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Degrelle. Qui suis-je ? Par Francis Bergeron, éditions Pardès, 2016, 125 pages

XIV. La rencontre Stéphane Steeman-Léon Degrelle

« [Stéphane Steeman] apprend que Degrelle envisage d’écrire un livre consacré à Hergé, Tintin mon copain. Steeman part en Espagne pour le rencontrer. […] L’humoriste belge se sent investi d’une mission importante : convaincre Degrelle de ne pas écrire n’importe quoi. Il veut simplement dire à Degrelle : n’en rajoutez pas. Ne faites pas d’Hergé un militant, ce qu’il ne fut jamais. » (Bergeron, p. 92)

La rencontre entre Léon Degrelle et Stéphane Steeman ne s’est en aucun cas produite à l’initiative de l’humoriste belge. À l’occasion du décès de ce dernier, la Communauté « Le Dernier Carré » des Anciens du Front de l’Est de la Légion Wallonie a publié un hommage détaillant fidèlement les tenants et aboutissants de cette visite (voir sur ce blog à la date du 17 janvier 2016).

gggg.jpgEn résumé, c’est à l’invitation personnelle de Léon Degrelle que Steeman se rendit à Malaga en octobre 1991, afin de relire le manuscrit de Tintin mon copain, dont il corrigea certaines fautes d’inattention. Ce n’est que pris de court par le scandale médiatique accompagnant son voyage qu’il s’imagina un rôle de redresseur de torts : « je n'ai jamais défendu Degrelle, je suis allé le voir pour faire supprimer des passages qui récupèrent Tintin… Je voulais lui faire supprimer des inexactitudes et, si possible, le dissuader de publier ces écrits... Mon passé irréprochable, mes sketches, mes parodies n’ont-ils pas prouvé, depuis 35 ans, que je suis un démocrate ?.... » (Le Soir, 19 octobre 1991).

Dans sa lettre à Présent que cite Francis Bergeron (p. 93), Steeman ira encore plus loin dans la faribole, prétendant avoir joué au Tintin-reporter ayant malheureusement échoué contre le vilain Tintin-Degrelle : « J’ai voulu jouer au petit reporter. Cela aurait pu mieux me réussir. J’avais appris qu’un livre […] allait sortir de presse bientôt. Et comme toujours, bien informé de ce qui se passe dans le domaine hergéen, je tombai sur le manuscrit. L’auteur n’était autre que Léon Degrelle […] Je fus relativement consterné d’apprendre, d’après ses écrits, qu’il “était” Tintin et qu’au fil des pages il se racontait en s’appelant Tintin-Degrelle. […]
Pas possible, fis-je. Il court suffisamment de calomnies à l’encontre d’Hergé, ces temps-ci.
Comme on me fit comprendre que j’avais quelque chance de dissuader Léon Degrelle d’un tel exploit […] je décidai de le rencontrer »

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Précisons simplement que le livre n’allait pas sortir de presse mais était toujours à l’écriture, que c’est Paul Jamin qui, après avoir lu et amendé un premier état du manuscrit, conseilla à Léon Degrelle de le faire relire par Steeman. A notre connaissance, sauf si Jamin lui eût communiqué sa propre copie, l’humoriste ne prit connaissance – avec enthousiasme ! – de Tintin mon copain que chez Léon Degrelle, à Malaga. Il n’a donc jamais pu « tomber sur le manuscrit », ne fut nullement « consterné » par ce qui s’y trouvait et il ne fut jamais question de « dissuader Léon Degrelle d’un tel exploit », c’est-à-dire avoir inspiré le héros de Hergé qui devait naître le 10 janvier 1929…

Léon Degrelle savait que Stéphane Steeman était contraint à ces gesticulations pour se sortir du scandale de sa visite et lui garda envers et contre tout son amitié car il avait apprécié sa gentillesse et sa compétence. C’est ainsi qu’il dédicaça encore, peu de temps avant sa mort, l’opuscule Va-t-on chez nous rôtir les morts ? à son « bien cher Stéphane Steeman », ainsi qu’une autre photo à « l’ami pittoresque, brillant entre tous, et si affectueux ! Pour lui redire le très affectueux attachement de Léon Degrelle. En exil, le 25 Mai 1993 » !...

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rancis Bergeron est néanmoins le premier à mettre le doigt sur une incroyable erreur qui est restée inaperçue dans
Tintin mon copain, malgré toutes les relectures, depuis celles d’amis belges bien intentionnés jusqu’aux plus autorisées car effectuées par les autres amis personnels de Hergé que sont Paul Jamin (« Jam », de Rex, et « Alidor », de Pan) et Stéphane Steeman, spécialement appelé à la rescousse, sur suggestion de Jamin !

« Georges Remi dit Hergé (1907-1983) “Georges Remi, le Hergé débutant, devint instantanément mon ami. Nous avions à peu près le même âge. Georges était né dans la banlieue de Bruxelles, le 3 juin 1907 [en fait, le 22 mai]. J’avais vu le jour à Bouillon, en face d’un vieux château millénaire, le 15 juin 1906. En chiffres ronds, vingt ans chacun. Tous les deux nés sous le même signe : les Gémeaux !” (Léon Degrelle) » (p. 122).

D’où vient la bévue de Léon Degrelle (personne, à notre connaissance, dans sa famille ou son entourage proche, n’est né un 3 juin) ? Et comment expliquer que le spécialiste par excellence, Stéphane Steeman, ne l’ait pas relevée alors qu’il corrigea nombre de fautes de frappe comme Meulenjizer pour Meulenijzer ou de fautes d’inattention comme L’Ile mystérieuse pour L’Etoile mystérieuse, etc.

O.Mathieu-Steeman.jpgCe qui est encore plus « mystérieux » et littéralement inexplicable, pour ne pas dire impardonnable, c’est que quelques pages auparavant, Léon Degrelle se trompe encore de date : « Le créateur de Tintin est né à Etterbeek, un faubourg de Bruxelles, le 3 mai 1907 » ! (Tintin mon copain, p. 6 ; l’autre date erronée se trouve à la p. 12). Nous sommes désormais en plein cafouillage, car là, il ne peut même plus être question de gémeaux !...

Voilà en tout cas qui montre bien que la relecture de Stéphane Steeman se cantonna dans la superficialité de quelques détails et ne concerna jamais le récit proprement dit (qui ne fut, bien entendu jamais allégé « de certaines récupérations » et qui s’enrichira au contraire du compte rendu du lynchage médiatique du pauvre Steeman : voir Tintin mon copain, p. 195 et sv.).

 

 

 (A Suivre)

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