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albert raty

  • Léon Degrelle dans l'art de la médaille

    Les médaillons de Victor Demanet et

    Marc Colmant

     

    Si Léon Degrelle a été abondamment dessiné (par exemple, en pré-Tintin, par Albert Raty, ce blog au 1er février 2016), peint (notamment par un artiste flamand, ce blog au 13 avril 2022) et caricaturé, le plus souvent méchamment et calomnieusement, mais aussi de manière sympathique (toujours chez Jam ; avec rosserie lorsque, après-guerre, il deviendra Alidor ! ce blog, par exemple, aux 2 février 2017, 4 juin 2019, 26 mai 2022), il fut aussi célébré dans le marbre, le bronze ou le cuivre, et ce, par les meilleurs artistes belges.

    victor demanet,marc colmant,albert raty,jam,alidor,révolution des Âmes,godefroid de bouillon,saint arnould,henri de man,plan du travail,orec,jules boever,fernand degreef,ganshoren,le cercle du collectionneurFusain du grand peintre ardennais Albert Raty, en frontispice de Mon pays me fait mal, publié en 1927 par un Léon Degrelle de vingt ans, dont la houppette inspirera Hergé (ce blog, entre autres, au 23 janvier 2016). Charles, le frère d'Albert Raty, avait épousé Jeanne, la sœur aînée de Léon Degrelle, le 23 avril 1924.

    Nous évoquerons ici quelques plaquettes, médaillons ou médailles ornés de son profil, constituant autant d'œuvres d'art séduisantes et pittoresques.

     

    Victor Demanet

     

    La plus belle plaque murale est due, sans doute, au ciseau de Victor Demanet (1895-1964) montrant un Degrelle sûr de lui, au visage fermé dont le sourcil anguleux souligne la détermination. Ce bas-relief fut fidèlement sculpté, en 1936, d’après le célèbre cliché diffusé au milieu des années 30 sous la forme d’une carte postale à la signature imprimée. Elle faisait partie d’une série de portraits de Léon Degrelle, vendus au profit du fonds de propagande de Rex. Ces photographies avaient été réalisées par le Studio Max, situé sur le prestigieux (à l’époque) boulevard de Waterloo de Bruxelles, dans le haut de la ville (ce blog au 3 mai 2021).

     

    LD Studio Max-horz.jpg

     

    Rien dans les biographies disponibles de Victor Demanet ne signale de particulière sympathie pour Léon Degrelle et le rexisme.

    Si la Biographie Nationale (t. 43, suppl. XV, fasc. 1er, col. 287-292) souligne bien son « amour du peuple » s’exprimant particulièrement dans sa « sculpture dédiée au labeur ouvrier », elle se garde bien de le rapprocher de la constante exhortation de Léon Degrelle à la « Révolution des âmes » (ce blog au 12 octobre 2023). L’auteur prend d’ailleurs soin de préciser qu’aux côtés de « nos rois (principalement le roi Albert), nos reines, nos princes », l’activité sculpturale officielle de Victor Demanet honore plus spécialement… « nos résistants ». Tant il est vrai que le sculpteur namurois fournit, après-guerre, nombre de bronzes exaltant la brigade Piron, le général Patton ou différentes personnalités de la résistance et de l’antirexisme, tel, par exemple, François Bovesse,

    Force nous est néanmoins de constater qu’au temps de la lutte épique contre les « banksters », des grands rassemblements populaires de Léon Degrelle et des formidables succès électoraux rexistes, Demanet multiplia les portraits du chef de Rex, notamment cette belle médaille du jeune Léon Degrelle au col de chemise ouvert, en 1938. Disponible en différents formats –dont une épinglette–, elle présente au revers la reproduction du célèbre bas-relief « Vouloir » (aussi appelé « L’Effort »), sommé du texte « Rex vaincra » ou, dans la version néerlandaise, « Rex Ter Zege ».

