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marc colmant

  • Sculpteur de la famille royale et de Léon Degrelle

    Eugène De Bremaecker signe le médaillon des 31 ans de Léon Degrelle

     

    Dans notre article sur le premier buste de Léon Degrelle par Ferruccio Vecchi, cofondateur des premiers Faisceaux italiens de combat (ce blog au 3 mai 2024), nous regrettions de n'avoir pas inclus le sculpteur Eugène De Bremaecker parmi les médailleurs du Chef de Rex (ce blog au 11 novembre 2023), faute d'avoir trouvé quelque représentation de son œuvre.

     

    Eugène De Bremaecker.png

    Eugène De Bremaecker (1879-1963)

     

     

    Un lecteur fidèle et critique de nos explorations degrelliennes, par ailleurs collectionneur averti de belles pièces de cette époque passionnante et chercheur expérimenté de son histoire, nous a fait le plaisir de nous envoyer un cliché de son exemplaire de la médaille réalisée par Eugène De Bremaecker.

     

    La mauvaise photographie que nous avions reprise du Pays réel du 14 juin 1937 ne lui rendait pas justice, ne permettant pas de reconnaître vraiment les traits de Léon Degrelle et, à peine, sa silhouette !

     

    LD Bremaecker 1.JPG     LD Bremaecker 2.JPG

     

     

    Nous pouvons maintenant constater que l'artiste a parfaitement rendu la physionomie de son modèle, saisie dans sa juvénile mais ferme confiance. Il se dégage de son expression à la fois de l'innocence, du sang-froid et de la force d'âme.

     

    Nous remercions donc avec beaucoup de gratitude notre correspondant attentif de nous avoir fourni ce précieux document. Il nous illustre en effet qu'Eugène De Bremaecker est un portraitiste des plus fins, ce que confirment ses nombreux bustes et médaillons ciselés à l'image des plus hautes personnalités du pays: Léopold III et Astrid, les souverains belges, le Prince Charles-Théodor (qui donna son nom à la troupe scoute de Léon Degrelle –ce blog au 15 juin 2021– et qui deviendra régent du Royaume en 1944), le cardinal Mercier (premier guide spirituel de Léon Degrelle : ce blog au 26 mars 2017), les tribuns socialistes Emile Vandervelde et Camille Huysmans,... en plus de nombreuses compositions inspirées par la musique ou la danse.

     

    Max+Brem. Patriote ill. 1936.10.04.png

    Le Patriote illustré, 4 octobre 1936.

     

    Cette activité de portraitiste quasi officiel lui valut une interview en première page du quotidien Le Soir recueillant quelques anecdotes sur les Rois et Princes devant le chevalet ou l'ébauchoir, le 19 avril 1930 (Eugène de Bremaecker avait déjà eu les honneurs de la « Une » de La Dernière Heure, le 2 août 1927, dont l'essentiel se retrouve dans la notice Wikipedia de l'artiste).

     

    Méd. Centenaire 1930 aa.png

    C'est Eugène De Bremaecker qui fut choisi pour la réalisation de la médaille commémorative du centenaire de l'indépendance de la Belgique (ainsi d'ailleurs que pour la médaille du Volontaire-Combattant 1914-1918 : voir ci-après). L'encyclopédie du savoir universel Wikipedia présente bien la médaille mais sans indiquer le nom de son créateur.

     

    « ...Qu'a donc à nous dire maintenant le statuaire Eugène De Bremaecker des deux princes Léopold et Charles-Théodor, dont il fit les bustes pour l'iconographie familiale du Palais royal ?

    La toute première des séances consacrées au jeune duc de Brabant faillit tourner au tragique. La chose se passait dans l'appartement dit Fontainebleau du Palais de Belle-Vue. L'éclairage de la salle étant défectueux, l'artiste proposa à son jeune modèle d'aller s'installer dans la serre toute proche. Et il allait sonner des domestiques pour le déménagement de son lourd matériel, lorsque le prince Léopold l'arrêta :

    Nous nous en tirerons bien à nous deux, monsieur l'artiste. On n'est jamais plus vite servi que par soi-même.

