Le neutralisme belge de Léon Degrelle aurait caché
ses sympathies nazies !
« Au début des hostilités (septembre 1939-mai 1940), Degrelle se rallie à la politique de neutralité belge de Léopold III et du gouvernement Pierlot. Ce qui ne l’empêche pas d’adopter une attitude hostile à la France et à la Grande-Bretagne, et favorable à l’Allemagne ».
Que voilà une singulière inversion des faits ! Tout d’abord, la politique de neutralité avait été proclamée par le Roi Léopold III dès le 14 octobre 1936, dans son discours au Conseil des ministres, avant d’être réaffirmée par le Premier ministre Pierlot, le 3 septembre 1939, à l’occasion de la déclaration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France à l’Allemagne.
Et s’il y eut un responsable politique à mener bec et ongles campagne pour une stricte et honnête neutralité belge vis-à-vis de tous ses voisins, ce fut bien Léon Degrelle (tout comme d’ailleurs son ami Hergé qui participa activement à l’hebdomadaire neutraliste L’Ouest, en ridiculisant les va-t-en-guerre franco-britanniques avec sa bande dessinée « Monsieur Bellum »).
Par contre, le Roi, tout comme ses ministres, biaisaient on ne peut plus cyniquement cette politique officielle de neutralité, au nom de ce qu’on a appelé « l’impossible neutralité des consciences » (tout comme le Monsieur Bellum de Hergé s’exclamant, dans L’Ouest du 14 décembre 1939, face à son poste de radio : « Neutralité !... Neutralité !... Mais la neutralité des consciences, ça, jamais !... ») !
Ignorant tout de ces agissements, Léon Degrelle saluera d’ailleurs avec enthousiasme, dans Le Pays réel du 28 octobre 1939, l’allocution radiodiffusée du Roi à l’intention des Etats-Unis. Il en proposera un résumé schématisant les points essentiels en autant de « points de repère » obligés ne souffrant aucune attitude hostile ou favorable envers quelque belligérant !
« Le Roi a voulu la neutralité. Il l’a guidée, protégée. Si des milliers de mères ne pleurent pas, si nos villes ne sont pas éventrées, c’est au génie politique et à la ténacité du Roi que les Belges le doivent. […] Dans notre nuit symbolique, ces phrases s’élevaient comme des […] points de repère qui marqueront désormais notre route.
1. Notre neutralité est dans la ligne de notre histoire. […]
2. Notre neutralité épargne à notre pays les horreurs indicibles de la guerre. […]
3. Notre neutralité sauve la vie même de la Belgique. […]
4. Notre neutralité défend la civilisation. […]
5. Notre neutralité n’admet pas d’asservissement économique. […]
6. Notre neutralité n’est pas une attitude de lâches. »
Et de conclure en se félicitant d’avoir gardé ce cap qui lui valut d’être accusé de favoriser l’Allemagne, puisque, dans son discours, le Roi lui-même le payait de ses avanies en officialisant tous les principes de la vraie neutralité : « A certains, ces nobles paroles apparaîtront comme des mises au point, parfois même comme des reproches. Mais à ceux qui ont lutté pour faire entrer dans l’esprit public chacun de ces mots d’ordre, à ceux qui ont subi les injures et les suspicions les plus pénibles pour les défendre, ces consignes royales ont apporté la récompense la plus émouvante et la plus haute… Quand on est du côté de la Patrie, il faut tenir bon, même si ça coûte et si on se sent seul. Ceux qui ont défendu la paix ont, à certaines heures, senti toute l’amertume qu’il y avait à dire le vrai et juste quand il était si simple de saisir à pleines brassées les succès en suivant les passions des foules. Mais la parole du Roi a payé de tout. Et le bonheur se mêle aujourd’hui à la joie du devoir ingrat, accompli pour lui-même. »
M. Delorme eût donc été mieux inspiré d’écrire : Au début des hostilités (septembre 1939-mai 1940), Degrelle se rallie à la politique officielle de neutralité belge de Léopold III et du gouvernement Pierlot, ce qui lui valut d’être traité de valet de Hitler, alors que les autorités belges adoptaient secrètement des mesures favorables à la France et à la Grande-Bretagne, privilégiant ces derniers face à l’Allemagne » !