     

    Médaille FR 1 A Demanet-horz.jpg

    Les médailles conçues par Victor Demanet pour exalter la figure de Léon Degrelle et l’action spirituelle et sociale de son mouvement Rex ont été commercialisées sous deux formats : 8,25 et 5,35 cm, gravées des deux côtés de la pièce. À l’avers, le profil de Léon Degrelle, col ouvert, à l’expression déterminée, est entouré (auréolé !) de son nom : à gauche « LEON » précédé du monogramme de Victor Demanet ; à droite « DEGRELLE ». Le revers s’orne de la reproduction de « L’Effort » ou « Vouloir », sujet ayant servi de support à de nombreuses médailles commémoratives professionnelles ; au-dessus, la devise « REX VAINCRA » ; au-dessous, l’emblème de Rex en couronne du Christ-Roi, imaginé par Richard Krack (ce blog au 12 novembre 2020). Cette médaille existe également sous forme d'insigne à piquer au revers de son veston ou de broche pour le vêtement (2,25 cm de diamètre) dont l’arrière, aveugle, est muni d’une attache sous forme d’épingle verticale ou d’épingle à fermoir de sécurité.

     

    Peut-être est-ce d’ailleurs à cette proximité avec Léon Degrelle que le sculpteur dut la commande pour la ville de Bouillon (dont le père du tribun, le brasseur Edouard Degrelle, était conseiller communal, constamment réélu depuis 1904, en même temps d’ailleurs que conseiller provincial de Luxembourg) de deux statues emblématiques de la ville, Godefroid de Bouillon et Saint Arnould.

    L’initiative en revient à l’éphémère et inefficace Office de Redressement économique (OREC, un organisme imaginé par Henri De Man dans le cadre de son Plan du Travail et mis en place en avril 1935 pour stimuler un programme de travaux publics et de résorption du chômage : il disparut dès 1938), mais ce sont des mécènes, associés à l’Administration des Ponts et Chaussées, qui en assurèrent le financement. Prononçant le discours inaugural à la cérémonie de remise des statues à la ville de Bouillon, le représentant du gouvernement justifia le choix historique et artistique des nouveaux ornements du Pont de Liège, concluant : « À l’ombre du vieux château, ces statues de Godefroid de Bouillon et de Saint Arnould rappelleront qu’ici, l’on a toujours le culte de la patrie et de la grandeur nationale. »

    Av. Lxbg 28.06.1939.pngPeu après la réalisation des portraits de Léon Degrelle, Victor Demanet sculptera deux statues monumentales pour la ville natale de son modèle : Saint Arnould et Godefroid de Bouillon. Leur inauguration, le 25 juin 1939, fut l’occasion d’une cérémonie grandiose, associant les représentants de la Cour royale et du Gouvernement aux notables locaux. L’Avenir du Luxembourg, le grand quotidien catholique de la province (dont le grand-père maternel de Léon Degrelle, le Dr Jules Boever, fut l’un des fondateurs), en fit un compte rendu détaillé (« Pour honorer deux de ses illustres enfants, Bouillon a vécu des heures inoubliables »), mais en confondant les deux sculptures: la photo de première page ne reproduit pas le monument de Saint Arnould, mais celui de Godefroid de Bouillon !...


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    lacés de part et d’autre de l’accès au Pont de Liège du côté de la place Saint-Arnould, sur la même rive que la maison familiale des Degrelle, les deux monuments en pierre du pays de Gaume, entendaient immortaliser les principaux ducs de Bouillon, Saint Arnould, –premier de la lignée et patron des brasseurs–, et Godefroid de Bouillon, chef de la Première Croisade, avoué du Saint-Sépulcre et modèle inspirant de Léon Degrelle.

     

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    Dix mois après leur inauguration, les statues de Victor Demanet échappèrent miraculeusement à la destruction lorsque les artificiers du 295e régiment d’infanterie de l’armée française firent sauter, au soir du 11 mai 1940, les ponts de Bouillon sur la Semois, tout en bombardant les quartiers populaires situés en bordure de la rivière (les documents mis aujourd’hui à la disposition des touristes laissent entendre mensongèrement que la dévastation de la ville fut l’œuvre des Allemands. Ainsi du site Connaître la Wallonie qui écrit sans sourciller : « lors de l’invasion allemande de mai 1940, aucune chance n’est laissée au Pont de Liège. Le bombardement épargne miraculeusement les deux statues » !). Les ouvrages d’art furent rapidement réparés par le génie allemand, installant sur le pont de Liège une passerelle permettant le passage des piétons, assurant ailleurs la traversée pour le charroi le plus lourd (ce blog au 15 juin 2021).

    Saint Arnould 1940.pngPhoto prise peu après la prise de Bouillon par les Allemands en mai 1940. Une autochenille allemande Sd. Kfz. 10 (Sonderkraftfahrzeug 10) est stationnée à l'entrée du pont de Liège, près de la statue intacte de Saint Arnould.