    Et d'empoigner à l'instant la plus lourde pièce de l'attirail, lequel, en deux ou trois étapes, se trouva commodément à sa nouvelle place. Tout un système séducteur se révélait là. Mais alors quelque chose survint qui fit pâlir d'effroi Eug. De Bremaecker. Une violente rafale soufflait au dehors. Elle arracha de la charpente d'un toit voisin une grosse poutre qui, projetée au travers du vitrage de la serre, effleura le visage du prince héritier, tout en faisant pleuvoir des éclats de verre tout autour de lui. Une déviation d'un centimètre ou deux et la poutre eût tué ou grièvement blessé le futur titulaire de la Couronne. Celui-ci, souriant, ne broncha point. L'artiste, lui, frissonna à la pensée de la terrible responsabilité qu'eût été la sienne, si le malheur s'était produit.

     

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    Bremaecker Prince Charles DH 1935.05.26.png

    La Dernière Heure, 26 mai 1935.

    Un autre se manifesta chez le jeune comte de Flandre, Charles-Théodor, beaucoup moins expansif, celui-ci, que son frère. Il ne parlait guère pendant la pose ; mais quand il sortait de son mutisme, c'était pour s'exprimer en véritable marin de vocation, profondément épris de navigation lointaine. Avec cela franc, sincère et décidé au possible. Il confia un jour au statuaire qu'il ne pourrait jamais se résoudre à dire blanc quand il pensait noir ou vice versa. Si, par exemple, on me met devant une œuvre d'art, en sollicitant pour elle une admiration qu'elle ne m'inspire pas, vous m'arracheriez la langue plutôt qu'un éloge. Devant une chose dont je ne sens pas la qualité, le maximum qu'on puisse obtenir de moi, c'est que je me taise, par politesse.

    Voilà... Heureux, les artistes à qui leurs modèles livrent ainsi un peu de leur visage intérieur ! Admis à scruter le dedans comme les dehors, de quelle vie véritable ils peuvent animer la toile, ou le bronze, ou le marbre !

    Gérard Harry »

    (Le Soir, 19 avril 1930)

     

    Mais quels furent les liens entre Eugène De Bremaecker et Léon Degrelle ? Le sculpteur fut-il un rexiste convaincu ? A l'instar, par exemple, du médailleur Marc Colmant qui se porta candidat du mouvement Rex aux élections municipales de sa commune bruxelloise, Ganshoren, en 1938, l'année qui suivit la remise du médaillon de De Bremaecker au Chef ?

     

    En fait, nous n'en savons rien et nous ne pouvons que risquer quelques hypothèses à partir des rares traces de l'artiste dans le sillage rexiste.

     

    Eugène De Bremaecker est le seul médailleur dont l'oeuvre a été illustrée dans le quotidien rexiste : ni Victor Demanet, ni Marc Colmant n'ont eu cette opportunité. Jamais il ne sera d'ailleurs fait mention de leur médaillon degrellien dans Le Pays réel. Les productions de Marc Colmant n'y bénéficieront même jamais d'aucun commentaire ou présentation (son nom ne sera ainsi mentionné que dans la seule liste des candidats rexistes aux élections de Ganshoren !). Et si ce n'est pas le cas du plus célèbre Victor Demanet (dont le quotidien ne manque pas de signaler les bustes, médaillons et bas-reliefs consacrés, en 1936, 1937 et 1938, au roi Albert à Arlon, Crainhem et Léopoldville), ce sera toujours sans illustration.

     

     

    PR 1936.12.07 Puccini.png

    Le buste de Giacomo Puccini offert au Théâtre Royal de la Monnaie, le 17 décembre 1936, à l'occasion de représentations de La Bohème, par Eugène de Bremaecker et le fils du compositeur, Antonio Puccini. Nous ignorons où cette sculpture se trouve actuellement. Photo publiée par Le Pays réel, le 7 décembre 1936.

