !).

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    Il faut être docteur en linguistique prétendant lire entre les cases pour affirmer que la présence de cette croix gammée sur la reproduction de la couverture de ce livre eût été incongrue dans une aventure se déroulant en Bordurie ! « Ce livre, et surtout sa couverture, sont visibles sur Amazon.com, ce qui permet de remarquer la modification opérée par Hergé, à savoir la suppression de la croix gammée qui n’a pas lieu d’être pour une aventure censée se passer en Bordurie » (Catherine Delesse, Le vrai-faux réel dans la bande dessinée : la presse et autres médias dans Tintin, Palimpsestes, http://palimpsestes.revues.org/838, § 6).

    Quelle idiotie ! Il s’agit du point de départ même des travaux du Professeur Tournesol et de cette aventure de Tintin ! Et Tintin traduit parfaitement le titre de ce livre explicitement consacré aux recherches militaires nazies : « Un ouvrage américain : “Les recherches allemandes pendant la deuxième guerre mondiale”… Capitaine, nous avons eu la main heureuse… ». N’oublions pas que nous sommes au début des années 50 et de la guerre froide : au moment où Américains et Soviétiques, qui se sont arraché les savants nazis pour bénéficier de leurs recherches, s’opposent à coups de gadgets technologiques et d’inventions futuristes (évidemment expurgés de leurs emblèmes devenus anachroniques). Pourquoi donc Hergé se serait-il gêné en ne faisant pas la même chose : l’absence de croix gammée n’enlève rien à l’origine de cette invention allemande destinée à protéger le IIIe Reich et le régime national-socialiste pendant la Seconde Guerre mondiale.

    Il n’est pas jusqu’à la dernière découverte du Professeur Tournesol –la pilule anti-alcool, dans Tintin et les Picaros– qui participe de la lutte constante des autorités nationales-socialistes contre les abus d’alcool (ou le tabagisme et autres comportements cancérigènes) : le 1er mai, Fête du Travail, fut ainsi institué « Journée sans alcool » et, à l’instar de la pilule tournesolienne « à base de plantes médicinales » et « absolument pas toxique » (p. 42), le Front Allemand du Travail remplaça, dès 1940, la bière par le thé sur les lieux de travail et l’Office de Santé du Reich promut le cidre doux non alcoolisé au statut de « Boisson du Peuple », tout en multipliant par cinq la production de jus de fruit (lire à ce sujet Robert N. Proctor, La Guerre des nazis contre le cancer, Les Belles Lettres, 2019)…

     

    A suivre