     

    Les statues ne furent que peu abîmées : la photo de 1940 (ci-contre) montre en effet un Saint Arnould intact alors que celles de 1941 (ouvrant et fermant cette digression) le montrent, neuf mois plus tard, décapité, Godefroid demeurant entier. Certains n’ont pas manqué de voir dans cette mutilation une menace voilée contre le brasseur Edouard Degrelle via son saint patron…

     

    Après la guerre, les œuvres d’art restaurées ne furent néanmoins pas autorisées à rejoindre le lieu pour lequel elles avaient été conçues : punition pour la supposée (et dès lors coupable) proximité degrellienne de leur concepteur ?

     

    Godefroid fut le mieux traité, placé à la fin du sentier pédestre menant à l’entrée de son château. Saint Arnould, quant à lui, a été relégué tout au bout du quai de la Tannerie, en surplomb de la Semois, loin de toute habitation et dissimulé par l’abondante végétation, ce qui a grandement facilité une nouvelle décapitation par d’imbéciles vandales en juin 2020.

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    (Les photos ouvrant et fermant ce texte ont été prises le 6 février 1941 par le Service photographique de Ministère des Travaux publics de Belgique et sont conservées aux Archives générales du Royaume).

     

     

    Marc Colmant

     

    Le sculpteur bruxellois Marc Colmant (1898-1962) est un artiste moins connu que Victor Demanet, ne bénéficiant pas de notice dans la Biographie Nationale, ni même d’une référence sur « Wikipedia ».

    IMG_20231107_123824.jpgC’est dire que nous n’avons guère de renseignements sur lui, sinon qu’il réalisa de belles statuettes dans le style romantique qui connaissent toujours le succès dans les ventes d'art contemporaines ainsi que des médaillons pour quelques tombes de notables, notamment celle du bourgmestre de Ganshoren, Jan Frans (Fernand) Degreef, mort en 1928 (photo ci-contre).

     

     

    Colmant Faune.jpg« Marc Colmant est un sculpteur qui, à en juger par ce qu'il expose, aime à travailler en petites dimensions. La plupart du temps, cela lui réussit très bien. Il y a dans Faune à la Sarbacane [...] un mouvement, une élégance nerveuse du meilleur aloi. » (Le Nouveau Journal, 26 novembre 1943).

     

    Ce n’est pourtant pas par hasard que Marc Colmant réalisa une médaille en l’honneur de Léon Degrelle : il était lui-même militant rexiste et même troisième candidat de la liste de Rex aux élections communales du 16 octobre 1938 à Ganshoren, la commune du nord de l'agglomération bruxelloise où il habitait. Il ne sera malheureusement pas élu.

    Médaille LD Marc Colmant.png

     

    Le médaillon proposé par Marc Colmant (diam. 14 cm) est, tout comme le bas-relief de Victor Demanet, inspiré de la photographie du Studio Max. Mais il n'est pas traité à la manière de Demanet que nous pourrions qualifier d' « hyperréaliste ». Si les accentuations de relief et l'arrondi de la tête mettent sa jeunesse en évidence, ils confèrent aussi à Léon Degrelle une expression plus introspective, soulignée par sa moue mi-amusée, mi-dubitative et des sourcils interrogateurs. Un portrait du jeune chef tout au service du destin de renaissance spirituelle du peuple qu'il s'est assigné, autrement dit, la « révolution des âmes » (ce blog, entre autres, au 31 mars 2020).

    Pour l'artiste, qui signe fièrement son œuvre, aucun besoin de nommer le portrait de celui qui s'est rendu célèbre en chassant les banksters de la cité, à l'instar de Celui qui chassa les marchands du Temple. Seul compte le mot d'ordre : REX VAINCRA.

    À l'évidence, l’œuvre d'un artiste qui connaît son modèle de près et apprécie sa joie de vivre et son humanité curieuse et attentive.

    Après la guerre, il semble bien que Marc Colmant eut à souffrir d'une définitive damnatio memoriae car nous n'avons plus trouvé trace d'aucune exposition accueillant ses œuvres, ni d'aucune critique les commentant. Même sa tombe a subi cette loi inique de l'effacement en disparaissant du cimetière communal de Ganshoren.

    Colmant Tombe Ganshoren.jpg

    Marc Colmant est mort en 1962 à l'âge de 64 ans seulement. Il reposait dans le caveau de ses parents qu'il avait aménagé dans l'ancien cimetière de Ganshoren. Malgré sa valeur aussi bien historique que patrimoniale, sa tombe a été rasée peu avant l'ouverture du Nouveau Cimetière en 1976. Voici l'endroit où se trouvait le monument funéraire, dans la seconde allée, à l'emplacement numéro 68...