     

    Par contre, quand Le Pays réel présente le buste de Puccini sculpté par De Bremaecker pour le Théâtre de La Monnaie (la scène lyrique bruxelloise), en décembre 1936, une grande photographie ouvre sa rubrique culturelle. De même, lorsque le médaillon de Léon Degrelle est évoqué dans Le Pays Réel du 14 juin de l'année suivante, une photo illustre naturellement l'article. Mais ce traitement, apparemment de faveur, traduit-il une plus grande proximité politique ? Pourrait-on le penser alors qu'à partir de ce moment, le nom de l'éminent médailleur ne sera plus jamais mis en avant (à part sa participation parmi tant d'autres à une exposition bruxelloise en 1938) ?

     

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    Antonio, le fils de Giacomo Puccini, et son épouse, accompagnés du sculpteur Eugène De Bremaecker lors de la remise du buste dans le foyer de l'opéra de Bruxelles (photographie publiée dans le magazine Hebdo, le 25 décembre 1936.)

     

    Ne peut-on cependant penser que le fait même d'offrir à Léon Degrelle son portrait exprimé dans le bronze suppose au moins quelque sympathie pour le modèle ?

     

    Notre correspondant suggère deux éléments pour, éventuellement, l'expliquer :

     

    « 1. De Bremaecker était un volontaire de la guerre 1914-1918. Or, au moins pour la période 1936-1937, REX put compter sur le soutien de nombreux vétérans de la Grande Guerre (Degrelle mettant régulièrement en avant les anciens combattants dans ses discours et écrits).

     

    2. De Bremaecker semble avoir été un artiste particulièrement attaché à la famille royale comme en témoignent les ''bustes royaux'' qu'il réalisa d'Albert Ier, du prince Charles ou encore de la Reine Astrid. Or, REX était un mouvement monarchiste très attaché à la personne du Roi dont il voulait d'ailleurs renforcer les prérogatives.

     

    Tout cela reste malgré tout fort léger pour sérieusement envisager une communauté d'idéal entre l'artiste et le politicien et, à moins de trouver quelques nouveaux éléments probants, il me semble plus prudent de ne pas considérer De Bremaecker comme ayant été un (sympathisant) rexiste. »

     

    Que De Bremaecker fût particulièrement attaché à la famille royale, nous venons de le vérifier, constatant même qu'une relation de confiance avait pu s'établir entre le sculpteur et les membres de la Cour prenant la pose et s'ouvrant aux confidences.

     

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    de Pierre Daye (ce blog aux 4 mai 2016 et 24 mars 2021), célèbre chroniqueur, soldat-milicien ayant participé aux combats de Namur, d'Anvers, de l'Yser et dans les colonies allemandes d'Afrique ; du dramaturge Paul De Mont (ce blog au 10 juin 2016), officier volontaire-combattant, Croix de l'Yser, Croix du Feu, grand invalide, amputé des deux jambes,... Tous les sénateurs rexistes (huit sénateurs élus directs, trois provinciaux et un coopté) sont d'ailleurs d'anciens combattants de la Première Guerre mondiale.

     

    A la question de savoir si De Bremaecker fut militant ou même simple membre de Rex, il faut très certainement répondre par la négative. Mais pareille hypothèse est sans doute parfaitement oiseuse car si nous considérons que les médailles qui furent éditées avec le profil de Léon Degrelle datent toutes de la même période 1937-1938, on pourrait se demander si ces oeuvres ne répondaient pas à une commande ou à une espèce de concours (une suggestion pour un cadeau ?) avec un cahier des charges tel que : présenter le profil du chef de Rex ainsi qu'afficher le slogan du mouvement « Rex vaincra ».

     

    Médaille Bremaecker R.JPG  Médaille Demanet R.png  Médaille Colmant.png

    De gauche à droite et par ordre chronologique, le slogan « Rex vaincra » selon Eugène De Bremaecker, Victor Demanet et Marc Colmant.

     

    Ce sont en effet les impératifs auxquels répondent précisément les trois médaillons que nous avons examinés (ce blog au 11 novembre 2023). Nous n'avons bien sûr trouvé aucune trace de pareille demande dans les organes rexistes : une telle publicité n'eût pu qu'alimenter les railleries de la presse prompte à accuser le tribun rexiste de mégalomanie !...

