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La première interview de Léon Degrelle d’après-guerre (4)

Copie de l’aide-mémoire destiné à la rencontre avec Robert Francotte (2)

Notes San Sébastian p. 3.jpg

III. Retour à Bruxelles – Août 1940

Je retrouvai ma maison occupée par un Etat-Major de l’Aviation Allemande. Je dus loger, pendant une semaine, dans une mansarde. Je ne demandai rien. 

 3.


Finalement, ce ne fut que sur intervention d’un avocat belge que ma maison fut évacuée [5].

Je ne visitai aucune autorité allemande à mon retour et ne vis même pas une seule fois, avant mon départ pour le Front de l’Est, le 10 août 1941, le général Von Falkenhausen [6].

Le « Pays Réel » ne reparut qu’en octobre [7].

 

[5] Dans La Cohue de 1940, Léon Degrelle a raconté le détail de la manière dont il retrouva sa maison, le 30 juillet 1940, occupée par la Luftwaffe :

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Photo de la villa de Léon Degrelle, à l’orée du bois de la Cambre, à Bruxelles, telle que publiée dans Degrelle m’a dit, de la Duchesse de Valence : « La Drève de Lorraine, la belle propriété de Léon Degrelle, dans la forêt de Soignes, à l’entrée de Bruxelles. A gauche (quatre grandes fenêtres) : son bureau. Au-dessus, sous les toits, la bibliothèque (quinze mille volumes) » (cahier photographique entre les pages 40 et 41).

 

Le lendemain de mon retour à Bruxelles, j’allai, le cœur battant, à la Drève de Lorraine, retrouver ma chère maison. Une sentinelle barrait l’entrée principale du parc. Non point que les Allemands eussent pris des mesures pour protéger ma propriété abandonnée, ce qui eût été assez indiqué si j’avais été l’agent n° 1 d’Hitler. Loin de là. Non seulement les autorités d’occupation n’avaient pas veillé à ce que le domaine restât intact, mais celui-ci était occupé, envahi par de nombreux membres de la Luftwaffe. Les concierges avaient été refoulés dans une maisonnette à l’écart. Des graminées hautes d’un mètre avaient poussé partout sur la terrasse. Quinze, vingt militaires allemands naviguaient dans les salons. Un gros colonel ronflait encore, nu et luisant, au milieu de mon lit d’érable.

Je crus d’abord à un quiproquo. Mais non ! D’ailleurs, je ne saurais trop le répéter, les Allemands ne me devaient rien. Ils avaient réquisitionné ma maison comme n’importe quel autre immeuble. Je crus tout de même, puisque j’étais revenu, qu’on allait me rendre ma demeure. Il y avait à Bruxelles, à ce moment-là, des milliers d’autres logements libres.

Mes propositions n’eurent absolument aucun succès. Ces messieurs se trouvaient bien chez moi et prétendaient fermement y rester.

N
e pouvant continuer à camper chez une de mes sœurs sur un sofa [ce blog au 20 mars 2020], j’obtins difficilement, après deux jours de palabres, de disposer d’une chambre à coucher dans mon habitation. Ce fut tout. Encore était-il impossible de dormir, les aviateurs vidant fort bruyamment, jusqu’au petit matin, les dernières bouteilles de ma cave.

Je m’attendais à voir revenir, d’un jour à l’autre, ma femme et ma ribambelle d’enfants. S’ils étaient arrivés, j’eusse dû les loger à l’hôtel. Je mangeais à la diable, chez des gargotiers des environs. Cette occupation devenait tellement désagréable qu’il ne me resta plus qu’à confier l’affaire à un avocat. Celui-ci connaissait un civil allemand, ami de Goering, et obtint qu’il lui télégraphiât. Grâce à ce hasard, les bureaux de l’aviation reçurent enfin l’ordre d’évacuer le terrain, me laissant une maison aux parquets râpés, aux peintures écaillées par les appareils de radio et où, en fait de biens meubles, il ne restait plus, éparpillés dans une cave et n’ayant tenté personne, lors des pillages belges de la mi-mai, que mes chers vieux atlas enluminés de Mercator, d’Ortélius, de Kaerius, de Blaue et d’autres géographes selon mon cœur [ce blog au 17 octobre 2018].