     

    Toutes les œuvres ici décrites sont disponibles sur le site Le Cercle du Collectionneur.

  • Les mémoires effilochés d’Anne Degrelle-Lemay

    VI. Des « histoires » aux allures de méchantes

    carabistouilles !

     

    1.LD+Anne Dispute.jpg

    « J’ai commencé à connaître beaucoup de facettes de la personnalité de mon père. Je suis devenue son principal inquisiteur. Mes interrogatoires étaient constants. […] C’était un incroyable raconteur de carabistouilles […]. Mes questions délicates, pleines de pièges involontaires, fruits de mon esprit cartésien, lui posèrent plus d’un problème » (p. 93).

     

    2.Anne Degrelle Couverture.jpgMalgré son titre Degrelle, l’homme qui changea mon destin, les mémoires d’Anne Degrelle-Lemay, comme nous l’avons constaté (ce blog depuis le 23 octobre 2022), ne nous apprennent pas grand-chose sur la vie d’exil de Léon Degrelle en Espagne. Et nous doutons que, malgré leurs demandes pressantes, la curiosité des arrière-petits-enfants du fils qu’Adolf Hitler se fût choisi pourra s’en satisfaire. Surtout si leur source d’informations privilégiée n’est que leur grand-mère : « Ils me demandent souvent : “Grand-mère, comment vont tes mémoires ?” Je leur ai tellement parlé de leur bisaïeul, qu’ils veulent en savoir plus. Les conversations surgissent sans crier gare dans n’importe quelle réunion familiale, avec des questions et parfois des discussions passionnantes. La troisième génération s’intéresse et veut en savoir davantage. […] Je suis particulièrement fière en voyant leur curiosité pour se rapprocher de cet arrière-grand-père qu’ils ne connaissent que par ses livres et les histoires que leur raconte leur grand-mère. » (p. 165).

    N’oublions pas que le titre de son livre, L’homme qui changea mon destin, s’articule autour de deux personnages : l’homme Léon Degrelle, présenté comme le principal acteur (c’est lui qui agit sur le destin de l’autre) et Anne Degrelle-Lemay qui va raconter cet homme si important qu’il « changea [son] destin ».

    Mais au bout du compte, c’est plutôt le second personnage qui tire la couverture à lui comme elle le laisse entendre à la fin de ses mémoires : « cette biographie n’est pas la mienne en tant que telle, mais plutôt celle d’une fille d’un politique, un poète, un écrivain… que j’ai connu tardivement et que j’ai essayé de juger, toujours selon mes critères propres. » (p. 141). C’est donc bien d’elle qu’il s’agit principalement, surtout lorsqu’elle parle de son père, ou plutôt lorsqu’elle le juge, uniquement « selon [ses] critères propres », non autrement précisés.

    Relisons donc son livre dans la perspective autobiographique : comment se raconte-t-elle ? comment présente-t-elle ses relations avec sa famille et ses proches ?...

     

    3.Pays réel 1936.07.27 Naissance Anne.JPG

    Le Pays réel du 27 juillet 1936 annonce en première page la naissance, deux jours plus tôt, d’Anne, la petite sœur de Chantal Degrelle.

     

    Ce n’est que passé le milieu de son texte qu’Anne Degrelle évoque sa naissance, qui la relie directement au chef de l'Italie fasciste : « [Mon père] me raconta que le jour de ma naissance, il était à Rome et que c’est Mussolini qui lui communiqua l’heureuse nouvelle : le 25 juillet 1936. » (p. 102). Ce qu’elle ne dit pas, c’est que son nom même était un hommage au Duce puisqu’il reprenait celui d’Anna Maria, son dernier enfant, née sept ans auparavant : « J’ai passé avec [Mussolini] une huitaine de jours passionnants, presque familiaux, puisqu’il m’a annoncé lui-même la naissance de ma fille Anne, à qui j’ai donné le prénom de sa dernière fille à lui. » (Jean-Michel Charlier, Léon Degrelle. Persiste et signe, p. 175).