     

    Aussi ne pouvons-nous, compte tenu de tous ces éléments, exclure non plus quelque sympathie pour Léon Degrelle et de l'intérêt pour son combat contre les « banksters » avec le balai pour emblème et « Propreté ! » comme slogan.

     

    Rex Balais 1936.jpg   Rex 1936.01.03 Propreté.png

     

    Et ce, malgré que les parents d'Eugène De Bremaecker fussent d'actifs militants libéraux : le père, Alexis De Bremaecker, fut conseiller libéral à Bruxelles et la mère, Céline, s'occupait de la section féminine de l'Association libérale de Bruxelles. Que la vigoureuse campagne anti-banksters de Léon Degrelle en 1936 n'épargnât pas de grandes figures du Parti libéral (outre le ministre des Transports Marcel-Henri Jaspar –ce blog au 3 mai 2024–, figurèrent ainsi dans le collimateur rexiste le ministre d’État Louis Franck, gouverneur de la Banque nationale ; le ministre des Finances Max-Léo Gérard ; le ministre de la Justice Victor de Laveleye, etc.) ne heurta manifestement pas le sculpteur, avide lui aussi sans doute d'un assainissement des mœurs politiques...

     

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    Ne manquons pas non plus de relever que si la médaille sculptée par Eugène De Bremaecker honorait les trente et un ans de Léon Degrelle, sa remise au cours du banquet d'anniversaire se passa aussi dans le contexte électrique de la défaite électorale du 11 avril 1937. Deux mois plus tard, le 11 juin, le rédacteur en chef du Pays réel et membre du conseil politique de Rex, Hubert d'Ydewalle, démissionnait avec fracas de ses fonctions, provoquant un véritable séisme politique dans le mouvement.

     

    L'anniversaire de Léon Degrelle devait être l'occasion d'afficher l'union des rexistes et la confiance en l'avenir : Eugène De Bremaecker semble avoir participé ostensiblement et activement à cette manifestation de refondation puisque le quotidien rexiste ne manqua pas de souligner que « La fête se termina par un bal fort animé et l'on retrouvait dans la foule animée des danseurs, MM. René Lust, chef de Rex-Bruxelles-arrondissement, [...] De Bremaecker et quantité de dirigeants rexistes ».

     

    C'est dans cette perspective que, dès le lendemain, les membres du Conseil politique de Rex mettaient leur mandat à la disposition du chef de Rex « pour toute réorganisation éventuelle ». Plusieurs des membres de ce Conseil allaient d'ailleurs en profiter pour prendre rapidement leurs distances : Pierre Daye démissionna immédiatement de ses fonctions de président du groupe parlementaire rexiste à la Chambre. Xavier de Grünne attendra, quant à lui, la fin de l'année pour quitter le navire.

     

    Mais d'autres ne retarderont pas plus longtemps leur départ, provoquant ce qu'on ne peut qu'appeler une hémorragie dans les rangs du mouvement. Ainsi de René Lust, chef du Front populaire de Rex, région de Bruxelles, président du conseil d'administration de Radio-Rex et membre du Conseil politique de Rex, qui s'enfuit dès le 19 juin ; Jacques Crokaert, membre du Conseil politique, le 20 juin ; quant au colonel Georges Vigneron, s'il quittera la direction des Gardes rexistes le 23 juin, il conservera son siège de sénateur provincial. Ce mouvement délétère se poursuivra jusqu'aux élections législatives anticipées du 2 avril 1939.

     

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    Alarmé par cette avalanche de défections et déçu par ces abandons, Léon Degrelle veut néanmoins y voir, au-delà de l'ingratitude et de l'opportunisme des dissidents, l'occasion d'une salutaire purification du mouvement. Dans son discours de réception du médaillon d'Eugène De Bremaecker, il affirme : « Qui serait devenu député, sénateur ou dirigeant à Rex ou dans ses journaux sans y être porté par la seule et unique force de Rex ? Que ceux qui ne sont pas contents fichent le camp. [...] Ceux qui voudraient se faire de Rex un escabeau seront balayés. [...] Les douleurs et les trahisons ne nous abattront pas. Ce sont ces épreuves qui feront la victoire et qui nous feront rester semblables à ce que nous étions au premier jour. » (Le Pays réel, 14 juin 1937, p. 3).