A propos des véritables agissements des responsables belges et des sentiments de Léon Degrelle, voir ce blog aux 4 juin 2016 et 28 juin 2017.
Après avoir ainsi présenté Léon Degrelle comme une espèce d’agent de la « Cinquième colonne » allemande, il coulait dès lors de source pour M. Delorme de présenter comme normale l’arrestation scandaleuse, en violation flagrante de son immunité parlementaire, du député Léon Degrelle : « En mai 1940, Degrelle et de nombreux rexistes sont arrêtés préventivement. » Sur l’arrestation de Léon Degrelle, son incroyable transfert à une justice française inexistante, les sévices et tortures qu’il dut subir au long de près de trois mois d’incarcération et de mise au secret dans plus d’une quinzaine de prisons, forteresses et camps de concentration, voir ce blog aux 30 avril et 6 mai 2017.
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La « Bourgogne » degrellienne asservie à l’Allemagne ?
« [Léon Degrelle] nourrit alors un grand projet : celui de faire de la Wallonie l’élément dominant d’une nouvelle Bourgogne, d’une nouvelle Lotharingie […]. Ces deux entrevues [entre Hitler et Degrelle] donnent lieu à des discussions approfondies sur la politique allemande en Belgique. […] la vraisemblance suggère que les deux hommes se sont accordés sur la création de cette Grande Bourgogne chère à Degrelle, même s’ils l’envisageaient de manières différentes (une marche du Reich sous stricte tutelle, pour Hitler, un Etat largement autonome de la communauté germanique, pour le chef rexiste). […] Et il est certain que [Hitler] considérait la “grande Bourgogne” à venir comme un simple protectorat ».
Nous avons déjà eu l’occasion de montrer en long et en large que le projet de « nouvelle Bourgogne » non seulement n’était en rien utopique mais que sa conception, et du point de vue d’Adolf Hitler et de celui de Léon Degrelle, n’était en rien non plus antinomique (voir ce blog aux 20 mai 2016 et 28 juin 2017).
Il suffit de lire ce qu’en dit Felix Kersten –kinésithérapeute de Heinrich Himmler et en rien concerné par cette affaire (c’était probablement la première fois qu’il entendait parler de Léon Degrelle !)– recueillant le rapport d’un entretien que le Reichsführer venait d’avoir avec Adolf Hitler : « La Bourgogne sera reconstituée sous une forme moderne ; ce sera un modèle et ses capacités en feront un des États les plus riches qui ait jamais existé. […] La Bourgogne sera un État indépendant au sein de l'Empire européen, disposant de ses lois propres, de son armée et de son gouvernement propres, de sa monnaie, de ses services postaux et de ses distinctions propres. […] Hitler a donné l'ordre exprès qu'aucune autorité du Parti national-socialiste allemand n'ait le droit d'interférer dans les affaires de la Bourgogne. Il y aura une ambassade bourguignonne à Berlin et une allemande en Bourgogne. [...] La Bourgogne sera inspirée par la philosophie SS afin que l’État modèle dont rêve le Führer devienne une réalité. » (cité d'après The Kersten Memoirs, with an Introduction by H.R. Trevor-Roper, Chap. XXVI « The Burgundian Free State », pp. 184-185.)