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Précisément trois ans plus tard, le 8 août 1943, Léon Degrelle accueillera, dans son vaste bureau de la Drève de Lorraine, d’autres officiels de l’armée allemande autrement policés et respectueux des lieux, dont ces vingt et un correspondants de guerre SS des Légions de Volontaires et de la Waffen SS effectuant un voyage en Flandre à l’invitation du Generalmajor Richard Jungclaus, représentant du Reichsführer Heinrich Himmler. Au programme : visite d’Anvers, Gand, Bruges, Ostende ainsi que de la côte belge et des champs de bataille de la Première Guerre mondiale. Pour clore ce voyage, ils furent reçus par Léon Degrelle en son domicile bruxellois avant d’assister, au studio de Radio-Bruxelles, place Flagey, à un concert symphonique sous la direction du SS-Kriegsberichter flamand Paul Douliez (photo de la délégation ci-dessous, entourant Léon Degrelle : Paul Douliez est le second, à partir de la gauche, debout sur le muret du porche de la Drève de Lorraine), par ailleurs compositeur et auteur en 1954, –en dépit de sa condamnation à mort par contumace–, d’une biographie du compositeur flamand Peter Benoit (1834-1901) qui fait toujours autorité.

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J’eusse pu, certes m’adresser directement aux autorités d’occupation. […] Ma maison avait été pillée de fond en comble. Les troupes allemandes avaient accroché du matériel partout dans ma maison, crevant ou ébréchant les murs, faisant des dégâts qui s’élevaient à des dizaines de milliers de francs.

On eût pu tout de même envoyer un vague officier d’ordonnance pour m’aider à récupérer ma demeure et me proposer une indemnité en réparation des dommages que les troupes du Reich avaient causés. Il n’y eut aucune démarche, aucune visite. Je ne reçus aucun appui, aucun souhait, aucune offre de dédommagement. Je ne possédais plus un patard. J’avais emprunté mille francs pour payer mes repas dans les gargotes des environs. […] Je ne parvins à me tirer de mes difficultés matérielles que grâce à un paiement vraiment cocasse. Je n’étais pas mort : donc j’étais encore député ! Imperturbable, cette bonne vieille démocratie, qui m’avait expédié au massacre, m’envoya par chèque, peu après mon retour, les émoluments des trois mois pendant lesquels j’avais survécu ! ça me fit une affaire de dix mille francs que j’avais parlementairement gagnés en buvant de force l’urine démocratique de mes gardiens et en encaissant dans la figure leurs coups de sabots et de trousseaux de clefs. (La Cohue de 1940, pp. 109-111)

[6] Fils d’un baron prussien, le général Alexander von Falkenhausen fut, durant la Seconde Guerre mondiale, le gouverneur militaire de la Belgique et du Nord de la France, reprenant ainsi le poste occupé par son oncle Ludwig à la fin de la Première Guerre. Réactionnaire antinazi, il ne pouvait que s’attirer l’inimitié des partisans de l’Europe nouvelle. Léon Degrelle le décrit ainsi dans le Persiste et signe de Jean-Michel Charlier :

« Les Allemands conservateurs de Bruxelles étaient à peu près tous des fonctionnaires qui voulaient prolonger le vieil impérialisme industriel des Allemands de 1914, qui ne pensaient qu’à étendre l’espace territorial allemand et à s’emparer de la vie économique de ces régions riches, bien équipées, aux populations laborieuses, d’un gros rendement. La création de l’Europe n’intéressait pas les généraux à la Falkenhausen. Elle était à leurs yeux une lubie de plus d’un Hitler qu’ils haïssaient. Un accord avec la Haute Finance de la Belgique leur paraissait, par contre, un objectif d’un intérêt extrême. […]

Avec le général von Falkenhausen et son équipe pro-capitaliste, nulle collaboration n’était pensable.