     

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    Nous étonnerons-nous de ne plus entendre parler d'Eugène De Bremaecker dans l'entourage rexiste après cette fête d'anniversaire où il remit à Léon Degrelle le médaillon qu'il lui avait sculpté ?

     

    L'artiste n'avait en effet pas à se montrer plus catholique que le Pape ni plus rexiste que le chef de Rex-Bruxelles, René Lust, dont le nom lui avait été associé, par Le Pays réel, parmi les danseurs assidus du bal clôturant cette mémorable soirée du 12 juin 1937 !...

     

    Eugène De Bremaecker n'eût de toute façon jamais suivi Léon Degrelle dans sa croisade antibolchevique destinée à rendre à la Belgique, grâce à l'héroïsme de ses faits d'armes au Front de l'Est, une place respectée dans l'Europe d'Ordre nouveau : son patriotisme était trop ancré dans la haine de l'Allemand issue de la Grande Guerre. Il ne parlera d'ailleurs jamais de cet « ennemi héréditaire » qu'en utilisant les expressions patronymiques argotiques classiquement péjoratives. Ainsi de deux anecdotes confiées à l'hebdomadaire Pourquoi Pas ? le 7 janvier 1949 : « C'était pendant la guerre... Une auto boche, fonçant dans le décor et derrière un tramway, manque de me tuer net. Je venais de frôler la mort de tellement près, et dans un éclair si rapide, que c'est après seulement que le choc se fit sentir. » (p. 28) ; « Je me vante d'y avoir écrit [dans la Gazette], en 1934, un article sur ce que nous préparait la Bochie, et dans lequel j'avais tout prévu jusqu'aux parachutages. » (p. 29)...

     

    Après la guerre, De Bremaecker eut bien encore l'occasion d'exprimer son art du portrait dans des médaillons exaltant des figures sportives, musicales ou patriotiques. Nous remarquerons également que, tout comme pour la médaille de Léon Degrelle, le sculpteur opte toujours pour le profil gauche, une caractéristique qui semble lui appartenir en propre !

     

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    DH 1949.05.01.png   LLB 1949.09.05.png

    Photographies extraites, de gauche à droite et de haut en bas, de La Libre Belgique du 6 juin 1945 (maréchal Montgomery), de La Dernière Heure des 11 novembre 1947 (Jef Scherens, septuple champion du monde de cyclisme sur piste), 9 juillet 1948 (le musicologue Gaston Knosp), 18 octobre 1948 (lieutenant-général Van Strydonck de Burkel) et 1er mai 1948 (le compositeur Marcel Poot) et de La Libre Belgique du 5 septembre 1949 (le roi Albert et la reine Elisabeth au cours de la Première Guerre mondiale).

  • Léon Degrelle dans l'art de la médaille

    Les médaillons de Victor Demanet et

    Marc Colmant

     

    Si Léon Degrelle a été abondamment dessiné (par exemple, en pré-Tintin, par Albert Raty, ce blog au 1er février 2016), peint (notamment par un artiste flamand, ce blog au 13 avril 2022) et caricaturé, le plus souvent méchamment et calomnieusement, mais aussi de manière sympathique (toujours chez Jam ; avec rosserie lorsque, après-guerre, il deviendra Alidor ! ce blog, par exemple, aux 2 février 2017, 4 juin 2019, 26 mai 2022), il fut aussi célébré dans le marbre, le bronze ou le cuivre, et ce, par les meilleurs artistes belges.

    victor demanet,marc colmant,albert raty,jam,alidor,révolution des Âmes,godefroid de bouillon,saint arnould,henri de man,plan du travail,orec,jules boever,fernand degreef,ganshoren,le cercle du collectionneurFusain du grand peintre ardennais Albert Raty, en frontispice de Mon pays me fait mal, publié en 1927 par un Léon Degrelle de vingt ans, dont la houppette inspirera Hergé (ce blog, entre autres, au 23 janvier 2016). Charles, le frère d'Albert Raty, avait épousé Jeanne, la sœur aînée de Léon Degrelle, le 23 avril 1924.