On le voit, contrairement à ce qu’affirme péremptoirement P.-A. Delorme, il n’est nullement question d’ « […] une marche du Reich, sous stricte tutelle, […] un simple protectorat », mais bien d’un Etat indépendant, devant d’ailleurs fonctionner comme un Etat modèle, servant d’ « exemple pour tous les Etats du monde » (Kersten, p. 185)…
Autre affirmation gratuite de l’auteur qui n’a manifestement rien compris au destin bourguignon de la Belgique au sein de la nouvelle Europe que lui assuraient les deux chefs de peuple : « [Léon Degrelle] pense alors, en effet, que la Belgique, dont pourtant il prétendait incarner l’identité, est désormais condamnée, d’une part en raison de la défaite et de l’hostilité allemande, d’autre part de l’existence d’un mouvement indépendantiste flamand décidé à profiter de la situation pour parvenir à ses fins. »
Cela, c’est ce qu’écrivent les « historiens officiels » pour condamner la « trahison » de Léon Degrelle. Mais nous avons montré comment le chef de Rex avait surmonté ces obstacles dressés par la vieille administration militaire allemande pangermaniste et sa Flamenpolitik, en s’imposant directement auprès du Führer (voir ce blog, notamment, au 28 juin 2017). La certitude belgo-bourguignonne sort d’ailleurs renforcée de la rencontre inéluctable Hitler-Degrelle qui suivit le sauvetage de Tcherkassy, contredisant très précisément les allégations de M. Delorme :
« Hitler m’avait remis la cravate de la Ritterkreuz. Je m’était battu en vrai soldat. Le Führer le reconnaissait. J’étais fier. Mais ce qui m’exaltait surtout dans cette nuit frémissante, c’était le prestige qu’aux yeux d’Hitler avaient acquis mes soldats. […] Nous étions partis pour le front anti-bolchevique afin qu’au-delà du malheur, le nom de notre patrie, jetée au sol en mai 1940, retentisse à nouveau, glorieux et honoré. Soldats de l’Europe, nous voulions que, dans l’Europe qui se créait si douloureusement, notre vieux pays reconquît une place aussi rayonnante que dans le passé. Nous étions les hommes du pays de Charlemagne, des ducs de Bourgogne et de Charles-Quint. Après vingt siècles de merveilleux rayonnement, ce pays ne pouvait pas sombrer dans la médiocrité ou dans l’oubli ! Nous nous étions jetés à la rencontre de la souffrance pour que, de notre sacrifice, jaillissent à nouveau de la grandeur et des droits à la vie ! Dans cette baraque, devant ce génie en pleine puissance, je me disais quel le lendemain, le monde entier saurait ce qu’avaient fait les Belges à Tcherkassy. Il connaîtrait l’hommage éclatant que le Reich, pays de soldats, leur avait rendu ! Je me sentais brisé, rongé par ces semaines terribles. Mais mon âme chantait ! La gloire était là, gloire pour notre Légion héroïque, gloire, au-delà d’elle, pour notre patrie en route vers la résurrection ! » (La Campagne de Russie, p. 330).
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Degrelle et Hitler ne pouvaient pas se comprendre !
« Ces deux entrevues [entre Hitler et Degrelle] donnent lieu à des discussions approfondies sur la politique allemande en Belgique (par le truchement d’un interprète, chacun des deux interlocuteurs ignorant la langue de son vis-à-vis). »
C’est cette précision incongrue qui vaudra à P.-A. Delorme un courrier de M. Claude C. publié par Rivarol le 18 avril 2017, nous révélant par la même occasion cette publication : « sur la question de l’interprète : dans le blog le dernier carré.hautetfort.com, il y a une contribution très intéressante du 05/01/2018, “Adolf H. comprenait très bien le français”, car il avait été estafette en 14-18 et passait son temps libre dans des cafés français, et Degrelle, depuis 3 ans sur le Front de l’Est, en contact quotidien avec des officiers allemands, se débrouillait très bien en allemand. »
C’est en effet la thèse que nous défendons : les deux interlocuteurs pouvaient très bien se comprendre, même si chacun s’exprimait dans sa langue maternelle.