    Détail curieux : dans une autre interview, à Jacques de Launay, Léon Degrelle se serait trompé sur le jour de la naissance de sa fille en donnant une date plus tardive de deux jours (mais probablement ne s’agit-il que d’une erreur de transcription du journaliste-historien) : « Je l’ai vu [Mussolini] pour la première fois, trois mois après ma victoire électorale du 8 mai 1936, avec 21 sièges de députés, voyons, c’était le jour de la naissance de ma fille Anne, le 27 juillet 1936. » (Jacques de Launay, Histoires secrètes de la Belgique, 1935-1945, p. 198) !

     

    4.Chantal+Anne St-Nicolas 1943.jpg

    Drève de Lorraine, 6 décembre 1943 : les sages petites Chantal et Anne ont reçu leurs cadeaux de Saint-Nicolas. Parmi ceux-ci, un petit magasin d’épicerie a été déposé sur l’imposante malle au décor floral du XVIIe siècle trônant dans le hall d’entrée.

     

    De sa prime enfance à la Drève de Lorraine, Anne ne conserverait que de rares souvenances, mais suffisamment précises pour donner de sa maison une description quasi architecturale (en n’oubliant surtout pas l’indispensable note culpabilisatrice sur la « ruine familiale ») ; « Je me souviens comme si c’était hier que la première chose qu’on voyait en entrant dans la maison, en haut de l’escalier monumental, c’était cette Louve capitoline allaitant deux enfants, Romulus et Remus. Mon père était amoureux de la Rome impériale, passion que j’ai héritée de lui, et innombrables étaient les vestiges et témoignages de cette merveilleuse civilisation qu’on retrouvait à travers toute la maison : livres, vitrines, mosaïques, reproductions de sculptures, etc. L’art était sa passion, à l’égal de la politique qui entraîna plus tard notre ruine, mais je parlerai de cela plus tard. […] à cinq ou six ans, j’avais l’habitude d’aller explorer le reste de la maison : les salons aux meubles du XVIIIe siècle français, la salle à manger que j’examinais quand il allait y avoir un dîner important et je regardais, bouche bée, cette table merveilleusement dressée, ces fauteuils, ces lumières… Et le bureau de mon père ! Un bureau où il se rendait invisible à nos yeux. Je me souviens qu’on ne voyait pas les murs : uniquement des livres et des tapisseries flamandes […]. Je fouillais ces tapisseries en cherchant une ouverture pour entrer car la porte restait fermée… Et alors, je restais à observer ce beau monsieur, élégant, magique… mon père. Et tout à coup, il me voyait, éclatait de rire et me prenait dans ses bras. Pour quelques secondes, il était à nouveau mon père. […] Je n’ai aucun souvenir cependant de fêtes d’anniversaire, de premières communions, de vacances en famille » (p. 15).

     

    5.Chantal+Anne Bureau Drève.jpg

    Chantal et Anne s’amusent dans le bureau de leur père : leur petite table à dessin est placée devant la cheminée ; à l’arrière-plan, on distingue un impressionnant globe terrestre du XVIIIe siècle.

    Les moments heureux en famille à la Drève de Lorraine évoqués par Léon Degrelle, alors qu’Anne avait cinq ans, dans le Degrelle m’a dit de la Duchesse de Valence n’eussent-ils pas pu stimuler ses souvenirs ? D’autant plus que sont évoquées à leur appui les mêmes photos que celles dont parle Anne (p. 148, ce blog au 23 janvier 2023) : « Père affectueux, il n’avait jamais manqué, même aux heures les plus tumultueuses de son action, d’être le compagnon de ses enfants. Il jouait avec eux, leur racontait mille histoires amusantes et naïves.

    Papa, t’es un comique ! lui répétait, ravie, sa petite fille Annette.

    Il avait alors trois petites filles en vie, Chantal, Annette, Godelieve (Godelieve veut dire en flamand, petite amie de Dieu) et un garçonnet qui s’appelait Léon-Marie. Libre pendant des heures, chaque jour, Léon Degrelle courait les bois avec eux, durant ce bel été 1941, leur expliquant la vie des animaux et des plantes, leur développant de jolies légendes, ou bien jouait avec eux, plus enfant qu’eux, dans les fleurs ou les foins coupés de sa prairie. Il existe de lui de charmantes photos d’alors. Ses enfants sont blottis près de lui. » (pp.356-357).

    6.Dreve de Lorraine 1943.jpg

    Les enfants de Léon Degrelle, Annette, Godelieve, Léon-Marie et Chantal, profitent de la permission de leur papa (ici en civil, en avril 1943) pour se blottir près de lui, le temps d’une photo.

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