    Nous évoquerons ici quelques plaquettes, médaillons ou médailles ornés de son profil, constituant autant d'œuvres d'art séduisantes et pittoresques.

     

    Victor Demanet

     

    La plus belle plaque murale est due, sans doute, au ciseau de Victor Demanet (1895-1964) montrant un Degrelle sûr de lui, au visage fermé dont le sourcil anguleux souligne la détermination. Ce bas-relief fut fidèlement sculpté, en 1936, d’après le célèbre cliché diffusé au milieu des années 30 sous la forme d’une carte postale à la signature imprimée. Elle faisait partie d’une série de portraits de Léon Degrelle, vendus au profit du fonds de propagande de Rex. Ces photographies avaient été réalisées par le Studio Max, situé sur le prestigieux (à l’époque) boulevard de Waterloo de Bruxelles, dans le haut de la ville (ce blog au 3 mai 2021).

     

    LD Studio Max-horz.jpg

     

    Rien dans les biographies disponibles de Victor Demanet ne signale de particulière sympathie pour Léon Degrelle et le rexisme.

    Si la Biographie Nationale (t. 43, suppl. XV, fasc. 1er, col. 287-292) souligne bien son « amour du peuple » s’exprimant particulièrement dans sa « sculpture dédiée au labeur ouvrier », elle se garde bien de le rapprocher de la constante exhortation de Léon Degrelle à la « Révolution des âmes » (ce blog au 12 octobre 2023). L’auteur prend d’ailleurs soin de préciser qu’aux côtés de « nos rois (principalement le roi Albert), nos reines, nos princes », l’activité sculpturale officielle de Victor Demanet honore plus spécialement… « nos résistants ». Tant il est vrai que le sculpteur namurois fournit, après-guerre, nombre de bronzes exaltant la brigade Piron, le général Patton ou différentes personnalités de la résistance et de l’antirexisme, tel, par exemple, François Bovesse,

    Force nous est néanmoins de constater qu’au temps de la lutte épique contre les « banksters », des grands rassemblements populaires de Léon Degrelle et des formidables succès électoraux rexistes, Demanet multiplia les portraits du chef de Rex, notamment cette belle médaille du jeune Léon Degrelle au col de chemise ouvert, en 1938. Disponible en différents formats –dont une épinglette–, elle présente au revers la reproduction du célèbre bas-relief « Vouloir » (aussi appelé « L’Effort »), sommé du texte « Rex vaincra » ou, dans la version néerlandaise, « Rex Ter Zege ».

     

    Médaille FR 1 A Demanet-horz.jpg

    Les médailles conçues par Victor Demanet pour exalter la figure de Léon Degrelle et l’action spirituelle et sociale de son mouvement Rex ont été commercialisées sous deux formats : 8,25 et 5,35 cm, gravées des deux côtés de la pièce. À l’avers, le profil de Léon Degrelle, col ouvert, à l’expression déterminée, est entouré (auréolé !) de son nom : à gauche « LEON » précédé du monogramme de Victor Demanet ; à droite « DEGRELLE ». Le revers s’orne de la reproduction de « L’Effort » ou « Vouloir », sujet ayant servi de support à de nombreuses médailles commémoratives professionnelles ; au-dessus, la devise « REX VAINCRA » ; au-dessous, l’emblème de Rex en couronne du Christ-Roi, imaginé par Richard Krack (ce blog au 12 novembre 2020). Cette médaille existe également sous forme d'insigne à piquer au revers de son veston ou de broche pour le vêtement (2,25 cm de diamètre) dont l’arrière, aveugle, est muni d’une attache sous forme d’épingle verticale ou d’épingle à fermoir de sécurité.

     

    Peut-être est-ce d’ailleurs à cette proximité avec Léon Degrelle que le sculpteur dut la commande pour la ville de Bouillon (dont le père du tribun, le brasseur Edouard Degrelle, était conseiller communal, constamment réélu depuis 1904, en même temps d’ailleurs que conseiller provincial de Luxembourg) de deux statues emblématiques de la ville, Godefroid de Bouillon et Saint Arnould.