Nous nuancerons cependant notre démonstration sur la maîtrise de l’allemand par Léon Degrelle, qui s’appuyait, entre autres, sur l’épisode lui ayant valu les « Feuilles de Chêne », décrit comme suit par le général Anton Grasser : « Son engagement personnel est caractérisé parle fait qu’il donna ses ordres debout sur le bord du fossé, incitant ainsi à la résistance les Estoniens peu endurcis. » Nous en concluions : « Il faut bien supposer que les ordres qui se devaient d’être précis et parfaitement intelligibles furent effectivement donnés en allemand par un Léon Degrelle s’adressant à des soldats allemands et estoniens !... »
C’est Léon Degrelle lui-même qui va tempérer nos propos en nous donnant sa propre version de cet épisode crucial : « Je ne voyais qu’une chose : c’est que Dorpat était rempli de centaines de camions en retraite […]. Je fis dégringoler tous les soldats du premier camion et de deux autres camions qui suivaient. Par bonheur, un sous-officier allemand comprenait le français à merveille. Je lui fis traduire mes ordres : “Nous allons contre-attaquer immédiatement. Il y aura des Croix de fer, ce soir même, pour ceux qui auront été les plus braves. Les Russes ne s’attendent pas à une réaction maintenant. C’est le bon moment pour leur sauter dessus. Vous allez voir ça ! Tout est une question d’audace. En avant, camarades !” Emmenant à contre-poil cette soixantaine de soldats, en déroute cinq minutes plus tôt, je courus aux Bolchevistes qui avançaient dans les talus du chemin. »
Mais si le retournement des fuyard par des ordres précis et de vigoureuses paroles a pu se faire rapidement grâce à un interprète, cela ne fait pas de Léon Degrelle un béotien de l’allemand puisqu’à la page suivante, il confirme notre théorie d’une connaissance élémentaire de la langue : « Il fallait avertir sur-le-champ le général Wagner. […] J’obtins la Kommandantur, puis le général, absolument stupéfait d’apprendre ce qui se passait et que j’étais là. Je savais comme lui que le sort de Dorpat se jouait sur mon coteau. Il n’eut pas besoin de m’expliquer grand’chose. Je lui promis que, moi vivant, les Russes ne passeraient pas. […] J’avais vidé les camions en fuite, confisqué les mitrailleuses et les munitions qui s’y trouvaient. Mes soldats avaient repris confiance. J’allais de l’un à l’autre, les réconfortant dans un sabir mi-allemand, mi-français. La plupart avaient vu ma photo dans les journaux, et ils s’habituaient à l’idée que l’affaire prenait une tournure originale. »
Nous en conclurons que Léon Degrelle avait une connaissance plutôt passive de l’allemand, mais qu’il pouvait la manier suffisamment bien pour se faire comprendre. Relisons ce qu’il dit lui-même de ses capacités : « Officiellement, j’ignorais la langue allemande […] Avec le temps, certains Allemands s’aperçurent que j’avais parfaitement compris des réflexions qu’ils avaient échangées, à mon insu, croyaient-ils. Ils me firent la réputation d’un jouteur redoutable, connaissant l’allemand sur le bout des doigts, mais qui faisait semblant de l’ignorer. La vérité, c’est que je ne savais pas l’allemand. Je n’ai jamais eu de dispositions spéciales pour apprendre les langues germaniques. Je ne comprenais donc pas l’allemand, mais – ce qui est une toute autre chose – je devinais l’allemand, comme j’ai toujours deviné les autres langues. Connaissant les quelques centaines de mots de base, j’établissais des rapports, des intonations me frappaient. En tout cas, en allemand, j’ai toujours compris ce que je ne devais pas comprendre. Parfois, quand l’interprète avait escamoté une nuance dans sa traduction, je l’interrompais pour rectifier. Les autres s’exclamaient alors : “Vous voyez bien que vous connaissez l’allemand !” Et pourtant je ne le connaissais pas. Je le sentais, c’est tout. […] Pendant la guerre, quand même j’avais parfaitement compris, je faisais semblant de n’avoir rien compris du tout. Ainsi, pendant que l’interprète s’éternisait à bredouiller sa traduction, j’avais tout le temps de préparer et de peser mes réponses. C’était un petit truc extrêmement utile. » (De Rex à Hitler, Editions de l’Homme Libre, p. 328).
A suivre.