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Le gouverneur militaire de la Belgique et son clebs tout-puissant.

 

Je me suis bien gardé de voir ce vieux junker égrillard une seule fois avant de filer en Russie. Je le fuyais comme la peste. Il vivait comme un mandarin –il avait longtemps résidé en Chine [ce blog au 23 août 2021]– dans un somptueux château brabançon, à Seneffe, propriété d’un Juif défenestré. Il s’adonnait au culte de son chien, arbitre en tout, dont les aboiements, ou le silence conciliant, indiquaient s’il fallait repousser ou accueillir le visiteur. En l’honneur de ce roquet-majordome, Falkenhausen avait fait fabriquer à Gand de richissimes cigarettes en tabacs anglais, portant le portrait du toutou comme un camée précieux » (pp. 253-254)

Au vrai, Falkenhausen correspond d’ailleurs parfaitement au portrait dressé par Léon Degrelle. Dans ses verbeux autant que prétentieux Mémoires d’outre-guerre (Comment j’ai gouverné la Belgique de 1940 à 1944), c’est à peine s’il mentionne l’existence de Rex et de Léon Degrelle (« qui trahit la vocation réelle de son parti » !) aux côtés du VNV et de son chef dont il massacre le nom en « van der Wiele » (p. 162). Il faut attendre les « Annexes » et les questions de l’éditeur Jo Gérard pour en savoir davantage, c’est-à-dire qu’il essaya surtout de saboter le défilé triomphal de la Légion Wallonie à Charleroi et à Bruxelles (ce blog aux 15, 26 janvier 2021, 7 mars 2022).

« –Et Léon Degrelle ?
Cette fois, Alexandre von Falkenhausen sourit :
– Celui-là… je ne l’ai vu qu’une fois, en 1943, à son retour du front russe. J’avais refusé à plusieurs reprises de le rencontrer, malgré ses insistantes démarches. Il en avait conçu, contre moi, un profond ressentiment et il répétait : “Il faut basculer ce général !”
Mais Degrelle avait acquis sur Hitler une puissante influence, aussi me donna-t-on de Berlin l’ordre catégorique d’accueillir le chef du rexisme. Je répondis que je voulais bien le recevoir en tant que soldat, mais pas en tant que leader d’un parti politique.
Je le vis donc et il me raconta pendant une demi-heure sa campagne. Il me parut assez exalté et singulièrement imbu de lui-même. Plutôt vulgaire, les Parisiens diraient : “un camelot”.

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Le hobereau prussien von Falkenhausen, ses bésicles d’un autre siècle et sa cigarette de tabac anglais artisanale…

 

Mais Degrelle vous exposa-t-il ses idées politiques et comment il envisageait l’avenir de la Belgique ?
– Non, il n’aborda pas ce thème, car il savait que je ne voulais considérer en lui que le soldat. On l’avait prévenu.
Avez-vous posé des questions à Degrelle ?
– J’ai essayé d’en obtenir quelques précisions sur la tactique des Russes, mais il se lançait aussitôt dans des récits colorés comme des images d’Epinal.
Puisque nous parlons de Degrelle, vous dirais-je que pour étoffer le défilé de sa Légion Wallonie à Bruxelles, on avait amené dare-dare quelques centaines d’authentiques soldats allemands de la SS casernés à Beverloo. Cette parade eut lieu à Charleroi, mais contre mon ordre, elle passa au retour par Bruxelles, bien que j’aie tenté en vain de l’empêcher en écrivant aux protecteurs berlinois du chef rexiste qu’on risquait ce jour-là un bombardement allié sur Bruxelles. » (pp. 300-301)

[7] C’est en fait le 25 août que Le Pays réel sera à nouveau présent dans les kiosques à journaux, soit trois mois après la capitulation.

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À suivre

 

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