    L’initiative en revient à l’éphémère et inefficace Office de Redressement économique (OREC, un organisme imaginé par Henri De Man dans le cadre de son Plan du Travail et mis en place en avril 1935 pour stimuler un programme de travaux publics et de résorption du chômage : il disparut dès 1938), mais ce sont des mécènes, associés à l’Administration des Ponts et Chaussées, qui en assurèrent le financement. Prononçant le discours inaugural à la cérémonie de remise des statues à la ville de Bouillon, le représentant du gouvernement justifia le choix historique et artistique des nouveaux ornements du Pont de Liège, concluant : « À l’ombre du vieux château, ces statues de Godefroid de Bouillon et de Saint Arnould rappelleront qu’ici, l’on a toujours le culte de la patrie et de la grandeur nationale. »

    Av. Lxbg 28.06.1939.pngPeu après la réalisation des portraits de Léon Degrelle, Victor Demanet sculptera deux statues monumentales pour la ville natale de son modèle : Saint Arnould et Godefroid de Bouillon. Leur inauguration, le 25 juin 1939, fut l’occasion d’une cérémonie grandiose, associant les représentants de la Cour royale et du Gouvernement aux notables locaux. L’Avenir du Luxembourg, le grand quotidien catholique de la province (dont le grand-père maternel de Léon Degrelle, le Dr Jules Boever, fut l’un des fondateurs), en fit un compte rendu détaillé (« Pour honorer deux de ses illustres enfants, Bouillon a vécu des heures inoubliables »), mais en confondant les deux sculptures: la photo de première page ne reproduit pas le monument de Saint Arnould, mais celui de Godefroid de Bouillon !...


    P
    lacés de part et d’autre de l’accès au Pont de Liège du côté de la place Saint-Arnould, sur la même rive que la maison familiale des Degrelle, les deux monuments en pierre du pays de Gaume, entendaient immortaliser les principaux ducs de Bouillon, Saint Arnould, –premier de la lignée et patron des brasseurs–, et Godefroid de Bouillon, chef de la Première Croisade, avoué du Saint-Sépulcre et modèle inspirant de Léon Degrelle.

     

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    Dix mois après leur inauguration, les statues de Victor Demanet échappèrent miraculeusement à la destruction lorsque les artificiers du 295e régiment d’infanterie de l’armée française firent sauter, au soir du 11 mai 1940, les ponts de Bouillon sur la Semois, tout en bombardant les quartiers populaires situés en bordure de la rivière (les documents mis aujourd’hui à la disposition des touristes laissent entendre mensongèrement que la dévastation de la ville fut l’œuvre des Allemands. Ainsi du site Connaître la Wallonie qui écrit sans sourciller : « lors de l’invasion allemande de mai 1940, aucune chance n’est laissée au Pont de Liège. Le bombardement épargne miraculeusement les deux statues » !). Les ouvrages d’art furent rapidement réparés par le génie allemand, installant sur le pont de Liège une passerelle permettant le passage des piétons, assurant ailleurs la traversée pour le charroi le plus lourd (ce blog au 15 juin 2021).

    Saint Arnould 1940.pngPhoto prise peu après la prise de Bouillon par les Allemands en mai 1940. Une autochenille allemande Sd. Kfz. 10 (Sonderkraftfahrzeug 10) est stationnée à l'entrée du pont de Liège, près de la statue intacte de Saint Arnould.

     

    Les statues ne furent que peu abîmées : la photo de 1940 (ci-contre) montre en effet un Saint Arnould intact alors que celles de 1941 (ouvrant et fermant cette digression) le montrent, neuf mois plus tard, décapité, Godefroid demeurant entier. Certains n’ont pas manqué de voir dans cette mutilation une menace voilée contre le brasseur Edouard Degrelle via son saint patron…

     

    Après la guerre, les œuvres d’art restaurées ne furent néanmoins pas autorisées à rejoindre le lieu pour lequel elles avaient été conçues : punition pour la supposée (et dès lors coupable) proximité degrellienne de leur concepteur ?

     

    Godefroid fut le mieux traité, placé à la fin du sentier pédestre menant à l’entrée de son château. Saint Arnould, quant à lui, a été relégué tout au bout du quai de la Tannerie, en surplomb de la Semois, loin de toute habitation et dissimulé par l’abondante végétation, ce qui a grandement facilité une nouvelle décapitation par d’imbéciles vandales en juin 2020.

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    (Les photos ouvrant et fermant ce texte ont été prises le 6 février 1941 par le Service photographique de Ministère des Travaux publics de Belgique et sont conservées aux Archives générales du Royaume).

     

     

    Marc Colmant

     

    Le sculpteur bruxellois Marc Colmant (1898-1962) est un artiste moins connu que Victor Demanet, ne bénéficiant pas de notice dans la Biographie Nationale, ni même d’une référence sur « Wikipedia ».

    IMG_20231107_123824.jpgC’est dire que nous n’avons guère de renseignements sur lui, sinon qu’il réalisa de belles statuettes dans le style romantique qui connaissent toujours le succès dans les ventes d'art contemporaines ainsi que des médaillons pour quelques tombes de notables, notamment celle du bourgmestre de Ganshoren, Jan Frans (Fernand) Degreef, mort en 1928 (photo ci-contre).

     

     

    Colmant Faune.jpg« Marc Colmant est un sculpteur qui, à en juger par ce qu'il expose, aime à travailler en petites dimensions. La plupart du temps, cela lui réussit très bien. Il y a dans Faune à la Sarbacane [...] un mouvement, une élégance nerveuse du meilleur aloi. » (Le Nouveau Journal, 26 novembre 1943).

     

    Ce n’est pourtant pas par hasard que Marc Colmant réalisa une médaille en l’honneur de Léon Degrelle : il était lui-même militant rexiste et même troisième candidat de la liste de Rex aux élections communales du 16 octobre 1938 à Ganshoren, la commune du nord de l'agglomération bruxelloise où il habitait. Il ne sera malheureusement pas élu.

    Médaille LD Marc Colmant.png

     

    Le médaillon proposé par Marc Colmant (diam. 14 cm) est, tout comme le bas-relief de Victor Demanet, inspiré de la photographie du Studio Max. Mais il n'est pas traité à la manière de Demanet que nous pourrions qualifier d' « hyperréaliste ». Si les accentuations de relief et l'arrondi de la tête mettent sa jeunesse en évidence, ils confèrent aussi à Léon Degrelle une expression plus introspective, soulignée par sa moue mi-amusée, mi-dubitative et des sourcils interrogateurs. Un portrait du jeune chef tout au service du destin de renaissance spirituelle du peuple qu'il s'est assigné, autrement dit, la « révolution des âmes » (ce blog, entre autres, au 31 mars 2020).

    Pour l'artiste, qui signe fièrement son œuvre, aucun besoin de nommer le portrait de celui qui s'est rendu célèbre en chassant les banksters de la cité, à l'instar de Celui qui chassa les marchands du Temple. Seul compte le mot d'ordre : REX VAINCRA.

    À l'évidence, l’œuvre d'un artiste qui connaît son modèle de près et apprécie sa joie de vivre et son humanité curieuse et attentive.

    Après la guerre, il semble bien que Marc Colmant eut à souffrir d'une définitive damnatio memoriae car nous n'avons plus trouvé trace d'aucune exposition accueillant ses œuvres, ni d'aucune critique les commentant. Même sa tombe a subi cette loi inique de l'effacement en disparaissant du cimetière communal de Ganshoren.

    Colmant Tombe Ganshoren.jpg

    Marc Colmant est mort en 1962 à l'âge de 64 ans seulement. Il reposait dans le caveau de ses parents qu'il avait aménagé dans l'ancien cimetière de Ganshoren. Malgré sa valeur aussi bien historique que patrimoniale, sa tombe a été rasée peu avant l'ouverture du Nouveau Cimetière en 1976. Voici l'endroit où se trouvait le monument funéraire, dans la seconde allée, à l'emplacement numéro 68...

     

    Toutes les œuvres ici décrites sont disponibles sur le site Le Cercle du Collectionneur.